Ce soir-là, après avoir profité d'une bonne sieste en l'absence de mon bien-aimé, je me sentais enfin repus du sommeil qui me manquait en raison des courtes nuits que j'avais depuis quelques jours déjà. Kibo était de sortie. Mission sans aucun doute et j'espérais qu'il serait de retour pour l'heure du repas, car je comptais bien lui faire une petite surprise. En effet, quoi de mieux pour commencer la soirée, qu'un délicieux repas romantique, directement dans le lit, prêt à passer à l'action et à la suite de la soirée.
J'étais joviale à cette pensée et c'est ainsi que j'avais décidé sans vraiment trop de réflexions, au repas que j'allais concocter pour cette occasion.

Manque de bol en tout cas pour moi, plus de viandes, plus de légumes... En gros plus rien dans le frigo. Il allait donc falloir que je la joue fine et rapide pour aller faire les courses dans ce lieu étrange que je ne connais pas du tout.

Légèrement intimidée, j'avais donc quitté l'appartement de mon amoureux, prenant soin de verrouiller la porte (lui-même ayant un trousseau de clés) et je m'étais mise à déambuler dans l'un des nombreux souks de la ville, avide d'en découvrir toujours plus. Entre nouvelles senteurs, nouvelle saveur et nouvelle découverte, l'authenticité de ce lieu n'était plus à prouver. Je ne cachais plus vraiment le fait que je me serais bien vue vivre dans ce lieu si différent de tout ce que je connaissais et c'est après avoir rempli différents sachets d'épices que je m'en retournais faire mes emplettes.

Du moins ... Ça, c'était avant d'avoir les yeux beaucoup trop occupés par les multiples couleurs des saveurs que je venais d'acquérir pour ne pas voir la jeune femme qui avançait droit vers moi.
Bien entendu, la suite, on la connait tous. Patatra, je tombais à la renverse sur le sol et mes épices volèrent dans les airs avant de me retomber dessus dans un véritable flot multicolores provoquant immédiatement une série d'éternuements et de brulures au niveau des yeux :


"Ouille !!!"


Vraiment pas agréable, on ne peut pas le cacher. Je fermais les yeux sans toucher ces derniers pour ne pas prendre le risque de me faire encore plus mal pendant que la jeune femme me proposait son aide. Mes fesses allaient bien et je n'avais pas l'air de mettre fait réellement mal par contre :


"Si vous pouviez me conduire à une fontaine rapidement ... Je crois que je me suis mis du piment dans les yeux ..."


Du piment et peut être un peu de coriandres et autre ... J'allais être contente du voyage moi !

L'air de rien et sans pour autant ouvrir les yeux, je me laissais guider par cette inconnue alors que je sentais qu'elle posait doucement sa main à un endroit précis sur mon corps, faisant disparaître d'éventuelles douleurs. Une medic-nin donc. Je restais pensive et alors que mes mains touchaient enfin la fraicheur de l'eau, je trempais doucement mon visage dans cette dernière pour me débarrasser des épices qui brulaient encore mes paupières et mon iris avant de finalement, me redresser, pour enfin observer ma sauveuse.

C'était une jeune femme à l'aspect sauvage, plus agés que moi à n'en pas douter et que je n'avais encore jamais vue depuis que j'étais à Suna. Après je n'étais pas beaucoup sortie de chez Kibo, il fallait également voir les choses en face. Elle me proposa alors de m'accompagner faire mes courses, voir de me rembourser mes épices. Je répondais alors immédiatement de façon négative en secouant la main devant elle et en souriant :


"Oh non, non quand même pas ! C'est entièrement ma faute, je ne regardais pas ou j'allais ..."


Ma surprise était pour l'instant dans de beaux draps et je baissais la tête légèrement peinée à cette perspective bien que l'heure me permette encore de rattraper le coup :


"Par contre, je ne dirais pas non pour un coup de main ... J'avais quelques choses de prévus, mais du coup, je dois tout recommencer ... Sans vouloir vous le reprocher bien entendu ..."


