Le rouleau s’était excité lors de son activation par l’Oterashi. Un simple message conviant le Taisa à se rendre dans l’un des forums du Guerrier Rouge. Il avait confirmé en toute simplicité sa venue, se montrant aussi concis que l’avait été la missive. Son respect maladif des règles de bienséance de la hiérarchie militaire refaisait surface. Même avec cet homme qu’il connaissait depuis un temps maintenant. Il était même coutume qu’ils emploient chacun le tutoiement, ce qui n’empêchait pas le bretteur de témoigner un profond respect pour son supérieur. L’homme avait survécu à bon nombre de batailles. S’il y avait bien quelqu’un au Shûkai capable de l’aider à se perfectionner, c’était bien lui.

Il y avait de grands guerriers au service de l’Empire. Ses pensées allèrent à Van et Hiko qu’il connaissait bien. Ils avaient tous deux été présents pour lui mais ils avaient chacun leur limite dans l’enseignement qu’ils pouvaient lui apporter. Yanosa pouvait parfaire sa formation et le pousser bien plus loin encore. Ses compétences du combat au corps-à-corps lui seraient bénéfiques et permettraient de se perfectionner. Se préparant au voyage, Fuka prit le strict nécessaire et rangea son arme par l’attache qu’il possédait sur son dos. Il se mit en route, quittant l’enceinte d’Iwa pour se rendre au pays du chef du Sengoku. Il connaissait la route par cœur maintenant. Il aurait tout aussi bien pu se renseigner pour demander un toit directement dans la région, mais la distance lui était profitable puisqu’il pouvait s’en servir pour augmenter ses capacités au corps-à-corps par des courses répétées, entrecoupées de sprints et de pauses. L’échauffement idéal pour un guerrier.

Lorsqu’il parvint à destination, il ne fut presque pas importuné par les contrôles. Son chakra et son apparence commençaient à être connus de tous, presque considérés comme un membre à part entière du pays. Le lieu de rendez-vous était le hall d’entraînement où il s’installa en attendant son hôte. Un long moment passa. Fuka en vint même à douter des informations qu’il avait retenues. S’était-il trompé ? Il commença à faire les cent pas, assuré de son souvenir. Un coup du Seigneur de Guerre ? Probablement. Retenu par une énième bataille quasi-mortelle ? Certainement. En tout cas le temps aurait raison de cette attente et lui apporterait des réponses. Il en profita pour ruminer ses pensées les plus personnelles, profitant de sa nouvelle capacité à bloquer l’intrusion de Samehada dans ces dernières. Il s’en était tellement bien sorti qu’il en aurait manqué d’être surpris par l’arrivée subite de Yanosa et de sa seconde, Asuka.

Tous deux n’attendirent pas les salutations pour se mettre en place, ce qui laissa envisager la suite des évènements. Comme pour répondre à sa pensée, l’Oterashi et la Jisetsu confirmèrent en annonçant cartes sur table que se jouerait ici son pugilat personnel. A deux contre lui, ils ne manqueraient pas de lui en faire baver. Mais il en fallait plus pour impressionner le Taisa. Se mettant en garde, il fut désarçonné par une charge de la demoiselle qui manqua de le faire choir. Fort heureusement, ses compétences martiales le tinrent bien plantés sur ses appuis malgré une légère perturbation. Ils s’étaient montrés clairs, il allait recevoir des coups. Mais rien ne l’empêchait également de riposter par la même.

N’attendant pas une minute de plus, il observa le ballet du duo pour se préparer à toute éventualité. Etant aux aguets, il renforça la poigne sur son arme et leva légèrement le pied pour caler son talon au sol. Entamant alors une véritable pirouette, il tourna sur lui-même pour dissuader toute approche. Un manège ridicule qui fut suivi d’un jutsu élémentaire de Ninjutsu. Un art qu’il maîtrisait encore assez mal mais qu’il comptait tout autant poussé que ses capacités naturelles au Taïjutsu. Alors que Fuka s’était transformé en toupie, une dizaine de projectiles aqueux se formèrent et furent expulsés de ce tourbillon pour augmenter leur portée sur une zone circulaire à son mouvement, optimisant les chances de toucher l’un de ses deux opposants. Cela ne risquait pas de les arrêter mais c’était un premier encas pour la suite de ce repas pimenté.

