ça faisait bien plus d’un an exactement qu’Ether avait quitté Suna après l’attaque.
Plus d’une année qu’elle n’avait plus tenté, ne serait-ce qu’une seule fois de s’y rendre.
Mais aujourd’hui était différent. Maintenant la jeune femme était considérée comme une véritable citoyenne de Kaze no Kuni. Ce qui signifiait qu’elle pouvait se déplacer sans craindre de véritables représailles pour son irrégularité. C’est pourquoi, ça lui avait pété, la Gogyou se dirigeait à présent vers Suna. Normalement, à son passage à la voie illusionnée, tout devrait bien se passer. Les nouvelles à propos du village n’était pas particulièrement rassurantes, et elle souhaitait voir où en était les gens qu’elle avait croisé lors de son dernier et unique passage. Après l’annonce du décès du petit Mizu par courrier, elle préférait s’assurer que l’hécatombe n’avait pas été plus grande. Mais surtout… Ether venait voir Ema. Pourquoi ? De un, parce qu’elle la considérait comme son amie, même si elles ne s’étaient vues que deux fois – très affectueuse la petite venteuse – et de deux, parce qu’elle avait appris lors de son déplacement sur la capitale avec l’Ancien, que le Kage avait été démit de ses fonctions. Et le Kage, bah c’était Kibo aux dernières nouvelles rapportées par les moines. Et Kibo, qui était-ce ? Le ninja qui vivait dans la même maison qu’Ema, comme ses parents. Qu’était-il arrivé à la sunajin, allait-elle bien ? Qui était cet Ogami, considéré comme régent ? Non pas qu’elle en avait réellement quelque chose à faire de la nouvelle tête pensante, mais elle désirait avant tout voir sa camarade.
Avait-elle changé ? Que faisait-elle à présent ? Le village avait-il reprit du poil de la bête ? Suffisamment pour faire la guerre à Konoha en tout cas… Peut-être qu’Ema en savait davantage à ce sujet. Mais pas sûr qu’Ether en comprenne la raison de toute manière. A ses yeux, la violence n’avait pas le moindre sens, et la sunajin l’avait bien remarqué. L’élémentaire espérait également que leur câlin ne lui avait pas porté trop de préjudice. Au dîner d’il y a un an, Kibo n’avait pas l’air d’avoir apprécié cet acte. Mais la jeune femme n’y pouvait rien, c’était comme ça qu’elle était, une guimauve très gentille ! Tout en marchant à travers le désert, la blonde observa ses mains. La reconnaîtrait-elle ? Physiquement, elle n’avait pas vieilli du tout. Les seules choses différentes étaient ses tatouages et sa peau qui avait encore brunit. Pas de quoi affoler les mémoires !

Le voyage ne fut pas long, quelques jours tout au plus, comme d’habitude, et elle finit par arriver à la porte du village cachée du sable. Elle regarda avec une certaine fierté la Voie Illusionnée. Et ouaiiiiis, j’ai participé à la reconstruire steuplé ! Oui bon, ça changeait pas qu’il fallait passer par le protocole de je-ne-sais-pas-quoi comme tout le monde. La jeune femme se présenta d’elle-même aux personnes de l’entrée.

« Bonjouuuur ! J’m’ap… Je suis Ether Hashimoto, de la tribu kazejin Hashimoto. », ça faisait bizarre de dire ça tiens… La demoiselle sortit sa preuve d’identité, « J’viens pour voir des amis d’longue date. J’resterais que quelques jours, j’pense. Enfin, si j’suis autorisée à rentrer bien sûr, z’êtes pas obligés hein ! … Mais j’aimerais bien. »

Bah ouais, ça serait con d’être venue pour ne pas pouvoir entrer, non ?
Allez, j’suis sympa et je souris en plus ! Et j’suis bien habillée pour une fois. Des tissus propres, pas de sable, rien de rapiécé ! Nickel quoi.

Alors qu’elle patientait bien sagement avec son sourire niais que les gardes s’occupent des formalités, un blondinet fit son entrée, en contestant l’existence de sa tribu. La jeune femme tourna la tête vers le sunajin et observa son visage méprisant pendant quelques secondes. Sa posture attestait d’une confiance en soi assumée, voire même un ego surdéveloppé. Au ton de sa voix, il pouvait paraître très imbu de lui-même, mais ne partant que sur des suppositions, Ether choisit de ne porter aucun jugement hâtif sur le garçon. Après tout, peut-être qu’il était sympa !

« Oui, ça existe. Et c’est la mienne ! », dit-elle sur un ton chantant.

