HRP:

La missive venait d’être donnée au Taisa. Le Chûnin l’avait brieffé sur la tâche. Une jeune recrue toute fraîche à qui il fallait expliquer un peu le fonctionnement du Shûkai. Il ne comprenait pas tout à fait pourquoi ce travail lui revenait étant donné sa maigre connaissance en la matière. Il n’avait pas connu la création du Shozaichi à proprement parler ayant rejoint l’Alliance quelques temps après son exil de son village d’enfance. Il n’avait donc pas toutes les qualités requises pour aiguiller un jeune soldat.

Le rôle aurait convenu à un politique ou un puits de science comme le Hoheinheim. Mais Fuka ne pouvait discuter les ordres. Il allait devoir improviser. Ça ne l’enchantait guères mais manque de choix… Il sortit du quartier administratif où il avait été convoqué. Le ciel clair l’aveugla brièvement, levant une main, il observa l’espace d’un instant la météo. Il allait attendre le nouveau venu ici. S’adossant sur un des murs de l’entrée, il déposa par la suite sa fidèle arme de la même manière qu’il s’était posé. Contre le mur, elle faisait quasiment la même taille que lui ! Les quelques bureaucrates rentrant dans le bâtiment le regardait de travers. Leur comportement arrachait des ricanements spirituels à la lame.

La situation n’était pas sans rappeler au bretteur sa première journée au Shûkai. Celle où Van l’avait conduit dans une mission périlleuse où il aurait pu finir en zombie hôte d’un dangereux ver parasite. Pour le coup, ce jeune garçon n’aurait pas le droit à un bizutage aussi violent. La chose se ferait plus académiquement. A voir en fonction de la tournure des évènements. Samehada était capricieuse et pouvait parfois susurrer des suggestions plus intéressantes pour pimenter une rencontre. Même si Fuka parvenait à avoir un meilleur contrôle de Peau-de-Requin, ce n’était pas encore parfait. Le jour où il y parviendra, l’ennemi aura tout intérêt à fuir assez rapidement.

Parmi la foule, Fuka repéra une tête vaguement connue. S’expliquant notamment par le fait que c’était un visage qu’il avait brièvement croisé dans le dossier qu’on lui avait remis en même temps que ses instructions. Il reprit donc son arme pour la remettre à la sangle qui passait dans son dos. Il fit quelques pas pour rejoindre le jeune homme qui commença par se présenter. Un membre du fameux clan Jisetsu. Une famille que le sabreur connaissait pour avoir collaboré avec un de leurs membres lors de la conquête. Rendant le salut par un acquiescement de la tête, le Taisa répondit à son tour :

- Taisa Fuka, Taichou du Shûkai. Je serais en effet chargé de te guider à travers l’organisation de l’Empire. Je n’en suis pas un expert, ainsi je ne prendrais pas toujours la responsabilité de répondre pour ne pas te dire de bêtises.

Il fit craquer ses doigts en regardant à droite à gauche comme s’il cherchait quelqu’un avant de finalement reprendre :

- Bien, avant toute chose j’aimerais que tu m’en dises un peu plus à ton sujet. Sur ton passé et autre. Ça me permettra de voir ce qui te manque pour être un bon Shukajin.

Paradoxal quand on connaissait le passé de celui qui proférait ces mots. Samehada ricana de nouveau silencieusement dans un recoin de la tête de son porteur. Ça s’annonçait folklorique pour Fuka.

A première vue, il n’y avait pas de réel lien entre le Jisetsu ayant collaboré avec lui lors de la conquête de Mizu et celui se tenant face à lui. Ils semblaient ne partager que le nom d’une famille vaste dont les membres n’étaient pas forcément tous liés directement. Les affiliations à degrés rendaient les arbres généalogiques des grandes familles très compliqués. Un véritable calvaire qui ne manquait pas de ressurgir lorsque les questions de chef de clan venaient à se poser. Certains privilégiaient le lien d’hérédité à ceux mettant en avant le mérite pour cette place convoitée. De mémoire, Fuka ne se souvenait pas avoir entendu parler d’un chef Jisetsu. Peut-être ce jeune homme en aurait un jour l’ambition et la possibilité.

Mais il était pour l’heure sous sa tutelle, du moins temporairement. Il fallait qu’il le guide à travers tous les rouages de l’Empire. Une tâche bien compliquée… Elle pouvait au moins mériter une promotion ! Si ce n’est une augmentation. Les responsabilités étaient rarement une récompense. Le statut de Genin avec la puissance d’un Kage était la vie idéale. Fuka s’en était rendu compte une fois promu. Comme beaucoup d’autres. Mais c’était un passage de la vie de shinobi obligatoire. Même ce Detsuo passera un jour. Il devait en être impatient pour le moment. Ce serait un moyen d’atteindre l’objectif qu’il s’était fixé. Fuka ne comprenait pas toujours ces personnes cherchant à tout prix à poursuivre un but précis. Le sien était unique et simple. Il s’accompagnait d’objectifs secondaires permettant d’y parvenir plus vite. Mais la recherche de la paix, la domination ou le pouvoir suprême ne l’intéressaient guères. Le système établi impliquait qu’il y ait des guerres. Pour qu’il n’y en ait plus, il faudrait éradiquer tous les shinobis, ce qui était chose impossible, ou en tout cas un but auquel le Taisa ne pouvait logiquement pas adhérer puisqu’il en faisait partie.

