Le terrain était dévasté et ressemblait aux restes d’un tremblement de terre. Le manteau blanc du Kazekage cessa enfin de balloter au vent. Les flammes vertes emplissaient les yeux mi-gris, mi-vert de Kenji. Sa main un peu tremblante replaça son bandana sur le Rahkegan. Cela faisait longtemps qu’il ne l’avait pas utilisé de cette manière. Ou bien étais-ce la première fois qu’il constatait la vraie puissance du phosphore. Quel phénomène étrange que cette torsion de gravité, d’électricité et de phosphore pour créer l’un des combos les plus mortel qu’il n’ait eu la chance de voir. Et par chance, il n’en était pas la suivre. Ses dons de senseur lui avait permis de sentir le chakra de la femme tatouée du clan Hyo, Misory, s’éteindre subitement. Et ce n’était pas une technique de dissimulation ; la femme était morte. Kenji ne sentit rien en son cœur : il était venu sur ce champ de bataille en sachant que ça allait arriver. Il avait également prouvé que le chakra et la puissance ne valait rien face à l’expérience. Ne venait-il pas de terrasser son égal sans prendre le moindre dommage. Un hululement strident lui fit lever les yeux et T., son hibou aux couleurs écarlates, se posa sur son épaule en s’ébouriffant les plumes. Kenji sentit alors le chakra du Sarutobi basculer brutalement, puis s’éloigner de la zone de combat. Il avait survécu, mais ne devait sa peau qu’à sa partenaire.
Le Raiu ne lui en voulait pas d’avoir fui, c’était préférable à mourir pour rien ici. Kenji avait besoin d’une Konoha en état de se battre lorsqu’ils marcheraient contre Makka. Les blesser, éviter les tueries, avait été le mot d’ordre. Mot d’ordre que lui-même n’avait pas pu suivre cette fois au dirait. Les combats cessèrent d’intensité alors que les Konohajins des alentours voyaient les longues colonnes de flammes vertes. Après encore quelques instants, le silence s’installa sur la plaine dévastée. La feuille avait fui. Suna remportait la première manche de cette guerre. Mais Kenji n’arborait aucun sourire. Ce n’était que le commencement. Une présence sur le côté lui fit tourner la tête. Amaterasu, du nom qu’elle se donnait, quelle ironie au vue de ses capacités. Le Raiu n’avait jamais vu une fillette aussi forte au combat. Celle-ci devint brillante quelques instants et un Kunaï plein de sang tomba sur le sol. Le Sarutobi l’avait poignardé par désespoir. C’était une blessure superficielle. Il remarqua aussi les larmes qui coulaient le long des joues de la petite. Kenji détourna les yeux un instant. Qu’avait-il fait ? Traîner de force une gamine dans les horreurs de la guerre, comme lui l’avait été pendant la grande guerre shinobi. Cela devait cesser. Laisser aux enfants leur enfance… Mais le Kage ne voyait qu’un seul moyen de mettre fin à ça, et ce moyen ne contenait pas un Furyou cherchant à dominer le monde shinobi. Il soupira. Autour, des eisei-nins sunajins aidaient les blessés, d’autres ramassaient les nombreux cadavres de Suna. Par respect, ils laissaient certains médecins de Konoha en faire de même pour leurs victimes. La guerre n’était pas totalement exempte de civilité. Kenji voulut s’accroupir pour parler à Amaterasu mais fut accosté par plus shinobis qui voulaient des ordres.
« Nous camperons ici pour le moment. Battre en retraite laisserait Konoha reprendre l’avantage. La prochaine bataille aura lieu dans leur village. »
Une heure plus tard, Kenji entra dans sa tente pour y retrouver la fillette, qui avait été traitée par un eiseinin entre temps. Il se sentait très fatigué, et n’avait aucun doute qu’elle aussi. Il s’assied donc sans un mot sur le sol et se coupa un morceau de pain. Quelques moments plus tard, on amenait de la soupe et d’autres accompagnements. Après un long silence, Kenji finit par le rompre.
« Tu as fait du bon travail aujourd’hui, petite. Comment te sens-tu ?»
II ne savait pas quoi dire d’autre. Ou bien…
« Pose tes questions. »
L’œil gris de Kenji regarda alors son manteau de Kage qui, accroché sur le côté de la tente, flottait gentiment au vent…
Les innombrables tintements de métal, de cris, d'explosions, tout ça était terminé. Le brouhaha chaotique de ce phénomène cataclysmique avait également disparu dans un amas de poussières, laissant deux corps gisant silencieusement sur cette terre dévastée. Seul l'un des corps était resté en vie, l'autre avait dors et déjà perdu son âme. Ce fut les larmes aux yeux que Kurohime comprit finalement l'étendue de l'atrocité de la guerre. La perte de la vie, pour des raisons que l'on ignore encore, était une punition bien trop brutale et inexorable. La jeune adolescente ne voulait pas recommencer, elle ne voulait pas mettre plus de sang sur ses mains. Son supérieur était resté de marbre, même la retraite des shinobis de Konoha ne lui avait extirpé un sourire. Elle s'était doutée qu'il n'était pas simplement un puissant déserteur du clan Kadoria, mais elle n'aurait jamais pu imaginer l'étendue de son pouvoir si elle n'avait pas été actrice et témoin de ce combat. Au bout de quelques minutes, elle sentit ses jambes trembler de plus en plus violemment. La douleur dans son dos et la fatigue de ce premier affrontement, tant bien physique que psychologique, affectaient sa faculté à rester debout. Au moment où elle allait tomber, un ninja médecin fit son apparition pour la rattraper. Il finit par la prendre dans ses bras, en s'agenouillant devant le Kazekage, avant de disparaître dans un fin voile de feuilles.
