Les pieds trainant au sol, je marchais péniblement dans le centre-ville de Konoha. La journée était particulièrement chaude et me faisait suer à grosses gouttes juste à me promener. Je m’étais réveillé ce matin le corps moite de la chaleur de la nuit et de celle du matin. Qu’il fasse aussi chaud si tôt le matin était un signe que la journée atteindrait une chaleur caniculaire. Incapable de rester un instant de plus dans mes couvertures chaudes et humides, je quittai ma chambre et commençai la journée par une bonne douche froide. Rien de mieux pour enlever la chaleur de la nuit pour partir la journée du bon bien. J’ignorais encore à quel point je me trompais. Si la nuit avait été chaude, alors l’avant-midi avait été infernale. La chaleur avait réussi à atteindre un sommet insupportable dans mon appartement, et ce même avec toutes les fenêtres ouvertes. En désespoir de cause, j’avais donc décidé d’aller dehors en compagnie d’Aka – qui lui souffrait le martyr sous sa fourrure, même d’été – en espérant que la chaleur serait moins accablante, ou qu’une brise viendrait adoucir le temps.

Grosse erreur. En effet, ce n’est qu’une fois dehors que je réalisai ma bévue et fut accueilli par une chaleur encore plus étouffante qu’à l’intérieur. Et, bien évidemment, aucune brise pour nous soulager ni l’un ni l’autre. Tout ce qu’il y avait était le soleil, bien en vue dans le ciel sans nuages, qui nous plombait tous sur la tête. C’est donc ainsi que je me suis retrouvé à déambuler dans les rues du centre-ville, imprégné de la chaleur qui collait à la peau, cherchant vainement un endroit où je pourrais me rafraîchir un tant soit peu. Parce que tous les restaurants, salons de thé ou autres établissements offrant des boissons désaltérantes, étaient sans surprises tous plein à craquer.

- Ce n’est vraiment pas notre jour de chance, Aka.

Ce dernier me répondit d’une plainte qui voulait tout dire. Même pas besoin d’être Inuzuka pour comprendre ce que ressentait mon ninken. C’est avec plus d’ardeur, mais sans pour autant plus d’énergie, que je repris ma recherche d’un coin tranquille où nous pourrions nous prélasser en attendant que la canicule passe. Malheureusement pour nous, tous nos coins fétiches semblaient avoir été pris d’assaut par divers konohajins qui, comme nous, essayaient de faire le mieux qu’ils pouvaient d’une journée comme celle-ci. Même notre coin au terrain d’entraînement, où j’avais rencontré pour la première fois mon ami Hyûga, était occupé, de même que le bout de rivière où nous étions allés l’an passé Akamori et moi. Nous continuâmes ainsi notre quête pendant plusieurs minutes, chacune qui passait nous amenant un sentiment de crainte de ne rien trouver.

Quelqu’un avait dû entendre mes prières puisque soudainement, devant mes yeux apparut un petit espace vert où se trouvaient quelques bancs et quelques arbres. N’en demandant pas plus, nous courûmes vers le petit parc alors qu’intérieurement je souhaitais qu’il ne s’agisse pas d’un mirage. Vous savez, ces illusions que l’on commence à voir une fois que notre cerveau commence à bouillir dans son liquide. En général, des histoires que j’avais entendues de shinobis ayant voyagé dans le pays du Vent, ces illusions vous font voir ce que vous désirez le plus, ce qui s’appliquerait bien dans notre cas. Quelle déception cela serait de finalement se rendre compte que l’oasis qui se trouvait devant mes yeux n’était après tout que le fruit de mon imagination. Mais le destin en voulu autrement puisque le parc était bel et bien réel, comme je le constatai dès que je me mis sous le couvert de l’arbre. Aaaah, quel soulagement! Enfin, un peu d’ombre pour nous autre pauvres shinobis accablés par le soleil. Sans attendre, nous nous installâmes sans rien dire au pied de ce dernier, profitant de ses feuilles qui jetaient leur ombre pour se cacher de la morsure de l’astre.

Je dus m’assoupir sous l’arbre parce qu’un crissement de roche sous un pied me fit légèrement sursauté, me ramenant dans le monde réel. Je reniflai l’air discrètement et parvins à dénoter clairement l’odeur de sueur humaine. À moins que cela vienne de moi… J’entrouvris les yeux afin de m’en assurer et, comme de fait, une personne se dirigeait vers nous, ou plutôt vers l’aire de détente. C’était ce qui avait le plus de sens selon moi, ne connaissant pas grand monde qui pourrait avoir affaire avec Aka et moi.

Spoiler:

Ce qui suivit se passa si rapidement que même si je n’avais pas été encore à moitié endormi je n’aurais probablement rien pu fait. Apparemment, Aka était plus réveillé que moi puisque lorsque je fus réveillé par le crissement de roche, je l’aperçu à travers mes yeux plissés devant ce que j’identifiai difficilement comme une jeune femme. Quelle clarté, j’arrivais à peine à voir autour de moi. Me frottant rapidement les yeux, je compris d’un seul coup d’œil ce qui se passait. Pour une raison que moi-même j’ignorais, Akamori avait décidé que la nouvelle arrivante était digne d’intérêt et avait commencé à tourner autour d’elle. Il n’avait aucune mauvaise intention, il était simplement curieux. Il devait certainement se demander comme moi qu’est-ce qui rendait cette femme si intéressante. Cependant, il y avait de ces gens que la taille de mon compagnon rendait mal à l’aise et qui pouvait confondre sa curiosité pour un attrait en tant que prochain repas. Malheureusement, mon ninken n’arrivait pas à sentir se malaise et agissait comme si rien n’était. Comme je savais ce qui arrivait lorsque ce genre de situation arrivait, cette éventualité me réveilla complètement en un temps record. Ce ne fut pas long que j’étais à mon tour sur mes pattes et me dirigeait à grandes enjambées vers mon ninken et la jeune femme.

Je fus toutefois trop tard pour empêcher ce qui devait arriver : la jeune femme lança un cri de peur qu’Aka interpréta comme une invitation à jouer – fouillez-moi comment il est arrivé à cette conclusion – et sauta sur la pauvre jeune femme qui devait être morte de peur. Cette dernière lança justement un cri d’effroi alors que mon chien ninja l’amenait au sol, alors qu’elle avait une belle robe blanche. D’un bond j’étais à côté d’eux, poussant mon ninken sur le côté, relâchant la jeune femme de son emprise. Les dommages avaient quand même été faits alors que je remarquais son visage luisant à la lumière du soleil. Mais mon attention se tourne vers mon ninken, à qui je fis comprendre qu’il ne pouvait pas simplement sauter sur les autres comme ça. Nous avions beau avoir un lien très spécial, il restait tout de même un chien. Laissant Aka en plan, je pivotai immédiatement pour proposer mon aide à la jeune femme pour se relever.

- Je suis tellement désolé! lui dis-je en tendant la main pour l’aider à se remonter. Ce n’est vraiment pas son genre de faire ça, je ne sais pas ce qui lui a pris.

Je lui offris un sourire désolé tout en laissant ma main en l’air, prête à prendre la sienne si elle en avait besoin. Je comprendrais néanmoins si elle ne voulait pas de mon aide. Pour elle, je devais sûrement qu’être le propriétaire de ce satané chien – bien qu’il s’agisse en fait d’un ninken – qui l’a renversé et lécher le visage. C’était tout à fait compréhensible qu’elle ne veuille rien savoir de moi, ni d’Aka qui avions bousillé sa journée. Lorsqu’elle fut finalement de retour sur ses pieds, je renouvelai mes excuses. Je sentis mon ninken s’approcher derrière mon dos, étant donné que je l’avais envoyé un peu plus loin pour ne pas empirer la situation, et me retournai vivement vers lui. Il s’immobilisa aussitôt et repartit en direction inverse, la queue entre les jambes.

- Il aimerait bien te présenter ses excuses, mais seulement si cela te va.