J'étais gênée et je regardais la rue de droite à gauche sans vraiment savoir par quoi commencer. Aller aux primeurs ? Au boucher ? Ou tout simplement retourner chez le marchand d'épice ? La question me laissait en respect vis-à-vis de la jeune femme alors que je tentais tant bien que mal de mettre mes idées au clair pour trouver un compromis dans ces dernières. Pourtant, une question subsistait à mon esprit :


"Vous m'avez bloqué un nerf non ? Vous êtes medic nin ?"


Aussitôt, je posais ma main au même endroit qu'elle pour remettre le nerf en état de marche. La douleur avait disparu, mais le gêne lui était toujours présent.

Un faible rire s'échappa d'entre mes lèvres. Non pas pour me moquer d'elle, mais devant le risible de la situation. Je ne connaissais absolument rien à la gastronomie sunajin et bien que j'espérais que mon amoureux me donne quelques cours particuliers à ce sujet, ce n'était pas le cas dans l'immédiat. Aussi, je secouais négativement la tête pour répondre à sa question :


"Non, non pas du tout, mais j'ai besoin de quelques épices pour faire mon repas ..."


Enfin quelques ... Vu la quantité qui s'était étalée sur mon visage, c'était plus que "quelques" épices qu'il me fallait. Je rougissais à cette pensée avant de regarder la jeune femme m'expliquait ce qu'elle venait de faire :


"C'est très malin effectivement ! Mais la gêne est déjà revenue, j'ai rétabli les signaux ! J'aime bien avoir conscience des ressentiments de mon corps !"


Je lui souriais pour toute réponse alors qu'elle m'expliquait le fonctionnement basique de sa technique. C'était efficace, mais ce n'était pas le genre de médecine que je pratiquais. Je n'aimais pas tromper l'organisme et le cerveau en lui faisant croire qu'il n'y avait pas douleur alors que c'était bien le cas. Selon moi, c'était le meilleur moyen d'épuiser les muscles qui se contractaient sous l'effet de la douleur. Mais les avis divergés sur ce point de vue et j'étais tout à fait apte à le comprendre.
Dans ma réflexion, je m'étais cependant perdue de la discussion qui était en train de se dérouler et lorsque la jeune femme m'interpella d'un mademoiselle, je dressais les yeux, quelque peu surprise avant de murmurer un :


"Yuki ... Samui Yuki ! Enchantée de faire votre connaissance !"


J'espérais qu'elle allait à son tour se présenter, car je n'aimais pas trop l'idée de ne pas savoir avec qui je parlais.

Dès lors que j'ai prononcé mon nom, j'en viens presque à le regretter alors que j'agite une main devant la jeune femme tout en devenant aussi rouge qu'une pivoine :


" Oh, je vous en pris ... Ne m'appelez pas Sama ... Je suis plus jeune que vous ..."


J'étais vraiment gênée de me retrouver dans une telle situation et c'est en redressant à peine les yeux et en évitant le regard de la jeune femme que je finissais par me diriger vers un coté de la rue tout en continuant ma discussion avec cette dernière. Ainsi donc elle me connaissait ? J'ignorerais que j'avais une telle réputation. Toujours aussi rouge de honte, je me permis enfin de lui adresser un petit regard en coin :


"Excusez-moi, mais ... Où avez-vous entendu parler de moi ?"


Il était peut-être temps de se détendre non ? Elle entamait alors un sujet beaucoup plus dans mes cordes et mes yeux se posèrent avec curiosité sur la kunoïchi alors que je demandais un morceau de viande à un vendeur :


"Je n'utilise que rarement la glace en fait pour ma médecine ... Je suis plutôt de la vieille école !"


Je lui souris tout en disant cela avant de payer mon morceau de viande et de m'attarder quelques secondes devant l'échoppe pour parler un peu de moi vis-à-vis de la question qu'elle vient de me poser :


"En fait, ma mère est médecin ... Du coup je baigne la dedans depuis toute petite ... Les livres d'anatomie étaient mes livres de chevet ..."