Sa blessure n'était pas très profonde, mais elle n'était pas non plus superficielle. Après une désinfection assez douloureuse, le médecin utilisa son chakra pour refermer la blessure. L'homme semblait assez vieux, beaucoup plus que le Havre de la Tempête en tout cas. La petite blonde l'allait déjà vu, c'était dans la clinique du Village Caché du Sable. Il était l'un de ceux qui lui avaient appris les subtilités de l'art médical ninja. Après ce qu'elle venait de faire, elle n'arrivait plus à le regarder dans les yeux. Les larmes qui avaient su s'arrêter semblaient revenir en force, mais l'homme comprit, à sa grand surprise, ce qui avait du se passer. Sans hésitation, il la prit dans ses bras, et lui caressa gentiment la tête, en lâchant ces quelques mots : "Tu as beau avoir la puissance de cents hommes, n'oublie pas que tu restes une enfant après tout." Elle fondit en larmes, silencieusement, en restant contre cet homme qui lui avait apporté un peu de réconfort.
Presque une heure était passée, elle sortit de la tente des premiers secours pour rejoindre celle du Kazekage, car tels étaient ses ordres. Il n'y avait personne. Après tout, il avait une armée à diriger, des hommes à sauver, un plan à mettre en place. Cette bataille ne sonnait pas la fin de la guerre, loin de là. Tranquillement, la jeune fille alla se mettre en seiza au bout de la tente, attendant le retour de son supérieur et geôlier. Elle en profita pour faire revenir la couleur naturelle de ses yeux et cheveux, resplendissant du blond éclatant qu'elle arborait depuis sa naissance. Par chance, elle n'avait pas croisé le Konohajin au visage effrayant, celui qui leur avait ouvert les yeux sur la cruauté de ce monde. Le résultat de cette bataille prouvait qu'il avait raison, une triste vérité à laquelle Kurohime ne pouvait plus échapper. Finalement, Kenji pénétra dans la tente, l'air épuisé. Il n'avait pas prononcé un seul mot, mais elle non plus. Elle s'était contentée de le saluer respectueusement quand il franchit l'entrée de la tente, mais il n'y avait rien eu de plus. Chacun s'était mis à son aise à sa façon, ne disant mot, esquivant les regards. Quelques minutes plus tard, on leur apporta des rations, une bonne soupe avec quelques accompagnements. Timidement, Kurohime commença à manger, n'ayant pas très faim, pensant à beaucoup trop de choses pour profiter pleinement de cette nourriture. Néanmoins, ce silence de plomb finit par se briser, et ce fut l'homme blond qui le brisa.
-"Tu as fait du bon travail aujourd'hui, petite. Comment te sens-tu ?"
Son cœur se serra vivement à l'écoute de ces mots. N'avait-il pas de remords, de peine, de tristesse en lui ? N'avait-il pas ressenti le même profond malêtre qui abritait désormais son âme et son corps ? Elle sentait que si elle partait dans ce sens-là, elle se mettrait à pleurer de nouveau. Elle ne lui avait pas répondu, et elle n'eut pas le temps de le faire car il ajouta un "Pose tes questions" clair et précis. En y repensant, pendant tout son séjour à Suna, elle n'avait pas eu un seul véritable moment pour discuter franchement avec lui, cet homme qui les avait tenu enfermés au fin fond de l'Ergastule. Il y avait une seule chose qui lui tracassait l'esprit, depuis ce fameux jour, une seule chose qui lui rongeait le cœur et qu'elle mourait d'envie de savoir.
-"H-Hakuito... Est-il... véritablement..."
Sa voix tremblait tellement qu'elle n'arrivait pas à terminer sa phrase. Elle utilisait pratiquement toutes ses forces pour ne pas lâcher une larme, pas devant lui. Il fallait qu'elle soit forte, il fallait qu'elle reste digne et solide, même si le poids de sa tristesse devenait trop lourd pour elle. Elle n'avait pas d'autres choix.
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Quelques souvenirs lui revinrent en tête. Du sable, beaucoup de sable. Son pas, alors maladroit dans le désert, son esprit, léger comme l’air. Tsura calme, plus calme que jamais, presque disparu. Pas de poids, le dos droit, fier. Une chute, une oasis, de l’eau en plein visage. Une autre présence, une inconnue. Un sourire, de la frustration. Le début d’une amitié. Et davantage plus tard. Puis les responsabilités, le devoir, le présent, le futur aussi. Peu de temps, beaucoup de tracas. De l’espoir. Puis Makka. Des flammes, des cendres, la mort. Le vieillard, le désespoir. La guerre. Et maintenant, la première victoire.
Raiu no Kenji avança le bras et déboucha une bouteille de saké dont il prit une rasade à même le goulot, n’ayant nulle envie d’user d’un verre inutile. La chaleur se déversa dans sa gorge et le Kazekage songea qu’il n’avait jamais eu de plaisir à cette sensation avant l’incendie de cendre. Et maintenant, c’était…Habituel. Même Zanshi avait été convertie à l’art de l’alcool, à l’art d’oublier, de nier son passé. Le remord, la peine, celle qui ne peut être assouvie par le sang et la rancœur. Cette guerre n’était pas une vengeance personnelle…Non ? Non. La fillette restait silencieuse à sa question, mais il n’en fit pas de cas. La mort de Misory semblait l’avoir marqué. C’était normal, surtout à son âge. Elle ne se battait pas pour une cause en quel elle croyait réellement, c’était pourquoi la mort la touchait aussi fortement. La gamine n’avait pas non plus eu un entraînement de Kunoichi traditionnel, sans quoi elle n’aurait pas été aussi affectée. La nouvelle génération avait oublié la première définition du ninja, celle du meurtrier dans l’ombre. Un shinobi avait pour tâche de tuer, mieux que quiconque si possible. Aujourd’hui, certains se donnaient des airs de justiciers et de protecteurs. Mais les shinobis utilisaient des Kunaïs et non des boucliers. Tuer restait la seule vraie façon de faire son devoir, même si c’était pour protéger la vie. Mais tout ça était une question d’innocence que Kenji ne souhaitait pas dérober à la fillette, comme on lui avait fait jadis sur les champs de bataille de la première grande guerre.
Elle demanda si Hakuito était vraiment mort et Kenji se contenta de prendre une autre gorgée, retirant son bandana de l’autre main, libérant ses cheveux blonds lui tombant sous les oreilles. On lui avait un jour dit que la couleur de ses cheveux était un piège : il était capable du meilleur, mais également du pire. Il avait protégé des humains, en avait tué d’autre. Parfois pour l’argent, parfois pour le devoir. Hommes, femmes, vieillards, enfants, ce n’avait jamais fait de différence. Ou presque, il éprouvait de la reluctance envers l’autre sexe, mais ce n’était pas handicapant comme le prouvait le combat d’aujourd’hui. Cette Misory avait péri comme tous les autres. Sa main n’avait pas hésité. Il était une arme, et Suna était le bras.
