-Mademoiselle ?

La voix du chunin résonne dans la petite pièce que l’on m’a donnée pour me recueillir, si recueillir est le terme exact, car de toute façon un Hakushi n’a jamais besoin de se calmer avant un combat. Un Hakushi doit être capable de faire abstraction de ce qui l’entoure à tout instant, à tout moment il doit être capable d’analyser la situation pour en tirer au maximum à son avantage, et pour cela jamais un membre de mon clan ne se laissera dépasser par ses émotions, et en particulier moi, Ozuka.

Les deux coudes posés sur mes cuisses, je contemple mes mains qui tiennent entre leurs paumes une de mes créations, l’éternel origami en fleur de cerisier que j’affectionne tant, ma première création en tant que shinobi, s’en est devenu ma signature et où que j’aille je ne peux m’empêcher de refaire ce pliage pour qu’il vienne étoffer mes cheveux. Celui-ci n’échappera pas à la règle, je le prend délicatement et le pose au milieu de ma petite touffe rose. Après ce petit geste je me lève doucement, j’attrape alors mon wakisashi que j’ai posé contre la chaise sur laquelle je me tenais il y a peu. Si tout se passe bien, sa lame ne me sera d’aucune utilité, donc j’en déduis qu’un moment où à un autre de ce combat je risque de la dégainer car s’il y a bien une chose que je sais c’est que lors d’un affrontement il ne se passe jamais rien comme on le souhaite.

-Me voilà.

J’apaise ainsi l’impatience du chunin qui est là depuis au moins 5 minutes et qui se demandait si j’allais bien participer à cette épreuve. Qu’il ne s’en fasse pas pour moi, s’il savait vraiment ce que je pense il ne serait même pas venu me chercher. Je le regarde alors une fois à son niveau et lui lance un léger sourire, celui qui rassure, celui qui dit que tout va bien et que tout ira bien. Je passe alors la porte principale et j’arrive dans le stade, pendant un moment le contraste entre l’obscurité de la pièce dans laquelle je me trouvais et la lumière du jour me fait plisser les yeux. Mes pupilles dilatées ont du mal à rentrer en myosis, mais après un petit moment tout va mieux, ce qui n’était qu’un grand voile blanc commence à prendre forme et le terrain se pose alors devant moi.

Je m’avance doucement jusqu’à l’arbitre, à côté de lui se tient une autre shinobi, elle est jeune, peut-être un peu plus que moi, je ne sais pas, en tout cas il semble maintenant évident que ce sera mon adversaire. Une fois à leur niveau je m’arrête, je jette un regard rapide à l’arbitre, puis à la jeune fille en face de moi. Puis je laisse apparaitre un large sourire pour essayer de détendre l’atmosphère, je dis alors :

-Me voilà, désolé du retard, j’espère que tu ne m’en veux pas ? En tout cas j’aimerais que tout ce qui se passe dans cette arène entre nous ne soit pas pris pour argent comptant, je serais atristé de savoir que l’on ne pourra jamais s’entendre à cause d’un examen.

Je lui ai dit tout cela en gardant le même sourire du début jusqu’à la fin, le même sourire qui vous fait croire tout ce que je peux dire. Je fais quand même une belle hypocrite, mais cela n’a pas d’importance à mes yeux, je l’ai toujours été et je le serais toujours, et ce n’est pas demain la veille que cela changera, car les autres n’ont pas de valeur, la seule chose qui compte c’est ma réussite.

La tournure de phrase employée annonçait déjà le personnage, des mots qui vous disent que l’on s’entendra comme les deux meilleures amies du monde malgré ce combat, alors que le corps dit tout le contraire par ses tremblements et son excitation. Elle ne cache même plus son regard, désolé ma pauvre, mais tu vas devoir te perfectionner avant de pouvoir faire passer cette pilule ne serait-ce déjà qu’à un enfant :

-Je vois…

Mon sourire s’efface progressivement, j’enlève mon origami de mes cheveux et le laisse tomber sur le sol, alors que l’arbitre lève le bras tout en demandant si nous sommes prêtes. Question tout à fait inutile, et cela tout le monde aurait pu le savoir, mais tout de même posée pour respecter le protocole. J’ai face à moi une véritable boule de nerfs, ce début de match ne sera pas de tout repos, je vais devoir réagir vite et efficacement, si le combat s’éternise, je pourrais alors peut être profiter de son excitation, mais nous n’y sommes pas encore.

