Entre deux dunes [Lina]

Le shûkai était tout juste derrière lui, il avait mis les bouchées doubles pour s'éloigner de l'alliance le soir même et le ventre plein. Mikami partait pour l'Est, mais était sorti par le Sud pour brouiller les pistes, au cas où. Et bien sûr à cette idée il savait que le jour venu il ferait un détour par le pays du vent, ne serait-ce que pour tremper le pied dans le sable et sentir le parfum de quelques oasis perdu dans la brise chaude. Sûrement passerait-il par le pays de la pluie après cette étape, histoire de faire un peu trempette après la grosse chaleur. Il avait entendu dire que quelques fleuves aux abords la plupart du temps sauvage traversaient Ame. Une balade en bateau, ça ça l'bottait.

Mais à l'ordre du jour : s'approcher du désert, trouver une dune assez grande pour s'y laisser glisser de haut en bas. Et ensuite se trouver un coin dégagé avec une vue imprenable sur ce no-man's-land qui caractérisait Kaze. Le tout en prenant garde de ne pas perdre de vue la lisière des lieux et des espaces verts. Même s'il savait qu'il n'aurait qu'à suivre la direction opposée du coucher du soleil pour repartir, il ne savait pas combien de temps il resterait à traverser ce désert et à quel point il résisterait à la faim et à la chaleur... l'occasion d'évaluer ses limites ?

D'abord il lui fallait un coin tranquille. Un endroit calme ou seul la nature jouerait de la voix en lui faisant parvenir sa perpétuelle mélodie, ici où le temps semblait être arrêté. Ici où la vie semblait avoir fini de consommer et consumer ces terres, là où la fin était arrivée à pas lent et sûr sans que personne n'ait pu ou tenter de s'y opposer, et où elle ne laissait plus que sécheresses et enchevêtrement de grains de sables tous aussi identiques que stériles. Là, enfin assis sur le sommet d'une dune qui lui convenait, il se livra aux rayons du soleil lui mordant la peau, profitant de cet endroit où l'Homme avait semblé ne faire que passer et trépasser, laissant leur folie se faire emporter par le vent qui rythmait le souffle de ce pays.

Alors que le dernier jour se levait sur l'alliance et que l'empire en voyait son premier, Mikami s'allongea dans le sable cuisant en respirant le calme et observant le silence seuls maîtres de ces lieux.

♫:

Cela fait quelques semaines maintenant que je travaille sur les projets confiés par Tsukiko et j'en suis encore à la phase d'analyse: récolter des échantillons de sable et de roche le long des tracés que le Bōrāsando pourrait emprunter! Il y a les tunnels Kawaguchi, oui! Mais je n'écarte aucune autre option d'autant plus que mon amie ne se trouve plus à Suna. Relier la capitale à Suna - et l'inverse! - est ma priorité. Mais si l'expérience est un succès j'aimerais développer plusieurs autres lignes de transport!

Si l'alliance avec Konoha est créée, les usines d'Ame pourraient bien nous fournir les ressources dont nous avons besoin. Et pour les transporter rapidement il sera sûrement nécessaire de créer un deuxième Bōrāsando. Rien n'est joué pour l'instant mais ça ne m'empêche pas de prendre un peu d'avance en reconnaissant le terrain! Il vaut mieux avoir des données dont on ne se servira jamais que ne pas en avoir lorsqu'on en aurait besoin. Logique!

- "Je s'appelle Chappie?"
- "Non, pas encore! Un peu de patience..."
- "Je s'appelle Chappie!"
- "Si tu penses être plus rapide ne te gêne surtout pas mon pote!" je souris en tapotant l'épaule métallique de mon robot. "Mais ça m'étonnerait! Ce petit bijou est imbattable!"

J'ai demandé au clan l'autorisation d'emprunter un module de prélèvement et de cartographie. Le top du top pour repérer les environs et prélever les échantillons dont j'ai besoin. Au final je n'ai qu'à attendre son retour pour récolter les informations dont j'ai besoin. Facile, pratique... mais pas spécialement rapide. Ça fait déjà un bon moment que Chappie et moi attendons que le module revienne prendre place sur mon véhicule.

En attendant je fume, je m'hydrate et je dessine des schémas sur le sable pour faire passer le temps. Jusqu'à ce que mon droïde attire mon attention en répétant plusieurs fois la seule phrase qu'il est capable de prononcer. Je me redresse et écrase ma clope dans le cendrier portable que j'ai pris soin d'emmener avant de prendre mes jumelles et observer la direction indiquée.

Je vois un jeune homme couché au sommet d'une dune. Qu'est-ce qu'il fait là, lui? Il bronze? Il a sûrement des ennuis et doit être en train de mourir à petit feu sous les morsures répétées du soleil. Un étranger en danger? Encore un imprudent qui a décidé de braver le désert? Dans tous les cas je me dois d'agir!

J'effectue quelques mudras et un jet-pack apparaît dans mon dos. Des sangles se déroulent sur mon buste pour le maintenir en place et deux poignées se glissent dans mes mains. J'active un bouton et l'appareil s'active et me soulève lentement du sol. J'ai juste le temps de demander à Chappie de rester sur place avant de foncer en direction de l'inconnu. Quelques instants plus tard j'atterris en douceur mais sans grande discrétion à ses côtés et me penche sur lui tandis que le jet pack se rétracte avant de disparaître.

- "Salut!" je l'observe de mes grands yeux verts et remarque qu'il n'est pas mort. Il semble même plutôt en forme. "Tu n'as pas l'air de quelqu'un qui a besoin d'aide en fait..."

Mouais, visiblement je l'ai un peu trop vite condamné... Il n'est pas brûlé par le soleil et ne semble pas non plus déshydraté ou trop faible pour bouger. Dans ce cas pourquoi est-il là? Je regarde autours de moi pour vérifier que personne ne s'apprête à me sauter dessus. On dirait que je ne suis pas non plus tombée dans une embuscade et qu'il n'est donc pas un appât ou quelque chose comme ça. Cool!

- "Donc... si tu n'es pas un étranger en train d'agoniser sur une dune, tu es quoi?" woups, précision du langage! "Enfin... qui, plutôt!?"

J'ai une main sur la gourde que j'ai détachée de mon harnais et l'autre sur le bouton d'activation de mon bouclier. Prête à me défendre en cas de besoin mais peu encline à me battre, j'attends qu'il m'explique ce qui a pu le mener à venir se balader dans le désert...

La somnolence le gagnait peu à peu alors que les rayons du soleil allant jusqu'à déformer la lumière bordant les dunes en était encore au stade où ils procuraient plus de bien être que d'inconfort. Petit à petit, leur lumière disparaissait dans l'entrebaîllement de ses paupières et sa tête se tourna légèrement d'un côté, offrant une de ses joues aux caresses du sable en surface emporté par le vent.
La partie consciente de son esprit laissant aussi retomber sa vigilance, son subconscient se mit à interférer avec ses pensées pour en occuper une place grandissante.

Mikami se voyait d'abord voguer seul sur un immense fleuve bordé d'arbres et de collines, la ballottement de son corps qui respirait se changeait en contrecoup d'une houle calme et paisible, les grains de sables s'infiltrant dans ces oreilles le bruit de la rame qui perçait la surface de l'eau, et enfin la chaleur accolée à son dos des briques de pierres contre lesquels il était adosser. Dernier passage traduisant la chute dans les paradoxes d'un monde onirique et les manifestations des méandres de la pensée.

Une troupe de shûkaijin obéissants et têtus lui faisaient face, déterminés à le ramener au village par la force de leurs mots rébarbatifs ou de leurs poings, visant son épuisement en passant par la contradiction de l'affrontement de shinobi pourtant censés être alliés. D'une classe sans égale et après un discours ni trop long ni trop court qui leur rappela quelques principes fondamentaux, il les étala tous à la fois un par un et dans le même temps. Une femme aux cheveux longs et bruns d'à peu près son âge s'approcha, enjamba ses ennemis et lui dit :

- Tu n'as pas l'air de quelqu'un qui a besoin d'aide en fait...