Je laisse ma réponse en suspend pour quelques secondes alors que je me remémore ce qui m'a finalement décidé à me lancer dans cette voix :


"J'étais à Yuki no Kuni quand j'ai décidé de devenir médecin ... Ça n'a pas été facile et j'ai subi une formation express si on peut dire ... Des moines qui m'ont formé. "


J'avais une petite lueur dans le regard en rependant à tout cela et je secouais rapidement la tête avant de me remettre en route alors que la jeune femme me demandait la raison de ma présence ici ...
Je préférais rester discrète sur la vraie raison aussi, après avoir un peu réfléchis, je déclarais sans détour :


"Je suis venue passer quelques jours avec mon fiancé !"


Pas plus, pas moi. Voilà une réponse qui devrait la satisfaire.

La jeune femme était curieuse de nature visiblement et aussi avide de savoir. Cela me fit sourire, car elle était un peu comme moi en finalité. Alors que je continuais mes achats, elle semblait me parler avec plus de libertés encore de son attrait pour la médecine. Voilà quelques choses de tout à fait louable et je ne pouvais que comprendre l'intérêt qu'elle portait à cet art divin :


"Notre art est un don utile et apprécié de tous. C'est un don précieux qu'il nous faut en tout point préserver, aussi les moines du temple perdus sont assez réticent à le divulguer au premier venu. Bien utilisé, il peut faire des miracles, mais dans le cas inverse, il peut être un vrai bouleversement pour notre société ... Il faut savoir l'utiliser avec sagesse ..."


J'étais curieuse à présent de ce que me racontait cette jeune femme. Elle me semblait en tout point autodidacte, comme moi, mais nos façons de faire étaient foncièrement différentes. J'essayais de comprendre le corps humain, de répondre à ses attentes et ses besoins, alors qu'elle réagissait encore à l'instinct. Mais la discussion avait déjà dérivé sur un tout autre sujet. Mon mariage. Voilà qui m'angoissait à présent, je n'aimais pas trop en parler, il était ... Encore trop tôt justement :


"C'est récent ... Je préfère encore ne pas trop en parler même si je suis sûre que mes parents ... Et surtout ma grand-mère verront les choses en grand ! En très grand même ..."


L'idée d'un mariage me plaisait. Mais je voulais quelques choses dans la simplicité et la discrétion. Peine perdue avec ma famille ... Encore plus lorsque Kakeshuou apprendrait la nouvelle et serait contraint de s'y résoudre. Cela me mettait des frissons dans le dos rien que d'y penser :


"Et vous mademoiselle ? Vous avez un être cher dans votre cœur ? Un jeune homme ?"

Visiblement, la jeune femme semblait perturbée par mon interrogation, si bien que je remarquai un léger agacement dans ses paroles alors qu'elle changeait du tout au tout de sujet en me demandant si j'avais fini mes emplettes. C'était le cas effectivement, mais je sentais comme une attente de la part de cette étrangère. La mine neutre bien qu'assez plaisante à regarder, je finissais par approuver d'un hochement de tête :


"Oui, je pense tout avoir : Épices, viande, légumes ! C'est que nous n'avons pas traîné, je vois !" Déclarais-je ce coup-ci avec un sourire.


Je prenais alors un peu mieux mon gros sac de victuaille dans un bras afin de pouvoir lui adresser un petit signe de la main :


"Merci de votre aide, mais je pense que nos chemins vont devoir se séparer maintenant !"


C'était la vérité. Je ne pouvais pas passer toute la soirée avec cette jeune femme alors que mon amour allait bientôt rentrer de mission et que le repas n'était même pas encore préparé. J'aurais été une bien mauvaise petite amie si s'était le cas pourtant. Je me sentais comme gênée de laisser cette jeune femme comme ça ...


"Je ne pourrais malheureusement pas vous aidez dans votre apprentissage lors de ce voyage, je dispose de beaucoup trop peu de temps ici, mais ..."


C'était le moment de prendre une décision, quitte à se faire taper sur les doigts par la suite. Je m'approchais alors d'elle et je déposais un doigt au creux de sa main faisant apparaître une petite plaque en glace éternelle portant le symbole d'un flocon de neige :


"Si jamais vous passez prêt de la capitale du Shukaï. Venez me rendre visite. Cette carte fera office de laisser passé !"


Je lui souriais alors une dernière fois avant de me sauver aussi rapidement que nous nous étions rencontrées. Pas de temps à perdre à présent.