A lesson about caring [Libre - Sunajins]

Soleil de plomb. Chaleur atroce. Etouffante. Suffocante. Et pourtant j'avance. Et pourtant je marche. Et pourtant je traine mon fardeau. Les mains usées. Rongées par le frottement de la corde. L'épaule en feu. Couvert de sueur. Avançant péniblement. Et pourtant, je continuais. J'avançais. Encore. Toujours. Parce que mon but était là. Devant moi. Et que je ne pouvais me permettre d'abandonner. Tel le messie trainant l'instrument de sa mort, je marchais à travers le désert, trainant un cercueil derrière moi.

Ce cercueil en bois, grossièrement taillé dans des planches de palmier... Il n'était rien. Rien aux yeux du monde. Rien dans cet immense désert. Mais pour nous, il représentait beaucoup. Pour mes camarades, qui l'avaient taillé en une nuit, alors que je noyais mon chagrin dans l'alcool. Pour moi, puisqu'il contenait la dépouille de mon frère. Ce n'était que quelques morceaux de bois grossiers. Sans aucune valeur autre que sentimentale. Je n'ai jamais aimé laisser les sentiments parler. J'ai jamais voulu être un sentimentaliste. Mais là. Avais-je le choix ? Clairement pas. Entre ces quatres planches, il y avait mon cadet. Mon frangin. Ma famille. La seule famille qui ait un jour comptée à mes yeux. Alors je devais avancer. Encore.

Et enfin, la délivrance apparut. Je voyais se dresser les portes de Suna. Ce village perdu au milieu du désert. Pour lequel il avait combattu. Auquel il avait prété allégeance. Ce village qu'il avait aimé. Lui aussi était devenu sentimental avec le temps. Il faut croire que tout change. Même nous deux. Surtout nous deux. Car il faut bien le reconnaitre... Plus rien n'était comme avant. Je n'aurais pas du me trouver là, à frapper à cette porte. C'est lui qui aurait du se présenter, pour rentrer en héros. Mais rien ne se passe jamais comme prévu. Et je toquais. Lascivement. Attendant une réponse du garde. Et je me contentais de lui présenter un vieux bandeau. Un bandeau rapiécé, mité par le temps. Souvenir d'un frère. Laissez passez pour franchir ces portes.

Et je rentrais, trainant avec moi mon fardeau. Je rentrais, et stoppais le garde. Je hélais la populace aux alentours. Tu es de retour petit frère. Et les gens ont le droit de le savoir. Ils se doivent de le savoir.

Mesdames ! Messieurs ! Aujourd'hui un des vôtres est de retour ! Et il rentre les pieds devant ! Je vous présente Shinmei Hayato !

Coup de théàtre, tirade au ton plus ou moins lyrique, et j'arrachais le couvercle du cercueil. Je détachais les cordes retenant le linceul. Et je découvrais son visage, comme paisiblement endormi, pour laisser tomber son bandeau à côté de son corps. Peu de choses nous différenciaient. C'aurait pu être moi à sa place. Mais le destin est cruel. Si tant est qu'il existe. Je me redressais alors, hurlant à la foule.

Désormais. J'exige qu'il soit inhumé avec les honneurs qui lui sont dûs ! Il a traversé le désert, blessé et affaibli pour tenter de rejoindre sa patrie. Et il en est mort ! Il est mort en tentant de rejoindre la patrie qu'il servait ! Il est mort en luttant contre la nature elle même ! Alors donnez lui la sépulture qu'il mérite !