- Je vogue sur ce monde comme ce monde vogue sur nous...

Une escalade à coup de démarches individuelles qui finiraient dans une auto-submersion totale, comme une cigarette jetée dans la Tamise ou le Sahara. Dans son délire il lui parlait en continuant de ramer et de faire chanter la surface du cours d'eau, alors qu'elle se tenait face à lui sur son côté, le corps debout à moitié immergé et que tout derrière n'était que bois et prairies.

- Donc... si tu n'es pas un étranger en train d'agoniser sur une dune, tu es quoi ?

Agoniser sur une dune, s'était-il fait piéger lors de son combat ? Par une illusion !? Il lui sembla saigner du ventre, sa vis-à-vis semblait tenir l'arme qui lui avait planté le coup de grâce. Son esprit s'échauffa, la demoiselle esquissa le début d'un mouvement des deux bras. Alerté il se réveilla d'un bond pour apercevoir dans ce bref moment entre cauchemar et réalité une kunoichi penchée au-dessus de lui les mains sur les hanches, apparaissant dans ce décor qu'il croyait tout juste avoir quitté comme un premier grêlon qui frappe le coin de la figure.

* Oh putain *

Il roula sur le côté en ayant pris soin de lancer trois shuriken pour le couvrir et sortit un kunai en se relevant, se tenant un garde, notant l'apparition d'un point noir qui n'était pas là plus tôt, au loin dans le désert, comme si son rêve ne l'avait pas encore quitté.

♫:

Mouais, je ne m'attendais pas vraiment à ce type de réaction... Je l'avais envisagé, bien sûr. Le doigt sur le bouton d'activation de mon bouclier en témoigne plutôt bien. Mais mon optimisme m'avait poussé à croire qu'on pourrait simplement discuter et non recourir aux armes. Et comme bien souvent lorsqu'il s'agit des rapports humains, je me suis trompée. Je crois que je ne comprendrai jamais la grande majorité de mes congénères et leur prédilection pour la violence plutôt que les mots. Pas grave ça, je me suis fait une raison...

Les projectiles qu'il me décochent sont déviés par l'apparition d'un écran bleu qui épouse la forme de mon corps tandis que l'étranger roule sur le côté pour se mettre hors de portée. Par précaution je fais pareil et j'attends la suite. L'autre se relève armé d'un kunaï et je lui adresse un regard réprobateur. C'est pas vrai ça, il compte continuer en plus?

- "Hé ho, on se calme ok?" je lève les deux mains pour lui montrer que je ne suis pas armée. "Je ne veux pas me battre, je ne suis pas une voleuse et encore moins une tueuse! Je voulais juste m'assurer que tu allais bien..."

De ce côté-là je suis rassurée d'ailleurs puisqu'il semble visiblement capable de se battre. Quelle chance... Ma radio émet quelques bips et je la désigne à l'étranger pour lui montrer que ce n'est pas une arme. Bon pour un non-initié à la technologie ça doit paraître bizarre mais j'espère tout de même qu'il comprendra. J'active l'oreillette que je porte et la fréquence sur laquelle on cherche à me contacter.

- "J'écoute?"
- "Contrôle de routine, Lina! Tout va bien?"

Je marque une courte pause avant de répondre et le responsable des équipes techniques du Kenkyuujo semble s'inquiéter.

- "Lina?"
- "Oui oui, je suis là! Excuse-moi je suis en train de bidouiller ma moto en même temps que tu me parles..."
- "Pas de soucis! Donc? Quelque chose à signaler?"
- "Non tout va bien! Très bien même! Si ce n'est que je suis en train de cuir sous le soleil!"
- "Parfait! Kenkyuujo, terminé!"

J'appuie une nouvelle fois sur l'oreillette et écarte les bras. Je n'ai pas quitté du regard mon vis-à-vis et il ne m'a pas attaqué. Ce qui est plutôt bon signe! Je remarque alors un point noir qui glisse à quelques mètres au-dessus du sable et qui se rapproche de nous. Ou plutôt de mon véhicule qui n'est guère éloigné de notre position actuelle. Et si l'autre pensait que le module qui revient représente une menace? Adieu mes échantillons et mes relevés!

- "Bon... Ce truc qui s'approche de nous n'est pas armé, d'accord?" j'ai l'air stressée et... je le suis, bordel! "C'est un module d'exploration Saibogu! J'ai vraiment besoin qu'il reste entier! Si tu lui lances quelque chose dessus on va vraiment pas s'entendre toi et moi! Et ce serait vraiment con parce qu'on a aucune raison de se battre..."

Comment il a atterrit là, lui? Il a l'air complètement paumé le pauvre... Une cuite? Une maladie? Ce ne peut pas être simplement un réveil difficile, si? Peut-être qu'il s'est simplement perdu mais dans ce cas pourquoi n'est-il pas retourné vers les arbres qu'on peut voir un peu plus loin? Si ça se trouve il est peut-être même déficient. Peut-être qu'il a simplement besoin de repaires. Et vite parce que le module se rapproche et que je ne l'ai peut-être toujours pas convaincu de ne pas l'attaquer...

- "Moi c'est Lina!" je reprends l'étape qu'on a sautée, c'est à dire les présentations. "Saibogu Lina pour être exacte! Je suis genin de Suna et si je suis ici c'est uniquement pour récolter des données géologiques! Je t'ai vu effondré au sommet de cette dune et je suis venue voir si tu avais besoin d'aide, comme je te l'ai dis!"

Je baisse le regard sur son arme et fais un pas dans sa direction. Je vais même jusqu'à désactiver mon bouclier pour lui prouver que je n'ai vraiment pas de mauvaises intentions. Est-ce que ça suffira à le calmer?

- "Tu pourrais peut-être ranger cette arme et me dire qui tu es maintenant?" je lui adresse un regard entendu. "Et si tu compte me répondre en me lançant des trucs dessus ce serait sympa de t'abstenir! Je préfère encore le silence à la violence..."

Faites qu'il soit un brin civilisé tout de même. J'ai un peu autre chose à faire que de me battre là. La science n'attend pas...

Alors qu'il s'écarte, se préparant à l'éventualité d'être attaqué... elle s'écarte, se préparant à l'éventualité d'être attaquée. Ok, soit ya problème genre euh genjutsu avec effet miroir, soit ya problème.

- Hé ho, on se calme ok?

Ok, ya problème

Je ne veux pas me battre, je ne suis pas une voleuse et encore moins une tueuse! Je voulais juste m'assurer que tu allais bien...

Putain la bourde ! Pouvait-il au moins croire ce qu'elle disait ? À y regarder de plus près, elle n'était qu'un brin de fille qui mettait les mains bien en vue pour ne pas se faire attaquer, mais bon à propos des apparences... Il faillit tout de même relâcher sa garde seulement à travers l'emprise qu'il avait sur son kunai, mais les bips le maintinrent en alerte car un rayon laser pourrait très bien sortir de son ventre. Initié à la technologie... mais à un stade encore fantasque (stade à conserver même en évoluant bien sûr).
Une voix comme lointaine résonna depuis l'oreille de la jeune fille. Mon dieu encore un genjut... ! Elle parlait seule à sa propre technique ?

* Bon c'est bon arrête la paranoïa avec les illusions mon petit Mika', c'est moi qui m'fais des films là... *

Elle prétexta bidouiller sa moto alors que... sa quoi ? * Eh elle se foutrait pas un peu de ma gueule là ?! Personne me bidouille ! * Ok j'arrête, j'ai mon quota de vanne sur la rencontre du deuxième type et demi. ... alors qu'il n'en était vraisemblablement rien. Mikami pencha la tête sur le côté, déchiffrant cette envie de se soustraire à son supérieur. Alors que ce dernier cherchait à se rassurer sur son état, le jeune homme cru apercevoir ce regard incertain qu'ont la plupart des gens qui mentent au téléphone pour une quelconque raison. Ce à quoi il répondit par un sourire, cherchant à induire un début de complicité pour rattraper sa réaction excessive à sa rencontre.

