À la tombée du crépuscule, un sombre voile épais et obscur venait recouvrir le paysage aride du désert, effaçant tout l'attrait chaleureux et joviale de Kaze pour dévoiler un deuxième visage qui n'apparaissait qu'au coucher du soleil. C'était le commencement de la vie nocturne au cœur d'un monde de plaisirs et de délices qui s'offrait aux habitants comme aux voyageurs du pays.

Parmi les dizaines de quartiers qui existaient à travers tout le territoire, le plus imposant se nommait Yoshiwara aussi surnommé la « nuit éternelle ». Ses bâtiments étaient illuminés de plusieurs lumières rougeoyantes en harmonie avec la couleur dorée du sable qui composait ses terres. Il ressemblait à un festival nocturne animé par les auberges et comptoirs ainsi que de multiples maisons où vivaient également des catins. Charmantes. Envoûtantes. Attirantes.

C'était un monde coupé de l'extérieur qui ressemblait à un mirage où se réalisait les rêves, mais aussi les cauchemars. La surveillance était plus pauvre que dans les grandes villes. Les crimes se trafiquaient en masse dans l'ombre, les lois de cet univers semblaient différentes des villages. Ce qui se produisait à l'intérieur de son enceinte durant la nuit demeuraient secrets du jour comme un rêve qui prenait fin dés l'instant où le soleil se levait, mais qui se poursuivait au prochain coucher. Dés l'instant où un pied était déposé dans l'enceinte du territoire, on était comme tombé dans le piège et on revenait la nuit suivante. Boire. S'enivrer. S'abonner.

Il était difficile de s'en détacher une fois que l'on était sous les effets du sortilège qui retenait prisonnier les passants comme des papillons de nuit. Ils étaient attirés par cette source lumineuse qui les guidaient à travers la nuit noire du monde extérieur. Ces créatures devenaient hypnotisées par la beauté et le charme de ce paysage si particulier. Il dégageait une douce sensualité qui enveloppait l'atmosphère dans un arôme de bonheur.

Tu venais fréquemment passer tes soirées dans les rues de ce quartier pour te libérer de l'ennui continuel de ton quotidien morne et fade. Tu te plaisais à admirer l'activité de ce monde où flottait dans l'air tout un parfum ensorcelant que tu respirais à pleins poumon. La douce chaleur du soir parcourait ton corps comme caresse voluptueuse te procurant un instant de joie faisant frissonner ton corps de bonheur.

Tu te laissais imprégner de l'ambiance comme un fantôme qui se mélangeait parmi les passants avec ton masque aux mille visages. Ces balades composaient tout le plaisir que tu avais à vivre dans le désert de Kaze. Lorsque tu étais fatiguée de marcher, tu pouvais aller dans un comptoir savourer de l'alcool et endormir ton âme dans un profond sommeil de rêvasserie.

Installée à une table solitaire, tu observais ton entourage comme un défilement d'images coupé de ton monde. Tu voulais chercher de la compagnie pour cette belle soirée. Ton regard se posa sur la présence d'une jeune femme assise à la table voisine. Elle portait quelques indices qui révélaient d'elle une combattante aguerris dans son regard, dans sa posture, dans sa forme. Étirant un léger sourire, tu avais comme le sentiment qu'elle avait quelque chose d'intriguant. Posant une main sur sa table devant elle, tu attiras son attention vers toi avec un léger sourire tracé sur tes lèvres.

« Bonsoir, vous avez là un joli sabre.. Vous m'avez l'air bien seule à boire votre verre, que diriez-vous de ma compagnie ? » Fis-tu avec une mine attirante.

J'étais là, dans un de ces bars du centre-ville, depuis quelques heures déjà. Le temps passait et mon client ne s'était toujours pas montré. Ce petit salaud m'avait posé un lapin ! C'était le karma qui me punissait, pour avoir accepté de vendre de la contrebande à un sale gosse de riche qui croit que le monde entier lui revient de droit. Ce n'était pas dans mes habitudes d'accepter un client inconnu et ça ne risquait pas de m'arriver de si tôt. Ce n'était pas ses supplications à genoux qui m'avaient fait accepter le marché, non ; plutôt la perspective d'avoir un nouvel ami dont le père possédait la quasi-totalité des bordels de Suna. Autant dire, un bon paquet d'argent.