« Je doute que tu le revois un jour, gamine. J’en doute fortement. Mais nous fabriquons tous notre futur. À toi de voir ce que tu feras du tien. »
Une autre rasade suivante.
« Tu es jeune, bien trop jeune pour te battre. Mais j’ose espérer qu’un jour tu comprendras pourquoi j’ai agi ainsi. Pourquoi je t’ai amenée en guerre. Et pourquoi nous avons tous deux versé le sang aujourd’hui. »
Il reposa la bouteille et s’appuya la tête contre la poutre centrale de la tente.
« Quand j’étais enfant, mon père me disait souvent de ne pas m’inquiéter du chaos. D’où je viens, nous avons pour croyance que le chaos est le début et la fin de l’univers. Toute progression, toute évolution ne peut venir que des collisions, des conflits. Cette guerre, ce sang versé, il ne faut jamais perdre de vue sa raison d’être. Sans quoi nous ne sommes que des bêtes ayant pris goût à la mort. Et ce genre de créature ne mérite que d’être abattu, pour leur propre bien. Les ténèbres de l’être humain.»
Après un long instant de silence, il retira ses gants et tendit une main scarifiée par les brûlures de Makka à la jeune fille.
« Donne-moi ton nom, ton vrai nom, fillette, puis prend ma main et ressent mon chakra. Et alors, tu sauras ce qu’est la vraie noirceur de l’humanité. »
Sans le savoir, sans même se demander pourquoi il buvait, la jeune fille n'était pas surprise de voir le chef du Village Caché du Sable dégoupillé une bouteille de saké. Elle avait déjà l'habitude de voir son maître, Gabushi, boire à n'en plus pouvoir pour sans raison apparente. Ce qui la tracassait bien plus, c'était l'imminente réponse à sa question, qu'elle finit par obtenir. Ses yeux reprirent quelques couleurs, la formulation qu'avait employé le grand blond laissait sous-entendre qu'il y avait des chances qu'il ait survécu. Elle le savait, elle s'en doutait, elle savait que ce n'était pas une illusion, elle l'avait bien ressenti cette fameuse nuit.
Se tournant les pouces, perdue dans ses réflexions, son regard ne croisa pas celui de son employeur temporaire. Elle ne faisait qu'entendre les gorgées se succéder, avant qu'il ne reprenne la parole. La lumière qui était apparue sur le visage de Kurohime s'éteignit aussitôt, comme lorsque l'on souffle sur une bougie, exactement le même effet. Selon ses dires, la guerre restait justifiable à partir du moment où l'on ne perdait pas de vue sa propre humanité. L'aversion de ces conflits armés obligea la Genin à repenser à tout ce qui lui était arrivé. Ame no Kuni, ravagé par les méandres de la guerre, était devenu un pays où la misère régnait, et où elle n'avait pas eu de place privilégiée quand elle se réfugia là-bas. Piétinée, méprisée, elle voyait les habitant du Pays de la Pluie comme étant des monstres créés par la guerre. Une telle chose ne pouvait se reproduire, il fallait à tout prix qu'elle mette fin à tout ça. Cependant, en était-elle capable ? Le sang coulait désormais sur ses mains, elle avait littéralement vu le corps de la jeune femme se faire oblitérer, juste devant elle. Se dire qu'elle avait permis qu'une telle chose se produise, ça lui retournait l'estomac. Quand elle retrouva ses esprits, le Havre de la Tempête lui demanda son véritable prénom. Le regard déterminé, elle réussit finalement à poser les yeux sur son interlocuteur, sans fuir ni flancher.
-"Aussi longtemps que les guerres existeront, je m'appellerai Amaterasu. Je ne peux pas encore trahir mon identité, alors qu'il me reste beaucoup de choses à faire."
De bien grands mots pour une préadolescente comme elle, surtout dans la situation où elle se trouvait. Malgré tout, elle tendit sa main gauche vers Kenji, sa main droite plaquée sur sa bouche. Parler autant alors qu'elle risquait de vomir à tout moment n'était pas une très bonne idée. Qu'allait lui montrer le Kazekage ? C'était un mystère qu'elle allait sans doute découvrir, si l'homme ne changeait pas d'avis, compte tenu de la réponse qu'elle lui avait fourni. Dans tous les cas, elle se demandait si elle pouvait soigner les blessures présentes sur celle du meneur du Sable, après tout, elle avait appris un nouvel art qu'elle comptait bien utiliser.
-"D'où viennent toutes ces blessures ? Je peux les soigner si vous me laissez faire."
Elle ne voulait pas paraitre indiscrète - ni vomir - alors elle lança ces quelques mots assez lentement et doucement. Il faudrait sans doute quelques jours pour récupérer pleinement de cette atroce journée, encore un traumatisme qui mettra du temps à s'effacer de sa mémoire.
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La main tendue, Kenji songea avec amertume au passé. Amaterasu lui rappelait quelqu’un, une fillette qu’il avait brièvement rencontrée pendant la guerre lorsque lui-même n’était encore qu’un enfant. Après une embuscade d’auquel lui et son père s’était échappés de justesse, sa famille les avait recueilli dans leur maison à moitié effondrée. Ils ne possédaient rien, même pas de quoi manger convenablement, et pourtant ils leur donnèrent tout ce qu’ils pouvaient. Ni lui ni son père n’avait eu le cœur de leur avouer qu’ils étaient du côté des Uchiwas, et donc théoriquement leur ennemi, même s’ils n’étaient que des civils. Kenji se souvenait ne pas comprendre, lui qui venait d’un endroit où aucune blessure ne guérissait jamais, où la chaleur ne venait jamais non plus. Il avait été frustré, même, de voir qu’ils s’en tiraient si bien. Qu’ils étaient si…Humains.