- Non tout va bien ! Très bien même ! Si ce n'est que je suis en train de cuir sous le soleil !

- Parfait ! Kenkyuujo, terminé !

Est-ce qu'elle avait dit « Je suis en train de cuire sous le soleil » et l'autre avait répondu « parfait » ? Nan, ça devait être pour le tout va bien. Un épisode bref dont on pouvait retenir l'apaisement qu'il joua sur la situation, et dont Mikami retint autre chose à force d'avoir du aiguiser son ouïe - veuillez l'en excuser - d'une attention instinctive * Kenkyuujo *

- Bon... Ce truc qui s'approche de nous n'est pas armé, d'accord?

Elle n'avait pas l'air d'être détendue, il avait du rêver leur petit échange alors, encore

C'est un module d'exploration Saibogu! J'ai vraiment besoin qu'il reste entier! Si tu lui lances quelque chose dessus on va vraiment pas s'entendre toi et moi! Et ce serait vraiment con parce qu'on a aucune raison de se battre...

Ses bras étaient retournés le long de son corps mais il avait toujours le kunai à la main. Cependant à l'entente de ces quelques mots et à la vue de son expression quelque peu désarmée, il écarta les bras et laissa tomber le métal dans le sable où il s'enfonça dans un glissement sourd.

- Moi c'est Lina! Saibogu Lina pour être exacte! Je suis genin de Suna et si je suis ici c'est uniquement pour récolter des données géologiques! Je t'ai vu effondré au sommet de cette dune et je suis venue voir si tu avais besoin d'aide, comme je te l'ai dis!

Putain, la grosse bourde !

Tu pourrais peut-être ranger cette arme et me dire qui tu es maintenant?

Merde, il se pencha pour ramasser le kunai laissé dans le sable, ainsi que ses shuriken tant qu'à faire, pour les ranger. « Et si tu compte me répondre en me lançant des trucs dessus ce serait sympa de t'abstenir! Je préfère encore le silence à la violence... » * Aaargh mais ramasse-les toi-même à la fin j'en ai maaarre ! * faillit-il s'emporter. Mais comme elle avait dit préférer le silene à la violence et qu'il voulait lui donner raison... Ouais, réveil difficile. Enfin en se relevant, par-dessus le son mécanique et flottant de ce qu'elle avait annoncé comme un module d'exploration, sonna finalement la voix du shûkaijin :

- Mikami, sans pouvoir être plus exact, Saibogu-chan. Mais je suis membre de l'alliance qui se trouve au Nord. Enfin en ce moment je pars en voyage, il y a un pays en particulier dans lequel je dois me rendre. Et là je faisais une halte dans le désert pour voir à quoi ça ressemblait lors d'un moment de calme, et m'y détendre

si tu veux tout savoir...

Rien de mieux que de livrer la quasi-totalité des informations pour prouver sa bonne foi et partir sur un bon pied, surtout à une indigène. Un silence faillit s'instaurer en laissant place au crissement qui semblait encore fluide de l'arrivée imminente de son module. Mikami pointa alors son index à quelques centimètres de son nez en direction de l'engin, les yeux démonstrativement plissés :

- Et ça tu m'as dit, c'est... ??

Présentations, done. Rien à ajouter ? On passe aux détails extra-ordinaires !

♫:

Un membre du Shûkai? Qui cherche à se détendre dans le désert? Cet océan de sable qui caractérise ma nation est certes fascinant mais de là à y prendre du bon temps... Mais pourquoi pas après tout? Tout le monde n'est pas si sensible au soleil - merci à mes chers parents pour m'avoir faite rousse! - et certains recherchent même la compagnie des grains de sable à ceux des autre. Les Akuzu aiment s'isoler dans le désert pour se ressourcer par exemple...

*Lui, ce n'est pas un Akuzu!* que je me dis. *Mais il est peut-être simplement bizarre...*

Je suis un brin ennuyée parce que je me rappelle plus vraiment de la marche à suivre en cas de rencontre avec un étranger. Nous ne sommes pas en guerre contre le Shûkai, ça j'en suis sûre! Mais c'est sûrement un shinobi vu la façon dont il m'a décoché ses shurikens et celle dont il tenait son kunaï. Autrement dit un militaire... Et si je ne suis pas une experte des relations internationales je suis en revanche pratiquement certaine que pénétrer sur le territoire d'une autre nation avec des armes n'est pas très bien vu...

Pourtant il ne porte pas de bandeau ou signe distinctif qui pourrait me confirmer son appartenance à une armée étrangère. Peut-être un déserteur? Pfiouuuu, je dois faire quoi moi? Le laisser tranquille et espérer qu'il ne fasse pas de conneries ou tenter de l'arrêter pour que les autorités lui demandent des comptes? Peut-être que c'est un espion après tout...

- "Te détendre, hein?" je répète le terme qu'il a utilisé pour marquer mon scepticisme. "Si tu le dis..."

Ouais, je vais jouer le jeu! Je n'ai aucune raison de m'en méfier pour l'instant à part le fait qu'il soit un brin grognon au réveil. Mettons ça sur le compte de la surprise! Voilà qu'il me désigne le module qui se rapproche en me demandant à nouveau ce que c'est.

- "Ça, Mikami, c'est un module de cartographie et de prélèvement géologique à circuits asservis! M.C.P.G.C.A si tu préfères! En gros il utilise l'énergie solaire pour s'alimenter en énergie et des répulseurs pour flotter au dessus du sol. Il se repère grâce à une balise placée sur un véhicule et balaye la zone alentours en volant en cercles de plus en plus larges. Ce faisant il relève la topographie du terrain et s'arrête pour récolter des roches ou du sable selon des critères préalablement programmés dans sa matrice de contrôle." je m'arrête avant d'aller plus loin. J'oublie parfois que les profanes sont vite dépassés par des explications pourtant simples... "Pour vulgariser ça fait des cartes, ça vole et ça rapporte ce qu'on lui dit de rapporter!"

Voilà, ça il comprendra! Je suis partagée entre mon désir de papoter avec lui et la méfiance que je me force à ressentir à son égard. Si ça ne tenait qu'à moi on s'essaierait et on papoterait de sa nation et de la mienne, de nos cultures respectives. Mais comme je ne sais pas s'il représente un danger ou pas je garde une certaine distance. Logique mais désagréable!

Je tire ma gourde et en prends une rasade tandis que le module nous dépasse et file en direction de mon véhicule. Je devrais être là-bas pour vérifier les premières analyses. Pas ici à... à faire quoi exactement? Le surveiller? Je vais devoir faire ça combien de temps hein?

*Ben... tant qu'il est sur le territoire de Kaze en toute logique... Quelle merde!*

Et là, paf, illumination! Il m'a dit être en voyage et vouloir rejoindre une autre nation. Si elle n'est pas trop loin je peux peut-être lui faire gagner un peu de temps. Et à moi aussi par la même occasion! Le tout en écartant un potentiel danger pour mon pays. D'une pierre trois coups en somme... C'est tout juste si une ampoule n'apparaît au-dessus de ma tête! Ouais, j'ai souvent des éclairs de génie! Non, n'en doutez pas!

- "Tu te diriges vers quelle nation précisément?" il n'a pas précisé tout à l'heure. Volontairement ou non? "Comme je te l'ai dit j'ai une moto un peu plus loin! Et elle est plutôt rapide dans son genre! Alors si tu veux que je te pousse un bout..."

Je marque une pause pour m'allumer une cigarette avant de hausser les épaules:

- "Et puis comme ça tu pourras m'expliquer comment tu arrives à te détendre dans un lieu pareil!" que j'ajoute avec un petit sourire en coin. "Parce que s'il y a une recette pour ça, je suis preneuse..."