Quitte à ce que cette soirée ne soit pas fructueuse, autant que je reste ici me noyer dans l'alcool plutôt qu'à mon appartement. Mes cocktails maison n'étaient pas aussi raffinés que ceux réalisés par le très séduisant barman de ce bar déglingué. Est-ce que j'avais déjà couché avec lui ? Je ne me souvenais plus. Mais les longs regards rempli de... tendresse... qu'il me lançait depuis le début de la soirée me laissaient penser que c'était le cas. Bah, si je m'ennuyais vraiment, je pourrais toujours le ramener à la maison à la fin de son service. Ou alors dans les toilettes du bar... Ah ! Les toilettes ! Ça me revenait à présent. Oui, je me souvenais... pourtant bien bâti, mais assez lent. Heureusement que j'étais habituée à mener la danse.

Alors que j'étais perdue dans mes pensées, une main se posa sur ma table. Féminine, si j'en croyais la délicatesse des doigts. Déjà un peu sous l'effet de l'alcool, il me fallut quelques secondes pour remonter le long de son bras, passer son épaule et arriver jusqu'à son visage, non sans jeter un bref coup d'oeil à sa poitrine. Ses traits étaient fins et un sourire était dessiné sur ses lèvres, mais elle m'était totalement inconnue. Elle me complimenta sur mon sabre. « Et encore, tu n'as pas vu celui du barman. » Pensais-je, laissant un sourire apparaître à son tour sur mon visage, répondant au sien. Elle me proposa ensuite sa compagnie.

« Mademoiselle, votre compagnie m'est plus qu'enviable. Prenez donc place à mes côtés, je vous prie. » Répondis-je sur le même ton qu'elle tout en appuyant mon dos contre le dossier de la chaise.

Je fis un signe au serveur, lui demandant d'un geste de la main de nous apporter deux autres cocktails.

« Et donc... Pourquoi une jeune femme comme vous traîne dans un bar aussi peu recommandable ? » Déclarais-je avec un sourire charmeur.

Poussant la chaise en arrière, tu pris ton aise pour t'installer confortablement à la table de la jeune femme, pendant que le charmant barman derrière son comptoir se chargeait de vous préparer deux verres alcoolisés. Cette dernière semblait déjà être quelque peu sous l'emprise de l'ivresse, maladie semblable à un songe endormant les esprits. Tu pouvais sentir un léger parfum de liqueur s'émaner de sa personne. Posant ton regard dans le sien, tu répondis d'une douce voix suave à sa question intrigante.

« Trouvez-vous ce bar peu recommandable ? Pourtant, je le trouve très charmant. Je ne viens pas souvent dans ce bar à cause de sa position légèrement plus reculée de l'allée principale, il faut dire que je change d'établissement à chacune de mes promenades nocturnes ici, mais l'ambiance de cette salle est tellement agréable que je me sens déjà comme une habituée.

C'est l'effet captivant de ces effluves qui flottent dans l'air, de ces couleurs chaleureuses qui éclairent les rues, de cette musique ensorcelant chacun des passants. Vous pouvez dire que toutes les personnes qui boivent actuellement ici ne sont pas des plus recommandables, pourtant ils sont tous plutôt charmants, les serveurs comme les invités. »

Plusieurs des clients étaient des hommes ou des femmes tatouées fumant une pipe avec un sourire vicieux sur les lèvres, mais dans le fond, tu n'étais pas tellement différente de ces personnes. Ton esprit même partageait cette même passion pour les vices, l'alcool, le crime. Le monde souterrain était un univers passionnant qui ne manquait jamais de divertissements. Si tu n'étais pas une noble sang pur du clan Ketsueki, tu serais sans doute comme ces criminels rampant dans l'ombre jouissant des plaisirs de la vie. Malheureusement, tu avais une image à tenir en journée.

« Et vous alors ? Êtes-vous une kunoichi ou une mercenaire travaillant dans l'ombre ? Porter une arme sur soi n'est pas quelque chose d'autorisé à moins d'être un petit soldat du village caché du sable. Vous ne craignez pas ruiner votre réputation en allant vous promener dans tels lieux, vous m'avez également l'air d'être une habituée de ce bar. Venez-vous pour observer l'ambiance afin de tuer votre ennui ? Ou peut-être venez-vous pour trouver de la compagnie afin de consoler votre solitude, mh ? Je ne me suis pas présentée, je me nomme Tsubaki, puis-je connaître votre nom ? »

Ce n'était qu'une forme de politesse. Pendant ce temps, le serveur revint avec deux boissons colorées d'une jolie lueur cyan et magenta. Saisissant l'un des deux verres, tu le portas doucement à tes lèvres.