C’était d’un pas fort et presque menaçant que le personnage s’était avancé, ses empreintes s’enfonçant profondément dans la neige du pays. Depuis la récente rencontre avec le Suzurane du Passé, l’Empereur s’était perdu en discussion avec autrui, afin de rassurer certains, de complimenter d’autres sur les efforts et les contributions, et de montrer son intérêt pour l’avancée et le développement de l’île. Le travail des Samui sur la ville portuaire de Dhartsedo avait été fantastique, principalement mené par Ketsuen, un jeune qu’il avait en connaissance et en respect. C’était aussi une bonne occasion de recueillir les avis de chacun sur le Triumvirat.

Sur ce point, les gens restaient évasifs. Le retour de la Daimyo, très appréciée par le commun, était un vrai soulagement ! Et le Kamui fut surpris de voir certains le remercier de l’avoir épargné, contrairement aux destins d’autres Seigneurs Féodaux plus belliqueux et malveillants pour leur peuple. La coopération entre Samui et Suzurane passait … pour transparente. En soi, ces deux peuples se haïssaient depuis longtemps et c’était un fait connu de tous. Mais suite à la conquête du Pays par Kiri, les Suzurane s’étaient faits distants. Avec la création du Triumvirat, les Suzurane avaient pris une place plus importante dans la gestion et la sécurité du Pays. Mais c’était plus aux autorités communales qu’il échouait de répondre à cette question ; et l’Empereur ne manquerait pas de leur demander leur opinion sur ce point un peu plus tard.

Il avait maintenant une affaire à régler. Une affaire urgente, qui se résumait pourtant à un petit bout de papier. Un bout de papier où était inscrit le nom souillé d’un Yamada recherché dans plusieurs pays pour la plus haute trahison qu’un Ninja puisse accomplir une vie durant : trahir son Village tout en étant Kage, et ce pour une cause de cœur. Cette histoire était dissonnante et inacceptable à tant d’égards que le Samui était incapable de prévoir sa propre réaction quant à cette rencontre. Car un facteur supplémentaire devait s’ajouter à cela. Le fait que Kioshi ait accompagné un homme qui menaçait ouvertement la paix que le Shukaï avait mis en place. Autant dire que c’était avec un esprit martial, voire guerrier, que le Kamui se rendait sur place.

Arrivé au bar « En pleureur », l’homme sut se faire discret malgré la colère qui émanait de son corps. Grimpant une à une les marches qui le mèneraient à l’étage comme s’il y louait une chambre, il ralentissait le pas pour en observer le seuil. C’est à la quatrième porte qu’il repéra ce qu’on lui avait annoncé : du sable, qui semblait glisser de sous la porte. Le signe que l’ancien Maître du Désert se trouvait dans cette pièce. Le Ninja hésita un instant. Devait-il fracasser cette porte, et intercepter l’individu ? Devait-il être prudent, dans le cas d’un piège ? S’il préférait oublier la première idée, il ne renonçait pas à la deuxième – il ne fallait pas si facilement oublier qui le Yamada avait accompagné sur ces terres glacées.

Ouvrant d’un pas sûr et le regard déterminé, il s’arrêta sur la première ombre qu’il vit dans la pénombre des lieux. Refermant la porte, toujours en gardant le silence, il scruta rapidement les environs au cas où une quelconque traitrise devait se faire attendre.

~ Tu es recherché dans plusieurs pays, y compris ceux de l’Empire. Non pas pour être éliminé ou livré, mais avant tout pour te localiser et connaître tes intentions. Il va de soi que si ton choix est de suivre et de servir ce Suzurane que tu accompagnais aujourd’hui, l’ordre serait amené à changer … .

Des propos qui ne laissaient aucun doute sur le message essentiel de l’Empereur. Toute personne jouant dans un autre camp que celui de l’Empire jouait contre l’Empire. Et le vieux Kakeshuou n’était pas assez douceureux pour faire cas et cure des anciennes ententes et amitiés du passé. En cela, il était prêt à ressembler à Hakyô.

~ Tu as dit avoir des questions … . Demande – mais sache que tu auras aussi droit à ton lot, une fois que tu auras obtenu satisfaction … .