Même si parmi mon clan je n’avais jamais rencontré qui que ce soit que la vue d’un ninken comme Akamori aurait apeuré, ce n’était pas la première fois que je rencontrais ce genre de situation. En deux ans à Konoha, et même dans certains villages lors de mes missions, j’avais plusieurs fois dû gérer avec des gens que la simple vue de mon ninken leur donnait des ulcères. J’ignorais si c’était le cas de cette jeune femme, mais je savais qu’avant qu’Aka ne s’approche pour lui montrer qu’il ne voulait pas lui faire du mal, je devais m’assurer qu’il pourrait bien se rendre jusqu’à elle, c’est-à-dire savoir si elle ne s’enfuirait pas ses jambes à son cou lorsqu’il s’approcherait de nouveau.

Même j’aurais compris son refus, je la vis néanmoins prendre la main salvatrice que je lui tendais. Alors que je la remettais rapidement sur ses pieds, la première chose qu’elle fit fut d’épousseter sa robe blanche, qui n’avait pas trop souffert de l’incident. J’eus même droit à un remerciement de sa part, même si elle était rouge de honte. Sur ce point, je devais la comprendre; je serais très embarrassé moi-même si j’étais dans ce genre de situation. C’était pourquoi j’avais essayé d’amortir la situation en me confondant en excuses et lui expliquant qu’Aka ne faisait pas ce genre de choses – son truc c’est plus de sauter sur l’ennemi et elle n’avait en aucun cas l’air d’une ennemie. Je lui proposai alors les excuses d’Aka, mais seulement si elle acceptait qu’il s’approche. Il était très important qu’elle prenne elle-même la décision de laisser mon ninken approcher. Cette dernière commença premièrement par refuser, enfin indirectement puisqu’elle ne voyait pas la nécessité de ses excuses. Sans le savoir, elle évitait de rencontrer le chien ninja de nouveau.

Peut-être s’en rendit-elle compte puisqu’elle rougit encore plus qu’elle ne l’était déjà. Elle mit ensuite la faute sur elle-même, pensant qu’il n’était pas normal d’être à priori apeuré par mon ninken, qui était beaucoup plus gros que les chiens domestiques. Je pus toutefois apprendre que sa peur des chiens, en particulier les gros, venait du fait qu’elle avait peur pour sa vie. Je la regardai de la tête au pied, l’observant plus attentivement. Les villageois n’avaient ce genre de peur irrationnel de se faire tuer par les chiens. Seuls les shinobis pouvaient imaginer de telles façons de mourir. Pas trop le choix lorsqu’on doit constamment lutter pour notre vie. Je m’empressai rapidement la rassurer, qu’elle n’avait pas à se blâmer.

- Non, ne t’en fais pas, tu n’es pas la première à réagir de cette façon. Malgré les apparences, Aka est tout ce qui a de plus inoffensif. Il faut simplement lui donner une chance…

Subtilement, je lui laissais entendre qu’elle pouvait faire confiance à Aka et que la balle était dans son camp. J’attendis quelques instants qu’elle réfléchisse à ma proposition, ce n’était sûrement pas quelque chose que l’on décidait d’un coup de tête, quand j’eu alors une réponse. Cependant, ce ne fut pas le genre de réponse auquel je m’attendais. Je m’attendais à recevoir une réponse positive ou négative, mais cette dernière ne semblait pas comprendre que mon ninken puisse s’excuser. Elle me posa alors quelques questions qui me firent alors réaliser qu’elle n’était sans aucun doute pas d’ici. Elle semblait n’avoir aucune idée de l’existence du clan Inuzuka; elle ne devait donc pas être Konohajin. Je me grattai alors derrière la tête, un sourire gêné. Comment expliquer ça?

- Euh, ouais, enfin… C’est-à-dire que… Ouais, on pourrait dire que je communique avec lui. C’est le truc de mon clan, le clan Inuzuka. Nous avons établis une relation avec les ninken, les chiens ninjas, comme Akamori ici présent, dis-je en pointant Aka du pouce, ce dernier relevant aussitôt la tête avec curiosité. Moi c’est Takeo, en passant. Ravi de te renconter…

L’invitation n’était même pas subtile; j’étais très curieux de qui cette jeune femme pouvait être. Si elle n’était pas de Konoha, d’où pouvait-elle bien venir? Trop concentré à lui faire surmonter sa peur des canidés, j’en étais à venu à oublier de me présenter. J’avais rapidement remédié à cela, mais il fallait le faire, présenter Aka avant de me présenter moi-même!

- Grâce au lien que je partage avec lui, je peux savoir qu’il s’en veut d’avoir réagi aussi vivement. Tu as une odeur particulière, dit-il… Pas mauvaise, rassures-toi, seulement différente de ce qu’il a l’habitude de sentir ici.

J’ignorais de quelle odeur il faisait référence. Sauf que lorsque j’avais réalisé ce que j’avais dit, notamment au regard intrigé de la jeune femme, je me repris rapidement. De manière générale, lorsqu’on disait à quelqu’un qu’il avait une odeur particulière, normalement ce n’était pas dans très gentil. Je n’avais fait que traduire ce qu’Aka ressentait, alors sur le coup je n’avais pas réalisé ce que je disais. J’avais aussitôt opté pour un terme qui reflétait sans doute mieux ce qu’Aka voulait dire; ça ne devait pas être une odeur qu’il sentait tous les jours si elle ne venait pas d’ici. Cela rajoutait encore plus de poids à ma déduction qu’elle n’était pas du coin. Je me retins toutefois de lui poser des questions à ce sujet, ne me sentant pas à l’aise de parler de ce genre de chose en ces temps troublés. Qui sait quel genre de réaction cela pourrait créer?

Même tandis que j’essayais de la sécuriser, de lui assurer qu’Aka ne lui ressauterais plus dessus, je voyais que son regard était inévitablement porté vers quelque chose derrière moi. Je devinais sans aucune difficulté l’objet de son obsession, mais ne disais rien puisqu’il était normal qu’elle veuille garder un œil dessus. Gardez vos amis près, mais gardez vos ennemis encore plus près comme on dit, hein? Je continuai tout de même de lui expliquer pourquoi elle pouvait me faire confiance lorsque je disais qu’il ne le referait plus. Ce n’est que lorsque je déclinai mon identité, demandant sans grande subtilité la sienne, qu’elle posa finalement son regard sur moi. Replaçant quelques mèches de ses cheveux noir, elle s’inclina alors légèrement devant moi et révéla s’appeler Yuki pendant que je la suivais dans une petite courbette respectueuse.

J’ignore ce qui la fit changer d’avis aussi drastiquement, peut-être était-ce simplement le fait de pouvoir mettre un nom sur cette grosse bête menaçante que devait lui sembler Akamori, mais tout ça pour dire qu’elle décida de finalement s’accroupir pour se mettre au même niveau que ce dernier. Quelle ne fut pas ma surprise quand elle alla même jusqu’à l’appeler. Ne reconnaissant pas ma voix, ce dernier leva aussitôt la tête, curieux. S’étant fait à l’idée qu’il ne reverrait pas son intérêt de sitôt, il était retourné se couché à l’ombre du feuillage. Entendre une nouvelle voix avait aussi piqué sa curiosité et reprit de l’aplomb, remuant rapidement la queue, lorsqu’il reconnut la jeune femme qui l’appelait. Cette dernière l’appela à elle, d’une façon qui dut sûrement lui donner un boost d’égo. Après tout, ce n’était pas moi qui allais l’appeler mon beau; nous avions passés depuis longtemps ce stade. Toutefois, il n’allait pas rechigné sur cette attention. S’avançant tranquillement vers Yuki-chan, cette dernière joua alors avec lui pendant quelques minutes, lui donnant divers ordres. Je les regardai, amusé, devant ce soudain changement d’attitude.