Rien de très étonnant lorsque, suite à sa pirouette, Fuka fut rapidement harcelé par les assauts de ses opposants. Ils n’avaient pas cachés leurs intentions en même temps. Il ne pouvait que s’adapter et réagir sur le moment. Il n’avait pas envisagé que le rythme serait aussi soutenu. Il aurait dû s’en douter en même temps lorsqu’on connaissait un minimum les personnages. La dentelle n’était pas leur première facture. Eux, ils jouaient plus dans la fracture.

Autant dire que la stratégie n’était pas la priorité ici. Si Hiko s’était acharné à lui inculquer ce trait-là, ces deux-là semblaient décidés à transformer son corps en un réflexe sur pattes. Tout se jouerait à l’instinct, sur le moment. Pas de place à la réflexion. Il fallait s’adapter à leur style de combat commun. A savoir enchaîner sans relâche assaut et esquive. La victoire irait au plus réactif et au plus agressif. Perdre du temps à se défendre permettait d’en ressortir vivant avec plus de certitude il est vrai, mais la victoire n’était pas au rendez-vous pour autant. Le premier à entamer les hostilités avait souvent des chances de submerger l’adversaire sous les actions répétées et le laisser simplement répondre. Pour cette raison, Fuka n’avait pas attendu qu’on se salue et qu’on lance l’assaut de manière vocale explicitement. Il avait entamé le combat dans le seul but de ne pas se faire étouffer sous les coups. Mais il restait seul face à deux adversaires.

Le Seigneur de Kusa s’était littéralement envolé pour venir écraser son talon dans le sol. Sans une réactivité accrue par ses instincts de combattant, le Taisa aurait fini avec une fêlure moins radieuse que celle creusée maintenant à même le sol. Encore heureux qu’il n’y avait aucun public. Que ce soit pour admirer le laminage ou même pour s’éviter de devenir les fameux dommages collatéraux. On en était qu’au début et le plancher avait déjà encaissé. Qui sait comment terminerait cette coquette salle d’ici la fin.

L’heure n’était pas à se préoccuper de la décoration mais bien de sa propre survie. Les protagonistes en question n’étaient pas du genre à se retenir parce qu’il s’agit d’un entraînement. La preuve en était d’ailleurs des coups répétés de la Jisetsu qui faisait progressivement reculer le bretteur. Lui faisant ainsi oublier l’essentiel dans cet affrontement : ils étaient deux. Après avoir esquivé tant bien que mal les coups d’estoc de la jeune femme, quelques éraflures en prime, il fut reçu par un coup en traître. Yanosa s’était subtilement glissé derrière lui afin de lui administrer un royal coup de jambe en plein dans le dos. Sous l’impact, il envoya valdinguer le Sabreur. Un angle mort et aucune préparation. Rien d’étonnant à ce qu’il décolle. Il renforça néanmoins sa prise pour ne pas perdre sa fidèle compagne. Il devait garder cet avantage en main. Maintenant légèrement éloigné du duo, il avait posé genou à terre alors que le Seigneur lui accordait quelques mots.

Il écouta sans vraiment y faire attention. Son attention était focalisée sur les éléments et leur placement actuel. Yanosa avait à peine terminé son sermon que Fuka était déjà intervenu. Il souhaitait plus de fermeté ?! Il allait lui offrir un combo longuement travaillé sur les terrains rocailleux d’Iwa. Plusieurs rochers y étaient passés. Il était temps de passer à de la chair et de l’os.