Spoiler:

La réponse du Yamada était plus que claire. Il se déclarait lui-même comme menace évidente, mais sans risque présent. Après tout, il « n’était » qu’un déserteur lambda parmi tant d’autres, « qu’un » ancien Kage aujourd’hui à l’air libre et désireux de poursuivre sa quête. Peu importe les relations qu’il tissait, et les contrats qu’il établissait avec d’autres mécréants sur cette Terre. Cela ne pouvait qu’inquiéter l’Empereur qui, de son côté, avait gardé son titre, ses responsabilités et son Devoir.

Et parmi ces responsabilités, en voici une qui avait le mérite d’atterir au premier plan. Dans une précédente correspondance, l’individu avait formulé une demande à son destinataire. La recherche d’une femme, une Ketsueki proche à son cœur. Bien que réticent, et opposé à l’idée que le Cœur s’impose à la Raison, le Kamui s’était engagé à jouer de ses relations et de ses moyens pour la retrouver. Un engagement auquel il était alors déterminé à se tenir.

Seulement voilà, les choses avaient depuis considérablement changées ! Non contente de ne plus être enlevée – ses actions ne le laissant plus supposer – cette femme faisait partie de ceux ayant attaqué des positions stratégiques du Shukaï près d’une année auparavant ! En débarquant au port de Dhartsedo, le duo mal intentionné avait semé le trouble et la destruction, avant d’être appréhendé par les forces de défense sur place, menée par le Shinda. Accompagné de son coéquipier, la jeune femme avait donc fait visite des geôles de l’ancien Shozaichi où elle était restée quelques mois. Et par la suite … .

~ Voyons les choses simplement. Celle que tu recherchais s’en est ouvertement prise à des infrastructures du Shukaï. Elle a dévasté le port où nous nous trouvons avec son acolyte, et son « groupe » - dont j’ignore tout encore aujourd’hui – a agi ainsi et de concert sur plusieurs de nos terres. Malgré les sentiments qui te lient à elle, je ne peux plus dans cette situation m’engager à te la ramener ou à te la livrer, du fait de ses crimes envers l’Empire.

Une réponse sèche, mais certainement compréhensible. Un Chef d’État, s’il veut être crédible, ne peut pas se mêler d’affaire de cœur et d’espoir. Lui a la dure responsabilité du présent et des Siens. Et relâcher une criminelle pour l’amour éperdue d’une ancienne connaissance ne pouvait être pensé.
Le ton n’était pas plus mielleux, malgré les remarques de l’ancien Kazekage. Le Dernier des Kiriijns restait toujours méfiant. Il avait déjà suffisamment payé ces derniers mois pour ne plus vouloir faire de cadeau. Son interlocuteur souhaitait mener un « interrogatoire » sur ses intentions ; soit. Mais cela ne se ferait pas sans compensations ; ni sans douleur si l’homme daignait s’aventurer hors des maigres avantages dont il bénéficiait.

~ Par ailleurs, la Ketsueki s’est échappée à l’aide de ses camarades dans l’année qui s’est écoulée. Et je ne savais pas comment te contacter. Autant dire qu’une fois l’évasion réussie et les faits étant ce qu’ils sont, il était alors inutile de te renseigner sur … rien. Tu as d’autres questions ?

Toujours aussi direct et froid … . Brrrr … .

Ayant obtenu satisfaction sur le premier point, le Yamada passait au second. Il tentait de toute évidence de sauver celle pour qui il avait tout perdu … . Rien de bien surprenant, en vérité, quand on connaît la nature humaine et la personnalité d’un homme qui avait tout trahi, tout abandonné pour la cause d’une seule femme. Une femme se révélant être plus destructrice et dangereuse pour la Paix que n’importe qui d’autre ! Avec sa troupe, ils avaient causé des dommages considérables ! Imposer la souffrance à de nombreux civils, battu en brèche les défenseurs de l’Empire ! Et ce serait pour une histoire de cœur, voire de fesses, que l’Empereur – ancien Capitaine de l’Ordre et de la Justice du Shukaï – devrait renoncer à la vengeance que son autorité lui permettait ?!