Pas que je m’en plaignais, j’avais réussi à lui faire voir que mon ninken n’était pas si dangereux. Je le réalisai à coup sûr lorsqu’elle releva la tête vers moi pour m’annoncer qu’il était gentil. Le commentaire qui suivit me rappela que la jeune fille devant moi était quand même kunoichi, mais je ne pouvais pas démentir ses paroles. En effet, Aka était un atout duquel je ne me passerais jamais. Continuant de cajoler le chien ninja, qu’elle semblait s’être prit d’affection, je lui répondis qu’elle avait bien raison.

- Tu as raison, Aka est un avantage considérable contre mes adversaires. Jamais je ne me séparerais de lui.

C’était bien vrai, combien de fois m’étais-je demandé ce que je ferais sans lui et que la réponse avait été « pas grand-chose »? Si ce n’était de lui, je ne serais pas à Konoha, jamais je ne devais oublier que c’était ensemble que nous étions venus à bout de tous les obstacles qui s’étaient dressés devant nous. Enfin, presque tous, mais je n’allais pas recommencer à penser à cela. Au lieu, je préférai lui expliquer la raison pour laquelle Akamori s’était intéressé à elle en premier lieu. Rectifiant le tir, ne voulant pas la contrarier, je lui expliquai que mon ninken avait senti une odeur différente de ce qu’il sent ici. Comme s’il s’agissait d’une information tout à fait anodine, elle nous apprit alors qu’elle revenait d’une grosse opération, dans laquelle elle avait elle-même perdu beaucoup de sang. C’était ce qu’elle expliquait comme l’odeur que mon ninken sentait. Cette jeune fille n’était définitivement pas comme les autres, je ne connaissais personne de son âge qui parlerait aussi sérieusement d’une telle opération. Mais bon, nous étions dans un monde de shinobis, cela ne devrait pas me surprendre. Je devais avoir à peu près son âge lorsque j’étais arrivé à Konoha.

- Peut-être… dis-je pensif.

C’était plausible, mais je n’arrivais pas à la sentir, peu importe comment je me forçais. Pourtant, j’avais déjà senti l’odeur aigre du sang, plus d’une fois même. Je restais donc sceptique que cela soit cette odeur qu’Akamori avait détectée chez la jeune femme. Cependant, je ne pensai plus à cela, préférant plutôt me concentrer sur le fait qu’elle soit devant moi présentement. Après tout, je me fichais bien de ce qu’elle venait faire ici, l’important était qu’elle soit là, avec nous. Je l’invitai donc à nous accompagner sous l’arbre. Elle disait aussi se remettre d’une grosse opération, sûrement avait-elle besoin de se reposer le temps qu’elle se rétablisse.

- Tu dois sûrement avoir besoin de te reposer après une si grosse opération; viens donc profiter d’un peu de l’ombre avec nous.

Je l’invitai d’un geste de la main et marchai tranquillement jusqu’à l’arbre où, il y avait quelques minutes, je me somnolais encore. Ce n’était pas qu’il faisait chaud, mais cela ressemblait assez à ça. Peut-être elle avec sa jolie robe blanche elle ne sentait pas l’intensité du soleil, mais moi je la sentais. Et puis, qui n’était pas bien sous l’ombre fraîche du feuillage d’un arbre? M’asseyant sur ses racines et m’accotant sur son tronc, j’attendis que Yuki nous rejoigne, Akamori et moi. Qui plus est, je mourrais d’envie de lui poser plein de questions sur elle et sur où elle venait, peu importe d’où elle venait. J’étais curieux, tout d’un coup. Était-ce à cause de l’intérêt que lui avait porté mon ninken? Impossible d’encore le dire.

Pas encore tout à fait sûr de l’origine de cette odeur différente, je chassai toutefois ces pensées. L’important pour le moment était qu’elle était là, devant moi, pas d’où elle venait. Cela ira pour plus tard, une fois que nous aurons plus ample connaissance, car je devais avouer rester curieux sur de de provenance. Ce mystère m’avait obsédé depuis que j’avais compris qu’elle n’était pas du coin, sans jamais trouvé l’occasion – ni la bonne façon – de le lui demander. JE me penchai plutôt sur un fait plus important encore : une jeune fille de son âge devait sans doute être fragile après une si grande opération et ce même si elle était une kunoichi. Je l’invitai donc aussitôt de venir profiter de l’ombre, qui serait sans nul doute plus agréable que ce soleil. En plus d’être bénéfique pour elle, ce l’était également pour moi; je me mourrais de retourner sous cet arbre. Cette dernière accepta, me confiant tout de même en route vers l’arbre qu’elle se sentait beaucoup mieux. Je souris à l’entente de cette nouvelle, mais arquai un sourcil en apprenant qu’ils avaient préféré laisser guérir la blessure naturellement. Même si elle ne l’avait pas dit directement, j’avais tout de même compris ce à quoi elle faisait allusion; c’était justement ce qui m’étonnait. En temps normal, les jutsus de soin étaient ce que la plupart des médecins shinobis utilisaient. Pourquoi n’y avait-elle pas eu recours?

- Vraiment? C’est… inhabituel comme méthode, commentai-je simplement, ne voulant pas offenser ma nouvelle rencontre en posant un jugement.

Arrivant finalement sous les grosses feuilles vertes de l’arbre, je soupirai d’aisance. Nous étions tellement mieux à l’ombre au soleil. Remarquez, il fait tout aussi chaud, mais au moins nous n’avons pas le soleil aveuglant qui nous tombait directement dessus. Nous nous installâmes au pied de l’arbre, là où Aka et moi nous reposions avant qu’il ne décide de sauter sur Yuki-chan, qui appela mon ninken d’un coup sur le sol. J’allais intervenir, mais me rappelai que j’étais le seul à partager ce lien avec Aka. Pour les autres, c’était bien un ninken, mais toujours qu’un chien. Je laissai donc la jeune kunoichi faire et la regardai cajoler le ninken. Après tout, si ce dernier ne disait rien, pour quelle raison m’interposerais-je? Parlant d’Akamori, il alla justement de poser tout juste à côté d’elle, allant reposer sa tête sur ses cuisses. J’observai quelques secondes ce qu’elle faisait avec ses mains et reconnut immédiatement ces gestes. En effet, elle n’était pas la première à faire cela au chien ninja; j’étais également de corvée de puces de temps à autres. Avait-elle un animal elle-même? Sinon, comment saurait-elle enlever les puces d’un chien. Enfin, n’importe quel animal, cette fois-ci cela adonne qu’il s’agisse d’un chien. Non pas une chien, un ninken.

Nous semblions tous bien profiter du moment, spécialement Aka, dans un silence ponctué par les bruits habituels de Konoha en été. Le chant des grillons, les sons distants du la grande rue principale du village qui grouille d’activité. Quoiqu’avec cette température j’en étais moins sûr, puisque la chaleur butterait sans doute quelques-uns à se rester à la maison pour se rafraîchir. La jeune fille à mes côtés me demanda alors de bout en blanc depuis combien de temps Akamori et moi nous entraînions ensemble. J’allais aussitôt lui répondre quand je vis qu’à son expression elle semblait avoir autre chose qui lui trottait dans la tête. J’attendis quelques secondes avant que finalement elle ne déballe ce à quoi elle pensait. La question ne me surprit guère, puisque rares étaient ceux en dehors de notre clan qui pouvait comprendre, mais eu toutefois le mérite de me réjouir. Ce n’est pas tous les jours que quelqu’un s’intéresse autant à notre technique de la Voie de la bête.

- J’ai pratiquement commencé à m’entraîner une fois l’avoir rencontré, donc ça veut dire depuis… un peu plus d’une douzaine d’année, commençai-je par répondre, commençant par ce que je savais. Parce que bien qu’excité d’enfin pouvoir entrer dans les détails, j’ignorais comment commencer. Et pour ce qui est de comment je me bat avec lui, je le considère simplement au même titre qu’un autre shinobi. Je mets à profit ces points forts et nous bâtissons nos tactiques autour de cela. Par exemple, un ninken est beaucoup plus rapide et plus discret qu’un shinobi. Je me retins de justesse pour ne pas ajouter qu’il était plus féroce également et continuai. Cela a l’air simple dit comme ça, mais c’est beaucoup plus difficile à mettre en pratique. Il faut une confiance et une coordination à toute épreuve, entres autres.