Le bras de l’arbitre s’abaisse d’un coup sec, et sa voix résonne alors dans tout le stade, alors que le public est maintenant fixé sur deux jeunes filles n’attendant alors qu’une chose, qu’elles se crêpent le chignon. J’en rigolerais presque, et ce malgré le fait si la scène ne s’y prête désormais plus car en face de moi l’attente a fait place à l’action.

C’est avec une vitesse incroyable que mon adversaire se jette sur moi, sans coup de semonce et sans hésitation. Elle aurait pu me surprendre si elle avait su contenir toute sa nervosité lors de notre petit échange des plus amical. Le choix est simple, soit je réponds à sa provocation en lui fonçant dessus, toute lame dehors, quitte à subir les dégâts de l’attaque qu’elle me prépare, soit je tente de me protéger et de faire une contre-attaque. Finalement mon choix se porte sur la deuxième options, j’effectue quelques mudras, et j’attends de voir ce que va faire mon adversaire pour savoir si oui ou non ce choix fut rigoureux, bien que le mot attendre soit plutôt mal choisit car à peine ais-je fini d’exécuter le signe final de ma technique, que la kunoïchi est sur moi. Tournoyant sur elle-même, de fins cristaux s’échappent dans tous les plans de l’espace. Avec un peu de retard, un immense origami se forme à mes pieds, je recule rapidement pour ne pas me trouver dans son aire d’effet, ce qui me vaut de subir quelques dégâts au niveau du bras gauche, qui me servait alors à couvrir mon visage, de la part des cristaux qui volent de manière centrifuge depuis la petite boule de nerfs qui me fait office d’opposante. Cela n’a rien d’agréable malheureusement, cela fait même plutôt mal, mais le diamant de papier a pris sa forme finale, et son envergure me couvre désormais des projections adverses.

Sans perdre un instant j’enchaine une technique, je fais apparaitre rapidement un de mes clones, qui sort alors son wakisashi, le diamant de papier me séparant toujours de ma « nouvelle amie », elle ne peut pas avoir vu ce qui vient de se passer, ni ce que je vais faire, j’en profite alors pour aller me cacher derrière un rocher en prenant bien soin de ne pas laisser de traces de pas ou de sang :

-Tss que de chakra gâché…

Je laisse échapper de manière quasi inaudible ce qui pourrait passer pour un mécontentement, alors que je sais que le plus gros du combat vient déjà de se dérouler, sans que personne d’autre que moi ne sache réellement pourquoi.

Une fois en position je fais disparaitre l’origami, mon clone s’élance alors à travers, comme surgissant du papier qui retombe sur le sol. Le bras armé, il se prépare à donner un large coup d’entaille avec mon petit sabre favori. J’espère au moins que mon adversaire sait se défendre au corps à corps, car à la distance où il a exécuté sa technique par rapport à l’origami, il n’aura que peu de temps pour voir apparaitre mon clone, réfléchir à ce qu’il va faire et le mettre en application pour ne pas subir le contact si froid et désagréable du métal au sein de la chair tranchée.

Spoiler:

-La différence entre deux shinobi de même niveau qui s’affrontent ne se fera pas à la force des techniques, car ils auront beau s’affronter des heures et des heures face à face, ils s’épuiseront aussi vite que s’égrainent les secondes dans un sablier, sans jamais prendre le dessus. C’est celui qui prendra le bon choix qui fera la différence. Le seul problème c’est que souvent ce choix doit être pris au bon moment, prenez le trop tôt ou trop tard et vous passerez alors d’une action brillante à l’une des plus démunie d’intelligence, offrant au passage votre flanc à celui qui vous fait face.

C’est incroyable comment les anciens ont le don de sortir des choses qui sont d’une évidence implacable et qui paraissent si simple quand on les écoute, alors qu’une fois devant le fait accompli il n’y a rien de plus dur que de mettre leurs conseils en application. C’est vrai qu’un combat de shinobi n’est en soit qu’une suite de choix, et c’est celui qui fera les meilleurs choix qui l’emportera, mais comment différentier le bon choix du mauvais ? La preuve que la réponse n’est pas que dans la parole des anciens, mais aussi dans l’expérience personnelle du combat. Même si je suis jeune j’en ai fait déjà quelque uns des combats, et il m’est apparu que le meilleur choix c’est celui qui s’éloigne le plus de toute pensée logique car la logique c’est ce qui dirige plus de 99% des gens et que pour anticiper ce que va faire son adversaire on pense trop souvent qu’il va suivre une logique implacable et universelle.