Son regard et son aura meurtrière montrait bien qu’une plaisanterie de ce genre n’était ni de bon goût par la présente, ni d’une grande ingénuosité. L’air devint froid en un rien de temps, et un chakra sombre se dégageait du corps du Kamui, comme s’il s’évaporait de sa peau !

~ … Kioshi … tu vas trop loin …

Menacer le Shukaï ? Et l’Empereur directement, qui plus est ?! Était-ce vraiment la meilleure stratégie qu’avait trouvée l’ancien Kazekage pour obtenir satistaction ? Les deux hommes s’étaient rencontrés plusieurs fois par le passé. Ils avaient conversé, échangé sur leur vision du Yuukan ; et avaient trouvé de nombreux points communs. En particulier ce désir de Paix, qu’ils voulaient instaurer sur l’ensemble des Nations, afin de protéger les petits des gros, les faibles des forts, les innocents des ambitieux. Réduire tous ces projets, cet Idéal, à néant pour l’intérêt d’une seule ?!

Les planches craquelèrent doucement … elles se contractaient sous l’effet de la lente torture glaciale qu’une bise gelée lui infligeait dans chaque rénure, chaque fissure, chaque nœud de bois. D’en bas, on pouvait entendre quelques « hola » de surprise, alors que le froid englobeait l’ensemble de la boutique. L’Ancien avait bien ressenti le chakra sensoriel de son interlocuteur sonder les environs. Il craignait une escorte ? Un comité d’accueil ? Pourquoi faire ! l’Empereur en personne était sur place, rien d’autre n’était nécessaire !

Kakeshuou Samui aurait pu briser le lieu en un milieu de fragmets de bois, de glace et d’os en peu de temps. Dans ce Pays, tout le servait. Pas seulement les hommes ! mais aussi la neige, le Vent, le Froid, l’Eau ! Le Pays des Neiges n’était qu’un immense réservoir naturel dont l’empreinte devait être un jour marqué par celui possédé par le Hikaïjuu, « le Démon des Glaces ». Yuki n’était rien. Yuki était Kakeshuou Samui !
Montrant un rictus mauvais, bougeant la tête de côté comme saisi de tics incontrôlables, le Dernier des Kirijins semblait lutter contre un désir intense de tuerie sanguinaire. Il contenait malgré tout cette violence du mieux qu’il pouvait afin de venir à bout de cette conversation.


~ … Tu l’avais retrouvé, tu m’as dit … . Elle t’a échappé par la suite … . Elle a dévasté ce port et une partie de ses habitants ! Elle s’est rendue coupable de crimes envers l’Empire, mais avant envers la Paix à laquelle aspire un pays neutre comme celui des Neiges ! … Et tu voudrais que je la libère ?! Qu’elle ne prenne pas conscience de ses actes, et qu’elle n’en paie pas les conséquences ?!

Le froid s’intensifiait. Maintenant, les murs de bois de la pièce étaient nappés de blanc ; un blanc givré, comme si la chambre devenait une sculpture de glace. En bas, la surprise laissait place à la panique pour certains, et aux cris de colère pour d’autres. Ils mettaient certainement cela sur le compte d’une météo plus capricieuse que d’habitude. Si vous saviez, pauvres sots !
Inspirant profondément, et expirant avec bruit dans un nuage de buée qui s’échappait de ses lèvres glacées, le vieil homme serrait le poing et fermait une seconde les yeux pour en revenir à l’ancien Rokudaime. Il se pinçait les lèvres maintenant … .

~ Il est vrai que je n’ai l’identité de personne au sein de ce groupe … et qu’il est ma première priorité … . Quant à l’Épée, je m’en moque, même si ton intérêt m’intrigue … . Mais tu joues les mauvaises cartes, Kioshi … . Pourquoi !! Tu veux libérer une criminelle qui s’en est pris au Shukaï ?! Tu accompagnes un ancien monstre dans sa quête de destruction ?! Et aujourd’hui, tu menaces de te placer directement contre nous ?! Où sont tes rêves de paix ! Et pourquoi ne pas assumer ta position hostile envers l’Empire une bonne fois pour toute ! Cette femme t’a déjà échappé une fois, elle pourrait le faire de nouveau !! Je me moque des noms, des épées et des condamnations des uns et des autres ! Quelles réelles contreparties peux-tu m’apporter pour que ce genre d’acte barbare ne soit plus commis contre l’Empire !