Je n’entrai pas plus loin dans le sujet, puisque les mots commençaient à ne plus venir. Décrire la relation que j’avais avec Akamori était très difficile à faire, puisqu’elle dépassait largement ce à quoi les gens s’attendaient. Par moment, j’avais presque l’impression de ne faire qu’un avec lui, mais ça n’arrivait pas assez souvent pour que me prononce sur ce sujet-là. Je profitai toutefois de sa curiosité afin de satisfaire la mienne.

- Tu sembles curieuse; aurais-tu un animal toi aussi? J’ai vu comment tu passais tes mains dans son poil, personne n’ayant pas d’animal pourrait arriver à enlever les bestioles de cette façon.

Dans un sens je répondais moi-même à ma question, mais je pouvais bien me tromper. C’est pourquoi j’attendis que Yuki-chan ne me réponde. Finalement, peut-être était-elle capable de me comprendre plus que je ne me l’étais imaginé.

Évitant de porter un jugement sur les choix de la jeune femme, peut-être avait-elle ses raisons d’éviter le ninjutsu médical, je me contentai d’observer que c’était inhabituel en cette ère des shinobis. J’avais aussi évité de lui poser des questions malgré ma curiosité aussi brûlante que la journée par respect; j’étais qu’un inconnu avec un gros toutou. Cependant, le sujet ne semblait pas l’indisposer outre mesure puisqu’elle commença aussitôt à me mettre dans les détails. Toujours en cajolant mon ninken, elle m’expliqua qu’on lui avait simplement prodigué le traitement à l’ancienne, comme nous appelons maintenant la méthode utilisé avant le ninjutsu médical, avant le justu médical. J’hochai lentement la tête, comprenant la situation en même temps qu’elle me l’expliquait. C’était toujours bon à savoir, surtout quand on ne connait rien aux justus médicaux. Je m’arrêtai toutefois après son dernier commentaire, cherchant un moyen de la réconforter, mais rien ne venait. Certes, elle n’avait pas tort – les blessures de guerres étaient bien monnaie courante dans notre monde – mais l’entendre d’une jeune fille aussi jeune avait quelque chose d’attristant. J’avais cependant la confirmation qu’elle était effectivement une shinobi, comme je l’avais deviné un bon moment sans pouvoir en être complètement certain.

- Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort… dis-je en reposant ma tête sur le tronc.

Méditant sur ces paroles, nous reposâmes tous les trois pendant plusieurs minutes avant que Yuki-chan ne me questionne sur ma relation avec Akamori. Je lui expliquai un peu dans les grandes lignes notre histoire à Aka et moi, comment nous nous sommes rencontrés il y a de cela un peu plus de douze ans, ainsi que notre façon de nous entraider en combat. Toutefois, j’évitai de lui révéler le secret du clan puisque, comme son nom l’indique, seuls les membres du clan peuvent le connaître. Je n’aurais de toute façon pas assez d’une journée, ne parlons pas d’un après-midi, pour lui expliquer la complexité du lien qui nous unissait. Malgré ces questions, que je me faisais un plaisir de répondre, je voyais quand même qu’elle avait l’air de s’y connaître plus en animal qu’elle ne le paraissait. L’interrogeant sur sa technique de dépuçage (oui, vous avez bien lu, bande de pervers…), j’appris qu’elle possédait effectivement deux animaux, un chat un une jument. Mon visage s’illumina; n’importe qui qui avait des animaux était mon ami! Je souris lorsqu’elle les compara à mon ninken, je voyais très bien pourquoi elle faisait ce genre de comparaison. Même si ce n’était pas comme Aka et moi, je ne doutais pas un instant qu’elle avait sa propre relation, unique à sa façon, avec ses animaux.

L’atmosphère me rendait las, c’était en partie pourquoi j’étais aussi amorphe. Sous l’ombre de l’arbre, je n’avais plus le goût de bouger de là, ni même faire l’effort de remuer un muscle. Les paroles de la jeune fille à mes côtés me firent étirer les lèvres, réalisant une fois de plus à quel point nous étions vraiment pareils. Me sortant de ma torpeur, je me tournai vers Yuki-chan afin de lui assurer qu’en temps normal nous étions tous les deux beaucoup plus énergique. Même si cela faisait un bon bout de temps que j’étais à Konoha, j’étais tout de même encore habitué aux étés frais sous les arbres du pays du Feu. Cette chaleur accablante, cette atmosphère étouffante, j’avais encore de la difficulté à m’y habituer. Cependant, je n’allai pas jusqu’à lui parler de ça. À place, j’assistai à un spectacle fascinant. Avec ça, plus aucun doute ne planait sur son appartenance aux shinobis. C’était la première fois que je voyais du hyôton de mes propres yeux! Je ne pus retenir une exclamation de surprise.

- Du hyôton! ... … Désolé, c’est la première fois que j’en vois de mes propres yeux. Ça doit être sacrément pratique pour des températures comme celles-ci.

Comme je disais cela, je réalisai soudain ce que si elle maîtrisait le hyôton elle ne devait pas vivre là où il faisait chaud. Mon cerveau cliqua alors qu’elle devait sans doute appartenir au clan Samui, pratiquement les seules personnes connues maîtrisant cette affinité. Je ne m’y connaissais pas beaucoup dans les clans des autres villages ninjas avant que je n’arrive à Konoha, nous mêlant rarement avec le restant du monde, mais depuis que j’avais emménagé Tenshi m’avait beaucoup aidé à les apprendre.

- Serais-tu du clan… Samui?

Bien que je n’y participais plus moi-même, nous étions toujours en guerre contre Suna et Kiri. Était-il vraiment prudent pour une Samui de se promener ainsi à Konoha, si jamais elle était bien une Samui? Personnellement cela ne me dérangeait pas, c’était plus par curiosité que je demandais et d’autant plus qu’elle était blessée, mais j’ignorais si tous seraient du même avis.

Lorsque Yuki-chan utilisa son hyôton pour la première fois devant mes yeux, je dois avouer avoir été tellement surpris que je ne pus retenir un cri de surprise. Ce faisant, je surpris moi-même la jeune kunoichi qui sursauta en se retournant rapidement vers moi. Avant qu’elle ne puisse mal interpréter mon cri de surprise, je m’empressai de lui expliquer la raison de ma stupeur, qui est un peu idiote quand j’y repense. Si jamais c’était arrivé en plein combat, aurais-je aussi crié de surprise? Je l’ignorais et le saurais probablement jamais. Tout en m’expliquant à la jeune fille, je trouvai nécessaire de rajouter en plus que cela devait être pratique pour de chaudes températures, seulement pour réaliser qu’elle n’était peut-être pas habitué à de telles températures. Sans s’étendre plus sur le sujet, elle me révéla simplement qu’il y avait en effet un côté pratique. Quel côté cela impliquait était remis à une autre discussion puisqu’elle reporta aussitôt son attention sur mon ninken, qui avait gémi une fois de plus pour qu’elle reprenne là où elle s’était arrêté lorsque je l’avais interrompu. Évidemment, cette dernière ne se fit pas prier et recommença à jouer câliner Aka.

Je les regardai quelques minutes alors que Yuki-chan allait s’enfouir ses mains dans la fourrure du chien ninja et allait le chatouiller. Ce qu’elle ignorait, c’était qu’Aka était chatouilleux ce qui faisait qu’il se roulait encore plus vivement sous les câlins de la jeune femme, qui je réalisai soudain faisait sûrement parti du clan kirijin qui manipulait justement l’hyôton. Avec Tenshi, j’avais appris quelques-uns des clans principaux de chaque village shinobi, question de savoir un peu à quoi m’en tenir si jamais je croisais leur chemin. Lui les connaissait puisqu’il avait eu une très bonne éducation, venant du clan Hyûga, et avait accepté pendant quelques jours de me faire un tour d’ensemble. Lorsque je lui demandai, juste pour être certain de ce que j’avançais, elle me le confirma en ajoutant un compliment qui me fit légèrement rougir des oreilles malgré moi. Me grattant derrière la tête, je tentai de trouver quelque chose à dire.