Toujours est-il qu’il ne put s’empêcher de songer à cela en entendant cette jeune recrue parler de ses objectifs. Un sourire aurait presque naquit sur ses lèvres si ce n’était pas impoli. Une précaution qui fit ricaner une nouvelle fois son arme. Le rire silencieux n’alerterait pas son interlocuteur à qui il apporta une réponse suite à sa déclaration :

- C’est une noble cause que tu défends. J’espère que tu sauras y parvenir.

Plus une formule de politesse qu’autre chose, il continua sans lui laisser l’opportunité de répliquer :

- Mais si tu viens de Taki, ne connaîtrais tu pas un certain Hoheinheim Van ?

La coïncidence l’aurait amusé. De toute façon, si ce n’était pas le cas, il finirait forcément par tomber sur la route du Lumineux. Et il s’en souviendrait à coup sûr. Les mondanités étant passées, il tâcha de se reconcentrer sur l’essentiel :

- Bien, maintenant dis-moi un peu ce que tu sais déjà du Shûkai. J’imagine que tu as pu en apprendre pas mal depuis ton arrivée. D’ailleurs depuis quand es-tu ici ? demanda Fuka.

Après m'avoir demandé mes objectifs, le jeune homme en face de moi me répondit que c'était une noble cause que je défendais et me dis qu'il espérait que je puisse y parvenir. Un sourire de plaisir naquit sur mes lèvres et l'homme continua sans me laisser le temps de rétorquer, me demandant si je ne connaissais pas un certain Hoheinheim Van. Ainsi donc, lui aussi connaissait Van ? Cette coïncidence me faisait drôle : tout le monde connaissait-il mon maître ? Puis je soupirais, comprenant qu'il était connue. Il était le propriétaire du temple d'Ao', forcément que tout le monde le connaissait ! Même si, je devais avouer que même si j'étais originaire de Taki, je ne connaissais pas le Lumineux grâce à ça : je ne m'étais jamais intéréssé à la religion d'autrui avant ma mission au temple.

• Oui, je connais cet homme. Il s'agit de mon actuel maître : j'ai arrêté un moine guerrier il y a quelques temps dans son temple.

Je regardais l'homme en face de moi : avait-il déjà rencontrer Van ? Etait-il important pour lui ? Je ne comprenais pas bien Fuka. Puis il me demanda ce que je connaissais du Shûkai ainsi que depuis combien de temps j'étais arrivé. J’essayais de me remémorer avec précision les détails de mon arrivée : la journée d'intégration était il y a dix semaines et elle avait lieu deux semaines après mon arrivée, donc…

• Je suis arrivé il y a deux mois et fais ma journée d'intégration il y a environ six semaines. A vrai dire, je n'ai appris que les bases : il y a des missions à effectuer – j'en ai d'ailleurs effectuer une avec Van – et le pays est dirigé par un Empereur, Samui Kakeshuou. J'ai cru comprendre qu'il y avait plusieurs corps armés ?

Je commençais déjà à poser des questions et j'avais peur d'énerver mon camarade.

Le pauvre garçon allait subir bien des misères et traumatismes dans sa carrière de shinobi. Il faut dire qu’avec un senseï comme le Hoheinheim, il ne risquait pas de s’ennuyer. Les rares fois où Fuka avait rencontré ce dernier, cela terminait toujours en eau de boudin. Un véritable festival scientifique. Le Jisetsu subirait peut-être quelques expériences lui aussi avant d’atteindre un niveau suffisant pour lui tenir tête. Même si le Taisa attendait toujours un tel moment. Non pas méchamment bien sûr mais pour prouver que ce jeune garçon un peu perdu ayant débarqué au Shûkai avait bien changé depuis le temps. Ce serait déjà le plus beau remerciement qu’il pouvait offrir à cet homme qui fut le premier à l’accueillir dans l’Empire.

Alors que Detsuo commençait à répondre, les premières questions furent posées. Rien de plus normal vu la nature de cette mission. Fuka avait été envoyé pour ça, même s’il ignorait véritablement en quoi il était le mieux placé pour répondre alors qu’il se contentait d’agir en tant que bon soldat. La discipline militaire n’avait pas été compliquée à lui inculquer étant donné que c’était la seule dans laquelle il s’estimait le plus doué. Même si c’était un jeune homme réfléchi, il s’était montré jusque-là irréprochable dans le cadre militaire pour se distinguer. Ce qui lui avait valu son grade actuel.

Ainsi, la première question du Jisetsu portait sur les trois corps d’armées. Interrogation quémandant une première réponse :

- Non ce n’est plus le cas. Il s’agissait d’une mesure en rigueur du temps du Triumvirat. Un système politique qui a été remplacé par celui de l’Empire qu’on connaît aujourd’hui comme étant dirigé par Samui Kakeshuou, comme tu l’as dit.