Il ne rejetait pas la demande du « Sans Village » ; mais les propositions n’étaient clairement pas dans l’intérêt immédiat de l’Empereur, qui ne pouvait tolérer qu’une nouvelle menace de ce genre perdure. Avec la guerre contre Kumo et le retour d’un Suzurane hanté par son passé, il avait déjà trop à faire pour poursuivre éternellement les mêmes prévenus, et les relacher pour des questions sentimentales !
La colère était maintenant dans les mots ; et en contrepartie de cela, la température de la pièce s’adouçissait peu à peu, la glace montrant quelques signes de fragilité. De toute évidence, le vieux briscard faisait son maximum pour conserver l’entente ténue entre les deux hommes.

Mais quel prix faudra-t-il payer pour cela ? Et venant de qui ?

Jouant de ses affinités et de sa nature, le Yamada adouçissait la pièce pour récupérer un semblant de contrôle sur les lieux. Prétendant vouloir l’entente, il n’en cachait pas moins sa résolution. Quoi, parce qu’il manipulait la Chaleur, il serait capable de battre le Kamui ?! Il oubliait certainement que s’il était capable de rivaliser avec lui, il n’en demeurait pas moins dans un Pays intégralement submergé par son élément opposé. Si un combat devait s’engager, l’Empereur Samui n’aurait aucun scrupule à le noyer dans l’atmosphère glaciale de cette Nation déjà privée de chaleur depuis longtemps … .

Il prétextait le soin du cœur, avant celui des hommes. Cette notion était archaïque, voire vide de sens, pour le Ninja qui avait tout sacrifié – sentiments, âme et même famille – dans l’intérêt d’un Village, puis des Nations. Rejetant l’idée d’avoir une famille de son sang, consacrant sa vie à sa Mission et au Devoir du Soldat de l’Ombre, le fait d’apprendre qu’il était fondateur d’une nouvelle lignée dans le Clan ne l’avait que peu ému, au final. Certes, il regrettait aujourd’hui la fin de cette descendance avec la mort de Yuki Samui ; mais il ne pouvait céder aux élans de cœur pour abandonner ce qui avait forgé sa vie des décennies durant. Que le Yamada lui dise qu’il lutterait pour le cœur plutôt que pour le Bien commun était tout simplement étranger à ses oreilles.

L’ancien Kazekage renouvelait sa proposition. Il tenait certes à cette fille ; mais visiblement restait aveugle sur les véritables desseins de l’Empire. Et en cela, préférait rester sourd aux interrogations de son interlocuteur. Oblitérant les questions posées sur le degré de sécurité du Shukaï avec la libération de cette femme, il insistait sur les informations qu’il prétendait détenir. De son côté, Kakeshuou Samui restait coléreux … et impatient.
Il essayait certainement de garder son calme, mais l’individu était apparu avec tellement d’incohérence et de changements dans sa personnalité et ses objectifs qu’on pouvait désormais douter de sa bonne foi. Un homme qui déserte son Village peut ne pas changer de caractère, car les arguments l’ayant poussés à cela peuvent alterner. Mais celui qui se dit prêt à ravager et à détruire alors qu’il promettait la recherche de la paix quelques années auparavant ne peut plus avoir le confort de la confiance. Il doit démontrer qu’il a raison, et qu’il reste digne de parole.

~ Tu persistes avec tes seuls arguments mais tu restes sourd à mes remarques … . Nous avons déjà repoussé cette Organisation par le passé, et nous le referons, sans l’ombre d’un doute. Si ta jeune protégée fait partie des assaillants, elle ne pourra que s’en prendre à elle-même ! La sauver ? … Oui, je le peux – devant la justice. Mais si elle emprunte le mauvais chemin et qu’elle meurt sur le champ de bataille, elle ne pourra qu’accepter sa destinée, Kioshi. C’est une femme ; pas un enfant.

