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Les événements s'étaient succédé sans que je ne parvienne à en saisir toute la portée. Zanshi, le nom des conseillers élus qui n'avaient pas encore conscience qu'il l'était excepté Tsukiko qui avait même brûlé le papier dans un geste que je ne parvenais toujours pas a comprendre ; Kioshi qui était effondré et qui perdait la raison face à la mort de l'Ecarlate qu'il n'arrivait pas à assimiler et à s'avouer... Tout était bien trop compliqué. Et pourtant nous devions œuvrer et rapidement pour permettre au village de se relever malgré tout et de ne pas laisser les civils dans l'insécurité qu'ils ressentaient déjà depuis quelques temps après l'attaque des conseillers ou encore, plus récemment, l'attentat de Kyoshi Rei.

Notre Godaime avait été évacuée sous les yeux effondrés de mon supérieur et ami. J'avais été obligé de faire en sorte que son chakra soit entravé pour qu'il arrête de martelé son corps froid de sa chaleur trop intense. Ainsi retenu par des jonins et membres du Kakumeigun, je leur demandais de le conduire chez lui et de le surveiller : dans son état, rien n'indiquait qu'il n'allait pas tenter mille et unes bêtises. Je soupirais après son départ et ses hurlements stridents alors que je me devais de prendre son relais en tant qu'intendante de l'unité spéciale. Il n'était pas en mesure d'assurer et d'assumer tout ce qu'il aurait dû normalement déployé : il aurait besoin de temps... Même si lui même n'était pas en mesure de guérir totalement certains maux.

***

J'étais parvenue à mettre en place toutes les choses les plus importantes qu'il fallait mettre en place pour l'heure. Éreintée et fatiguée, je me devais pourtant de tenir et d'aller rendre visite à Kioshi. Mon sang pulsait lourdement dans mes veines alors que ma maladie gangrenait mon hémoglobine : je devais m'arrêter à l'hôpital pour subir une transfusion où ingérer directement du sang : j'aurais dû, mais je m'inquiétais pour Kioshi et je ne voulais pas me permettre de faire de détour.

Arrivant rapidement dans le quartiers Yamada alors que quelques heures s'étaient écoulées depuis l'effroyable assassinat sous les yeux de Suna, je me dirigeais vers le nouvelle demeure du chef du Kakumeigun. Deux gradés de l'unité spéciale étaient présents devant la tente, sûrement senseur et sans cesse à l'affût de l'activité de l'habitant des lieux. Je n'eus même pas besoin de leur adresser un mot pour qu'ils me laissent pénétrer dans la demeure sommaire.

Il était là, assis sur le sol me tournant le dos alors que je savais pourtant pertinemment qu'il avait dû sentir ma présence. La tête rivée vers le sol il demeurait silencieux tandis qu'il semblait tenir quelque chose entre ses mains. Je m'approchais un peu pour observer un katana. Je crus tout d'abord qu'il comptait s'en servir pour mettre fin à ses jours et puis, à voir la façon dont il contemplait l'arme, il était évident que cet objet avait un sens beaucoup plus profond... Appartenait-il a Zanshi ?

Je m'accroupissais à sa hauteur et posais une main sur son épaule. Je me doutais d'avance qu'il me dirait vouloir être seul mais c'était peine perdu pour lui : je ne le laisserais pas. Je savais qu'il ne parviendrait pas à remonter la pente seul... Il n'était même pas sûr que de l'aide puisse y parvenir mais c'était là la seule chose que je pouvais malheureusement faire : lui montrer mon soutien et ma compassion.

« Je sais qu'aucune de mes paroles ne pourra la ramener. J'ai perdu ma Kazekage, celle qui m'a fait avoir foi en l'humanité et qui m'a même prise sous son aile en tant que sensei malgré mon nom... Ma peine est immense et je sais que la tienne est bien plus forte encore... »

Je marquais une pause avant de reprendre :

« Je te promets que nous allons la venger et que nous retrouverons ceux qui ont fait ça ! Je sais que cela ne sera pas aisé mais nous devons avancer Kioshi... Tu sais très bien que c'est ce qu'elle aurait voulu. Nous allons tout faire pour respecter sa volonté et instaurer la démocratie qui lui tenait à cœur et qui lui a coûté la vie... »

Je posais ma main libre sur son autre épaule et renforçais mon étreinte en m'approchant de lui.