Son expression perplexe le contraria. Il était observateur et son faciès trahissant quelques doutes et le début d'un conflit intérieur le laissa songeur à son tour. Une méfiance ? Drôle de revirement après ces trois ou quatre rebondissements survenus en si peu de temps. Pas si illogique ? Difficile à dire, il y avait une toute autre profondeur dans le regard qu'elle avait dès lors par rapport à leur rencontre animée.
Puis elle lui parla de son module. Lui qui comprenait les mots et avait une mauvaise mémoire courte, cette brochette de sigles lui traversa le cerveau comme une balle de revolver qui rentrait par une oreille afin de sortir par l'autre. En revanche, devant toutes ces nouveautés qu'il n'avait pas l'habitude de côtoyer, ses yeux se mirent à briller comme à ceux d'un gamin. J'appelle ça l'effet par d'attraction, on découvre et on veut toucher à tout, sans prendre le temps de se poser entre deux pour réfléchir à ce qui serait vraiment bon.

- Pour vulgariser c'est comme un chien domestique quoi... tu restes assis le menton dans la main et t'attends qu'on te ramène tout sur un plateau.

Aaah la facilité, il restait songeur face à cette découverte. Pourtant il avait déjà entendu parler des Saibogu et de leurs « miracles », mais ne s'était jamais encore vraiment penché sur le sujet, considérant ça comme une capacité spéciale mineure, comme toutes les autres bien qu'elle repose sur des bases différentes. À ce jour et ayant sous les yeux un bond en avant comme il n'en avait jamais vu ni entendu parlé. Beaucoup de questions germaient dans son esprit, il en discuterait bien avec une des principale concernée... Mais pour ça, elle avait d'abord besoin de connaître la recette de la détente, ça tombait bien qu'elle le lui demande !

- Je pourrais t'en donner les simples secrets facilement, mais je m'égare souvent dans mes explications souvent alambiquées, comme on pourrait dire. Il me faudrait... quelque chose pour te l'illustrer, une source d'inspiration.

Il lorgna sur l'engin flottant.

Ton module de cartographie, il aurait pas repéré un oasis dans les environs ?

Ou comment demander à un bandeau sunajin de pénétrer un peu plus dans ses terres.

- J'aime profiter de mes voyages, je ne veux pas me précipiter et voir le paysage défiler sans que je ne puisse le saisir. Mais ta moto pourrait nous conduire à l'ombre d'un palmier au bord de l'eau, ça ne me dérangerait pas d'y arriver plus vite si c'est pour ne pas s'attarder sous la chaleur et entre ses innombrables grains de sable.

Même si ce n'était pas ça qui allait l'habituer à ce rude climat, mais ce n'était pas à l'ordre du jour.

- Je pourrais commencer à t'expliquer comment une simple dune peut te vendre du rêve sur la route. Du moins si cette machine ne fait pas trop de vacarme...

♫:

Mouais... Il n'a pas répondu à ma question! Pourquoi est-ce qu'il ne veut pas m'indiquer sa destination? Et puis maintenant il veut se rendre dans une oasis. C'est sûr, elles sont belles nos oasis! Mais elles sont aussi vitales et stratégiques... On doit garder leurs positions aussi secrètes que possible si je m'en réfère à ce que j'ai appris à l'académie shinobi. Si Mikami agonisait et que je n'avais plus d'eau avec moi je n'aurais pas vraiment hésité avant de le mener dans l'un de ces refuges de verdure. Mais... ce n'est pas le cas, non?

*Simple touriste ou éclaireur?* bah ouais, il peut très bien venir repérer le terrain! *Pourquoi est-ce que j'ai pas un super pouvoir de la mort qui tue pour connaître instantanément la vérité? Ballot!*

Bon il dit vouloir trouver l'inspiration pour m'expliquer comment il se détend. Sur le principe je m'en tape un peu, c'était une simple remarque destinée à détendre l'ambiance. J'ai déjà entendu de meilleurs arguments que ça. J'accorde volontiers - sûrement trop! - ma confiance aux gens mais ça ne fait pas de moi une naïve pour autant. Il répond à mes questions par d'autres questions et se montre plus qu'évasif sur certains sujets. Sans parler de la façon dont s'est déroulée notre prise de contact...

- "Mouais mais non..." allez, trouve une explication plausible ma grande. "L'oasis la plus proche est à plusieurs heures de route d'ici et ça nous mènera trop loin à l'intérieur de Kaze. En soi ça ne me dérange pas de t'y emmener hein? Mais je ne pourrais pas te raccompagner ensuite aux frontières parce que je dois absolument rentrer à Suna! T'aimerais pas connaître les chances de survie des étrangers dans ce désert quand ils sont livrés à eux-mêmes, crois-moi!"

Hé ouais, je ne mens pas en plus! Bon il doit bien y avoir une oasis ou deux pas trop éloignées de nous, ok! Mais pour le reste... Je dois ramener le module avant la nuit et si je peux accompagner Mikami un bout le long de la frontière je ne peux pas me permettre de lui faire visiter la région. J'ai déjà assez perdu de temps comme ça! Du coup c'est parfait: je prétexte que je me soucis de lui alors qu'au final je préserve des secrets militaires et du temps pour m'occuper de mes prototypes. Le Bōrāsando ne va pas se construire tout seul...

- "Et puis tu sais les oasis c'est surfait!" je tente d'adopter un ton convainquant et marque une pause pour tirer une bouffée sur ma clope. "Quand on y pense ce n'est qu'une sorte de gros étang avec un peu de verdure et de l'ombre. Mais t'y trouves pas mal de bestioles pas vraiment sympathiques aussi: scorpions, scolopendres, araignées des sables... Franchement ça vaut pas le peine de crever d'une morsure juste pour faire trempette quelques minutes! Tu sais je suis en train de te sauver la vie, là!"

Paf, coup de grâce. On va pas tourner longtemps autours de l'hypothénus non plus! Je ne vais pas non plus argumenter pendant quatre heures hein? Je commence à cuir au soleil et ma peau ne va pas tarder à devenir toute rouge si je ne trouve pas rapidement de l'ombre. Et puis j'ai envie de voir si la balade du module a été prolifique.

- "Tu m'accordes deux secondes?" j'active un bouton et mon jet pack se remet en place avant de me soulever dans les airs. "Je reviens tout de suite! Bouges pas!"

Je reviens vers ma moto et atterris directement sur son siège. Je vérifie rapidement que le module est bien accroché à l'arrière du véhicule avant de mettre les gaz pour rejoindre l'étranger. Je m'arrête devant lui et relève mes lunettes de protection. J'ai trop la classe en moto! Je le sais et je ne peux pas m'empêcher de me la jouer. Je descends et active un sceau placé sur le côté de mon bébé. Elle adopte une configuration side car presque immédiatement.

- "Voila, un siège de plus!" j'ouvre ensuite l'un des compartiments sur le flanc opposé de la moto. "J'ai à boire et quelques fruits à manger si jamais ça te tente!"

C'est peut-être un ennemi mais ça ne m'empêche pas de me montrer courtoise, nan? Et puis bon, j'ai quand même une idée derrière la tête: le temps qu'il passera à manger, c'est du temps que je gagne pour analyser les données récoltées par le module. Je me dirige vers ce dernier et active son écran. Je me mets ensuite à pianoter sur les divers boutons tout en tentant de ne pas oublier non plus la présence de Mikami.

- "Ça ne te dérange pas si je travaille un peu pendant que tu... heu... te détends?" je ne lui laisse pas trop le choix en même temps, j'avoue. "En fait... Tu ne m'as pas dit où tu te rendais je crois? C'est quoi ta destination alors?"

Ouais, j'ai la tête dure! Je lève un instant les yeux pour le dévisager et lui adresser un sourire en coin avant de me replonger dans mes données. Chappie nous rejoint finalement - le pauvre, il n'a pas du vraiment comprendre pourquoi je suis partie en trombe - et se plante à côté de moi, sa caméra pivotant de Mikami à ma propre personne.

- "Ha! Ça c'est Chappie! Il est un peu bizarre mais n'y fais pas attention, on s'habitue très vite!" voila, présentations faites!
- "Je s'appelle Chappie!"

Et voilà qu'il tend l'un de ces gros bras mécaniques pour serrer la main du jeune homme. Ouais, lui aussi il est poli!