Les mots étaient secs, mais justes. Bien que combattant et Empereur sur les terres neutres, l’Empereur n’en était pas pour autant un Dieu omniprésent et omniscient capable d’arrêter ses hommes dans leur fureur du combat. Tout comme il ne pourrait pas en vouloir à un soldat ayant achevé son adversaire pour sauver sa vie.
En revanche, il était un autre pan de conversation qu’il souhaitait aborder.

~ Et ton « attachement de cœur » à cette femme n’explique pas tout … . Qu’est ce qui te motive à suivre un homme surgissant du Passé ? A emprunter le chemin d’un Suzurane avide de conquête et de vengeance ? Tu crois pouvoir atteindre tes objectifs de paix et me convaincre de t’aider en t’associant à celui qui devient mon futur adversaire ?

Nous rentrions enfin dans le vif du sujet. L’Organisation anti-impériale qu’avait affrontée le Kamui un an auparavant était certainement redoutable, mais elle avait déjà été repoussée d’une certaine façon. Au moment opportun, l’Empire y mènerait une traque afin de les localiser et de les détruire. Si menace devait naquir contre l’Empire aujourd’hui, c’était bel et bien ce Fils de la Montagne, qui avait déjà annoncé la venue imminente de la guerre sur le Pays des Neiges.
Et c’était cette menace qui pesait en priorité.

La conversation devenait trop longue et trop pénible. Cette rencontre n’était rien de plus qu’une accumulation de joutes verbales, d’affrontement visuel, de changement climatique et d’exigences trop élevées. Et tout cela pourquoi ? Pour savoir qui gagnerait le trophée en forme de balance pèse-couilles. Bref, autant dire que si par le passé ces deux hommes s’étaient accordés et étaient à l’origine de la récente alliance entre le Sable et la Roche, on ne pouvait plus garantir de leur bonne entente pour l’avenir.

Se décidant à abandonner le sujet de la Ketsueki, comme s’il y donnait son accord sans se prononcer, Kakeshuou faisait le choix de parler de cet homme qui avait – en partie – la raison de sa présence sur la mère-patrie. Il voulait en savoir plus sur lui, même s’il avait déjà cerné le personnage. Il ne doutait pas un instant que cet « Hakkyô » entreprendrait tout pour atteindre son objectif. Un objectif qu’il n’avait pas cacher la moindre seconde : s’emparer du Pays, peu importe les sacrifices à faire.
Rompant avec le sérieux et la violence des propos précédents, l’Ancien se laissait choire avec lourdeur dans le premier fauteuil de la pièce. Il ne quittait pas son interlocuteur des yeux, mais son regard était plus blasé, plus relâché. Sans doute un signe pour montrer qu’il portait son attention sur autre chose. Bien qu’il demeurat sur le même sujet.

~ Je ne vois pas comment un homme qui arrive avec sa rancœur et sa haine envers et contre tout pourrait être « droit dans ses bottes ». Vous êtes certainement lié à un contrat, c’est ton choix. Après tout, si tu tenais à prouver que personne ne peut te cerner, tu le fais avec brio. En attendant, tu ferais bien de ne pas voir dans ce sauvage un espoir de paix futur … . Il ne vit que sur sa colère, et ne pense qu’à la vengeance. Je n’ai même pas besoin de m’en inquiéter ! Car ce n’est pas moi qui le rejète : c’est le Triumvirat, et le peuple de ce pays tout entier … . Je ne prends pas de décision sur cette contrée, et je suis persuadé que les Triumvirs auront tôt entendu parler de l’incident. Mais je doute qu’ils voient en sa personne une « réponse pacifiste » au conflit à venir … . Je suis même prêt à parier que l’énergumène vogue déjà vers les Nuages pour demander leur soutien … ?

Son regard scrutait les réactions de l’ancienne Ombre. Un Suzurane seul était un véritable incapable. Il ne pourrait rien faire, seul porté par sa haine. Il devrait se trouver des alliés. Contre le Shukaï, il n’aurait aucun mal à cela. Mais le soutien le plus solide dont il disposerait dans la région serait assurément le premier adversaire d’importance de l’Empire. Et pour sa « promesse » de paix, il n’hésiterait pas un instant à tuer 9 habitants sur 10.