- Oh ce n’est rien, vraiment. J’essaie simplement de me tenir au courant… C’est mon ami Tenshi qui m’a tout apprit.

Bien sûr, j’évitais de mentionner que c’était au cas où j’avais à me battre contre eux; cela n’était vraiment pas le bon moment pour lancer quelque chose comme ça. Nous avions beau être tous deux shinobis, cela n’empêchait pas qu’en une journée comme celle-ci, une journée aussi chaude, ce n’était pas le moment de parler de ce genre d’affaires. Mon esprit réfléchissait à toutes ces choses, me coupant momentanément de la réalité. Lorsque finalement je sortis de mes pensées, je jetai un coup d’œil au duo et remarquai qu’ils dormaient tous deux à poings fermés. Les regardant, un sourire flottant sur les lèvres, je m’accotai de nouveau la tête contre le tronc et fermai les paupières à mon tour, les rejoignant rapidement dans le sommeil.

Dong… Dong… Dong… L’immense horloge du village résonna soudainement, supplantant ainsi pendant quelque secondes tous les bruits de Konoha. Dès les premiers coups, je me réveillai en sursautant. Pas que j’étais étonné de m’être assoupi – ça avait même été mon objectif dès le départ – mais je ne m’imaginais certainement pas un réveil de la sorte. Je regardai ensuite les deux nouveaux meilleurs amis et vis qu’ils avaient tous deux été réveillés par l’horloge tout comme moi. Sûrement ne m’était-ce pas destiné, mais j’entendis tout de même Yuki-chan se désolé qu’elle ne pourrait pas faire ses courses. Tendant l’oreille, j’entendis les derniers coups de l’horloge. Si nous nous dépêchions, peut-être aurions-nous le temps. Me jetant sur mes deux pieds, je fis aussitôt part de mon plan avec la jeune fille.

- Il n’est pas trop tard, Yuki-chan! Les marchands doivent encore être en train de fermer leurs étals, si nous nous dépêchons ils n’auront pas complètement fermé boutique pour la journée.

Je savais de quoi je parlais, combien de temps cela m'était arrivé d'arriver de justesse après avoir passé la journée à me balader en forêt ou à me prélasser sur le bord d'une rivière? De plus, la perspective d’une course contre la montre jusqu’au marché m’excitait beaucoup. Ma petite sieste d’après-midi m’avait revigorée et me donnait soudainement un regain d’énergie. La température avait aussi baissée de quelques degrés qui faisaient toute la différence, nous étions maintenant très confortables. C’était le moment idéal pour se délier les jambes et un excellent moyen de se réveiller, qui plus est. J’eus alors un léger doute quant à la condition de ma jeune amie; pourrait-elle tout de même suivre avec ses blessures?

Ma proposition fut aussitôt accueillie par un sourire, signe qu’elle aimait bien l’idée elle aussi. J’ignorais toutefois si c’était pour les mêmes raisons que moi, l’important c’est que quelques instants plus tard, elle acceptait la proposition. D’autant plus que selon elle les rues de Konoha ne lui étaient pas encore totalement familières. Raison de plus pour que je l’accompagne, Yuki-chan se perdrait sans doute si je ne l’accompagnais pas; les rues allaient dans tous les sens et zigzaguaient entre elles. Dans plusieurs villages où nous nous sommes arrêtés pendant ma jeunesse, mon clan et moi, la plupart des villages avec des rues très ordonnées, soit parallèle soit perpendiculaire. Vous n’imaginez pas ma surprise lorsque je suis arrivé à Konoha et me suis retrouvé face à ces serpentins entre les maisons. Je me rappelle encore combien de fois Aka m’avait remis sur le droit chemin afin que je ne perde pas dans les rues du village!

Sans perdre une seconde, la jeune Samui s’élança à toute vitesse en direction du marché. À premier coup étonné par la vitesse à laquelle elle allait malgré sa blessure – elle avait bel et bien affirmé bien allé et j’étais maintenant plus disposé à la croire – Aka et moi nous empressâmes de lui emboiter le pas et d’aller la rejoindre. Cela ne commencerait pas notre mission d’une bonne façon de se perdre dès le début, surtout que le temps jouait contre nous. Cela ne fut pas long que mon ami à poil ainsi que moi-même nous retrouvions aux côtés de notre nouvelle amie tandis que nous la guidions jusqu’aux étalages des marchands. Elle devait en premier lieu trouver des fruits et des légumes ainsi qu’un boucher. Avant même qu’elle n’ait terminé sa question, je savais déjà où allé. Levant un pouce en l’air, je vis au loin la place du marché qui apparaissait.

- Ne t’en fais pas, je sais exactement où aller!

Tout en continuant vers les divers magasins, je concentrai mon esprit sur le primeur. Eh oui, j’avais un peu bluffé, mais comment pouvais-je dire non à cette jeune fille qu’Akamori semblait bien apprécié, sûrement en grande partie grâce au traitement qu’elle lui avait offert? Je profiterais du temps au boucher, que je connaissais bien, afin de trouver un bon primeur qui serait ouvert à ce temps-ci. Je gardai ce souci en tête jusqu’à l’arrivée au boucher et même lorsque je le saluai chaleureusement tout en lui expliquant la situation. Bon comme il était, je n’eus pas besoin de le convaincre longtemps avant qu’il ne se retourne vers Yuki et lui propose d’aller jeter un coup à ce qu’il lui restait. Je remerciai l’homme d’un signe de tête alors que la kunoichi choisissait les morceaux qui l’intéressaient. Remerciant de nouveau le boucher lorsque nous quittâmes, mon regard fit un tour sur la place du marché. La Fortune devait être avec nous puisque pratiquement juste devant nous, à l’opposé de la place, se trouvait justement un primeur qui étaient en train de fermer les cadenas sur ses étalages. Redoublant de vitesse, me je sprintai vers le primeur, agitant frénétiquement les bras pour attirer son attention.

- Hé! Attendez! hélai-je à l’endroit du primeur.

Ce dernier releva les yeux, de la curiosité dans le regard alors qu’il se demandait qui pouvait venir l’importuner. Par chance, il s’était arrêté dans son mouvement et n’avait pas complètement verrouillés ses légumes. Il fut un peu plus dur à convaincre que le boucher, mais nous finîmes par gagner sous la condition de nous dépêcher. Nous y mettant à deux, nous eûmes tôt fait de ramasser tout ce qu’elle avait de besoin et de payer le primeur. J’y allai même de ma propre poche pour rajouter au montant, histoire de le remercier pour sa sollicitude. Et puis, avec les marchands, quelques ryos étaient souvent ce qu’il fallait pour leur graisser la patte. Bon, nous étions passé par le boucher ainsi que par le primeur, la jeune Samui avait-elle besoin de passer quelque part d’autre?

- Alors, quel est notre prochain arrêt? Il y a une boulangerie encore ouverte juste là si tu le souhaites, lui dis-je en pointant un étal pas très loin d’où nous étions.

Jamais je ne m’étais autant dépêché de ma vie. Plus nous nous attardions à un magasin, plus il y avait de chances que le prochain soit fermé lorsque nous arriverions. C’est pourquoi lorsque je vis le primeur qui commençait rechigner un petit peu, je n’ai pas hésité et j’ai promis une bonne compensation s’il voulait bien nous aider. Ce fut comme s’il avait entendu des mots magiques et changea aussitôt d’attitude, affichant un sourire et nous invitant à regarder ce qu’il lui restait en fin de journée. Quelques fruits et légumes dans son panier, nous nous empressâmes de régler nos achats ici, sans oublier le « pourboire » que je lui verserais. J’avais presque l’impression de me sentir comme un mafieux qui accomplissait une transaction illégale alors que je lui remettais les ryos que je lui avais promis, lui donnant ainsi une montagne de pièces beaucoup trop irréaliste pour les quelques produits que Yuki-chan avait acheté.