Mais tout ça, c’était avant Tsura. Avant le Furyou, Kenji n’aurait jamais pu comprendre ce qu’est la vraie humanité avant d’y voir son parfait contraire. La créature qui avait envahi son corps représentait tout ce qu’il avait été, de partie en partie, à un moment ou un autre de sa vie. Et maintenant il faisait synthèse avec le monstre, sans toutefois être une sorte de Ying-Yang. C’était un mélange gris et opaque, et terriblement vide lorsqu’on cherchait en profondeur.
Amaterasu refusa de décliner son identité et Kenji souffla du nez, quelque peu déçu de cette réponse. Après une bataille si violente, il s’était attendu à un peu plus de confiance de sa part, surtout que lui allait lui montrer ce que très peu de shinobi avait eu la simple chance de ressentir. La folie infinie d’une créature mi-humaine, mi-autre chose. Alors que la fillette s’inquiétait sur l’aspect endommagé de ses mains, Kenji se déplaça un peu sur le côté pour être plus prêt d’elle.
« Ces blessures ont été infligées par le feu sacré d’une assimilatrice des flammes. Makka, comme les gens l’appelle. Peut-être as-tu entendu parler de l’incendie de cendre ? Elle a attaqué Suna de plein front et l’a presque entièrement incendié. Tout le Triumvirat a trouvé la mort et je ne suis arrivé que trop tard. Je pu forcer la tyrante à fuir, mais j’en perdis l’usage d’un œil, et ces blessures sur mes mains. As-tu déjà empoigné un feu physique, Amaterasu ? Je crains que tu ne puisses rien faire pour moi, car ce sont des flammes nées d’un chakra instable qu’aucun humain ne peut, théoriquement manier. Mais Makka n’a rien d’humain. Maintenant, ferme les yeux, et ressent. »
Il lui prit la main et propulsa son chakra tout en façonnant un genjutsu dans l’esprit de la jeune fille pour lui permettre de voir, d’entendre et sentir un souvenir particulier…
***
Glisser…Noir. Il n’y a pas d’histoire. De temps, de son. Nous n’avons pas….Senti. Je vois, je sens , je touche. Elle est là. Une robe…verte. Feuille verte. Pays du feu. Le parfum s’engouffra dans mes narines. Effluves de jeunesse, de peau lavée à l’eau de rose. Jeune, Jeune. La lettre J. Stop. Regarder , collecter, classifier. La collection. Mes griffes en effleurèrent les pages crispées par la saturation du sang où elles ont été trempées de si nombreuses fois. Faire attention à H, il est fragile. Pas parfait. Besoin d’un autre , mieux, plus jeune, plus solide…
Elle ne me sentit pas venir, d’abord. Elle trempait ses pieds dans l’eau de l’étang. La lune brilla sur les crocs de mon masque pendant un instant, puis je disparus. Je sentais son pouls, l’air qui entrait dans sa toute jeune poitrine. J’avais goûté dans l’air, maintenant je voulais voir. Je voulais voir la torsion, la distorsion. Mes pattes effleurèrent l’eau, y flottèrent un instant alors que la laideur charmante de la vase enroulait ses tentacules sur ma carcasse. Le froid emplit les recoins de ma peau, la caressant, la flagellant d’une hideusité qui aurait fait rire les princes de jadis. C’était profond, comme la fermeté de ses traits, comme l’ouragan qui se déchainaient dans les paupières émeraude de ses yeux.
Je progressai comme le navire parti pour une aventure sans espoir, comme le soldat qui part dans une guerre déjà perdue. Je me perdit mille fois dans le gréement de ses pieds, qui caressaient la surface comme l’amant les tissus de soi recouvrant péniblement son âme sœur. Tout cela était beau. Tout cela était dans le cœur des choses.
Je voyais, sous l’eau trouble, à travers la boue de son sol, les poissons chats cachant leurs barbillons, les crapauds prétendant être grenouilles et les algues qui poussaient comme des fleurs mais n’ayant rien d’elle, je voyais tout cela. L’eau était devenue mon espace, ma prison de crystal. Je pouvais la voir, déviée par la physique mais toujours aussi harmonieuse. Je pouvais voir la frontière qu’était la surface, l’indécision de ses orteils à entrer dans un royaume qui n’avait rien à lui proposer.
Que pensait-elle, que disait-elle ? Des bribes revenaient dans ma propre mémoire, comme les bulles qui s’échappaient de mes lèvres pour aller mourir à la surface. Des souvenirs couleur blé, des mémoires de danse et de spectacles. Cela ne dura pas, comme ma patience. Mes pattes s’agitèrent et se libérèrent de la vase, remontant doucement.
Doucement, comme l’air. Je suis l’air. Je suis…Ordinaire. Mon masque émergea, regarda cette fillette, cette fille, cette femme, cette statue qui ornerait les châteaux de ma collection. Et alors, il y eut émerveillement. J’aurais voulu goûter le cri. Mordre dans la terreur, empoigner la peur qui aurait secoué son corps, qui aurait donné une nouvelle mesure à ses traits de cire. Mais il n’en fut rien, car au lieu de ça, elle me regarda. Elle me regarda, cercle blanchâtres aux triples yeux, aux crocs de métal baignant dans l’essence aqua.
Je ne dis rien, car je n’avais de voix. Elle ne dit rien, car elle ne veut pas de moi. Elle n’a ni peur, elle n’a pas honte. Elle me voit comme la surface, comme l’eau vaseuse en dessous. Cette dame ne croit pas en moi. Je n’appartiens pas à son monde. Mon masque est un nénuphar qui appartient à cet étang...
Ma griffe déchira l’air et l’affaire se termina sans un cri. Mais j’avais déjà perdu. Je ne pu sauver d’elle que son sourire, qui s’effrita entre mes griffes au bout de quelques temps…Mes lames se frayèrent un chemin sous sa peau, le sang éclaboussa mon visage masqué, ses cris déchirèrent l’air pendant de longues secondes, alors que je savourais ma proie. Lorsqu’enfin la peau se détacha dans un bruit caractéristique qui me fit frissonner, elle s’arrêta, un coma bien mérité.