Le Dernier des Kirijins soupira. Il commençait effectivement à être fatigué de tout cela. Devoir lutter contre les petites rébellions, les sentiments ridicules et les mesquineries de chacun. A quand la bombe atomique sur SnH qu’on envoie tout ce beau monde au grenier et qu’on puisse souffler un peu ? Cela faisait longtemps que l’Empereur n’avait pas pris du repos … . Devant sans cesse se battre envers et contre tous les caprices de l’un et de l’autre. Il perdait patience pendant qu’il perdait la tête. Un fait qui n’annonçait rien de prometteur pour l’Empire … .

~ … Je négocie depuis plusieurs mois avec Suna une alliance qui a pris forme pendant cette dernière année. Dans les négociations, j’ai notamment demandé ta réhabilitation … . Le nouveau Kazekage est ton ancien élève, et il m’a dit vouloir t’engager pour ses projets, à défaut de te compter dans ses rangs … . Le mercenariat te convient sans doute aujourd’hui ; mais suivre des hommes dangereux comme ce Suzurane ne fera que te mener à des situations où tu trouveras une mort qui ne t’était pas dûe. Je suis prêt à soutenir cette proposition à Suna, afin que notre alliance joue dans ta réintégration ; ainsi que celle de ta compagne … . Mais je veux bien plus qu’une simple organisation menaçant un port ou une mine … . Je veux que tu m’informes des faits et gestes de cet « Hakkyô » qui menace non pas seulement Yuki ou même l’Empire, mais tous ceux qu’il côtoyera de près ou de loin pour étancher sa fureur … . Un tel danger ne peut pas rester sans surveillance … .

C’était une offre exceptionnelle ! Et la dernière que le Kamui pouvait proposer … . Si rien n’était accepté, il n’y aurait plus qu’à se séparer … en mauvais termes, hélas.

~ Cet homme a voulu me trouver en pensant pouvoir faire pression sur moi. Or, il s’est lourdement trompé et si ses propos ont séduit quelques idiots, ça n’a pas détourné la fidélité de la foule, ni du Pays ! C’est au Triumvirat de prendre des décisions dans l’intérêt du Pays. S’il souhaite à ce point l’obtenir, qu’il s’y adresse seul. Je ne suis ni son guide, ni son avocat et encore moins son bienfaiteur. Mais ce n’est pas le Triumvirat qui le rejètera ; mais lui et son orgueil de victime contrefaite qui le feront par fierté.

Les mots étaient durs, mais traduisaient bien les pensées du vieux briscard. En espérant provoquer l’Ancien dans une bataille qui aurait ravagé le secteur peu de temps après sa reconstruction, le Suzurane s’était heurté à un mur de calme et de convictions. Ce qui faisait certainement échouer son plan initial. Et désaprouvant le régime populaire mis en place, il aura certainement cherché des alliés ailleurs. Ainsi agissent ces hommes qui pensent tout posséder à la naissance ; et qui estiment qu’ils n’ont à courber l’échine à aucun instant !

L’ancien Kazekage embrayait sur la proposition que lui avait soumise le Kamui. Les relations entre Suna et Iwa s’étaient considérablement améliorées dernièrement, notamment grâce à certains accords secrets dont l’Empereur tairait les contenus et propos sombres. Les deux puissances travaillaient main dans la main, et pouvaient converser sur leurs stratégies économiques et militaires. Pour l’heure, cachun devait gérer son propre conflit dans son coin. Mais les deux partis trouvaient des sujets à partager. Comme la traque des criminels, et la mise en place d’un réseau de renseignement pouvant servir aux intérêts de tous – et avant tout pour la Paix impériale !

L’homme se fendait en questions banales sur la santé de son élève et le souçi de son Village. S’en préoccupait-il vraiment ? Après tout, il avait tout abandonné pour une histoire de cœur ; peu de chances que l’état de ses anciens compagnons abandonnés dans le désarroi et la crise d’une attaque récente soit vraiment de ses priorités. L’information d’un chef captif entre les mains de la Feuille était en revanche une information de choix … . Dont il ferait peut-être usage plus tard … .