« Nous devons être fort, pour elle... Zanshi symbolise la force : arborons nous aussi cette image. »

J'avais volontairement parlé d'elle au présent parce que même dans ces derniers instants c'était ce qu'elle avait incarné. Je savais bien que le poids de mes mots n'étaient rien par rapport à ceux des événements mais je voulais qu'il comprenne qu'il n'était pas seul et que nous devions tous nous montrer forts et plus solidaires que jamais.

L'éclat de sa voix était terni, ses paroles étaient acerbes, son regard était distant et fuyant : il avait perdu la luminescence qui le caractérisait. Il était dénué de tout sentiment, répondant machinalement à mes propos comme un robot aurait pu le faire. Comme il était difficile de le voir dans cet état, lui si chaleureux et élevant fièrement les Yamada comme étant des astres diurne alors que lui avait perdu toute vie.

La chaleur que dégageait son corps oscillait en fonction de son humeur. Il était dans le déni : croyant dur comme fer qu'elle était encore en vie ou qu'il aurait pu la sauver en la réchauffant comme il le faisait lorsque j'avais ordonné qu'elle soit arrachée de ses bras alors même qu'il était en train de carboniser son corps froid. Il était inutile de le lui expliquer et pourtant il faudrait le sortir de ces espérances car, alors qu'il se rendrait compte par lui même qu'elle nous avait vraiment quitté, il devrait faire face à la mort de sa bien aimée plutôt qu'au fait que quelqu'un avait osé la blesser.

Tantôt il riait nerveusement, tantôt il s'enfermait dans le silence, comme un homme perdant pieds et sombrant peu à peu dans la folie. Venait ensuite la crise de larmes qu'il ne pouvait plus contenir en évoquant des propos que l'écarlate lui avait tenu : il ne la méritait pas. J'ignorais du pourquoi elle lui avait dit cela mais je savais que, bien que secrète, l'existence de Zanshi n'était pas aisée et qu'il ne lui était pas possible de concilier vie professionnelle et personnelle, délaissant Kioshi qui avait attendu sans cesse un pas de sa part vers lui plutôt que le contraire.

« Zanshi avait sans doutes bons nombres de problèmes personnels en plus de ceux professionnels : mais cela tu dois le savoir mieux que quiconque. Elle a probablement dit cela car pour elle tu méritais mieux que ce qu'elle pouvait t'offrir... »

Pourquoi je disais cela ? Je n'en avais aucune idée. Peut-être que lui rappeler qu'il comptait pour elle malgré tout était un moyen pour moi d'apaiser son cœur et son âme meurtri ? Aucune parole ne parviendrait sans doute à guérir une telle tragédie : j'en avais fait les frais lorsque j'avais appris la mort de Shinji.

« C'est dur et même impossible de penser ainsi pour le moment mais il te faudra te remémorer les bons souvenirs que tu as eu en sa compagnie... Lorsque j'ai appris la mort de Shinji, de manière tout aussi abrupte, j'ai moi même perdu pied comme si je me trouvais désormais dans un monde de désespoir surtout en me rappelant que nos dernières paroles avaient été houleuse... Mais je me suis souvenue d'une chose dont tu devrais te souvenir également : je n'étais pas seule pour surmonter cela. J'aurais pu m'enfermer dans mon désarroi et sombrer mais vous m'avez permis de sortir la tête hors de l'eau alors que je m'y noyais. Shinji n'aurait pas voulu me voir ainsi tout comme Zanshi n'aimerait pas te savoir comme ça... »

Il était sans doute trop tôt pour évoquer tout cela mais Suna avait besoin de se mettre rapidement sur pieds et nous devions plus que jamais être soudés et nous montrer forts : c'était la dure réalité.

Finalement il déversait sa haine à mon encontre : me reprochant de l'avoir éloigné d'elle alors qu'il s'était acharné sur son corps sans vie. Il m'était impossible et insupportable de le voir agir de la sorte : il aurait fini par réduire le corps de Zanshi en cendre et ne s'en serait que plus voulu par la suite. La température de son corps augmenta drastiquement, me faisant le lâcher tant mes mains commençaient à brûler. J'affichais une grimace de douleur alors que je restais concentrée sur ses paroles.