Plusieurs kilomètres avant la prochaine oasis, ça ne le décourageait pas vraiment. Quant au retour seul, il n'avait pas trop d'avis là-dessus. Pas vraiment inquiété par le fait de ne pas pouvoir se repérer, de se désaltérer, mais les mises en gardes de Lina le firent passer outre cette optique. Quoi qu'il aurait bien échangé sur les conditions de survie dans le désert, qu'est-ce qui faisait que cette population avait su s'y adapter, s'y retrouver et y survivre comme si ç'avait été les simples couloirs de leur maison. Ça l'était, en quelques sortes, et constituait le plus global de la réponse. Mais Mikami se serait vu ravi d'en apprendre plus sur ces pratiques qui lui auraient ouvert toute une zone géographique prête à être explorée par sa propre autonomie. Mais bon, si elle disait que pour elle, ce n'était pas possible, alors ce serait sûrement pour une autre fois...

En revanche toute la crédulité qu'il portait à ses arguments s'envola quand elle lui pondit son couplet sur les légendes tournant autour des oasis, la minimalité de la part de vérité et le jeu qu'elle effectuait avec sa cigarette et ses sourcils froncées pour appuyer son discours sûrement improvisé et qui semblait avoir été maintes fois répété. Lui, ce qu'il voulait, c'était voir de ses propres yeux les reflets de l'eau sous les feuilles de palmier, respirer l'odeur saline dans une bouffée d'air frais et constater l'activité de ses petites bêtes dangereuses, tournant précautionneusement autour d'eux pour chercher une faille à travers laquelle se glisser. Rien à foutre de ce que l'on pouvait en dire en bien ou en mal, il voulait se greffer ses propres souvenirs.

- ... Tu sais, je suis en train de te sauver la vie là !

* Ok d'ici la fin de la journée on s'y sera baignés chérie. *

Paf, esquive, tape sur l'épaule. Au moins y tremper les pieds quoi, s'asseoir au bord. De surcroît Mikami sentait le poids du soleil sur la Saibogu à travers son regard dont émergeait une pointe de désarmement, la détournant de ces pensées pour la retourner sur son labeur. D'un geste instinctif et imitatif, il passa ses doigts entre son front et les racines de ses cheveux, sondant la chaleur qui s'abattait sur lui. Sueur, chaleur, manifestation du flux sanguin dans les tempes, fallait dire qu'il en prenait aussi pour son grade.
Et encore une fois il crut être au milieu d'un rêve, d'une hallucination tropicale ou d'un mirage sur-développé quand il la vit s'envoler en empoignant deux bras mécaniques longeant ses coudes et avant-bras. Son esprit entra en ébullition en entrainant tout son corps, ses yeux se mirent à briller, quelques larmes à perler.

* Moi aussi, je veux ! *

Grave erreur. Il resta immobile, rivé sur ce vol majestueux tout le long de son absence. Même quand elle était à terre, il la voyait encore prendre son envol et fuser comme un oiseau vers un point prédéfini et même dévier réellement sa trajectoire en court de route plutôt que vainement en amorçant une vautre sans pareille mesure. Même quand elle dérapa devant lui, il resta immobile. Le sable vint le percuter de toute sa face, glissa sur ses vêtements, s'envolait devant ses prunelles qui brillaient encore. Le jeune homme avait cru la voir arriver à nouveau en jet-pack, sans en démordre. Quand elle retira son casque et fit balancer ses cheveux dans le vent, son délire atteint l'apothéose.

Puis il remarqua les lunettes de protection, perdit le casque de vue. La moto était aussi apparue. Pouf, un side-car. À l'aise. * Non moi ce que je veux c'est... oh des fruits ! * Synonymes de fraîcheur, ils le faisaient déjà saliver et le jeune homme se permit d'en prendre un en remerciant gracieusement sa nouvelle camarade. Ouais, elle lui avait offert à manger, c'était une camarade à présent - accessoirement elle lui avait aussi vendu du rêve avec son jet-pack et son calme olympien et avenant malgré son agressivité. Il secoua horizontalement pour affirmer que le fait qu'elle s'enquiert de ses résultats ne le dérangerait pas. En temps normal il se serait intéressé à ce sur quoi elle travaillait et aurait sûrement penché la tête par-dessus son épaule, mais cette fois il croqua dans le fruit en s'imprégnant de l'environnement.

- En fait... Tu ne m'as pas dit où tu te rendais je crois? C'est quoi ta destination alors?

- Kaminari,

dit-il en mâchant la chaire qui lui emplissait la bouche.

Je vais essayer de retrouver mon village natal, c'est dans un des deux massifs montagneux normalement.

Avant qu'il ne lui retourne innocemment la question, une masse de ferraille s'approcha d'eux. Après le module de cartographie MACDCFDPGPGRADDP et le jet-pack, cette apparition aux formes humanoïdes ne le fit même pas broncher. Vous savez comment on dit hein, la troisième fois ça glisse. Pourtant il s'apprêtait à lui demander s'il était possible d'utiliser son appendice mécanique pour décrire des courbes dans le ciel.

- Ha! Ça c'est Chappie! Il est un peu bizarre mais n'y fais pas attention, on s'habitue très vite!

- Je s'appelle Chappie!

- Salut Chappie !

Il lui serra la main,

Moi c'est Mikami.

- Je s'appelle Chappie !

Ils se serraient encore la main, leur mouvement se faisant de plus en plus ample à chaque réplique, peut-être essayant de voir qui casserait en premier le bras de l'autre.

- Moi c'est Mikami.

- Je s'appelle Chappie !

- Moi c'est Mikami.

- Je s'appelle Chappie !

- Moi c'est Mi... aargh écoute Chappie !

Rencontre du troisième type, mais pour le coup il n'était pas sûr d'être arrivé le second.

J'ai besoin d'un de tes conseils : je voudrais obtenir de l'agréable demoiselle qui nous tient compagnie l'autorisation d'utiliser sa machine pour flotter dans le ciel. Toi qui doit bien la connaître, tu saurais ce qu'il lui ferait plaisir ? Que ça puisse être comme euh... donnant-donnant ?

- Je s'appelle Chappie !

- ... ...hum comment tu t'appelles déjà ?

- Je s'appelle Chappie !

- Qu'est-ce que c'est bon quand tu réponds correctement aux questions...

♫:

J'ai vu beaucoup de situations étranges lorsque mes semblables ont rencontré pour la première fois Chappie. La plupart d'entre eux le regardent avec méfiance ou scepticisme et la grande majorité s'en lassent très vite. Perdre du temps avec un robot qui ne sait que répéter encore et toujours la même phrase? Même le plus persévérant de mes confrères n'a pas tenu plus de deux semaines...

Mais c'est la première fois que je vois quelqu'un lui taper la causette et faire semblant de comprendre ce qu'il lui répond. Leur poignée de main est amusante tout comme l'est la situation. Je suis si étonnée que je lève les yeux de mon écran pour observer la scène tandis qu'un sourire sincère s'installe sur mes lèvres. J'apprécie le comportement de Mikami et je crois que Chappie aussi. Les subtiles variations dans le ton de sa voix synthétique me confortent dans cette opinion!

Mon sourire s'accentue lorsqu'il utilise mon robot pour me demander indirectement l'autorisation d'essayer mon jet pack. Je suis peut-être une brillante ingénieure mais je suis avant tout une femme. Et je suis sensible à la façon dont le jeune homme amène la question, au mot "charmant" qu'il utilise pour me qualifier. C'est malin, ça, de passer par l'intermédiaire de Chappie! Mais ce n'est pas non plus suffisant pour que l'amusement efface la méfiance. Il a répondu à ma question, c'est vrai: il se rend à Kaminari! Mais de là à le laisser essayer une de mes inventions... Et s'il la casse? Horreur!

- "Chappie?" je tourne finalement le regard vers mon robot sans me départir de mon sourire. "Tu pourrais peut-être expliquer à ton nouveau copain que je ne suis pas du genre à prêter mes affaires au premier venu?"
- "Je s'appelle Chappie? Je s'appelle Chappie!"