Aujourd'hui rien n'allait normalement pour le jeune Eichi : Déjà en pleine nuit un homme totalement bourré faisant irruption chez lui pour lui voler son lit, ensuite le matin un pigeon voyageur s'écrasant sur sa vitre au moment où il ouvrait ses volets et enfin depuis ce matin : Une accréditation au poste peu envieux de garde des portes. Il avait un rôle mineur : Enregistrer chaque passage sur un calepin stipulant le lieu d'arrivage du voyageur, son nom et sa fonction. Il était là avec un autre gars de sa promotion d'école, ça devait être un baptême ou un truc du même style, quoi qu'il en soit ça en devenait barbant, surtout lorsqu'il fallait décrypter les paroles pleines d'accents d'étrangers ne faisant même pas l'effort de parler la même langue que les sunajins. Pourtant l'un de ses visiteurs attira le regard du Wada : Un homme aux cheveux roux, assez couillon au premier abord qui transportait en plus un cercueil... Mode du Gothique de retour ? Alors qu'il allait lui demander son identité, celui ci commença un numéro de soliste devant une foule qui s'en foutait à moitié, et ce n'était pas ses arguments qui allaient changer quelque chose, ce qu'Eichi allait tranquillement lui expliquer.

Excuse moi, ne le prend pas mal hein mais un Sunajin qui meurt dans son propre désert, ça ne peut pas être un héros ici. Donc ne crois pas qu'il aura des funérailles nationales, si il en obtient ce sera déjà pas mal. Je vais devoir te demander ton nom, ton origine et le pourquoi de ta visite ici.

C'est là que les yeux du shinobi dévièrent sur un bandeau en piètre état, les lambeaux de tissu faisant pâle figure même à côté du métal rouillé par endroit. Rapidement il lui arracha des mains, observant si il ne s'agissait pas d'une contrefaçon et apparemment ce n'en était pas une. Lui tendant la main avec son bien contenu à l'intérieur, il s'excusa et commença à faire bouger le peu de citoyens s'étant arrêtés car ceux ci n'avaient d'yeux que pour voir le corps défunt du frère de la personne. Il s'agissait là d'un manque totale de respect : Si il avait déjà été Sunajin par le passé, il méritait au moins des révérences lorsque les regards croisaient son enveloppe charnelle. C'était vraiment un sale rôle que celui de garde des portes, on ne faisait rien et lorsque que l'on y était obligé, c'était pour faire la circulation près d'un mort. Rapidement le second du Wada s'évapora pour aller chercher des autorités compétentes, laissant le jeune Eichi face au problème. Mais après tout quel problème ? Il était sunajin lui aussi non ? Donc il avait le droit d'être sur son sol.

En tout cas, bienvenue chez toi. Eichi, Genin de Suna. Mais avant petite question, tu étais ici avant ou seul ton frère était de Suna ?

Voilà donc la dernière interrogation qu'il poserait à ce garçon. Importante pour savoir si il s'adressait à un compatriote ou à un homme en quête de patrie. Pendant ce temps, autour du cercueil ouvert, un chamelier et sa caravane entrait, signant le registre et prenant la direction des marchés. Comprenant la gêne de la situation le jeune garçon attrapa le lit éternel de bois et le tira jusqu'à l'ombre d'un petite falaise de quatre ou cinq mètre bordant la grande porte, hors du chemin poussiéreux. Au moins il serait mieux là. Quant à son frère décédé en particulier, se remémorant son nom, le Taijutsuka chercha dans le book du village des informations sur lui, pour valider les propos utilisés, et un sourire apparu sur son visage : Il avait bien été ninja à Suna par le passé, il méritait donc d'y être enterré, pourtant pas question pour le Genin de laisser passer comme ça, il devait attendre les ordres.

Comment dire ? Lucy était assez… Perfectionniste ? Non, ce n’est pas le mot qui convenait. Professionnelle ? Oui voilà. Ou disons plutôt qu’elle mettait du cœur à l’ouvrage pour être une genin exemplaire et irréprochable. Mais peut-être était-ce tout aussi bien un signe stress perpétuel incontrôlé… Qui sait ? Tout cela pour dire qu’hier soir, comme chaque soir, elle avait consulté le cahier de service justifiant d’un emploie particulier des ninjas pour le lendemain. Tous étaient tenus de vérifier ce cahier afin d’éviter qu’un poste ne soit pas effectué. Le non de la jeune Hassei n’apparaissait nulle part depuis quelques temps (même si elle se retrouvait finalement très souvent engagée…). Surprise néanmoins, le nom de son ami, lui, était inscrit. Manque de bol, il devait monter la garde aux portes du village… poste assez barbant. Pour palier à cet ennui, et emplie de bonne volonté, la chanteuse avait décidé de venir apporter son soutien au Wada, bien évidemment en dehors de ses missions annexes….