« Je n'aime pas décider : surtout pas pour ce genre de choses alors que je vois les miens tomber un à un ! Mais je n'ai pas le choix ! La vie à Suna poursuit malheureusement son cours alors même que le village est profondément affecté : le Kakumeigun est chargé de mener l'enquête sur l'affaire et les dossiers s'accumulent mais tu n'es pas en état de les diriger alors je le fais à ta place. Te déchargeant de ton travail pour te soulager durant tout le temps nécessaire dont tu auras besoin. »

Il parlait alors de traquer le coupable à sa manière, sans foi ni loi, ni procès ni justice : je comprenais sa réaction mais les choses avaient déjà changé.
La chaleur augmentait encore, brûlant une nouvelle fois mes avants bras comme dans les ruines à la recherche de Hotep. J'usais de mon chakra pour anesthésier ma douleur et poursuivre malgré mes tissus qui rougeoyaient et se déchiraient sous l'action de ces brûlures intenses : je devais continuer. Le sol devenait verre et mes chaussures crépitaient sur leurs morceaux.

« Justement. Les choses ont évolué. Saibogu Shun à été maîtrisé et tué, s'échappant visiblement d'un immeuble alors que la probable arme qui a servi à atteindre Zanshi a également été retrouvé : en morceaux. L'enquête est en cours puisque si Shun a agit il ne devait pas être seul : les caméras du Kakumeigun ont été désactivé de manière inconnue et le Saibogu a été libéré de sa cellule peu de temps avant l'attentat. »

Toute cette affaire était bien trop louche. Il n'avait pas pu agir seul et nous ne pourrions jamais l'interroger maintenant que ce Kaijiro l'avait réduit au silence... Il faisait lui aussi parti de ma liste des suspects. J'attendais le rapport de Tetsui et de son père à ce sujet, ayant été mis en contact avec le Kawaguchi. Est-ce que cette mise en scène était une autre partie du plan de Kyoshi Rei qui, même dans la mort aurait voulu s'assurer d'éliminer la figure imposante de Suna ?

Je ne savais pas si parler de l'affaire allait calmer le Yamada mais au moins voudrait-il peut-être recentré ses esprits pour s'y concentrer.
Je m'approchais de nouveau de lui malgré la température me meurtrissant la peau et, tout en serrant les dents et grimaçant, je lui demandais calmement :

« Kioshi. Ecoute moi. Calme toi. Nous avons besoin de toi pour résoudre cette affaire. Tu es le chef du Kakumeigun : Zanshi t'y a nommé. Tu dois nous guider et nous faire part de tes directives concernant l'enquête. Plus le temps passe et plus les complices ont le temps de disparaître dans la nature et de se constituer des alibis. Tu peux compter sur moi pour t'épauler et t'assister et sur beaucoup d'autres mais nous avons aussi besoin de toi. »

Après Zanshi, il était l'homme le plus influant à Suna et puisque la première était tombée nous avions besoin du second pour nous relever : sans quoi nous étions perdus...

Il n'en faisait qu'à sa tête : aveuglé par sa rancœur et sa hargne à l'encontre des meurtriers. Je prenais sur moi pour garder mon calme, tout simplement parce qu'il valait mieux l'épauler dans cette situation que l'enfoncer.
Il ne se jugeait pas seul mais ne pensait qu'à ceux qu'il devait traquer, occultant complètement les personnes de son entourage prête à lui apporter du soutien. Plus rien n'avait de sens pour lui excepté la vengeance.

« Dans ce cas ne dis rien. Tout le monde perd des êtres chers. Chaque nouvelle perte est un déchirement mais hélas ce ne sera ni la première ni la dernière... Je n'attends pas de toi que tu parles mais que tu réfléchisses. Rassemble tes idées Kioshi. »

Il s'était redressé, se tenant face à moi la lame toujours en main alors qu'il demeurait tendu à l'extrême. J'en venais presque à me demander comment il faisait pour tenir debout et je ne pouvais m'empêcher de diriger mon regard vers ses pieds nus qui devaient être désormais blessés par le sable transformé en verre. La chaleur demeurait plus étouffante encore, comme ci j'étais bien trop proche de son foyer qui me causait du tord. Je haletais peu à peu devant cet environnement désormais pauvre en oxygène, mes avant bras protégeaient mon visage, souffrant à sa place.