Je fronce les sourcils! C'est plutôt rare qu'il prenne la défense d'un inconnu et encore plus lorsqu'il vient de le rencontrer. On dirait bien que Mikami lui a tapé dans l'oeil... Et ben ça alors!

- "Tu dis ça parce qu'il te parle, c'est tout!"
- "Je s'appelle Chappie!"
- "Ha ouais? Et tu crois que ça change quelque chose peut-être?"
- "Je s'appelle Chappie?"
- "Ho arrête, ça n'a rien à voir! Et tu le sais très bien!"
- "Je s'appelle Chappie!"
- "Peut-être mais c'est pas toi qui réparera les dégâts s'il se foire!"
- "Je s'appelle Chappie!"

Je soupire et reporte mon attention sur Mikami. Chappie n'a peut être pas tort finalement! Je suis la première à vanter les mérites du partage entre les êtres humains alors pourquoi est-ce que je refuse? Qu'est-ce que je risque au final si ce n'est un jet pack à réparer? Je suis possessive et presque maniaque lorsqu'il s'agit de mon matériel, c'est pas nouveau! Mais je peux offrir un peu de plaisir au jeune homme et je ne vois pas très bien ce qui me pousse à refuser sinon la crainte de voir quelques heures de travail réduites à néant! En relativisant on se rend vite compte que ce n'est pas grand chose...

- "C'est bon t'a gagné..." je soupire pour la forme. "Viens par ici Mikami!"

Je retire mon jet pack et le glisse au dos du jeune homme avant de l'attacher solidement grâce aux sangles. J'ai un petit pincement au coeur en pensant à la possible destruction de mon matériel mais ma décision est prise et je vais m'y tenir! Je m'assure que Mikami est harnaché correctement puis passe aux explications:

- "Bon! Tu vas voir c'est plutôt simple à diriger! La manette de gauche commande la propulsion et régule sa puissance! Tu pousses vers le haut, tu montes! Vers le bas, tu descends!" facile non? "Le joystick de gauche gère l'inclinaison des propulseurs et te permet de te diriger! Vas-y doucement, il est plutôt sensible!"

Je vérifie rapidement les derniers réglages pour m'assurer que tout est en ordre et appose un sceau sur l'appareil avant de reculer de quelques pas. Je désigne ensuite les deux bracelets qui ceinturent ses poignets:

- "Ils vont pomper ton chakra pour alimenter le jet pack! C'est désagréable la première fois et ça surprend! Quoi qu'il arrive essaie de stabiliser ton flux d'énergie: si tu libères trop de chakra tu risques de t'envoyer littéralement en l'air! Trop peu et tu t'écraseras!"

Je hausse les épaules! Il y a du sable partout et une éventuelle chute serait facilement amortie. Mais on ne sait jamais après tout! Il y a bien des gens qui arrivent à se tuer en descendant des escaliers...

- "Maintenant la partie moins rigolote: j'ai placé un sceau de neutralisation sur le jet pack!" ouais, je suis ouverte d'esprit mais pas stupide. "Juste au cas où tu serais tenté de rejoindre Kaminari un peu plus tôt que prévu en volant par exemple. N'y vois rien de personnel hein? Mais on est jamais trop prudente... Reste à portée de vue d'accord?"

S'il fait mine de s'échapper je n'hésiterai pas à le ramener brutalement sur terre. Et s'il croit qu'il peut être plus rapide que moi en plein désert et avec les véhicules que j'ai à disposition il risque de rapidement déchanter. Je prête exceptionnellement mon matériel à un quasi-inconnu par pure courtoisie ou presque. De là à prendre le risque de le voir s'envoler avec...

- "Voila! Dès que tu es prêt tu n'as plus qu'à pousser le levier d'envol et mon génie fera le reste!"

Je recule encore un peu et me tourne vers Chappie. Lui et ses idées...

- "Je te parie que ça va prendre moins d'une minute avant qu'il bouffe du sable!"
- "Je s'appelle Chappie!"

Je tape dans sa grosse main métallique: pari tenu, donc! Et pour une fois j'espère que je me trompe...

Mikami suivit leur échange comme l'on suit un match de tennis, ses yeux fusant d'un locuteur à l'autre alors que son nez flirtait avec la chair du fruit à l'air libre encore censée être à portée de bouche. Son cœur bondissait à chacune de leur réponse et chutait à la suivante, sa bouche s’entrouvrait dans un sourire et une inspiration, se refermait sous une perceptible déception et un soupire attristé. Le père noël va passer, le père noël n'est pas passé... Le père noël est passé ! Le père noël n'est pas passé... La mère noël se déshabille... ! l'ordinateur se met à ramer... Un drôle de monsieur s'apprête à faire son entrée... ! On constate amèrement que le père noël n'existe pas... « Peut-être, mais c'est toi qui réparera les dégâts s'il se foire ! » Le père noël existe ! Et il est soutenu par les plus grandes industries Saibogu pendant que cette tendre femme délaissée s’attelle à illustrer l'emprise des détournements de bon sentiments sur des familles qui toute l'année n'attendent que de se rassembler.

Et puis, finalement, comme un gamin qui s'apprête à déballer avec joie et acharnement l'attention dont l'a couvert sa très chère mère :

Clique et continue vite de lire !

- C'est bon t'a gagné... Viens par ici Mikami!

Vous avez reçu le Jet-Pack ® ! Vous pouvez utiliser la manette de gauche pour vous propulser ou vous stabiliser, le joystick de gauche pour vous diriger * Et la main droite c'est pour se ?! * Vos énergies vitale et spirituelle seront décomptées ! Attention aux plafonds et aux dunes trop élevées !

Le dit premier venu se vit chagriné quand elle émit l'hypothèse qu'il s'en aille avec, bien que dit comme ça, l'idée se fut séduisante. Mais passons sur les avantages et les inconvénients. En bonne âme d'enfant, il empoigna les manettes des étoiles pleins les yeux. Profitant de cet instant dans les escaliers avant le septième ciel, il enregistrait à vie ce jour où une inconnue lui permit de voler librement dans le ciel, elle qui lui accordait sa confiance et un bijou alors qu'il venait juste de se rencontrer et ce peu importe les intonations insistantes de son camarade mécanique à qui, bien sûr aussi, il en devait une. Mais voulant imprimer ce souvenir dans sa mémoire faillie, associant sa redevance à vie envers la Saibogu et son ami mono-triverbes, ses caresses sur les joystick, son regard pétillant et son sourire satisfait lui donnaient une allure bien moins enfantine.

* Bon, reste à portée de vue. Régale-toi, mais reste à portée de vue. ... Newston newston, prêt au décollage ? Paré au largage de la terre derrière soi et à la découvertes de nouvelles dimensions... FE...*

- Je te parie que ça va prendre moins d'une minute avant qu'il bouffe du sable!

* Ah ouais, tu vas v...*

Il vit. Il vit que tel qu'il était parti, il lui aurait même pas fallut une seconde. Si le ô combien sournois pari de Lina n'était pas arrivé à ses oreilles, il aurait mis les gaz alors que l'inclinaison était au maximum vers l'arrière. Vous voulez plus de détails ? Il aurait fait un demi salto à reculons pour planter directement sa tête dans le sable, c'est ce qu'il faillit se passer. Alors il reprit, adressant un vicieux regard par-dessus l'épaule envers ses deux vis-à-vis. Parés ? Plein g...

Un nuage de poussière vertical prit place en un vif sifflement, Mikami s'élevait tout en hauteur, disparaissait dans le ciel en laissant traîner derrière lui les étoiles de quelques larmes de joie, de peur ou de célérité. Et malgré sa latitude et sa longitude qui n'avaient pas différé de celle de la Saibogu, il n'était plus à portée de vue...