Je chassais cette désagréable comparaison de ma tête tandis que nous quittions l’échoppe du primeur et que mes yeux se posaient sur une boulangerie. Rien ne disait qu’elle était ouverte, mais mon nez ne me trahissait jamais et celui-ci sentit encore le pain d’ici. Cela voulait donc dire qu’ils n’avaient pas encore débarrassé leur magasin des produits de la journée! Sautant aussitôt sur l’occasion, je demandai à ma nouvelle amie si elle ne devait pas passer par une boulangerie, tant qu’à être juste à côté, et cette dernière m’informa qu’elle devait effectivement s’y rendre. Juste à entendre ce qu’elle voulait faire, cela me donnait l’eau à la bouche. Je dois dire que cela avait toujours été mon point faible, mon estomac. Peu importe le problème, un bon plat cuisiné était toujours le meilleur moyen pour me réconcilier. Atteignant la boulangerie, nous arrivâmes juste à temps en interrompant le boulanger alors qu’il fermait sa porte. Prenant connaissance de ce que la jeune kunoichi voulait, soit une simple miche, ce dernier nous consentit à bien vouloir nous en vendre une dernière.

- Mais n’en prenez pas une habitude… grommela le boulanger alors que Yuki lui tendait l’argent.

Nous hochâmes tous les deux la tête, promettant que cela n’arriverait plus, même si je n’étais pas vraiment certain de pouvoir tenir cette parole. Le boulanger referma la porte derrière nous alors que nous nous mêlions à la foule de passants – c’était après tout l’heure de pointe après les coups de l’horloge – de la place du marché. J’appris toutefois que ses courses étaient terminées, ce qui me fit sourire.

- Tu vois, je savais que nous aurions le temps!

Je levai le poing en signe de victoire avant de rire légèrement. Maintenant qu’elle avait terminée, nous pouvions quittés ces rues grouillantes de personnes pour nous diriger vers les quartiers résidentiels, un peu moins actifs. Enfin, je déduisais qu’elle habitait là. Même si elle était de Kiri, elle devait bien séjourner chez quelqu’un. Je n’aurais toutefois pas la chance de la savoir, puisque nos chemins étaient sur le point de se séparer; elle semblait vouloir continuer alors que nous devions tourner ici. J’allais le lui faire remarquer lorsqu’elle me devança et nous proposa de manger chez elle. Je dus paraître surpris, je ne voulais après tout pas m’imposer dans sa famille ou peu importe qui l’hébergeait, puisqu’elle s’empressa de rajouter qu’elle était seule pour un certain temps. Un aboiement enthousiaste de la part d’Aka précéda ma réponse, qui abondait dans le même sens.

- Mais bien sûr! Nous sommes nous aussi seuls à la maison, ça serait idiot d’aller retourner seul chacun chez soi. Allez, je te suis.

L’invitant d’un geste de la main à passer, j’attendis qu’elle se mette en marche pour la suivre. Il y avait de cela quelques heures, j’ignorais jusqu’à l’existence de cette jeune fille, je ne pouvais pas savoir où elle demeurait. Tout en la suivant, je pensai à ce qu’elle ferait. Peut-être ce plat en sauce dont elle parlait…

Souriant à la jeune femme, je la laissai passer afin qu’elle puisse nous amener, Aka et moi, là où on l’hébergeait. C’était un des avantages de vivre seul : personne qui m’attendait à la maison pour manger; je pouvais changer à n’importe quel instant de plan sans que cela ne dérange personne. Non seulement cela, mais j’aurais amplement l’occasion de manger de nouveau chez moi, alors qu’on ne pouvait pas en dire de même pour chez Yuki-chan. J’ignorais qui elle était, mais j’avais déduis durant notre trajet qu’elle n’était pas une kunoichi ordinaire. Je n’y avais pas prêté attention avant, mais alors que nous étions seuls tous les trois dans la rue, ce fut à cet instant que je les sentis. Nous étions suivis, pas de doute. Jetant un rapide coup d’œil vers l’arrière, je fus surpris de reconnaître l’ANBU. Je ne mis ensuite pas longtemps à relier les points et déduire qu’ils suivaient la Kirijin. Ce ne fut toutefois pas long que je m’habituai à leur présence, finissant même par les ignorer. Ce n’était pas cela qui changerait ma perception de la jeune femme. Suivie ou non, Yuki-chan restait la même jeune fille totalement gaga de mon cher Akamori.

Alors que je suivais diligemment la Samui, gardant mes découvertes pour moi-même pour ne pas assombrir l’atmosphère, je découvris que ce quartier m’était familier. Je reconnaissais bien ces maisons, mais ma mémoire me défaillait pour savoir pourquoi il l’était. Je connaissais quelqu’un qui habitait dans ce coin, ou du moins près d’ici, mais qui? Je laissai cette question sans réponse et suivis Yuki-chan jusqu’à un bloc d’appartements. Nous y entrâmes en file indienne puis montâmes les marches à la suite de la jeune fille qui nous appris que notre destination se trouvait au deuxième étage. Ce n’est qu’en rentrant dans l’appartement que je compris pourquoi ce quartier m’avait paru si familier : c’était l’appartement de Rin! Comment ne pas le reconnaître avec la panoplie d’instruments qui reposaient un peu partout?

- Tu habites chez Rin-kun?

De toutes les personnes chez qui elle pouvait habituer à Konoha, cela avait tombé sur Rin! Quelle drôle de coïncidence! Ne s’attardant pas plus longtemps dans le salon, Yuki-chan disparut vers l’arrière de l’appartement et m’empressai de la rejoindre. J’arrivai alors dans leur cuisine, où nos courses de dernière minute reposaient, prêtes à préparer. Cependant, notre première préoccupation à tous était de se prendre quelque chose à boire. Même si la température était rendu supportable en cette fin de journée, notre marche m’avait toute de même assoiffé. Me demandant ce que je voulais. La voyant agripper un soda, je lui d’en prendre un deuxième. Elle le vida dans un verre et me le tendit alors qu’elle me disait d’aller m’installer confortablement. Pendant ce temps, elle se mettrait à la préparation du repas. Est-elle tombée sur la tête? Ou peut-être n’est-elle pas complètement remise?

- Ah ça non, pas question. Je ne vais pas simplement tout te laisser faire, je le mange autant que toi ce repas. De plus, je suis celui qui fait la cuisine chez moi; c’est sans vantardise que je dis que je suis un assez bon cuisinier. C’est ce qui arrive lorsqu’on aime trop manger,terminai-je avec un clin d’œil tout en la rejoignant dans la cuisine.

Je n’aurais pas été à l’aise de la laisser travailler seule alors que je sirotais mon soda de mon siège. Même si j’étais un invité, je voulais participer à la préparation du repas. Ça le rendait encore meilleur lorsqu’on savait qu’on y avait mis notre part. Qui plus est, à force de me faire à manger pendant deux ans, j’étais effectivement devenu un bien meilleur cuisinier. Maintenant que nous étions deux, la préparation se retrouva faite doublement plus vite. Au bout de quelques minutes, notre viande et nos légumes étaient au four et émanaient déjà une odeur salivante. Ce n’est qu’à cet instant que nous nous dirigeâmes au salon pour laisser le temps à notre plat de cuire. Une fois confortablement installé, je ne pus retenir ma curiosité plus longtemps.

- Si ce n’est pas indiscret, ou confidentiel ou peu importe, comment as-tu connu Rin? Tu sembles à l’aise dans cet appartement, comme si tu y résidais depuis longtemps.