Vint ce moment fatidique où je me demandais si je devais lui laisser la vie sauve, la laisser vivre dans cet état mutilé, une revanche pour la créature que j’étais désormais. Mais je me rappelais alors que je n’étais pas humain, et qu’une bête ne ressentait pas la haine, ni la vengeance. Mes lames se frayèrent un chemin entre les os de sa petite cage thoracique et le sang me coula entre les doigts. Je me relevai, human l’air, posant le masque de chair sur mon propre masque. La beauté coulait en moi, elle était à moi. Je la rangeai précieusement dans mon livre alors que des bruissements de feuilles se faisaient entendre derrière moi. Quatres ombres chambranlantes, quatre créatures…Nous disparurent…
***
Kenji lâcha la main de la fillette. Il était en sueur et avait le souffle court. Pourquoi avoir montré ça à une enfant alors qu’il ne l’aurait jamais fait, même à Kusanagi ? Mais pourtant, son instinct disait de le faire. L’instinct animal de Tsura. La préservation. Il attrapa son air.
« Ce que tu as vu…N’est pas un rêve, mais bien un souvenir réel. Il date d’environ huit ans. Celui que tu as vu…Était un homme, du moins une chose du nom de Kan’Sei no Tsura. Et les autres…Un des autres…Est celle que nous nommons Makka. »
Il avala sa salive.
« Ils sont tous morts pendant la guerre. Mais ils sont toujours là. Quelque part. Et Tsura…Tsura n’est pas seulement là…Il est moi. »
Makka. Ce nom ne lui rappelait que de mauvaises choses. Pendant son escapade avant le début de la guerre, la petite blonde était tombée contre un de ses subordonnés, voire même une. Le combat qu'elle avait mené contre elle lui avait appris pas mal de choses sur celle que l'on redoutait de par le monde entier. Le Sandaime Kazekage l'avait donc affronté en personne, il y avait tellement de choses que la Genin voulait lui demander, peut-être qu'elle obtiendrait quelques réponses auprès de cet homme. L'intérêt qu'elle portait à Makka semblait tout autre que tout le reste du monde, Kurohime voulait tout simplement obtenir des réponses, une vérité qui la concernait directement, une vérité qui pourrait sans doute justifier dans son cœur le fait qu'elle et son jumeau avaient été jetés dans cet univers regorgeant de souffrance, de haine et de misère. Rien que d'y repenser, son teint devenait de plus en plus livide. Le fait que Kenji qualifie cette personne d'inhumaine rendirent ses yeux humides. Si Makka n'était pas humaine, et qu'elle faisait parti du même clan qu'elle, cela voudrait dire qu'elle-même était un monstre ? Ces pensées firent perler quelques larmes au creux de ses pupilles, mais elle se retentait de les laisser couler, du mieux qu'elle pouvait.
Mais ce n'était pas fini. Comme lui avait demandé le grand blond, elle ferma les yeux. Il lui prit la main, elle sentit une immense source de chakra la parcourir. Des image défilèrent lentement dans son esprit, une atmosphère sombre, l'odeur du sang, de la mort, un tableau capable de tuer un mort. Ils étaient cinq, elle ne comprenait pas. Une fille, des lames, de l'eau. Un étang, un sourire, des larmes. Des cris, du sang, et enfin la mort. Toutes ces images se répétaient dans sa tête, la blondinette avait l'impression que sa tête allait exploser. Et puis plus rien. Le chef du Village Caché du Sable avait rompu le contact. Si lui avait le souffle, la petite fille, elle, plaqua sa main devant sa bouche, avant de courir tant bien que mal à l'extérieur de la tente, afin de délester le stress, la peur et bien d'autres émotions qui s'étaient accumulées dans sa gorge. Alors qu'elle était restée accroupie près de l'étang où elle avait dégluti, son interlocuteur la rejoignit, pour continuer son discours.
-"Ce que tu as vu…N’est pas un rêve, mais bien un souvenir réel. Il date d’environ huit ans. Celui que tu as vu…Était un homme, du moins une chose du nom de Kan’Sei no Tsura. Et les autres…Un des autres…Est celle que nous nommons Makka. Ils sont tous morts pendant la guerre. Mais ils sont toujours là. Quelque part. Et Tsura…Tsura n’est pas seulement là…Il est moi."
Arrête, arrête ! C'était ce que pensait la kunoichi. Cela faisait beaucoup trop de choses à emmagasiner en si peu de temps. Les larmes n'arrêtaient pas de couler. Elle qui croyait avoir tout vu aujourd'hui, elle se trompait totalement. Ces gens qui s'étaient réunis il y a huit ans sont dits morts, mais ils seraient toujours présents ? Cela coïncidait avec ce que la femme aux cheveux roses lui avait appris sur sa patronne, mais elle n'arrivait pas à se dire qu'il fallait qu'elle en informe Kenji. Elle ne pouvait plus le regarder directement, sans doute par peur de revoir ces atroces images qu'il venait de lui montrer, mais aussi surtout parce qu'elle appartenait à la même famille que celle qui lui avait brûlé la main et l’œil. Il avait peut-être déjà remarqué son appartenance à ce clan chassé par tous, les capacités qu'elle avait montré plus tôt dans la journée en était la preuve irréfutable. Elle avait été trop imprudente ces derniers temps, elle qui d'habitude écoutait les sermons de son frère à ce sujet. Toutes ces informations se bousculaient dans son esprit, la faisant déglutir à nouveau, les larmes redoublant d'intensité. Qu'était-elle devenu aujourd'hui ? Qu'allait-elle devenir par la suite ? Avec la mort de son ennemi aujourd'hui, qu'allait être le prochain mal qu'elle allait infliger au monde ? Allait-elle suivre le même chemin que la dite Makka ? Elle ne savait plus. Elle ne voulait pas savoir. Tout ce qui importait à présent, c'était de laisser tout ça jaillir de son corps, car elle n'en aurait bientôt plus l'occasion.
Quelques minutes étaient passées, elle avait réussi à se calmer. L'histoire de Kenji, avec du recul, manquait cruellement d'informations. Qui étaient ces gens ? Malgré le fait qu'ils aient péri à la guerre et qu'ils errent toujours en ce monde, qui étaient-ils ? En y repensant, la petite blonde n'avait jamais entendu parler d'une histoire similaire auparavant, il devait s'agir d'une information classée hautement dangereuse et secrète au sein même des archives. Son regard livide ayant repris quelques couleurs, elle s'évertua à lui poser la question.