Cependant, parler de l'enquête semblait bel et bien faire avancer les choses car voilà qu'il réfléchissait désormais et se focalisait sur autre chose que la disparition de l'Ecarlate. Selon lui, les inventions des Saibogu nous étaient plus préjudiciables qu'autre chose et j'étais d'accord sur certains aspects toutefois ce n'était pas la pure vérité.

« Seul les Saibogu sont en mesure d'utiliser et comprendre leurs machines : voilà ce qui nous portent préjudice. Les armements et inventions dont dispose Suna grâce à eux nous permet également un avantage sur nos ennemis en terme de communication, de défense et de tactique militaire. »

Finalement, alors même que je le suppliais de nous donner des directives, il pointa son arme sur moi , à quelques centimètres, sans que je ne sourcilles. La lame prise dans la chaleur intense faisait rougir le métal par endroit tandis que, malgré ma technique, je commençais à ressentir la douleur fulgurante de mes brûlures. Une odeur de chair brûlée emplissait la tente peu à peu alors que je demeurais suffocante, presque à bout de souffle, gardant pourtant mon regard rubis planté dans le siens en toute circonstances. Vois où ta colère te conduit Kioshi...

Pourtant, je ne pouvais pas répondre favorablement à sa demande. Demain, le conseil serait créer suivant les attentes des Sunajins et pour respecter la démocratie que souhaitait instaurer Zanshi. Je n'étais pas seule à décider pour annoncer un mensonge pareil : il me faudrait leur aval sur le plan de Kioshi pour pouvoir le mettre en place. Les conseillers étaient ceux les plus à mêmes de diriger le village désormais tant que le nouveau Kage ne serait pas élu. Kioshi avait donc beau avoir une raison personnelle de le faire, je ne pouvais pas proférer de telles paroles en représentant le Kakumeigun sans m'en être entretenue avec les Conseillers d'abord.

« Je verrais ce que je peux faire. »

Me contentais-je donc de dire.

« Peux-tu, s'il te plaît, réduire la température que tu dégages ? Je ne vais pas tarder à finir carbonisée... »

Le suppliais-je dans un murmure tout en grimaçant de douleur. La peau des mes avants bras étaient de nouveau aussi rougis qu'il l'avait été pas le passé et ma tenue avait brûlé ou fondu par endroit, se collant sur ma chair meurtrie. Moi qui avait la peau pâle, je n'avais sans doute jamais été aussi colorée... Je me sentais un instant défaillir sous le manque d'oxygène, me faisant tomber les genoux à terre, m'écorchant par la même occasion sur le verre saillant. C'était douloureux. Affreusement douloureux. Mais je savais que je devais en passer par là pour tenter de le raisonner.

Il semblait déçu que je ne puisse appliquer son ordre mais je ne relevais pas. En revanche, mes paroles et mon état parurent lui faire comprendre la situation, si bien qu'il s'empressa de faire retrouver à la pièce une température normale. Je soupirais de soulagement, sentant de nouveau l'air pénétrer mes poumons bien que cela fut douloureux durant quelques instants, restant néanmoins haletante à cause de mes brûlures et mes blessures.

Il s'écroula a son tour sur le sol, arguant que je ne pouvais pas compter sur lui, ce qui, malgré mes blessures me faisait étirer un sourire.

« Bien sûr que si. Tu me l'as prouvé à maintes reprises... »

Il avait toujours été là pour moi lorsque je n'allais pas bien et j'avais toujours tenté de lui rendre l'appareil bien qu'il lui fallut du temps pour s'ouvrir à moi.
Le voir parler d'autre chose me faisait du bien. Bien sûr il aurait besoin de temps mais au moins il n'était plus enfermé avec cette seule pensée. Si me blesser pouvait lui faire penser à autre chose qu'à la mort de Zanshi alors soit... J'étais prête à revenir chaque jour pour subir le même supplice si cela pouvait lui faire décrocher un sourire : parce que son bonheur à lui n'avait pas de prix... Après les instants que nous avions vécu, je pouvais dire que je commençais à le connaître. Alors, lorsqu'il me demanda de partir pour ne pas risquer de me blesser davantage, je savais qu'une part de lui disait vrai, préférant la solitude mais une autre avait besoin d'un soutien inavouable que je m'évertuerais à lui donner sans relever.