* * *

Un groupe d'oiseau migrant insouciamment, un albatros respirant l'air frais avant son atterrissage cascade, une cigogne transportant un futur Jean-Louis Tsukiharo, né le lendemain. Un missile chevelu et au cri indescriptible perça leur formation, forçant l'albatros à la chute routinière et reniée, poussa une famille à rendre le mobilier et les vêtements pour bébés. Un détail important qui n'a pas été spécifié : est-ce que la sangle du jet-pack fait le tour des hanches ou est-ce qu'elle passe aussi entre les jambes ?
Dans tous les cas son esprit fut apaisé - après qu'il l'ait retrouvé - et atteint l'apogée de son ascension suite au relâchement de la manette. Le pays du vent, le pays de la terre et les quelques contrées qui les séparaient s'étendaient sous ses pieds, même les bois du pays du feu étaient visibles et dans le calme rafraîchissant qu'impose une telle hauteur, il aurait cru entendre couler les cours d'eau du pays des rivières, rire et chanter l'insouciance d'un monde en paix. Retour à la réalité, ses organes lui montait à la gorge alors qu'il commençait à chuter. Après un bref instant de panique et un long moment de lucidité, il tâta modérément des manœuvres indiqués pour prendre en main le sac-à-voler. Parce que oui, malgré tout, c'est un ninja de grande classe le Mika'.

Un salto avant instantané à s'en casser les cervicales, un arrêt net et stationnaire à s'en écraser la bourse, une petite vrille-tête en bas parce que lui aussi, il aimait se la péter. En plus il voyait lentement réapparaître les formes de tout ce qu'il avait laissé planté en bas. Avec toute la hauteur qu'il avait prise en exagérant sur la poussée, il avait bien passé plus d'une minute dans les airs non ? Allez on s'permet, on incline douuucement tête en bas, on vrille un peu, et on prépare une stabilisation de grande classe histoire d'épater la jeune fille. La chaleur du sable commençait à se faire ressentir à nouveau sur son faciès... Hop en relève ! Bouf raté, un effet mirage lui avait empêché de sonder correctement la distance entre son nez et le sol. En décrivant une courbe tentant de repasser à l'horizontale, il vint épouser le désert de tout son long en décrivant un magnifique tracer sur la dune qui lui servit de tremplin pour se renvoler. . Un nuage de sable transport par l'intégralité de son corps vint s'étaler sur l'autre flan. Une minute trente-six ! Pari tenu !

Puis il virevolta, toujours à portée de vue, de virages serrés à droite, à gauche, avec toujours une petite vrille entre-deux pour pouvoir manœuvrer avant de prendre encore de la hauteur et de se gratifier, de temps en temps, pourquoi pas, d'un salto enfin bien exécuté. Un vol en rase-motte pour épater la galerie, décrire un sillon dans du sable qu'il n'avait même pas touché mais qui pourtant se soulevait derrière lui en une splendide ola. Des virages serrés dans le creux des dunes, une bosse surprise, une vautre fantastique, des cercles décrit au sol comme un pilote de F1 qui remporte la course, en nouvel envol qui sort la tête du sable pour découvrir le dessin d'escargot que son crâne y avait laissé, une suite moins mouvementée et aux mouvements plus lents et calculés, tout autant précis mais bien plus aisés.

Il se rapprocha néanmoins avec une très bonne marge de hauteur pour être sûr de ne pas terminer en s'encastrant dans Chappie, puis se stabilisa à deux ou trois bonnes dizaines de mètres du sol, au-dessus de la kunoichi et des dunes qui en temps normal leur cachaient l'horizon.

- Bwelh Bwarbhogrou-chfraan... !

Il toussa puissamment en recrachant les humides bouchées de sable qui lui empêchaient de parler.

- Eh Saibogu-chan ! Tu m'as menti tout à l'heure !

L'amnésique marqua une pause insistante pour appuyer le sourire en coin et narquois qu'elle ne pourrait louper malgré la distance.

- La première oasis n'est pas à plusieurs kilomètres ! Il y en a une pas très loin d'ici, juste au Sud !!

Vilaine va.

♫:

Parfois il faut un certain temps avant de se rendre compte qu'on a fait une erreur. Et parfois vous le remarquez immédiatement. A vous de déduire laquelle de ces deux options m'envahit tandis que je suis en train de regarder Mikami prendre de plus en plus d'altitude à une vitesse folle. Je suis impuissante sur ma dune à le regarder disparaître et je sens peu à peu une étrange sensation se glisser dans mes pensées: l'impression d'avoir été dupée, volée, manipulée...

- "Rappelle-moi de ne plus jamais t'écouter Chappie!"
- "Je s'appelle Chappie?"
- "Non c'est plutôt à moi que j'en veux..."

Je commence à scruter le ciel avec une main vissée sur le front pour me protéger du soleil. Où est-ce qu'il est passé ce filou? Je demande à mon robot de river sa caméra en l'air et de m'aider à le repérer. Avec sa caméra il est sûrement plus à même de trouver notre homme volant que moi! Si j'annonce à Oniri que je me suis faite voler un jet pack je suis bonne pour de longues semaines à nettoyer le Kenkyuujo. Je vais passer un sale quart d'heure...

- "Je s'appelle Chappie?"
- "Ouais j'y ai pensé... Mais si j'active le sceau la chute va le tuer!"
- "Je s'appelle Chappie!"
- "Peut-être qu'il a simplement de la peine à maîtriser l'engin hein? Laissons-lui le bénéfice du doute pour l'instant..."
- "Je s'appelle Chappie..."
- "Ouais bon ça va hein?"

Il n'a pas tort cependant: si Mikami est en train de me jouer un sale tour il ne faut pas que je tarde avant de désactiver le jet pack. Mais s'il a simplement de la peine à le maîtriser je condamne simplement une personne malhabile à la mort. C'est une décision que je n'ai pas encore envie de prendre et je laisse donc du temps au jeune homme pour apparaître à nouveau dans mon champ de vision. Deux minutes précisément!

Et j'ai bien fait d'attendre! Le voila qui revient à toute vitesse et je soupire de soulagement tandis qu'il se rapproche de nous. Deux secondes plus tard je suis en train d'agripper mes couettes avec force quand il manque de peu de s'écraser et qu'il creuse un sillon dans le sol. Psychopathe! Tu y penses à mon engin, hein? Tu y penses?

- "Je s'appelle Chappie!"
- "Ha? Ça fait déjà plus d'une minute?" je jette un regard à mon chrono. Ha bah tiens il a raison. "J'suis pas sûre..."
- "Je s'appelle Chappie! Je s'appelle Chappie!"
- "Calme-toi, je plaisante! T'as gagné! Voila! Satisait?"
- "Je s'appelle Chappie!"

Ce qui me confirme qu'il est heureux de sa victoire. Battue à un pari par une intelligence artificielle! C'est pas spécialement agréable comme sensation. Finalement Mikami se rapproche et lévite à quelques poignées de mètres au-dessus de nous. Il m'annonce alors que j'ai menti après avoir craché du sable et de la salive mêlés. Mélange dégoûtant que j'évite d'un pas sur le côté avant d'être salopée!

- "Ha... heu..." il parle de l'oasis. J'ai pas pensé à ça, mince! "Et bien oui c'est possible qu'il y en ait une en fait! Mes connaissances de la région laissent un peu à désirer, je le reconnais..."

Sa remarque et son sourire appuyé me font comprendre qu'il n'a pas abandonné l'idée de faire une pause dans un de ces points d'eau et de verdure... Que faire? Il a été honnête avec moi puisqu'il m'a ramené mon engin! N'est-ce pas une preuve de sa bonne foi? Ou alors il essaie simplement de gagner ma confiance. C'est possible aussi... Bon allez, optons pour la confiance!

- "Bon, ok... Tu veux aller dans une oasis? Alors on va y aller! Mais avant..." j'effectue quelques mudras et le jet pack se désactive, tombant lui et son occupant sur le sol. "Voila! Fin du baptême de l'air!"

La hauteur et la vitesse n'est pas suffisante pour que Mikami se blesse ou que mon jet pack soit endommagé. Je scelle ce dernier en vitesse et libère ainsi le jeune homme de son poids. Puis je lui fais signe de monter dans le side car et j'allume le moteur après m'être équipée à mon tour d'un brassard qui aspire le chakra pour lui fournir l'énergie nécessaire.