-"Qui étaient-ils ? Étaient-ce des souverains désormais déchus et oubliés de leur patrie ? De quoi veulent-ils se venger ?... Que sont-ils ?"
Au final, cela devait être ça, la véritable question. Que sont-ils ? Que leur était-il arrivé pour qu'ils se retrouvent dans cet état ? Kurohime venait de comprendre une chose cependant. Un des leurs se trouvait actuellement à l'intérieur du corps du Kazekage. Cela signifiait qu'il ne s'agissait pas que de son clan dans cette histoire. Un soulagement dans l'esprit de la petite fille. Makka en possédait un, mais ce n'était pas parce qu'elle était une Gogyou, loin de là. D'un seul coup, elle voulait en savoir plus, même si son corps tremblait toujours d'effroi à cause de tous les évènements survenus en cette dure journée de guerre.
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Elle se précipita pour aller vomir dehors et Kenji baissa les yeux. Il se demandait encore pourquoi confier autant d’informations à une gamine, mais continuait à le faire. Kusanagi n’aurait pas été fière…Mais Kusa’ était morte. Et cette Amaterasu possédait un rôle clé dans cette histoire, le Raiu en était certain. Mais à quel prix ? S’il continuait comme ça, il allait simplement la traumatiser à vie… Le Kage se leva malgré sa propre fatigue et alla la rejoindre à l’extérieur. Plusieurs curieux les regardèrent mais un simple regard du blond suffit à les remettre à leurs fonctions respectives. Les rumeurs allaient circuler mais Kenji n’en avait rien à faire. La gamine n’osait plus le regarder, par peur ou par honte ? Doucement, Kenji la prit par les épaules et l’encouragea à revenir dans la tente maintenant qu’elle avait fini de gerber – hum - . Le Kazekage lui tendit calmement une gourde d’eau dont elle aurait besoin sans aucun doute, puis se rassied. Au même moment, une avalanche de questions lui tomba dessus et Kenji lui jeta un regard gris acier. C’était sans doute bon signe, elle n’avait pas perdu l’esprit lors de la connexion. Maintenant, les réponses… C’était un sujet encore plus pointu. Ce qu’il savait, seul un autre homme était au courant, Uriô, son cousin, lui aussi à la guerre de son côté. Que répondre, la vérité ?
Kenji songea aussi à ce qu’il savait de la petite. Elle était une Gogyou, membre du même clan que Makka. Si celle-ci était de mèche avec la tyrante, révéler ce qu’il savait signerait son arrêt de mort. La maitresse du pays de la cendre convergerait tous ses hommes pour le tuer. Que faire ? La laisser dans l’ignorance, faire plâner que sa famille n’est qu’un ramassis de monstres ? Tout lui dire et prier qu’elle ne soit pas affiliée de près ou de loin aux partisans. C’était trop risqué.
« Beaucoup de questions, mais encore davantage de mystère, petite. Tu t’es bien battue aujourd’hui, à mes côtés. Mais je ne sais rien de toi, hormis ce que j’ai découvert par moi-même. D’où tu viens, où tu as appris l’art de l’ombre… Tout ce que je sais, c’est que tu es une gogyou. Ce qui, pour la plupart des gens, ne te pose pas en état de faveur. Mais autant je hais Makka, autant je n’ai rien contre toi. Même que je n’ai rien contre Makka en fait, mais plutôt envers celle qui la possède. » Le Raiu ouvrit une bouteille de saké froid qu’il porta à ses lèvres. La chaleur dans sa gorge lui fit beaucoup de bien. « Ces créatures possèdent les gens et finissent par les contrôler entièrement. D’autres peuvent signer un pacte avec la chose et garder une partie de leur personne. C’est ce que j’ai fait, à un prix qui marquera un jour les pages de notre histoire. Ces êtres sont nés humains comme nous tous, mais n’en ont plus que la vague apparence. Leur intelligence est un puit profond de folie dont nul humain sain d’esprit ne peut espérer comprendre car il ne fait justement, aucun sens…Ces gens sont l’incarnation de la folie et de l’obsession. » Une autre gorgée, il toussa un peu. Son œil lui piquait, Tsura n’aimait jamais qu’on parle de lui. Ses griffes raclaient les tréfonds de l’âme du Raiu. « Et cette folie est celle qui la pousse à essayer de détruire tout ce qui vit sur le territoire… C’est tout ce que je peux te dire pour l’instant, si tu refuses de me parler de toi. Autrement, tu peux poser directement tes questions à lui , si tu le souhaites… » Et le Raiu lui présenta une nouvelle fois sa main. Si elle croyait avoir vécu l’horreur, elle n’en avait encore effleuré que la conscience.
Avec un simple geste, il fit la petite fille retourner dans la tente. Cela était malgré tout compréhensible, le sujet dont ils discutaient n'était pas l'une de ces conversations mondaines que tout le monde pouvait écouter. Kurohime le suivit sans faire d'histoire, étant à peu près sûre qu'elle n'avait plus besoin de rester près de l'étang. Elle retourna donc s'asseoir dans le même coin que précédemment, avec cette fois-ci une petite gourde pleine d'eau que venait de lui donner l'homme blond. Cependant, les questions de la blondinette ne trouverait pas de réponses, du moins pas tant qu'elle ne donnerait pas plus d'informations sur elle-même. A ces mots, elle se recroquevilla un peu plus, mettant sa tête contre ses genoux. Elle n'avait pas vraiment le choix. Connaître ces démons serait la clé pour les possibles batailles futures contre Makka ou un autre démon de son espèce. Il fallait qu'elle donne de sa personne.
-"V-Vous vous rappelez de la première fois que l'on s'est vu ? On vous a directement reconnu comme étant le Havre de la Tempête. C'était parce que l'on a étudié à Kumo Gakure no Sato... Avant, on était un simple clan sans histoire dans le nord du Pays de la Foudre. Mais les attaques se multipliaient, et des hommes mourraient, alors on a décidé de rejoindre le tout nouveau Village Caché des Nuages. Mais... un an seulement après, mon frère et moi avions jeté hors du village, au lieu d'être abattus... Je suppose que vous devinez pourquoi..."