Ses derniers mots prononcés, Yanosa put ressentir la brusque présence de Fuka derrière eux qui avait chargé à toute vitesse. Mais il n’avait plus la même apparence. Sa peau ressemblait étrangement à l’apparence de son épée. La peau épineuse s’était comme propagé sur sa personne, lui conférant une armure dangereuse au corps-à-corps car aussi tranchante que l’épée. Etant passé entre les deux membres du Sengoku, ils avaient dû ressentir un vif éclair et une douleur au passage de la peau rugueuse. Mais Fuka n’allait pas en rester là. Il était à peine arrivé qu’il enchaîna plusieurs coups. Des mouvements larges et circulaires afin d’atteindre les deux cibles. Si son épée les touchait, ils pourraient ressentir alors la perte d’un peu de chakra. Il montrait enfin le véritable potentiel et la puissance de Samehada…maniée par Taisa Fuka. Sabreur Impérial.

La ferveur du combat faisait battre le sang à ses tempes, entraînant un rythme régulier donnant la mesure à sa respiration. Fuka commençait à se laisser gagner par la frénésie guerrière qu’il adorait tant dans ce genre de moments. C’était son côté Samehada qui était mis en exergue lorsque commençaient les premiers coups. Maintenant qu’il passait à la vitesse supérieure, son corps se mettait dans l’esprit combattif qu’il adorait tant. Les muscles n’étaient plus qu’un prolongement de la pensée, réagissant au quart de tour. Dès lors que la pensée même d’une action ou d’un geste lui venait, son corps se mouvait en conséquence pour accomplir ce à quoi il songeait.

Samehada décrivait maintenant un véritable ballet infernal, même si l’Oterashi et la Jisetsu ne se laissaient pas impressionner par si peu. Fuka ne retenait aucun coup. Il y en allait de son honneur et un peu de sa survie. Le sang d’Asuka vint délecter les papilles de Peau-de-Requin qui dégusta avidement l’infime quantité de chakra qu’un des coups portés lui avait offert. Un échantillon qui l’avait mise en appétit et qui la fit frémir de toutes ses écailles. Un frisson qui remonta l’épiderme du Taisa ayant fusionné en partie avec son arme. Il put même ressentir l’appétit vorace le tirailler. Sentiment qu’il chasse bien vite de son esprit pour s’éviter de perdre le contrôle, ainsi que ses moyens.

Un instant qui lui coûta cher puisque Yanosa se saisit de lui en l’entourant fermement de ses bras. Malgré la peau tranchante du Taisa, il tenait prise. Il en profita même pour le provoquer une nouvelle fois mais ses paroles n’atteignirent pas le bretteur dont l’esprit fulminait déjà pour trouver une échappatoire. Cet homme n’était pas Seigneur de Guerre pour rien. Il était assez tenace pour rester ainsi enserré avec l’arme Samehada. Elle était frénétique sous les gorgées de chakra qu’elle avalait. Elle grignotait un peu plus de l’énergie vitale du Shinobi. Le concerné pourtant ne se priva pas de sauter au sol pour plaquer sa prise contre le plancher, après avoir consciencieusement débarrassé Fuka de sa compagne. Un choc qui provoqua de nouvelles fissures dans la salle.

Fort heureusement, le Taisa avait pu garder sa peau protectrice le temps de l’impact. Malgré le lien physique brisé avec son arme, il avait eu quelques secondes de plus avant que sa peau ne revienne à son teint blanchâtre. Ce qui lui permit d’au moins survivre assez pour se relever. L’Oterashi affaibli par son étreinte fut reçu d’un coup de pied magistral qu’il lui attribua non sans une certaine ferveur. Un coin de son esprit était directement relié à l’épée et il n’avait pas besoin de visualiser où elle se trouvait pour être conscient de sa position. Son regard s’était immédiatement concentré sur Asuka qui s’était tenu en retrait pour le cueillir pile à ce moment-là. Il ne resta pas sur place bien longtemps, chargeant justement dans la direction de la Jisetsu. Sans son arme, le but ici n’était pas de la frapper à mains nues. Elle s’était interposée entre lui et Samehada afin qu’il ne la récupère pas aussi aisément. Il avait donc choisi la voie la plus courte en fonçant en ligne droite. Il avait prévu le coup en entamant les mudras à son point de départ. ce qui fit qu’une fois sur elle, il cracha alors une flaque d’eau collante pour lui engluer les pieds et la dépasser. Il termina en une glissade vers son épée qu’il ressaisit fermement.