Il m'avait appris à m'ouvrir davantage à autrui et à faire confiance en n'hésitant pas à aller quérir de l'aide plutôt que de se morfondre en solitaire.

« Non je reste. Tu m'as toujours dit que lorsque ça n'allait pas il ne fallait pas rester seule mais aller trouver une personne de confiance. Tu peux me faire confiance. Je suis là. Je ne te laisserais pas seul. »

Je pouvais bien rester ici tout le temps qu'il faudrait et il était clair que je ne partirais pas tant qu'il n'aurait pas retrouver ses esprits : il avait besoin de soutien pour traverser cette épreuve et je voulais le lui apporter. Car plus que quiconque je ne voulais pas le voir malheureux. Je voulais qu'il retrouve ce sourire et cette espièglerie qu'il avait eu dans le regard lorsque nos corps avaient parlé à nos places. Mais il faudrait du temps...

Assise sur le sol, douloureuse et endolorie, je m'approchais de nouveau de lui, m'éraflant une nouvelle fois les jambes sur le verre au sol sans y prendre cas : tout mon être était tourné vers lui. Je n'avais pas le droit d'agir de la sorte après ce qu'il s'était passé mais je m'en moquais. Arrivée à sa hauteur, je posais mon front contre le sien pour capter son regard et posais ma main brûlé sur sa joue, demeurant impassible malgré la douleur lancinante que me créait ce simple contact.

Je ne savais que dire face à la situation alors je me terrais dans mon mutisme, me contentant de l'observer dans les yeux, cherchant à l'apaiser en même tant que moi même. Moi aussi j'avais besoin de ce contact pour me rassurer.

Finalement, Kioshi se posait des questions sur sa captivité. Ne pouvait-il pas comprendre que tout cela était pour son bien ?

« Tu n'es pas emprisonné... Tu es sous escorte pour être sûr que tu ne ferras pas de choses stupides... »

Il était encore émotionnellement instable. J'avais refusé à ce qu'il soit entravé de son chakra à son propre domicile justement car il n'était pas un prisonnier mais un homme en détresse qui n'avait pas en plus besoin d'être diminué.
Pourtant, il parvenait même a me faire décrocher un sourire en me demandant depuis quand est-ce que j'étais si gentille avec mes prisonniers.

« Depuis qu'il s'agit d'une personne chère à mon cœur... »

Me contentais-je de lui répondre, les yeux fixement concentrés sur les siens qui me fuyaient totalement. Ses paroles suivantes faisaient disparaître instantanément ce sourire pour une mine d'inquiétude.

« Ce n'est pas la même chose Kioshi... Même si tu meurs tu ne la reverras pas. Non seulement ton geste serait inutile mais en plus tu las rendrais triste... »

Le sang était l'essence et l'argent de l'âme. J'étais persuadée que grâce à lui nous étions capables de connaître les émotions des autres où d'observer des souvenirs mais cela ne s'inscrivait que dans le présent et le passé : sans vie il n'y avait justement pas de futur...

Mon regard s'attarda un instant sur la lame qu'il tenait toujours fermement dans sa main. Je ne voulais pas la lui enlever, craignant qu'il s'en offusque mais j'avais peur qu'il s'en serve contre lui même...
Je fus cependant tirée de mes pensées par une douleur fulgurante à la main, lui qui me la soignait. Je fis une grimace de mécontentement bien vite dissipée pour laisser place à la quiétude et à l'apaisement face à son comportement : il ne pouvait pas s'empêcher de panser les maux des autres ou de rattraper ses erreurs. C'était un homme bien que je ne méritais sûrement pas... Pourtant, ce que je voulais, je l'obtenais toujours...

Son air mélancolique se poursuivait, allant même jusqu'à se dévaloriser complètement : il n'était plus que l'ombre de lui même. Je détestais le voir ainsi, c'était comme si quelque chose se brisait en moi sans que je ne parvienne à l'expliquer.

« Si tu servais a rien je n'aurais pas moi même retrouver mes esprits plus d'une fois. Si tu n'avais pas été là je serais peut-être encore dans ce genjutsu que m'a lancé Aare au manoir... Sans toi j'aurais été perdue... »

Ma réaction en te voyant quand j'étais sortie de cet enfer en était la preuve non ?