Jetés de leur village à cause de leur sang, une cruelle manière de se débarrasser d'un fléau que ces bureaucrates craignaient de tout leur être. Elle ne pouvait malgré tout pas se résoudre à compter ce qui leur étaient arrivés par la suite, ni ce qu'ils avaient vécu durant les débuts de leur exil, ni comment ils étaient entrés dans cette organisation à peine connue du monde entier, l'An'tei. Désormais, elle se battait pour des réponses, pour connaître le pourquoi du comment de ce monde. Désormais, elle ferait tout pour changer le voile corrompu de cette terre, un voile nommé guerre et haine. Le même refrain sortait toujours, mais les actions et paroles les entourant changeaient également selon les personnes qui les effectuaient. Mais fini de penser, le Kazekage allait lui donner des réponses, enfin, ce n'était pas vraiment lui qui allait lui répondre, selon lui.
Kurohime ne savait pas exactement ce qui allait arriver, elle appréhendait le fait qu'elle tombe nez-à-nez avec cette entité dont ils parlaient depuis le début. Au moment où elle se mit à penser ça, le visage de Kenji était tout autre, un masque blanc couvert de symboles, une vision d'horreur pour la petite fille qui se retint de crier avec ses deux mains, tout en reculant au plus profond possible de la tente. Cette aura maléfique, c'était exactement la même qu'elle avait ressenti lorsque le blond lui montra ses souvenirs. Ces êtres existaient donc vraiment. Quelque part dans son esprit, elle espérait que tout ceci ne soit que des légendes et reliques du passé, mais ils étaient vraiment là. Le regard figé dans la peur, elle fixait malgré tout l'homme masqué, sans cligner des yeux.
-"Q... Qu'êtes-vous... tous les cinq ?"
Elle avait pu compter cinq personnes en se comptant elle dans la vision. Il y avait cinq de ces entités, cinq de ces monstres composés de souffrance, de haine et de vengeance. Ce qu'elle allait apprendre allait tout jamais changer la manière de vivre de la petite princesse, pour le meilleur ou pour le pire...
Meteora
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Le Raiu prit une autre rasade de Chakra, et s’appuya la tête contre le pilier de la tente avant de se frotter les yeux légèrement. Il savait que son chakra s’extirpait des pores de sa peau, comme une rivière, impossible à ralentir mais incapable d’accélérer également. Le prix de laisser Tsura se manifester librement, du moins à l’intérieur d’un cadre semblable à un Genjutsu. Kenji avait appris cette technique un an plus tôt, lorsqu’il avait voulu lui aussi en apprendre davantage à propos du démon qui l’habitait. Et incapable de converser plus longtemps, il avait forcé la créature à prendre apparence à travers son propre chakra. Forcer était un grand mot ; Tsura n’avait aucune hésitation à se repaître de son énergie vitale, son contrôle sur le Kazekage augmentant plus le blond était faible. Recontrez Kan’Sei no Tsura, la bête qui vole les visages… Un sinistre cirque plus vrai que nature, malheureusement…
La petite lui apprit ce qu’il soupçonnait déjà depuis un certain temps : elle et son frère avaient étés Kumojins, comme lui. Le havre de la tempête… Ce nom avait traversé les voix des shinobis de Kumo lorsqu’il était revenu de la guerre, vivant comme peu de jeunes de son âge envoyé à l’abattoir. Mais ce n’était que bien plus tard qu’il avait pris comme nom officiel ce patronyme. Non, il avait été fier d’être Kadoria Kenji à ce moment-là… Et il l’était toujours. Mais l’anonymat était une puissante arme, qui secouait les sangs de chaque personne cherchant à se mesurer à lui. Ce laps de temps pendant lequel ils ignoraient tout de ses capacités pouvait être fatal. Et si la gravité devenait une puissance connue, le Rahkegan, lui…Il regarda la fillette et se demanda comment elle s’en sortait. Ou si elle allait s’en sortir, tout simplement…
***
Kan’Sei no Tsura flotta d’abord autour de la pièce. Il n’avait d’apparence pas de bras ni de jambes. Son masque blanc détonnait sur son corps totalement noir, aussi mobile qu’un simple drap de tissu. À chaque petit instant, on entendait le bruit de son inhalement puis de l’exhalement à travers son masque, un bruit rauques, presque fiévreux. Un grondement dans son gorge, animal, le secouait de temps à autre. Les trois yeux de son masque semblaient fixer chaque objet, chaque coin de la pièce au même moment. À chaque petit mouvement, il s’approchait de la fillette. Les crocs de son masque semblèrent soudainement former un affreux sourire métallique. Elle voulait savoir qui il était. « Qui….Qui je suis, en-fffant ? » En un instant il fut tout prêt d’elle, son masque-visage à quelque centimètre du sien, qui trahissait la peur. Un autre grondement secoua la gorge de la bête, une lueur métallique s’extirpa des tréfonds de son corps de tissu. De longues lames de métal partiellement rouillées, les griffes d’un animal irréel, cliquetant alors que les mains de la bête s’ouvraient et se refermaient. Un des couteaux se posa sur la joue de la petite. « Siiiii belle…Bientôt. Bientôt… Je suis…, celui-qui-porte-la-beauté…On a pleuré mon nom dans la nuit…J’étais…humain. »