Ce jour, il faisait beau-temps, même légèrement plus chaud et insupportable que d’habitude. Ayant été occupée une bonne partie de la matinée, l’idée d’apporter et de partager le repas du déjeuner avec Eichi s’imposa tout naturellement. Rien de bien compliqué cependant. Un repas copieux avec entre autre une salade composée pour apporter un peu de fraicheur, des petits sandwiches de pain de mie pour garder la guitoune propre, et enfin, des diabolos à la violette… sans surprise ! L’écureuil comptait venir lui aussi, mais avait un régime bien spécifique. C’était donc en possession d’une grosse glacière que la genin quitta son domicile en direction de la voie illusionnée. Aussi banal soit le repas, ils pourraient tous les trois partager un bon moment de convivialité…

Non loin des grandes portes de Suna, Lucy aperçut le Taijutsuka qui se tenait face au désert. Ses cheveux blancs et sa posture, qu’il était le seul à avoir, trahissaient, malgré la tenue réglementaire de gardien du village, sa réelle identité dont la demoiselle ne pouvait se tromper. Les portes étaient ouvertes agissantes tels un puits de chaleur de lumière. Visiblement, le Wada semblait occupé. Elle lui signalerait juste sa présence avant de s’abriter dans le poste, renfermant quant à lui beaucoup de fraîcheur. Mais ce ne fut qu’arrivée à son niveau qu’elle comprit la situation. Un corps, inerte, se trouvait dans ce cercueil boisé. Qui était-ce ? Un sunajins d’après les dires ? Et l’homme qui se tenait à ses côtés, épuisé, était son frère…

Tandis qu’un chamelier se voyait octroyer le droit d’entrer, Lucy s’approcha de la scène. La vue d’une personne sans vie lui donnait des frissons. Prenant sur elle-même elle tendit un sandwich ainsi qu’une gourde fraiche au frère du défunt. Elle venait apporter son aide dans cette situation quelque peu délicate.

« Tenez. Vous devez avoir faim et soif. », dit-elle alors d’une voie compatissante.

Puis elle posa rapidement son regard sur Eichi. Pinçant ses lèvres, elle faisait un effort surhumain pour paraître que peu affectée par la vue de ce corps.

« J’étais venue manger avec toi ce midi… »

Mais elle n’avait plus goût à la nourriture. Là, une constatation méritait d’être faite : le Wada avait la poisse. C’était un vrai chat noir, ce genre de chose ne pouvait que lui arriver… En tout cas, la jeune Hassei se tenait là, au milieu de ces trois hommes à attendre que les autorités arrivent. Kwizz était quant à lui déjà parti vomir son petit-déjeuner. Il avait le cœur bien moins accroché que sa maître. Mais tiendrait-elle encore longtemps ?

J'allais exploser. Sa remarque allait me faire sortir de mes gonds. Je serrais les poings, tremblant presque de rage. Je visualisai déjà la scène. Un coup à la gorge. Puis une frappe au plexus. Et enfin une attaque au couteau sur la jugulaire. Jusqu'à ce qu'il se reprenne et se corrige, chassant par la même occasion mes envies de meurtre. Mais pas mon envie de cracher à ses pieds. Tant d'hypocrisie. Bienvenue chez moi ? Mais j'ai plus de chez moi. Pour mon frangin, okay. Pas pour moi.