Le soldat occupé sur les registres confirma ses dires, et la demoiselle eut un sourire d’autant plus lumineux. Alors c’était bien vrai, ils étaient même inscrits dans ce cahier et tout ! Hi hi, elle était contente ! Et elle ne s’en cachait pas. L’homme exprima ensuite une opinion intéressante qu’elle ne comprit pas tout à fait, ce fut pourquoi elle répondit tout naturellement ;

« Et qu’d’autres trouvent encore l’temps d’faire l’gentil concierge. Il a l’air sympa vot’ métier en tout cas ! », répondit-t-elle avec une naïveté désarmante et sans la moindre once de moquerie, « Vous voyez du monde, c’cool ! J’espère qu’z’êtes pas tout seul pour ouvrir ou fermer la porte, elle doit être lourde. »

La façon dont il expulsa son nom d’entre ses lèvres, finit de dresser le portrait du sunajin. Egocentrique, dédaigneux, orgueilleux… Jamais la Gogyou n’avait vu autant de ce qu’on appelait défauts dans un seul corps de Normaux, mais il semblait vivre avec, ce qui était plus que louable. Vivre avec un tel soi-même devait être épuisant, non ? Pour autant, le cas humain se trouvant devant elle était plus qu’intéressant ! La façon dont s’étiraient ses traits, la forme du visage, la façon dont se tordait sa bouche en un rictus, décidément, l’élémentaire ne se lasserait jamais de les observer. Ils étaient si expressifs même dans le plus simple des gestes ! Tout en ce garçon attestait de sa personnalité, c’était en ça qu’ils étaient fascinants. Malgré le comportement évidemment méprisant du blondinet, toutes les pensées de la demoiselle n’étaient en aucun cas négatives, au contraire. Ce n’était qu’une observation. Après l’avoir examiné avec une grande curiosité – elle s’était pour cela rapproché pour le voir de plus près - elle finit par lui répondre, toujours muni de son éternelle joie de vivre.

« J’viens voir Ema, ça fait longtemps qu’j’l’ai pas vue ! Et p’têtre qu’j’trouverais Hisoka, Asuka, Bao, Ruri… Et m’faire d’nouveaux z’amis ! Puis lire des livres aussi ! V’nir au marché pour les miens ! Ah bah ça prendra p’têtre plus de temps que quelques jours… », remarqua-t-elle avant de se tourner vers les gardes à qui elle s’était présenté au départ, « J’peux changer ma réponse à propos des jours et l’transformer en semaines ? », ajouta-t-elle en souriant joyeusement, « J’vous embêterais pas, promis ! Puis… », elle sortit un sac de kraft un peu froissé, « … Cadeau ! C’est des beignets d’fruits faits par ma mère. Sont très bons ! »

Toujours ce grand sourire sur son visage rayonnant.

Étrangement, ce qui ennuya la Gogyou ne fut pas le comportement plus que détestable du sunajin, mais plutôt le fait qu'il privait ces pauvres soldats d'un petit encas. Ils avaient l'air d'avoir faim. Elle crut même surprendre des gargouillis provenant d'un des deux ventres. Le sourire de la jeune femme ne disparut pas pour autant de son visage, mais elle jeta un regard au sachet de kraft avant de finalement hausser les épaules. C'pas grave, elle en avait un autre ! Le concierge ne semblait d'ailleurs, pas apprécier qu'on lui rappelle son métier. Beuh, pourtant c'est un travail très sympa d'être concierge, non ? Ce dernier se mit à parler de corruption et Ether fronça légèrement les sourcils, lui jetant un regard interrogateur.

« Ko-rup-sion ? J'comprends pas. Mais je vous suis  », dit-elle joyeusement.

Elle fit mine de ne pas avoir relevé le terme « sous-race », mettant ça sur le compte de l'égocentrisme du garçon. Il devait probablement souffrir d'un complexe d'infériorité pour ressentir le besoin de rabaisser à ce point les autres. Il ne correspondrait pas du tout à un humain pour « sortir avec ». Oui, elle avait un jour écouté les Normaux discuter entre eux à ce sujet qu'elle, soyons honnêtes, n'avait absolument pas compris de la même manière hein. Donc, si elle récupérait leurs conditions pour « sortir » avec quelqu'un, il fallait qu'il soit beau, drôle, cultivé, intelligent, macho « mais pas trop », musclé « mais pas trop », attentionné, délicat, poli, sensible.... Les humains étaient décidément très exigeants pour simplement vouloir aller se promener dehors avec quelqu'un. Pourquoi avoir besoin de tout ça pour prendre l'air ? C'est bizarre. Décidément, y'a plein de choses qu'il fallait qu'elle apprenne sur leur façon d'appréhender la vie. Enfin bref, en gros, bah ce concierge ne pourrait jamais se promener avec quelqu'un dehors autre que lui-même. Ça devait être triste de ne pouvoir marcher qu'en sa propre compagnie. Certes, elle ne pouvait pas se prononcer sur le beau, vu qu'elle n'avait aucune notion de ce qu'était la beauté, drôle meh, cultivé apparemment pas, intelligent – bah il avait pas l'air d'avoir inventé l'eau tiède – macho ouais mais trop, musclé pas du tout, attentionné – ça dépendait du point de vue – délicat la blague, poli – pas sûr qu'il connaissait la définition – et sensible... Aha, n'exagérons rien !
D'un côté, il restait très drôle dans sa façon d'être ! C'était en partie pour ça qu'elle continuait de sourire. Il était amusant de le voir se complaire dans son ridicule petit jeu. Ça tombait bien, elle était d'humeur à rire ! Le suivant sans rouspéter, elle entra dans la pièce puis patienta bien sagement. Le sunajin alluma ce qui – elle s'en souvenait ! - devait être une « sigh-arête », un bâton de papier qui fait de la fumée et qui pue. L'odeur était inconvenante mais elle ne dit rien. Il posa également ses pieds sur la table ce qui intrigua la jeune femme. De un, parce que dans sa tribu, il n'y a pas de table, mais de deux, le peu de fois où elle en avait vu, les gens s'en servaient pour manger dessus. Peut-être que monter dessus était une autre de ses fonctionnalités ? Il faudrait demander à l'Ancien ! Il lui fit ensuite une pseudo-morale, disant que Suna n'était pas un camp de vacances. Un camp de vacances ? C'était quoi ? Et il rajouta que ce qu'elle désirait faire au sein du village lui donnait envie de vomir. Ce à quoi elle répondit immédiatement, un brin d'inquiétude dans la voix ;