Il fit brutalement volte-face, toujours conscient de la présence d’Asuka à ses côtés. Yanosa venait d’encaisser douleurs et perte de chakra, il était donc assez affaibli pour le coup. En revanche sa seconde n’avait pas encore assez encaissé. Raison pour laquelle Fuka sauta dans les airs pour brandir bien haut Peau-de-Requin, prête à s’abattre sans vergogne sur sa cible l’attendant en contrebas. Un coup qui scellerait le sort de la Jisetsu en bain de sang ou en une poupée de chiffon sans chakra. Mais il ne doutait pas de sa réactivité encore bien aiguisée pour parer une telle frappe. Du moins il l’espérait. Ça ferait désordre sur le parquet après sinon.

La joute avait repris de plus belle avec la seconde de l’Oterashi. A peine son coup magistral porté, Fuka se retrouvait de nouveau engagé dans un échange de coups éclairs, chacun ayant réellement vocation à toucher l’adversaire pour le blesser, de façon très mineure évidemment. Mais là était aussi le défi pour le Taisa. Blesser superficiellement avec un hachoir dans le style de Samehada, c’était déjà un exploit en soit !

Mais au-delà de l’effort physique déployé pour cet exercice, le bretteur ressentait une impression très particulière qu’il n’avait encore jamais ressenti à ce point. Il avait déjà effectué un travail similaire auparavant pour observer et comprendre les ficelles du corps-à-corps. Un excellent moyen de faire jouer les réflexes en plein combat. Mais là c’était différent. C’était à un autre niveau. Supérieur. Il pouvait à la fois ressentir et prédire les actes de son opposante, mais aussi adapter sa posture et ses muscles agissaient d’instinct pour parer au bon endroit au bon moment. Etait-ce là l’objectif que l’Oterashi s’était fixé en l’invitant à cette séance d’entraînement ? Que ça en soit la raison ou pas, les faits étaient là.

Il ne se faisait pas surprendre par les offensives. Les quelques entailles qu’il encaissait à chaque fois lui permettait d’avoir une ouverture pour le prochain coup. Et c’était généralement une réussite. Si l’on venait à comptabiliser les blessures de l’un et de l’autre, il devait y avoir un équilibre entre eux. Mais pas le temps de s’habituer à cet échange réciproque. Yanosa semblait prêt à en découdre à nouveau et il se jeta dans l’arène pour accompagner Asuka dans ses assauts. Ce qui ajoutait de la difficulté pour le Taisa. Comment gérer deux adversaires à la fois, surtout quand ces derniers avaient un niveau supérieur au sien séparément. Pourtant le Sabreur ne se laissait pas distancer. Il gardait ses appuis et ne faiblissait pas sous les coups. Il les rendait du mieux qu’il pouvait, parant par la peau écailleuse les coups physiques de l’Oterashi pendant que son poing ou son pied déviait l’arme de la Jisetsu.

Le tumulte d’actions et le travail musculaire déployé dépassait l’entendement pour le jeune Fuka qui ne ressentait ni fatigue ni tension. Tout n’était qu’harmonie. Les mouvements étaient précis et ordonnés. Ils s’enchaînaient à la perfection selon le moment précis. Il n’avait plus de mal à suivre les évènements. Ne se fiant plus forcément à ses yeux, il laissait l’instinct le guider. Une nouvelle communion semblait s’établir entre Peau-de-Requin et lui. Comme si le côté primaire de l’arme se transmettait à son porteur. Ce dernier partageait alors l’instinct animal et primitif qui lui permettait de prévoir la suite des actions. Au milieu de toute cette cohue, malgré les coups qui pleuvaient, il eut un sourire très furtif. Mais il était différent de d’habitude. Sa dentition avait adopté celle de l’animal totem de son arme. Et tel le prédateur, il frappait pour toucher à coup sûr son objectif. Afin de se porter au niveau.