Et voilà, c’était sorti. Je ne pouvais pas m’empêcher de me demander comment une Kirijin s’était retrouvé sous le toit d’un Konohajin. Quoi qu’en y pensant bien, Rin était bien peut-être un des seuls shinobis que je connaisse qui pourrait bien héberger une Kirijin sans que cela ne se termine pas en bain de sang. Depuis la guerre, notre relation avec le village de Brume n’était pas des plus harmonieuses. Ce qui amenait aussi la question de ce qu’elle faisait ici, mais je n’allais pas aborder ce sujet tout de suite.

Le soda à la main, je me dirigeai vers la cuisine afin d’aider Yuki-chan pour préparer le repas. Cette dernière profita de mon initiative pour offrir à Aka quelque chose pour se désaltérer. Je commençai ainsi à couper la viande qu’elle avait achetée du boucher en petits morceaux, maniant le couteau avec une dextérité acquise avec beaucoup de pratique. Même avant que je ne quitte le nid familial, j’avais toujours été le nez dans une cuisine; quand je n’étais pas en entraînement bien évidemment. Vous pensez réellement que j’étais le genre de personne à filer en douce de l’entraînement pour aller me délecter dans la cuisine? Bon d’accord, je l’avoue l’avoir fait une ou deux fois, mais pas plus! Enfin bref, pendant ce temps, la Samui avait offert un grand bol d’eau au ninken, qu’il buvait déjà à grande lampées, et revenait vers moi pour s’occuper des légumes racines. Lorsque j’eus terminé, elle m’indiqua la prochaine étape à faire, soit les oignons.

Suivant ses instructions à la lettre, je plantais les clous de girofle dans les oignons et rassemblai tous ce que nous avions coupés pour les mettre dans une casserole. Cependant, je ne voyais aucune casserole dans autour de nous. Me voyant sûrement chercher, elle me pointa aussitôt l’endroit où les casseroles se trouvaient et je pris celle qui, après une estimation sommaire de ce que nous avions à mettre, devrait pouvoir contenir toute cette viande et ces légumes. Je la regardai mettre tous les ingrédients dans la casserole, à l’exception des carottes. Ces dernières cuisaient plus rapidement et risquaient de devenir trop molles si mises dès le départ, alors j’allai chercher les fines herbes que j’hachai rapidement avant de les saupoudrer sur le tout.

- Et voilà! Reste plus qu’à attendre pour les carottes.

Prenant mon verre de soda, que j’avais mis de côté lors de la préparation, j’en pris une longue rasade avant de le reposer sur le comptoir. Toute cette préparation m’avait donné l’eau à la bouche et j’avais accueillis cette gorgée avec soulagement. Nous devions toutefois attendre quelques minutes avant de pouvoir laisser le tout mijoter alors nous restâmes debout dans la cuisine à attendre que l’eau bouille. Ce ne fut pas très long que des bulles commencèrent à se former sur le dessus du mélange et je fus celui qui fut incombé de la tâche d’enlever l’écume. Suivant encore une fois les instructions de ma nouvelle amie, je chassai l’écume de sur la casserole et nous incorporâmes alors les carottes. Tout étant plus ou moins terminé, nous pûmes nous installer un peu plus confortablement et jaser entre nous.

Bien vite, je demandai à la Kirijin les circonstances qui avaient mené à sa rencontre avec Rin. En fait, j’étais curieux de savoir comment deux shinobis de village ennemis avaient pu ainsi se rencontrer et vivre sous le même toit. Peut-être cela s’était-il passé comme moi, alors que j’avais appris à apprécier la jeune fille avant de connaître son affiliation au village de la Brume? La voyant immédiatement rougir à la seule mention de cette épisode, je me demandai si j’avais réellement bien fait de le demander. Était-ce, comme je le pensais, trop indiscret? Cela n’Avait pas l’air puisqu’elle finit par me répondre que c’était son deuxième séjour au village de la Feuille. Marquant une pause, sans doute pour rassembler ses idées, je me dis que cela expliquait son aisance dans les lieux; ce n’était pas la première fois qu’elle venait ici. Je n’avais aucune idée de comment je dérapais sur toute la ligne.

Je ne sais pas trop à quoi je m’attendais comme histoire, mais sûrement pas à cela. Mais en fin de compte, à quoi d’autre aurais-je pus m’attendre dans lequel nous vivions? J’appris alors que sa première visite au village avait été loin d’être aussi plaisante que celle-ci, malgré la blessure. Cela remontait à l’opération Amphibie, comme on l’avait appelé dans le temps, lorsque Kiri avait accosté sur les berges du pays du Feu. Son frère avait été capturé pendant l’un des raids et elle avait accourut au village à son secours. Même si elle avait été dans le camp ennemi, je ne pouvais que sympathiser avec elle puisque j’aurais sans doute agit de la même façon. C’est ici que Rin fit son entrée dans l’histoire en jouant le rôle du shinobi qui avait accueilli la jeune kunoichi aux remparts du village. La fin se termina abruptement et brutalement lorsqu’elle avoua avoir été chassé du village pour avoir tenté de mettre fin à la vie de son frère emprisonné pour le sortir de ses souffrances. Essayant du mieux que je pouvais de cacher ma surprise – je ne m’aurais jamais attendu à cela de sa part – je dois quand même avoir ouvert grand les yeux de surprise. Nous restâmes en silence plusieurs secondes, pendant lesquelles je laissai l’histoire s’ancrer dans mon esprit, avant que je ne le brise.

- Ce… ce n’est pas le genre d’histoire auquel je m’attendais, ça c’est sûr, commençai-je avec un sourire gêné, du coup je me sens un peu mal d’avoir demandé.

Pour être honnête, je me sentais mal d’avoir demandé et je ne savais pas trop comment réagir après avoir entendu cette histoire. C’était tellement intense comme histoire! Je comprenais qu’elle soit venu directement ici afin de lui porter secours, mais jamais je ne mettrais fin aux jours de ma famille, même pour les aider à ne plus souffrir. Enfin, je dis ça maintenant, mais si j’étais pris dans une situation semblable à Yuki-chan… Non, je préférerais mourir avec eux à essayer de s’enfuir que de tuer ma propre famille. L’atmosphère avait soudainement assombris, me donnant la chair de poule. Je n’avais toutefois aucune idée de quoi dire pour poursuivre la conversation, comme si cette histoire avait mis malgré elle un frein à notre conversation.

C’était toute une histoire qu’elle avait là, je ne pouvais pas dire le contraire. Faire tout ce chemin jusqu’à Konoha et pour quoi? Pour essayer de délivrer son frère de sa misère. Aussi bonne ces intentions étaient-elles, sa logique était tout aussi implacable dans un monde comme celui des shinobis, mais je ne pouvais simplement pas m’imaginer. Maintenant que je savais la réponse, je me rendis compte que c’était le genre de question auquel finalement on n’aurait pas nécessairement voulu avoir la réponse. Je le fis remarquai à la jeune fille, m’excusant par le fait même d’avoir amené ce genre de sujet alors que nous passions un si beau moment. J’ignorais si je devais prendre ça comme un bon signe, mais elle ne sembla pas s’en préoccuper en me signifiant de ne pas m’en faire. Mon instinct, en plus du regard qu’elle me lança en même temps, me suggérèrent que ce n’était pas totalement vrai sauf que je ne voulais pas aller encore plus loin que je ne l’avais déjà été. À mon grand étonnement, l’histoire n’était pas finie alors qu’elle se terminait sur une note encore plus tragique que s’il avait été question de fratricide. Malgré moi, mes traits s’allongèrent par la surprise.