« Je ne veux pas que tu sois perdu à ton tour... »

Sur ces mots, je le serrais dans mes bras, ne faisant fit de la douleur fulgurante de mon corps meurtri, dissimulant les larmes qui roulaient désormais sur mes joues face à son état de détresse qui m'affectait particulièrement. Il n'avait pas le droit d'être malheureux : pas lui. Il ne devait aspirer qu'au bonheur car s'il ne l'était pas alors je ne parvenais pas à l'être non plus...

Calant fermement mes mains endolories derrière sa nuque, je reculais mon visage pour mieux m'approcher de ses lèvres et l'embrasser passionnément, lui ôtant toute possibilité de s'y soustraire, alors que des perles salines continuaient de s'écouler le long de mon visage. Vois comme tu es aussi en mesure d'apaiser les tourments de mon cœur...

« Non des choses stupides comme te faire du mal à toi même. Tant pis si tu me blesses et ce n'était pas stupide mais involontaire. »

Puis finalement il relevait ma propre affirmation : cher à quel point ? En voilà une bonne question... Y-avait-il seulement un mot pour décrire ce genre de sentiments à l'égard de quelqu'un ? De cet attachement sans nom qui était près à nous faire faire n'importe quel sacrifice du moment qu'il soit heureux... Ce n'était pas la même chose qu'avec Ogami et c'était encore différent de ce que je ressentais pour Oniri où même ce que j'avais pu ressentir pour Shinji... C'était drastiquement différent sans que je ne puisse savoir pourquoi ou en quoi...

« A un point que moi même j'ai dû mal à définir... »

Me contentais-je de répondre tout en quittant un instant son regard.
Puis vint le moment du baiser passionné et larmoyant. C'était comme ci je parvenais a exprimer tout le flot de mes sentiments de l'instant présent dans ce même et unique baiser. Solennel, affectueux et aimant, c'était un baiser d'espoir et de soutien. Mes mots ne parvenaient pas à l'atteindre vraiment alors peut-être que mes sentiments y parviendraient. Etait-ce pour l'apaiser ou bien pour me rassurer moi même ? Un peu des deux peut-être... Je ne savais pas mais je n'aimais pas le voir ainsi. L'espace d'un instant, je sentis même son corps se réchauffer en même temps que l'air ambiant le temps de cette étreinte, signe que ce geste avait su évoquer une réaction au sein de celui qui demeurait désormais plus comme une coquille vide... J'étais heureuse de ce constat.

Pourtant, il se renfermait bien vite, comme rongé par le remord. Regrettait-il désormais tout ce qui avait pu se passer entre nous alors même que Zanshi était encore vivante ? Je n'avais jamais eu de remords de son vivant à ce sujet et cela n'allait pas changer alors qu'elle était morte. Ses paroles soulignaient d'ailleurs mes pensées mais je ne pouvais décemment pas lui dire que je me moquais de mon acte alors qu'elle n'était plus. Toutefois, je parvenais à comprendre son point de vue et sa position. Surtout qu'il laissait sous entendre qu'agir de la sorte était immoral en ce moment de deuil récent mais pas qu'il n'en avait pas besoin ni qu'il y dirait non en d'autres circonstances...

Voilà maintenant qu'il s'excusait pour ses paroles, comme s'il pensait qu'elles m'avaient secoué... C'était légitime qu'il pense ainsi, je ne m'en sentais pas offusquée et je me doutais même qu'il allait réagir comme il l'avait fait. Il me rappelait à quel point il se jugeait peu expérimenté dans les relations amoureuses en soulignant où tout cela l'avait mené et je ne savais pas vraiment quoi lui répondre... Évoquait-il ses écarts de couple ou bien au contraire ce couple en lui même ? Peut-être un peu des deux en tout cas je ne voulais pas prendre le risque de le froisser à cause d'une mauvaise interprétation...

« Les histoires d'amours... »

Je laissais cette phrase en flottement quelques instants, réfléchissant à sa portée. L'amour... Qu'était-ce ? Etait-ce vraiment cela ? Tout cela me paraissait si abstrait et un mot bien faible pour exprimer toute la portée des sentiments et la multitude qu'il composait... Il était malvenu de l'embrasser en de telles circonstances pourtant je l'avais fait alors lui parler de cela...