Je m'appuyais contre un mur, fermant les yeux à sa dernière question. Je serrais les dents. Les poings aussi. Mais je pouvais pas y échapper avec une petite courbette. Alors je fouillais dans mes poches, quelques instants, pour en tirer un autre bandeau. Un bandeau dans un état encore pire que le précédent. Au tissu déchiré. Au métal rongé par la rouille et fissuré en son centre. Avec au milieu un symbole. Un symbole qu'il connaissait surement. Je lui lançais d'un geste dédaigneux.

Voilà d'où on vient. Ca fait cinq ans qu'on a quitté le village de la Brume. Cinq ans que nos routes se sont séparées. Il a fait son chemin. J'ai fait le mien. Il a décidé de devenir soldat ici, moi je faisait ma vie dans le désert. C'est son village. Pas le mien. Techniquement.

Oui, techniquement. Parce que je pouvais pas atteindre mes objectifs en restant nomade. Je pouvais pas honorer sa mémoire en continuant à vivre cette vie de pillard. Je me laissais glisser contre le mur froid, m'asseyant, recroquevillé. Je fermais de nouveau les yeux. Techniquement je devrais pas être là. Techniquement il devrait être en vie. Mais non. La chance ? Une salope. Le destin ? Un connard. J'avais tout perdu. Il me restait juste un souvenir. Et des rêves brisés. Des rêves à reconstruire. Je relevais la tête en entendant une voix. Je remarquais d'abord la gourde et la nourriture avant de m'attarder sur la future jeune femme qui me tendait le tout. J'attrapais le tout, commençant à vider la gourde, frénétiquement, empressé comme un cocaïnomane en manque. Je buvais, en renversant une bonne partie sur mes vêtements. Quel goût ça avait ? J'en savais rien. C'était liquide. Buvable. Et donc largement suffisant. Je décelais juste une touche sucrée alors que ma chemise commençait à me coller à la peau.

Je. Eh. Merci.

Difficile de s'exprimer dans ce genre de conditions. Même pour moi. Et je me contentais de mordre à pleines dents dans le sandwich qu'on venait de m'offrir, l'engloutissant en quelques secondes. Débile que je suis. Vouloir traverser le désert sans préparation. Tss. Je savais plus quoi faire maintenant. Et je suis débile. Je le sais. Mais j'assume. Je me relevais alors, prenant appui sur le mur, pour me diriger vers la porte.

Pas la peine de déranger vos supérieurs. Je reviendrai dans une semaine, pour me recueillir sur sa tombe.

Je m'apprêtais à partir. Du moins je le voulais. Mon esprit le voulait. Mon corps s'y refusait. Et je sentais mes jambes se dérober sous moi, alors que je mettais un genou à terre, incapable d'empêcher ma chute. Je pouvais pas repartir. J'en avais pas la force. J'étais coincé là.

Les informations circulaient assez rapidement dans Suna, et parvenaient encore plus rapidement aux oreilles de son dirigeant. Lorsqu'un chuunin vint m'informer, j'étais debout derrière la vitre du bureau que j'occupais, à scruter le village, c'est un peu comme ma pause journalière. Au début je ne lui prêtais pas vraiment d'attention, puis lorsque son nom fut évoqué je ne pus que réagir. Je me retournai en lui faisant signe de la tête, et empruntai la porte.

Je fis quelques pas dans le long couloir et disparus instantanément pour réapparaître à la voie illusionnée. Il y avait là déjà quelques personnes, des genin que j'avais déjà rencontré ou tout au moins aperçu, j'avais une bonne mémoire des visages. J'avançais vers eux rapidement, posant mon regard rouge sur chacun, et sur le corps entre quatre planches. Je n'avais pas pu entendre toute leur conversation, néanmoins quelques bribes m'étaient parvenues.

"Hayato..."

Je fis signe à deux Sunajins postés à proximité de faire le nécessaire pour le corps du défunt ninja, sans demander un quelconque accord au jeune homme, qui lui ressemblait de prés.