- "Alors? C'était comment?" j'aime recueillir les impressions des gens qui utilisent mes créations. "Tu t'en es plutôt bien tiré en tout cas!"

On arrive quelques minutes plus tard vers l'oasis et je gare mon véhicule sous l'ombre d'un palmier. Il n'y a rien de plus désagréable que de poser ses fesses sur le cuir brûlant des sièges...

- "Et voila! Si tu veux te baigner ne te gêne pas mais pour ma part je m'abstiendrai! Le soleil et moi on est pas spécialement potes!"

Je vais pas me dénuder à moitié pour aller me jeter dans de l'eau en plein soleil! Je vais donc simplement me mettre à l'aise contre le tronc d'un arbre et retire mon haut que j'utilise comme support pour ma tête. Je sors ensuite ma tablette et continue de parcourir les informations ramenées par le module. Joindre l'utile et l'agréable, c'est la base! Au bout d'un moment je pose néanmoins une paire d'yeux émeraude sur Mikami.

- "Comment quelqu'un né à Kaminari se retrouve à servir l'Alliance en fait?" ça m'a pas interpellé sur le moment mais ça aurait dû. "En toute logique tu n'aurais pas du rejoindre Kumo?"

Il y a sûrement une histoire intéressante derrière tout ça! Alors je prends une rasade d'eau et m'allume une clope avant d'attendre sa réponse...

[Rolala désolé pour l'attente, j'ai pas vraiment le temps d'écrire en ce moment]

* Non, non, non ! *

La gravité s'empara à nouveau de lui en même temps que ne s'échappa l'illusion de pouvoir survoler insouciamment ce monde grave et sans vergogne. Dans le coin de la figure, une dune lui présentait une pente bâtarde pour que sa réception soit à la hauteur de son vol. Pourtant déséquilibré par le poids du jet-pack, il atterrit avec aisance et effectua un dérapage d'une grande classe pour user de son épaule et de la masse que lui présentait Chappie pour se stopper net. Parce que ouais, malgré son illustre baptême de l'air et ce que laissait penser son parcours au shûkai, il était un shinobi avec plus d'expérience que ce qu'on pourrait lui accorder.

Des larmes pleins les yeux, il exprima toute sa gratitude en un simple et intense « Merci » qui aurait très bien pu sortir de la bouche d'un opprimé dissimulé aux forces de polices ou de celle d'un jeune homme dépucelé vingt ans trop tard. Ceci devrait suffire à son recueil d'impression, il n'aurait pas eu assez de mot - et donc trop - pour décrire à quel point il avait apprécié. Il accorda quand même une certaine attention à la façon dont elle se ré-empoignait de son chef d'œuvre, ce subtil mélange d'insistance et de résignation au moment où elle le lui avait attaché l'avait interpellé. Sûrement était-ce aussi pour ça qu'il ne lui demanda pas de la suivre en volant, sans vouloir abuser de sa gentillesse il prendrait place dans le... le truc au nom étrange à côté la moto là. ... Oh, des fruits !

* * *

- Et voila! Si tu veux te baigner ne te gêne pas mais pour ma part je m'abstiendrai! Le soleil et moi on est pas spécialement potes!

- Moi il m'adore, et c'est réciproque. C'est pas que je suis triste quand il est pas là, mais quand il brille je deviens comme incontrôlable...

En se retournant vers elle, d'un kinobori pied nu à la surface de l'eau. Il s'était dévêtu à son tour en jetant tout ce qui lui couvrait le torse dans le sable, avait remonté son pantalon jusqu'au genoux, et après s'être redressé, il se laissa tomber à l'eau. Le gloussement de la houle qui se brise précéda un moment de silence, de calme profond qui aurait pu perdurer des heures s'il n'avait pas de la compagnie à la surface et une très mauvaise connaissance des lieux et de ses dangers. Se laissant transporter en hauteur par la flottaison, il laissa néanmoins une imperceptible décharge d'électricité glisser dans ce qu'il avait compté comme le premier point d'eau après quatre mirages. Une façon de signaler sa présence et sa supériorité à toutes les bêbêtes dérangeantes et nuisibles qui aurait pu être éprises de la tentation de le mordre, ou on ne sait encore quoi. Allez hopopop, chacun son coin, et les hippopotames seront bien gardés ! Pourtant il aurait aimé leur serrer la main, la nageoire ventrale ou la pince, comme si aucun n'était nuisible à l'autre et que tous pouvaient cohabiter sans heurt. Mais il ne parlait pas le serpent de mer ou ce genre de langage, et puis il regagnait l'air chaud portant le sable du désert.

Les yeux perdus dans le ciel, étalé en étoile de mer à la surface de l'eau, son esprit fit le lien avec le moment précédent les explosions qui annonçaient l'assaut sur Shozaichi. Ainsi il réalisa qu'entre ces deux moments passés à regarder le ciel, très peu de temps s'était en fait écoulé... Pourtant tout s'était enchaîné très vite pour lui, le dénouement, le séjour dans le labo du "docteur" Hoheinheim, le départ en pleine nuit. Et aujourd'hui se trouver sous le soleil, dans une eau fraîche abrité par quelques palmiers resplendissants. Préférer le voyage à la destination, c'est vraiment pas des conneries ! Tout allait tellement vite...
Dire que quelques jours à peine s'étaient écoulés, dire qu'il aurait pu être pris dans le sillon du coup d'état. ⁽¹⁾ Mais en parlant de destination :

- Comment quelqu'un né à Kaminari se retrouve à servir l'Alliance en fait? ... En toute logique tu n'aurais pas du rejoindre Kumo?

Il se redressa, calant ses avant-bras sur les vaguelettes qui allaient et venaient à l'aide d'un nouveau kinobori, se demandant par où commencer.

- En fait je pense être originaire de Kaminari. Je suis amnésique, mais quelques travaux menés avec un... scientifique, que j'ai eu l'occasion de côtoyer au Shûkai, ont fait ressurgir quelques images qui me permettent de déduire que la pays de la foudre mérite d'être passé au peigne fin. C'est pour ça que je me rends là-bas. Quant au shûkai, je l'ai rejoins avec l'espoir d'apporter du changement ici bas, en croyant en ce que cette alliance peut apporter. Malgré les récents déboires de leurs seigneuries...

Il prit un accent volontairement et abusivement bourgeois sur les derniers mots de sa phrase, puis enchaîna, remontant le temps :

- Avant ça je passais mon temps à voyager sur les terres shinobis, redécouvrir qui je suis, observer mon environnement, chercher ce que j'étais, errer perdu, errer, errer, errer...

Et pouf, trou noir. Se rendant compte qu'il était arrivé à la limite de l'histoire que ces souvenirs lui permettaient de raconter, il s'aperçut aussi que sa tête s'était penchée sur le côté en glissant sur son bras quand une petite vague vint lui taper sur la joue, comme pour le réveiller et le replacer dans le présent.

* Kenkyuujo, kenkyuujo, kenkyuujo... *

Un mot qui tournait comme une curiosité dans sa tête et dont il avait du mal à véritablement se défaire. Enfin il reposa son regard sur Lina en calant son menton à la jointure de ses bras flottant :

- T'aurais quand même pu me laisser te suivre en jet-pack hein !

Pas d'affolement ! Il est taquin.

T'avais peur que je te le vole ou quoi ?

Bingo, même pas fait exprès. Comme s'il avait décroché involontairement le jackpot (jet-pack !) en s'accoudant sur le levier de la machine aux triple 7 alors qu'il discutait avec la personne derrière. Excusons-nous !
Ah oui, il commençait à peine à se dire que quelqu'un pas spécialement pote avec le soleil, qui vivait et travaillait en plein désert... avait aussi sa part de mystère à élucider.

____
⁽¹⁾ Je replace un peu mon contexte là, mais je crois que quelques jours après l'attaque sur Shozaichi, pour toi, ça coordonne pas avec le lancement des travaux dans Kaze non ?

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