~ Ton élève va bien le village se redresse et il mène une opposition farouche contre la Feuille – la phrase avait été dite d’une traite … . Si tu veux à ce point l’immunité sur les territoires impériaux, il faudra cependant accepter trois conditions qui seront immuables peu importe ton insistance. Tout d’abord, tu devras te faire savoir au Seigneur local, peu importe que ce soit par courrier ou en personne. Ensuite, j’attends de ta compagne qu’elle suive strictement son engagement à ne pas s’en prendre aux biens et aux habitants du Shukaï. Si elle devait céder à ses motivations tout comme elle l’a trompée par le passé, cet accord deviendrait caduc. Pour tous les deux.

Plus question de laisser libre accès à un potentiel terroriste ayant déjà fait part de ses velléités destructrices. Une dernière chance pouvait certainement être accordée, mais le mot le plus important ici serait « dernière » ! Car si cet accord devait être rompue dans la destruction et la mort, l’Empereur lui-même se chargerait de la traque et de l’exécution !

~ … Dernière condition … . Je ne veux pas juste des informations au compte-goutte et à la dernière minute. A sa façon, le Kyomu m’a informé de son opposition à l’Empire … en entrainant la destruction à travers ses terres ! Ce que je veux, ce sont des informations fiables et rapides. Pas incertaines et de dernière minute. Oui, je te demande de le trahir. Car dans un premier temps, on ne peut pas dire que cela sera une première … . Ensuite, parce que je me berce sans doute d’illusions, mais tu as eu un idéal de paix à une époque. Et tu sais que cet homme n’amènera que la vengeance et la guerre avec lui. Quant aux garanties …, je ne peux t’en donner aucune. Tout comme ce Suzurane ne peut pas t’en donner. Mais même si nos accords n’ont pu être accomplis par le passé, tu sais que je suis un homme de parole. De plus, si je venais à rompre mon serment, tu auras alors loisir à mettre les menaces que tu me récites à répétition depuis le début de cet entretien, non ?

L’homme avait la main tendue, prêt à valider l’accord final. Le Kamui restait distant : ce pouvait très bien être un piège de dernière minute ! Après tout, ce ne serait pas une nouvelle de voir une telle trahison après tant d’autres auparavant ! Il fit un mouvement en direction de son invité.

~ Inutile de te préoccuper de cette partie de l’accord. Je compte bien activer mon réseau d’informations, afin de savoir où cette Ketsueki se trouve, et de la rencontrer en personne. Avec pour intention de lui signifier les termes de ce contrat. Je serais alors personnellement assuré qu’elle est au courant des implications de cet accord, et qu’elle a désormais son destin entre ses mains.

Le vieux briscard avait déjà en tête le nom du Sunajin qu’il pourrait contacter dans cette entreprise. Avec sa rencontre avec Kibô – nouveau Kazekage – il avait également fait la connaissance de son Bras-Droit ; et avait trouvé chez lui un allié de grande qualité, qui désirait comme lui ne pas laisser d’importantes informations lui échapper. Dans ce sens, ils sauraient certainement mettre en valeur ce réseau qu’ils formaient, afin que toute personne ou nouvelle ne leur échappe. Sans doute ce combattant saura-t-il l’aider à localiser une ancienne patriote … .

L’Empereur saisissait la main qui lui était tendu.

~ Et je te l’ai déjà dit. Du moment que tu seras sur les terres impériales, je pourrais savoir où tu es. La raison pour laquelle je te demande de signifier ta présence est en cas de danger immédiat te concernant, ou de visite officielle pouvant s’avérer gênante. Mes Seigneurs vassaux pourront alors t’informer à temps pour que tu puisses prendre certaines mesures si cela est nécessaire. Mais comme je l’ai déjà dit, tout comme tu l’as déjà fait remarquer … tu n’as que ma parole.

Relâchant la pression de la main, l’homme se préparait pour le départ. Il n’imaginait pas vraiment ce qui pourrait susciter la suite de cette conversation qui avait déjà été houleuse à plusieurs reprises. Il attendrait les premières informations que l’ancienne Ombre du Sable lui avait promises. Si celles-ci tardaient à arriver, voire s’avéraient fausses, il saurait alors à quoi s’en tenir … et comment s’y prendre pour se venger.
Restait la question de la communication.