"Ce ninja était un héro à sa façon, il mérite les honneurs qui lui sont dus. Eichi, évite de prononcer des mots dont tu ne peux mesurer l'ampleur. Toi.. Tu es .. Son frère ? Hayato m'a dit que tu étais mort; la première fois que je l'ai rencontré. Lucy, Eichi.. Shinmei Hayato était l'un des fondateurs de ce village, un membre du Kakumeigun originel. Yamato, c'est bien ça ? Tu es à Suna comme chez toi."

Mes regards croisaient successivement ceux des deux genin, et du frère 'perdu'. On pouvait m'accuser d'inconscience, mais s'il y avait bien une personne à qui je faisais confiance, c'était Hayato; et les apparences ne trompaient pas, ni mes sens. Le dénommé Hayato ne pouvait être son meurtrier, trop faible pour se mesurer à lui, il ne pouvait donc être que 'la vérité'. Je lui offrais donc l'hospitalité qu'il méritait en tant que frère d'Hayato, il pouvait la refuser, je n'obligeais personne à se joindre à Suna, ni même à me suivre.

"Je souhaiterais néanmoins que tu me dises ce qui s'est passé durant ces cinq années. Quand tu le voudras bien sûr, je ne t'oblige à rien."

Au moins pouvais-je être certaine de ne pas être la cause de sa mort, cela me délestait d'un poids certain...

Les choses prenaient des mesures que ne soupçonnaient même pas le jeune Genin, un peu prit par les évènements sur ce coup là. Alors qu'il attendait patiemment les supérieurs et surtout les réponses de l'étranger, voilà que vient Lucy équipée de bien belles attentions. Elle venait pour déjeuner avec son camarade bien que la vue du cadavre semble l'avoir mise dans de bien mauvaises dispositions, et alors qu'Eichi allait se servir dans le repas qu'avait apporté son amie, le rouquin vint lui prendre des mains et manger comme un porc, boire comme quelqu'un qui sortait d'un désert, étrange...

Le garçon réagissait parfaitement aux pics qu'envoyaient le jeune sunajin. Ses réponses nerveuses montraient de l'énervement, validant les raisons évoquées de sa visite ici, malheureusement une grande personne n'allait pas l'entendre de cette oreille et pour cause : Le chûnin en poste avec le Wada qui s'en était allé chercher des supérieurs revint avec la Kazekage en personne, qui eut en premier lieu une attention peu glorieuse à l'égard du garçon aux cheveux blancs, qui malgré son tempérament ne rétorqua rien, laissant la scène se dérouler sous ses yeux sans un mot.

Alors ce gars mort était un fondateur de Suna ? Bien alors Eichi méritait une sacrée ronflante. Il n'aurait pas pu le soupçonner après tout, et en temps de guerre les mesures extrêmes aux portes sont bien plus utiles que la gentillesse débordante. Lucy également semblait tout à fait surprise par ce qu'il se passait. Eichi restait tranquillement contre la paroi de la voie illusionnée. Puis lorsque l'intervention de la chef du village se termina, il s'avança vers le nouveau venu pour s'excuser. Il lui tendit la main en signe de paix, baissant la tête, un peu honteux de la situation.

Je te présente mes excuses, je ne savais pas... Tu sais en temps de guerre on est assez tendu. Je vous présente également mes excuses Kazekage-Sama, je ne pouvais savoir l'importance du défunt.

Il commença à se retirer doucement, il avait des demandes à faire mais ce n'était ni le lieu ni le moment. Alors il tira doucement Lucy par le bras, elle qui était encore stupéfiée par le corps inerte. C'était la première fois qu'elle en voyait un, cela ne faisait aucun doute. Il l'emmena vers la hutte des gardes et lui installa une chaise, toujours face à la scène au cas où le besoin s'en faisait ressentir. Puis il se tourna vers la demoiselle pour prendre de ses nouvelles.

Sympa de te voir Lucy, et désolé que tu ais assisté à ça, je ne prévoyais pas ce genre de chose...