Au moins connaissait-il les bases. Et surtout qu’il ne cherchait pas à aller trop loin. Ce qui arrangeait grandement le Taisa qui n’était pas un puits de science comme le senseï du détenteur des pupilles dorées. Après tout, c’est à lui qu’aurait dû incomber cette tâche ! Mais une mission est une mission et le fameux petit soldat savait se comporter en tant que tel. Detsuo ne le savait pas mais sa question apportait une réflexion supplémentaire :

- En revanche, nous devons nous référer à notre passé par moment pour mieux comprendre notre présent et visualiser notre futur. C’est pourquoi je te conseille de te fixer une ligne de conduite. C’est encore le meilleur moyen de s’en sortir de nos jours. En te fixant une voie, tu y arriveras sans problème.

D’un simple signe de la main, il désigna son imposante épée et sa tenue de militaire.

- Comme tu as pu le constater, je ne me suis pas engagé dans la politique, étant plus un homme de terrain. Dès lors que tu sauras répondre à ce genre de questions, tout sera bien plus aisé par la suite. Tu sauras où chercher de quoi t’améliorer, qui consulter et ce sera le temps qui te permettra de devenir celui que tu veux.

Fuka ne s’était pas étendu sur ses objectifs à lui. Ce n’était pas le sujet à l’ordre du jour. Il devait consacrer cette journée au développement de cette fraîche recrue. C’est pourquoi il l’invita à répondre à une question :

- Par exemple toi, dans quoi te verrais-tu ? Penses-tu être un diplomate aguerri plus qu’un combattant ? Peut-être tes capacités personnelles feront de toi un très bon soutien. Il y en a qui s’avèrent doués dans des tâches bien particulières come la torture et/ou les interrogatoires. Dans quelle genre de fonction te verrais tu pour l’avenir ?

Mon professeur pour une journée sembla pensif lorsque je lui demandais ce qu'il en était à propos des corps armés du Shûkai. Pourtant, cette question n'était point compliquée et la réponse aurait dû revenir rapidement ! Il était donc certainement perdu dans ses pensées. Il m'avait cependant paru impliqué dans sa mission et concentré… Peut-être repensait-il à son expérience personnelle. Quoi qu'il en soit, j'eus ma réponse après quelques secondes d'attentes. Il m'expliqua que les corps armés n'étaient plus d'actualités actuellement, qu'il s'agissait d'une mesure en rigueur à l'époque du Triumvirat, système politique remplacé par l'empire de Samui Kakeshuou. J'étais assez heureux d'avoir retenu que l'Empire était dirigé par Kakeshuou et, en même temps, surpris de voir qu'encore aucune modification n'avait été faîtes dans les textes administratifs. Peut-être faudrait-il le faire pour ne pas induire les nouveaux comme moi en erreurs.

De même, je ne cherchais pas le moins du monde à rentrer dans les détails : je devais retenir tellement de chose que c'en était à peine faisable. Je me contentais donc des informations que tout membres de base du Shûkai se devait de savoir et me pencherais sur les détails compliqués plus tard lorsque j'aurais tout assimilé de manière naturelle. Je pensais ma réponse achevée et enregistrée mais Fuka décida d'apporter une précision à sa réponse. Il m'expliqua que nous devions nous en référer à notre passé afin de comprendre le présent et le futur. Il me conseilla donc de me fixer une ligne de conduite ; qu'il s'agissait du meilleur moyen de m'en sortir : il me fallait une voie à suivre. Il me désigna son épée et m'illustra ses propos en me disant qu'il ne s'était engagé dans la politique, étant conscient qu'il était fait pour le terrain.

Le Taisa ne s'était pas étendu sur ses objectifs, mais je comprenais. Il ne désirait pas confier sa vie à un parfait inconnu. J'appréciais les efforts qu'il faisait pour moi alors qu'il venait de m'avouer qu'il était un homme de terrain. Je ne lui en voulait donc pas de me cacher des détails de sa vie, bien au contraire. Il désirait cependant en savoir plus sur la voix que je m'étais fixé. Il me demanda si j'étais plus un diplomate aguerri ou un combattant, ou peut-être encore un tortionnaire ou un intérrogateur. Je savais faire deux choses mais faire souffrir sans avoir de remords n'en faisait pas parti.

• Je peut-être diplomate ou un guerrier – un soutien offensif plus précisément – mais, dans les deux cas, sur le terrain. Je ne me vois pas rester enfermer dans des cachots à faire passer des interrogatoires ou des tortures. J'ai besoin d'adrénaline ! Et la politique n'est pas non plus pour moi. Même si je suis sage, c'est trop… Complexe on va dire. Trop d'embrouilles et de manigances, pas trop mon style quoi.

Je comprenais tout à fait le message que voulait me faire passer Fuka : rester propre à soi-même et ne pas s'éparpiller, ne pas devenir quelqu'un d'autre.

• Merci pour les conseils. Je suis sincère. C'est un honneur que d'être formé par vous. Vos conseils sont logiques et m'aideront grandement, je le sens.