La lame glissa doucement autour du visage d’Amaterasu , profilant lentement le tour de son petit menton. Le regard de la créature était brillant. « Jadis… Humain…Et beau. Comme le jour. Le jour qui me hait désormais…Mais je subsiste, dans l’ombre, et je suis celui…celui-qui-porte-la-beauté, désormais… » Le masque s’avança et renifla le cou de la petite, le couteau traçant désormais son chemin sur la gorge de l’adolescente. Un autre grondement. « J’étais beau…Puis la vie me vola ce qui…m’appartenait. Les yeux rouges…Me promirent la lumière, l’humanité, à nouveau…Car déjà, je chasssssais ce qui me revient…de droit…Comme…toi. » Il se recula légèrement, et son corps flotta en un instant derrière elle dans le concert de claquements de ses dix longues griffes. Une d’entre elle se posa cette fois sur la nuque de la gamine. Ce jeu faisait bien plaisir à la créature… « Je les collectionne, je les conserve. A à Z…Tu serais…un bon…V…V comme vigueur, comme vitalité, comme…Victime. » Sourire denté. « Les yeux rouges…Me trahirent…Me mentirent…Moi et mes frères…Mes frères d’infortune…Mes frères monstres et créatures…Ils me mirent…À la terre, alors que j’étais toujours…sans ce qui m’appartient. Je ne voulus pas. Je ne pouvais pas. Tu…comprends ? Je ne peux pas. Tant que je n’ai pas…Ce qui est à moi…Comme toi ! » La lame descendit le long de son dos. Le cou de la créature se percha au-dessus de l’épaule d’Amaterasura et le masque se tourna vers elle, figé mais pourtant surnaturellement expressif. Dans les triples yeux, un feu impossible régnait, une folie qui se déversait dans la gamine… « Eux…Eux non plus…Les yeux rouges se sont enfuies…Ils ont tous traversés…Lâcheté…Trait humain…Mais nous sommes toujours là…Nous persistons. Vengeance. Deux frères, deux sœurs…Pas de valeur pour la bête…mais…sentiment humain de fierté, pour Shizu. Embrasser son destin. Embrasserais-tu le tiens, Enfant ? » Le masque se rapprocha du visage de la petite sans toutefois le toucher. Kenji empêchait le lien d’aller plus loin. Mais Tsura n’avait pas besoin de davantage…Pour le moment. Il se recula lentement, son corps dérivant pour reprendre sa position initiale, devant l’adolescente. Les griffes disparurent dans les pans de son corps d’ombre dans un dernier cliquetis. « Lorsqu’elle aura…détruit ce monde, je n’aurai plus qu’à ramasssssser ce qui m’est dû…Beauté dans la mort…Mais…Je te garde pour la fin….La faim… À…très bientôt… »
*** Le Raiu ouvrit les yeux. Il tremblait. La fatigue devenait conséquente. Une autre gorgée de saké rassura quelque peu ses mains, remplaçant la torpeur par la sensation plus apaisante de l’ivresse. Tsura se tenait tranquille dans sa tête, repu pour le moment. « Je… » Mais il ne trouva pas les mots et ne dit rien en fin de compte…
Ce qui arriva dépassait de loin tout ce qu'elle aurait pu imaginer. Elle s'attendait à découvrir une horreur sans précédent, mais jamais elle n'aurait pensé qu'elle la verrait de si près. Un masque blanc recouvrit le visage du Kazekage, le reste de son corps enveloppé dans une sorte de masse noire, plus noire que les ténèbres elles-même. Il y avait trois yeux sur le dit masque, des yeux qui bougeaient indépendamment les uns des autres. Sans même qu'il n'ait pu s'approcher ou commencer à parler, la petite blonde savait dors et déjà qu'elle n'allait pas aimer ça. Ce ne fut qu'après avoir tenté de s'enfoncer légèrement et discrètement dans le fond de la tente qu'elle remarqua les pics en fer qui étaient sortis du masque. Tout semblait très dangereux, extrêmement dangereux même.
Elle n'eut pas le temps d'imaginer la suite des évènements que la nouvelle entité était venue pratiquement coller son visage contre le sien, laissant glisser les "moustaches" métalliques lui caresser très brutalement les joues. Un couteau vint se joindre à la fête, une expression de peur et de détresse se dessinant dans les yeux de la gamine. Les larmes ne faisaient que commencer à perler, elles n'avaient pas encore parcouru le long de cette petite tête fragilisée par la frayeur qu'elle était en train de subir. Le souffle rauque et puissant de la bête stressait le cœur de la kunoichi, ne lui laissant aucun répit de quelque sorte, tout avait été fait pour lui infliger cette peur dont elle ne pouvait plus se débarrasser. Dans toutes ces actions cauchemardesques, la créature laissa échapper un "J'étais humain." Jusque là, Kurohime avait pu suivre, cette ombre était donc belle et bien la réincarnation d'une âme ayant déjà péri une fois. Mais plus il parlait, plus il exécutait des mouvements non coordonnés, comme le fait qu'il lui renifle le cou, le souffle de sa respiration et le passage du fameux couteau provoquant chez la blondinette des tremblements mais aussi des petits soupirs à peine audibles, comme si elle s'apprêtait à crier. Des yeux rouges, une promesse, les Uchiwa ? Les Uchiwa leur avaient promis quelque chose ? Elle ne voyait personne d'autre d'aussi influent et puissant que le clan Uchiwa pour posséder de tels yeux dont on pouvait faire référence pendant des lustres. La créature s'était complètement affalée sur la jeune fille, qui avait désormais les larmes aux yeux. Elle tentait de résister à la peur, tout en réfléchissant à ce qu'il était en train de dire. Un effort psychologique très grand, sans doute trop grand pour elle, mais rien n'était dit.
-"Lorsqu’elle aura…détruit ce monde, je n’aurai plus qu’à ramasssssser ce qui m’est dû…Beauté dans la mort…Mais…Je te garde pour la fin….La faim… À…très bientôt… "
Ce fut à ce moment précis que la Genin eut la question du siècle sur le bout de la langue, mais son dégoût et sa peur l'empêchait de parler. Si lui était Kan'sei no Tsura, comment s'appelait celle qui contrôlait Makka ? Ca, elle n'aura sans doute jamais l'occasion de le savoir. Cependant, la bête disparut, l'atmosphère lourde et pesante s'en alla également, laissant les deux êtres seuls avec leurs sentiments confus. C'était fini, Kurohime n'arrivait plus à prononcer le moindre mot. Elle était complètement essoufflée, ses yeux ne voyaient plus devant eux, cela en faisait beaucoup en une seule journée. Tant bien que mal, elle se releva, les jambes gigotant comme des feuilles qui résistent au vent, une scène presque pathétique qu'elle montrait au chef du Village Caché du Sable. Ne voulant pas en savoir plus pour le moment, ne voulant pas encaisser d'autres atrocités, elle fit la révérence, avant de sortir de la tente en courant le plus loin possible. Cette nuit, elle sera loin d'être porteuse de conseils...
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