~ Un certain nombre de marchands sont en relation étroite avec l’Empire. Un réseau souterrain existe pour nous informer des différentes nouvelles à l’étranger. Si tu veux me contacter, écris une lettre et marque-là d’une croix bleue dans un angle. Porte là à l’amirauté d’un port ; et le reste sera fait dans les plus brefs délais. Je ne pourrais certainement pas te contacter de mon côté, mais nous saurons trouver une solution en sens inverse … .

L’homme était prêt à partir ; mais sans doute y avait-il encore certains sujets à aborder ?

La négociation avait été sèche, mais elle prenait enfin une tournure acceptable. Et en acceptant de serrer la main de son interlocuteur, l’ancien Sunajin agréait enfin à des termes convenables. La dernière requête qu’il formulait arrivait au dépourvu, et l’homme manqua de peu de retirer sa main, le temps d’y réfléchir. Mais les choses étaient entendues. Il acceptait donc, non pas de bon cœur, en se disant que les choses seraient on ne peut plus claires ainsi.
Avec cette conclusion, l’Empereur-Ninja s’ôtait une sacrée épine du pied. Était-il pour autant rassuré ou en sécurité ? Pas vraiment. Il savait qu’il ne pouvait accorder sa confiance aussi facilement. Mais il savait également qu’un homme averti en vaut deux. Et en trouvant un moyen de mettre son Empire à l’abri des désirs sournois et des jalousies mal placées, il avançait sa reine sur l’échiquier.

Kakeshuou Samui s’apprétait à partir. Cette étape n’était qu’une goutte d’eau dans l’océan par rapport au voyage qu’il entreprenait et qu’il voulait commencer par une ecale au Pays des Neiges. Mais il n’avait que peu de temps, et beaucoup à faire ! Le premier objectif était assurément de répondre à la lettre de son neveu qui l’informait d’une menace grave pesant sur leur nation. Mais il fallait également observer certains faits, prendre la température populaire et se rendre à quelque réunion secrète dont il serait l’instigateur.

Aussi la question de l’ancien Kazekage vint en surprise, mais méritait un semblant d’attention. La question de Konoha était déjà un sujet assez délicat ! Des tensions aux frontières étaient bien réelles, et le fait que le récent allié du Sable soit avide de meurtre sur la personne du nouveau Daimyo de Hi ne faisait de raviver un peu mieux les velléités de chacun. Devait-il lui dire ses intentions par rapport à cette alliance, et ses intérêts sur le Pays des forêts enflammées ? L’Ombre désormais déchue n’avait guère donné preuve suffisante pour obtenir de telles faveurs … . Entre vérité et secret, mieux valait trouver le compromis idéal.

~ Les guerres de Suna ne concernent que Suna. S’ils viennent à nous demander de l’aide, nous les soutiendrons évidemment. Mais l’Empire a ses propres ennemis, dont un Village belliciste qu’il faudra bien un jour remettre au pas ! Le Shukaï n’interviendra donc pas contre la Feuille tant que celle-ci ne menacera ni ses frontières, ni ses intérêts … .

Mais en sachant que les intérêts de l’Empire sont la paix elle-même, peut-on vraiment considérer que le vieux briscard ne fera rien ? Un homme plein d’énigmes, prêt à porter son regard aussi loin qu’il le faudra pour atteindre son but. Pour se hisser à la place à laquelle il aspire. A supposer qu’on puisse deviner ce à quoi un Empereur-Ninja puisse véritablement aspirer de mieux ! …
Sa main était presque déjà sur la porte. La question ayant trouvée réponse, le Kamui était prêt à s’éclipser. Et pourtant, il se tourna une dernière fois vers son hôte.

~ Je ne peux pas rester plus longtemps. Même si je suis en voyage, je tâche pour l’instant d’être le plus discret possible. Et je dois voir le Triumvirat au plus tôt. En guise de départ, si Suna est prêt à te pardonner pour tes crimes, je serais d’avis que tu saisisses cette opportunité unique, quoi qu’il arrive … . Cette vie sauvage ne te convient pas.

Un conseil d’ami, avant une prochaine rencontre.
Until we meet again.