Ça y est, mon clone vient de se faire avoir, il aura réussi à lui infliger une blessure, nous voilà donc quittes. Il ne lui faudra pas beaucoup de temps avant qu’elle ne devine où je me cache, choisir un rocher qui se trouve à peine à dix mètre de ma position initiale n’est certainement pas la meilleure cachette si l’on veut s’y éterniser. J’attrape deux parchemins explosifs avec ma main gauche, elle est parcourue de fourmillements et a du mal à se refermer correctement sur les deux feuilles. L’une des aiguille a dû donner un léger choc au niveau de mon nerf ulnaire, ça passera, je ne m’en fait pas trop pour ça.

J’entends des bruits de pas non loin, elle approche, voilà donc l’heure du choix, je passe rapidement les deux parchemins dans ma bouche, et exécute quelques mudras.

A dix mètres de moi à l’emplacement où mon clone s’est fait avoir, le papier retombé sur le sol semble parcouru de frémissements, une dizaine de feuilles commencent à se plier toutes seules, rapidement elles ont pris la forme de kunaï et de shuriken. Soudain les armes de jets se mettent en mouvements et se dirigent alors vers la konohajin, ou devrais-je dire vers moi puisqu’en fait je les attire tel un aimant mais entre ces simples pliage et ma chevelure rose se trouve ma cible réelle.

Entre temps, je vois apparaitre Shio, elle m’a débusqué. Sans hésiter je me jette vers elle tête baissée, de mon bras droit je lui pousse son avant-bras qui lui sert de support à son bouclier. J’essaie ainsi de lui enlever la couverture que lui procure cet élément de cristal. Ma main gauche qui a récupéré les deux parchemins explosifs s’avance vers son torse. En voyant les aiguilles qui me sont destinées j’esquisse un léger sourire, je vais toutes les recevoir, toutes à pleine puissance, je vais toutes devoir les encaisser jusqu’à ce que mon adversaire soit définitivement hors combat, je ne sais pas si mon corps en sera capable, mais tant que l’esprit est là, je devrais tenir. Ma main estropiée a presque finit son travail, dans une dernière extension je donne à mon adversaire une impulsion qui devrai lui faire perdre l’équilibre et qui au passage devrai m’éloigner assez d’elle pour ne pas trop subir les dégâts engendrés par l’explosion que je lui réserve :

-Sans rancune hein ?

Je retombe en arrière, me laissant entrainer par mon propre poids avant d’atterrir sur le dos à endroit où je m’étais caché, au même moment où l’explosion de mes parchemins retentit. Que ce soit par devant avec les parchemins explosifs ou par derrière avec mes kunaïs, je ne lui ai pas fait de cadeau, de toute façon je n’étais pas là pour lui en faire. Par contre c’est vraiment désagréable ces aiguilles, ça pique sur l’ensemble de mon corps, je risque d’avoir du mal à me relever correctement, mais il le faut si je veux gagner ce match…

-Comment savoir si c’est au bon moment que vous faites votre choix ? Voilà une excellente question, en fait c’est tout bonnement impossible de le savoir avant, vous ne le savez qu’une fois que vous sortez victorieux ou perdant du combat.

Décidément ils en ont de bonnes ces vieux séniles…

Spoiler:

Deux jours plus tard…

-C’est une véritable chance pour vous que l’arbitre soit intervenu, sans cela, votre bras droit aurait été définitivement hors d’usage, votre plexus brachial a subi un gros traumatisme, et votre artère axillaire a été touché par le cristal de votre adversaire, ce qui a entrainé une importante hémoragie, s’il avait progressé encore un peu plus c’est l’ensemble des nerfs qui auraient été sectionnés.

Allongée sur un lit aussi blanc que mes feuilles de papier, mon regard se perdait sur mon bras droit. Il était encore parcouru de légers fourmillements désagréables, et les gestes précis et fin m’étaient impossibles, se traduisant souvent par des mouvements brusques des doigts et de forts tremblements incontrôlables.

-Ne vous inquiétez pour ces symptômes, ils passeront d’ici quelques jours, le temps que tous les neurones recouvrent leur intégrité. Sur ce je vous laisse, j’ai encore une dizaine de combattant à voir, ce tournoi est une véritable attraction populaire, mais c’est une catastrophe du côté médical.

La porte se referma doucement sur le ninja médical qui était venu me voir, me laissant seule dans cette chambre des plus glauques. Du blanc partout, aucune couleur à part quelques bandes bleues placées ici et là renforçant encore plus le côté froid et non avenant de la pièce. Mon lit avait une position centrale entouré par les pieds à perfusions, les tensiomètres et autres éléments médicaux plus ou moins nécessaires à ma santé. J’attrapais la potence avec mon bras gauche bandé et me relevais doucement sur mon lit pour adopter une position assise plus confortable. Ma poitrine et l’ensemble de mon torse étaient bandés, c’était la zone principale où j’avais subit les dégâts des aiguilles lors de mon attaque. Je pourrais passer en revue l’ensemble de mon corps ainsi, sans oublier la douleur qui persiste encore malgré les nombreux antalgiques que l’on m’a donné.