Dans le temps de le dire, Yuki-chan avait le nez dans le frigo, à la recherche de ce qu’il nous fallait pour le restant de notre repas. C’était bien beau avoir fait le repas principal, mais ce n’était pas tout ce qu’il y avait! Je profitai de ce petit instant pour reprendre mes esprits et adopter un air naturel, ne voulant pas que mon choc se lise sur mon visage. Cette histoire devait déjà l’ébranlé assez, je ne voulais pas qu’elle ait à se soucié de ma réaction. Quand je la vis revenir vers moi avec des œufs dans les mains, je compris immédiatement ce qu’elle voulait faire : le dessert! Je vis aussi à son attitude enjoué qu’elle avait décidé de clore le sujet, bien que je voyais toujours ses yeux légèrement brillants. De toute façon, qu’y avait-il d’autre à dire. J’étais vraiment désolé pour elle, mais n’osait pas le lui dire pour ne pas retourner encore sur ce sujet. Elle me demanda alors ce que j’aimerais comme dessert pour aller avec tout ça et me pinçai le menton afin d’y réfléchir.

- Hum… quoi choisir? J’aime beaucoup trop les desserts, je n’arrive jamais à me décider à quoi faire lorsque vient le temps de le préparer, avouai-je.

Ce fut finalement la Kirijin qui arriva avec la solution miracle, me demandant de préparer un dessert typique du pays du Feu. Mon regard s’illumina; quelle bonne idée c’était! Il me fallut encore quelques autres secondes afin de trouver le bon dessert, temps qu’elle prit pour sortir divers outils et ingrédients que nous aurions sans doute besoin. Lorsque ce fut enfin fait, je levai l’index en l’air, tel celui qui vient d’avoir une idée de génie. Et puis, on ne va pas se le cacher, j’avais bel et bien eu une idée de génie.

- Je sais! Nous allons faire la tourtre que ma mère me faisait lorsque j’étais jeune!

Aussitôt mon choix fait, je devins fébrile et aussi enthousiaste que la jeune fille. Depuis mon aménagement en solitaire, j’avais à plusieurs reprises refaits les plats qui avaient bercés mon enfance, mais étant seul je n’avais jamais vraiment eu l’occasion de refaire cette tourtre. Voilà maintenant que cela allait être possible! Je regardai les ingrédients qu’elle avait sortis et remarquai qu’il ne manquait que le beurre. Je m’apprêtai à le lui demander lorsque je me retins à la dernière seconde. Elle avait l’air très impatiente à l’idée de préparer le dessert, je décidai alors de changer les rôles.

- On va tout de suite commencer avec la pâte puisqu’il faut la laisser reposer un peu. Commences par mélanger les ingrédients secs.

En même temps de lui dire les quantités nécessaires, je jetai un regard circulaire dans la cuisine, trouvant rapidement ce que je cherchais, soit le beurre. J’allai prestement le chercher avant de revenir vers Yuki-chan. Ensemble, nous sablâmes le mélange avec le beurre puis ajoutâmes l’eau. Alors que la jeune fille était en train de pétrir la pâte, j’eu comme une impression de déjà vu, me voyant moi-même à la place de Yuki-chan alors que j’étais encore qu’un gamin, encore plus jeune que Yuki-chan. C’est alors que les paroles que ma mère me prononça cette fois-là sortirent d’elles-mêmes de ma bouche.

- Fait attention de ne pas trop travailler ta pâte en la pétrissant.

Je sentis mon visage commencer à chauffer tandis que le rouge me montait au visage. Me détournant du travail de la jeune femme, je repris mes esprits. C’était vraiment gênant lorsqu’on réalisait qu’on sonnait comme sa propre mère. Tout de même, je pus m’empêcher un petit sourire à la pensée de ma mère. Mes pensées furent dérangées par la Samui, qui était enfin satisfaite de sa pâte. Je vins la rejoindre pour lui dire de la filmer et de la mettre au frais. Ceci fait, nous avions terminé la première partie, la majeure partie même. L’autre partie importante serait la cuisson.

- Maintenant que la pâte est au frigo, nous devons attendre au moins une demi-heure. Pendant ce temps, je propose qu’on vérifie si tu as les ingrédients pour la garniture.

Tout en disant cela, j’espérais que Rin ait de l'anko et des châtaignes. Ce n’est que maintenant que je réalisais qu’il s’agissait là de deux ingrédients pas nécessairement commun, que tout le monde aurait à leur maison. Raison de plus pour croiser les doigts pour en trouver.

Sous mes consignes, la jeune Kirijin mit rapidement et joyeusement les mains à la pâte, littéralement, et mélangea les ingrédients afin d’obtenir une belle pâte. Elle semblait particulièrement contente de pouvoir cuisiner une recette qui venait d’ici, comparativement à ce qu’elle faisait normalement. C’était vrai qu’il y avait quelque chose d’excitant lorsqu’on essayait une recette pour la première fois, encore plus si nous n’avions jamais vu ni gouté ladite recette. Je trouvai la kunoichi audacieuse de s’embarquer comme ça. Ensuite, toujours sous mes instructions, elle la travailla afin d’obtenir la consistance que nous désirions. Comme elle n’était pas familière avec cette recette, je la conseilla et lui donnai quelques indications supplémentaires lorsque vint le temps de sabler la pâte.

Finalement, elle atteint la consistance désirée et nous nous empressâmes de la mettre dans un film et la mettre au réfrigérateur. La pâte était faite, il nous fallait maintenant nous atteler à la deuxième partie de la tarte et ma partie préférée : la garniture. Préférant trouver les ingrédients à l’avance, je commençai à farfouiller dans leur cuisine afin de trouver ce que je cherchais. Un bref éclair de terreur me passa par l’esprit en pensant qu’ils n’avaient peut-être pas d’anko ici, mais heureusement pour moi je trouvai rapidement la conserve que je connaissais bien. Ressortant le pot et le brandissant triomphalement au-dessus de ma tête, je le déposais sur le comptoir alors que je retournais dans ma quête d’ingrédients. J’entendis la question de la kunoichi dans mon dos, mais je préférais la rejoindre pour bien lui expliquer. Les châtaignes furent beaucoup plus faciles à trouver et le sucre était déjà sorti. Satisfait d’avoir trouvé tous mes ingrédients, je pus enfin rejoindre la jeune femme avec mon verre et m’assis sur le tabouret à côté du sien afin de répondre à sa question.

- C’est bon, j’ai tout ce dont j’ai besoin; on doit simplement attendre pour la pâte. Ce qui suit sera assez simple : On met environ deux tiers de la pâte dans le moule – le tiers restant couvrira le tout – et on y verse la boîte d’anko ainsi que les châtaignes hachés. On pourrait même les faire griller, mais c’est comme tu veux. Ensuite on saupoudre un peu de sucre et hop! Ça va au four pour une vingtaine de minutes.

Tout en terminant mes explications, je frottai mes mains pour faire comme celui qui venait de terminé une grande tâche. Même si en repensant bien, il n’y avait pratiquement rien à faire. D’accord, il fallait couper les châtaignes, peut-être même les griller, et ouvrir une boîte d’haricots rouges, mais il ne s’agissait pas là de grande préparation. La demi-heure pendant laquelle nous attendîmes pour la pâte passa plus rapidement que je ne m’en rendis compte, ponctué seulement pas ma courte absence pour aller préchauffer le four. Me levant subitement lorsque je réalisai combien de temps cela faisait que nous discutions de nos expériences et de nos parcours différents – j’évitai soigneusement le sujet de la famille, ayant déjà eu un aperçu de ce à quoi cela ressemblait – je trouvai un moule qui faisait mon affaire, un peu moins d’une vingtaine de centimètres à vue d’œil. J’allai cherchai la pâte et en pris environ le deux tiers alors que je donnais le tiers restant à Yuki-chan qui l’aplatit pour pouvoir couvrir la tarte une fois la garniture placée. Je badigeonnai d’un peu de lait à la dernière minute pour dorer la croûte et nous la glissâmes sur une grille. Alors que nous refermions la porte du four je passai le nez au-dessus de notre casserole.

- Alors, comment va notre casserole?

M’adressant à la casserole comme si elle me répondrait, chose que je savais pertinemment impossible, j’espérais toutefois que l’experte en la matière pourrait nous indiquer si c’était bientôt prêt. Je devais avouer que je commençais me creuser un bon appétit et les effluves qui en sortaient étaient plus qu’alléchantes.