« Je... Je t'aime. »

Mes yeux se rivèrent de nouveaux au sien : je l'avais dit.
Cela sonnait étrange à mes propres oreilles : je n'avais jamais prononcé ces mots pour personnes. Maintenant que je l'avais dit cela ne me semblait pas si sorcier mais semblait moins fade que ce que j'imaginais. Mes joues s'étaient même légèrement empourprées sans que je n'y puisse rien. Tout était trop tôt. Tout allait trop vite. Je le savais mais je m'en moquais...

Je restais dans mon silence, ne sachant pas vraiment ce que j'attendais... Une réponse ? Non. Je savais pertinemment qu'il n'était pas en état de m'en donner une et je me doutais que la portée de mes sentiments à son égard n'était pas réciproques. Etais-je déçue ? Non même pas. J'étais parvenue à ôter un poids qui me soulageait alors même que je n'avais pas réellement compris qu'il était là...

Pourquoi le dire maintenant... C'était là son interrogation. Il n'y avait pas vraiment de réponse à cela... C'était comme si je le réalisais en ce moment même alors que l'a tristesse de le voir dans cet état de désarroi me semblait incommensurable. Alors même que j'allais enfin pouvoir faire ce qu'il voulait que je fasse à savoir suivre la solution que j'avais pour me guérir du mal qui rongeait mon être et me drainait peu à peu de ma vie. Mon père m'avait prévenu : ce rituel ne serait pas sans conséquence et si perdre une partie de mon âme me faisait en plus perdre une partie de mon humanité et de mes sentiments, je ne voulais pas avoir de regrets en les ayant jamais prononcés. Je voulais que l'on sache qui était et comment était la vraie Yami Ketsueki.

« Parce que je viens moi même de le réaliser... Je suppose. »

Ta détresse avait été le déclic à mes sentiments. Pourtant cela devait déjà faire quelque temps maintenant... L'aimais-je déjà lorsque nos corps avaient parlé à notre place ? Je ne savais pas. Et lorsqu'il m'était venu en aide avec Oniri pour me sortir de l'illusion ? Probablement. Ou alors lorsqu'il m'avait réconforté quand le présence de Megami était trop forte et que Shinji me dégoûtait ? Non pas encore. Et lors de la fête pour Kibo ? Je ne le savais plus... Finalement c'était l'instant présent le plus important et je connaissais désormais l'étendue de mes sentiments : j'en avais pris conscience.

Lorsqu'il me demanda du temps je ne pus m'empêcher d'esquisser un faible sourire. Du temps... Cette notion abstraite qui, pour le moment, m'était comptée... Je le comprenais. Je ne pouvais décemment pas lui dire cela en espérant une réponse favorable alors même qu'il pensait me perdre d'ici quelques temps et souffrir de nouveau...

« Je ne te demande même pas de réponse. Prends le temps. »

Lui disais-je fixement dans les yeux.

« Bientôt, il ne me sera plus compté... »

Comprendrait-il que j'allais finalement accéder à la solution à ma portée ?
Il m'affirmait ensuite qu'il ne chercherait pas à rejoindre Zanshi et me demandait si cela me convenait... Croyait-il vraiment que j'allais répondre non ? Je ne voulais pas le perdre. S'il faisait cela je serais obligée de prendre son collier où il semblait y avoir inscrit le nom de disparus, proches j'imagine pour être sur un pendentif, et le retourner pour y graver son nom à mon tour avant de le porter a mon cou... Cette simple image me pétrifiait d'horreur.

Je hochais la tête a ses mots.

« Bien sûr que oui. C'est tout ce que je souhaite... »

J'aurais bien voulu lui demander s'il avait besoin de quelque chose mais je craignais que sa réponse ne soit : « que Zanshi revienne » et en plus de me faire mal c'était quelque chose que je ne pouvais pas accomplir aussi je me taisais à ce sujet, préférant poser ma main sur mes brûlures pour me les soigner dans des grimaces que je tentais de restreindre pour ne pas le rendre plus mal que Kioshi ne l'était déjà.

« Tu ne veux pas te reposer un petit peu ? »

Lui demandais-je. Il avait sûrement rien avaler de la journée : moi non plus d'ailleurs. Il lui fallait reprendre des forces pour parvenir à affronter les prochains jours.

« Je resterais là, à tes côtés, même si tu dors. »

Tu ne seras pas seul... Je suis ton ombre Kioshi... Ne l'oublies jamais...