Je me perds pendant un moment dans mes souvenirs, cherchant à refaire toute la lumière sur ce qui s’est passé à partir de ma chute. Il faut dire que les multiples chocs on pas mal altéré ma conscience pendant ce court instant qui fut celui décisif du combat. Les premiers souvenirs qui me viennent sont ceux qui viennent juste après avoir posé les deux parchemins explosifs, et je ne suis pas sûre de leur exactitude, je me revois tomber en arrière, pensant la konohajin trop déséquilibrée pour pouvoir exécuter encore une autre technique. Il faut croire que mon bras gauche était plus atteint que je ne le pensais, car l’impulsion n’a pas dut suffire et Shio a réussi à placer quelques mudras, m’envoyant alors une décharge électrique, à moins que ce ne soit autre chose, je ne sais plus, mais l’effet principal fut que mon corps se retrouva entièrement engourdis, ainsi que mon esprit, laissant apparaitre un trou noir dans mes souvenirs.
Ensuite ce n’est pas une vision qui me revient en premier, mais une sensation, oui mon épaule droite, c’est à ce moment-là que mon artère machin chose a dû être touchée, je n’ai vraiment aucun souvenir visuel mais la douleur elle je m’en souviens bien, j’ai senti un élément important pénétrer ma peau et ma chair comme un couteau le ferait sur du beurre. Certainement un cristal comme l’a dit le médecin. Mais ce que je ne comprends pas c’est qu’à ce moment où je pensais finir démembrée, je ne ressens plus la progression de cette douleur, et au lieu d’avoir une position allongée sur le dos, je me retrouve sur les deux pieds. Je ne pouvais pas m’être relevée toute seule, j’en suis certaine, il s’est passé quelque chose mais quoi.
Soudain les paroles du médecin me reviennent, l’arbitre, voilà la raison de ce brusque changement de position non expliqué. Tout me reviens maintenant, il est intervenu, il n’a pas pu résister devant le sang d’une jeune fille blessée, petite nature va. Pourtant il savait pertinemment qu’en faisant cela il me disqualifiait d’office, d’ailleurs je lui en ai voulu, j’ai essayé de lui donner un coup avec ma main gauche, mais il l’a stoppé net, trop lente et trop exténuée, je me suis alors agenouillée, sentant mes forces me quitter aussi vite que le sang coulait de ma blessure à l’épaule. Je lui en veux encore, à cause de lui j’ai perdu alors que je suis sûre que mon adversaire devait être dans le même état pitoyable que moi. Mon dernier souvenir est celui d’un regard qui s’est posé vers le rocher où tout s’est joué. J’y vois trois ninjas médicaux penchés au-dessus d’un corps inerte, le terrain est labouré, bien plus encore que ce que mes deux parchemins auraient pu faire. Après c’est noir complet, je crois que je m’évanoui à ce moment-là, de toute façon cela n’a plus d’importance, j’ai recouvert l’essentiel, ce qui explique largement mon état.

Pendant un moment je resserre ma main droite de façon nerveuse, seule je peux laisser aller mes sentiments, je me laisse envahir par une rage sans nom, je m’en veux pour la première fois depuis bien longtemps, j’en veux à l’arbitre et étrangement je n’ai aucune pensée mauvaise envers celle qui m’a mise dans cet état. Pourquoi lui en voudrais-je, tout ceci n’avait rien de personnel comme je l’ai dit au début de notre combat, ceux qui sont responsables de mon état sont ceux qui ont laissé un tel évènement avoir lieu, les Shinobis. Ma main est totalement tétanisée, les muscles n’arrivent plus à desserrer leur emprise et bientôt la contraction se communique à l’ensemble de mon bras, remontant jusqu’à mon épaule meurtrie, la contraction est tellement violente que la plaie encore fraichement recousue semble en partie céder. En plus du sang qui vient désormais colorer mon pansement, une violente douleur irradie l’ensemble du membre et la contraction cesse d’un coup. Je laisse échapper un profond soupir afin de contenir la douleur et je retourne à ma position allongée, me laissant glisser sous la couverture, cherchant calme et repos.


[hrp] Voilà c'est terminé, je suis donc la grande perdante de ce combat, merci d'avoir passé ce moment d'écriture avec moi ce fut bien plaisant ^^.[hrp]