« Z'êtes pas bien ? Mais vous n'devriez pas travailler si vous'êtes malade ! Vot' chef devrait comprendre. », dit-elle avec sincérité.

On a beau être le dernier des malotrus, personne ne devrait se forcer à faire quelque chose quand la santé ne suit pas ! Puis elle n'oublia pas de réagir à ses dires.

« J'sais pas c'qu'est un camp de vacances, mais j'me souviens pas qu'Suna ait été appelé com'ça. »

A la remarque comme quoi ce sont ceux qui disent ne pas vouloir faire le bordel qui en font le plus, elle se contenta de sourire sans arrière-pensée. Puis se demanda ce que ces gens avaient bien pu pouvoir faire, avant de rapidement oublier ce à quoi elle pensait. Le sujet vint ensuite à propos d'Ema, ce qu'elle pensait de Kibo alias Matsuno Yamuro, si elle était venue l'aider à récupérer son poste de Kage, causer du tort au Régent, provoquer des émeutes, coller des affiches... Ether arqua un sourcil d'incrédulité. Ce qu'il disait était si stupide qu'elle aurait pu éclater de rire. Et finalement, elle s'exécuta lorsqu'il demanda si elle était une envoyée de la Feuille. Oh, c'était drôle, si drôle ! Elle riait avec une sincérité assez déroutante et n'arrivait pas à s'arrêter. Malgré le fait qu'elle soit pacifique et ne ressentait aucune haine envers le Pays du Feu pour avoir tué bon nombre des siens, il lui avait tout de même volé des frères, des sœurs. Elle ne leur souhaitait aucun mal, mais n''éprouvait pas non plus un intérêt très grand pour cette contrée. Alors le simple fait de s'imaginer être une konohajin avait de quoi la faire rire. Consciente que le sunajin en face d'elle était un être de sang chaud, elle finit par se contenir et par répondre franchement.

« Merci pour la blague, c'était très drôle ! », dit-elle en s'essuyant les yeux, « Nan, j'suis pas d'chez eux, j'suis Kazejin. Oui, j'connais Kibo/Yamuro, enfin, je l'ai vu deux-trois fois j'crois. C'que j'pense de lui ? Bah, comme j'lui ai pas trop parlé... J'dirais qu'le peu que j'en ai vu, qu'il était très sérieux et poli, qu'il avait l'air de tenir à son village. Mais j'ai entendu parler com'quoi, il a changé d'comport'ment, très obsessionnel, un truc comme ça, et qu'il est plus Kage suite à un soulèvement d'une partie d'la population j'crois, ou c'était plutôt un groupe restreint, j'sais plus, parce qu'il s'rait responsable du début d'la guerre. J'tais pas là donc j'sais pas ! »

Nuire au Régent ? Encore faudrait-elle qu'elle sache qui c'était ! On la mettrait face à lui qu'Ether ne le reconnaîtrait pas, vu qu'elle ne l'avait probablement jamais vu.

« J'sais pas qui c'est l'Régent Tora... Oga... Euh... », elle jeta un regard hésitant au sunajin, n'arrivant pas à trouver son prénom, « ça commence par Oga et ça finit par Mi. C'était pas Ogatatami, hein ? … OGAMI ! Non, Ogami, voilà, c'est ça ! Pfiuuu... m'en souviens enfin ! 'Fin non, j'vois pas qui c'est, j'pense pas l'avoir déjà vu. », dit-elle en riant avant de rajouter, « Pourquoi j'collerais des trucs ? A quoi ça sert d'coller des... Affiches comme vous dites ? »

Puis elle se contenta de le regarder de ses grands yeux bleus en attendant une réponse au « pourquoi coller des affiches ».