Qui aurait pu le prévoir ? Un nouveau, un héros revenant à titre posthume et une intervention de Kazekage en direct. Une journée qui s'annonçait barbante avait eu plus d'activité que toute la semaine du Wada.

Je pouvais pas filer à l'anglaise. J'aurais bien aimé pourtant. Mais non. Je pouvais pas. Mon corps n'obéissait pas. J'aurais du partir. Ouais, j'aurais du. Et je maudissais ma bêtise. Si j'avais été plus prudent, j'aurais pris mes dispositions avant de partir. Et j'aurais pu reprendre la route. Avant que les grandes instances du village n'arrivent. Et le problème, c'est qu'elles venaient de débarquer. Je me retournais, regardant les gradés qu'on envoyait pour m'accueillir. Et merde.

Je la regardais avancer. Aucun doute à avoir. C'était elle. Putain. C'aurait pu être n'importe qui. Mais pas elle. Bordel. J'avais lu le journal de mon frangin. Il avait fini amnésique après son combat entre Teichirô et Aare. Et il avait écrit ce journal avec ses restes de souvenirs. Avec les bribes de son passé. Et je ne pouvais pas me tromper. C'était elle. Elle.

... Toi ! Zanshi. Je.

Je ne finissais pas ma phrase, grimaçant. Je serrais les poings. D'un côté les courbettes. Puis la façon dont les soldats l'appellaient. Kazekage. Tss. Quant à son discours... J'hésitais. Entre lui répondre violemment. Exploser. Hurler. Ou lui adresser à peine quelques mots et partir. Mais je ne pouvais pas m'éclipser comme ça. Pas après ce qui venait de se passer. Pas après que ce soit elle qui soit venue m'accueillir. Je reprenais donc la parole, calmement. Froidement.

Ouais. Je sais bien qu'il me pensait mort. Mais c'est pas le cas, je suis toujours là, bien réel.

Je fermais les yeux. J'enrageais intérieurement. Et comme un volcan, on ne peut pas le garder éternellement endormi. Il faut bien qu'il se réveille. Et qu'il explose. Je serrais les poings. Et je m'approchais d'elle. Je ne pouvais pas me permettre un drame en public. Mais je ne pouvais pas non plus rester caché dans mes faux semblants. Je l'attrapais par l'épaule. Brusquement. Fermement. Mais sans violence. Et j'approchais mon visage du sien, pour grogner à son oreille, d'un ton froid, chargé de ressentiment.

Il est mort dans mes bras. Il est mort dans mes bras, et ses derniers mots... Est-ce que tu sais à qui ils étaient destinés ? Ouais. A toi. Alors j'ai un dernier message de sa part, madame la Kazekage. Il m'a dit te dire... Qu'il t'aimait.

Je la repoussais alors d'un geste brusque. Les dents serrées, le visage déformé par une sorte de rictus forcé. Je la regardais avec dédain. Tss. Quel idiot. Frangin, te laisser avoir par les sentiments. Je me tournais vers les soldats qui s'agitaient autour de moi, laissant cette fois exploser ma rage.

QUOI ? J'lui ai fait aucun mal, calmez-vous les chiens de garde ! Tss.

Je crachais par terre, m'éloignant en direction de la ville. Je soupirais, écoutant d'une oreille distraite les excuses de la petite sentinelle. Je lui répondais d'un simple geste de la main, lui indiquant de laisser tomber. C'était suffisant, j'avais eu ce que je voulais. Et je m'éloignais, me retournant au dernier moment.

Je vais m'installer dans le coin. Je vais surement faire venir mes compagnons de route également. Ah. Et si tu y tiens, je ferai une demande d'audience officielle pour te raconter tout ça.

Je la tutoyais. Oui, je me permettais de tutoyer la Kazekage. Mais peu m'importait. Quelle importance que cela m'apporte des ennuis ou pas ? De toutes façons j'avais plus rien. Plus rien. Alors à mes yeux, ça n'avait pas d'importance...

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