Plusieurs jours s'étaient écoulés depuis les événements survenus à Taki. Tant bien que mal, l'ancien Seigneur avait sauvé les meubles, nommément les membres de la famille du Hoheinheim, qui pour sa part restait pour l'instant introuvable, ainsi que les différents travaux et recherches en suspend qui se trouvaient dans son laboratoire secret. Yanosa ignorait encore si cette sauvegarde in extremis jouerait la moindre importance à l'avenir, mais en ce qui le concernait, toutes ces données tantôt loufoques tantôt témoins d'expériences vraiment peu orthodoxes étaient bien mieux entre les mains des chercheurs Jisetsu que dans celles des ingérants de Kaminari qui venaient d'annexer le Pays des Cascades. Pour le moment, la situation à la frontière est de Tsuchi semblait stabilisée, et aucune tentative de quoi que ce soit n'était à signaler, preuve que Kumo, Tetsu, le Daimiyô de Kaminari ou bien même les trois à la fois avaient conscience de leurs limites. Le guerrier rouge en avait profité pour aller immédiatement prendre la température à Kusa no Kuni, en dépit de ce qu'il pensait être l'opinion générale là bas à son sujet. Il y avait à vrai dire passé assez peu de temps depuis sa longue léthargie curative : il n'avait pas voulu s'y imposer, n'avait pas voulu forcer les guerriers et sages du Pays de l'Herbe à faire face à une réalité qui dépassait l'entendement, à savoir le fait même qu'il était encore en vie. L'accueil qu'il reçut pendant ces quelques jours passés à transmettre les nouvelles et à organiser la surveillance au nord lui prouvèrent toutefois que dans sa grande majorité, le peuple hétéroclite de Kusa le reconnaissait toujours comme l'un des plus éclairés, l'un des piliers fondateurs de l'idéologie qui était la leur.
Pendant quelques jours, presque à sa grande surprise, Yanosa se prit à se ressourcer en dépit du contexte, alors même qu'il aidait au transport des effectifs et à l'entraînement de plusieurs pousses prometteuses aux arts de la sensorialité. En son absence, et comme depuis maintenant des années, les communautés du pays avait germé et fleuri. La violence du milieu sauvage dans lequel elles évoluaient entrait en échos au quotidien avec la violence qui était propre à l'Homme, et l'harmonie, aussi hermétique qu'elle pouvait sembler, était totale entre les hommes, les femmes, leur environnement et leurs propres sentiments. Un état que l'ancien Seigneur de ces terres avait grand peine à retrouver, même après s'être astreint à de grandes sessions de méditation profonde, très profonde, plus qu'il n'avait pu se le permettre depuis des mois. Et ce n'était pas encore cette semaine-ci que le guerrier rouge pourrait se recentrer sur ses émotions et son rapport au monde, car suite à une partie de chasse grisante en compagnie d'autres kusajins, tandis qu'il ramenait du gibier sur son dos, Yanosa fut interpellé par un message à son ceinturon, signifié par une émanation vibrante de chakra. Le parchemin d'Asuka, qui elle était restée à la citadelle d'Iwa pour traiter avec son clan et les autres représentants hauts placés de ce qui était de se transformer en « ancien » Empire.
Relâchant négligemment le gibier sur la grande table de découpe en pierre, il jeta un coup d'oeil perplexe au parchemin avant de l'ouvrir. Quel genre de problème pouvait bien avoir la valkyrie pour avoir besoin de le contacter ? Il l'apprit bien sûr en ouvrant ledit parchemin pour en lire le contenu, qui s'effaça quelques instants plus tard.
« Ça commence déjà...
- Hm ? Qu'est-ce qu'y a le Rouge.
- Comme je te l'ai dit, Brenin. L'Empire de Kakeshuou s'effondre. Et les charognards veulent s'en accaparer les miettes.
- Et en quoi ça t'concerne dis, hein ?
- J'aimerais... vraiment.. que ça ne me concerne pas. Mais je ne fais pas confiance, pas le moins du monde... aux hauts fonctionnaires et aux gradés de la Roche et de la citadelle. Ils ne sont pas comme vous ici, vous savez. Si on les laisse faire, les travaux des Jisetsu seront mis en péril... et nous pourrions tout aussi bien avoir aussi la frontière nord à surveiller étroitement dans un avenir très proche.
- La politique, tu sais... ça a jamais été mon fort.
- Pas le miens non plus, à vrai dire. Je manquerais apparemment de « doigté ». Une drôle d'idée... n'est-ce pas ?
- Hahahaa ! T'as pas perdu ton sens de l'humour au moins le Rouge, c'est déjà ça. Et donc-
- A plus tard, Brenin, tu salueras les autres pour moi. »
Prononçant ces mots, Yanosa porta son index et son majeur sur son front en se concentrant, arrivant directement sur la position d'Asuka à Iwa. Prenant connaissance de son environnement, il vit devant lui une petite procession, faite de plusieurs hommes richement vêtus escortés par de nombreux soldats aux uniformes équivoques, des gardes privées provenant de la capitale économique Jukusui. A son côté, Asuka bien sûr, qui pestait contre son interlocuteur, un homme d'une quarantaine d'année qui s'était fait le porte parole de la grande délégation.
« … mais vous écoutez quand je vous parle, sérieux ? Vos papiers à la noix ils valent quedalle, il faut vous le dire comment !? Ah, Sensei, désolé mais... Sérieusement, des guerriers, des invocateurs, des Bijuus même si vous voulez, je peux vous en découper autant que vous voulez mais ce genre de mec me donne vraiment trop la gerbe.
- Mademoiselle, calmez-vous ce n'est pas digne de votre rang de Seigneur de Guerre. Vous n'êtes encore qu'une leader fraîchement nommée, de donnez pas de raison de vous décrédibiliser.
- Me décrédibiliser ? C'est quoi, une menace ? Mais quel genre de pouvoir vous croyez avoir ici, au juste ?
- Mademoise-
- Et arrête de m'appeler « mademoiselle » j'te jure sinon ça va partir.
- ... Asuka-dono... Je vous assure... que notre venue ne vise qu'à unifier les moyens dont dispose encore l'Empire, afin d'assurer dans le calme une transition démocratique qui soit le plus natur...elle... possible... que faites-vous, monsieur ? Demanda-t-il à Yanosa, tandis que ce dernier se déportait sur le côté pour observer au loin la colonne de soldats de Jukusui et les nobles qu'elle encadrait.
- Oh, rien. J'estime à peu près le temps que ça va me prendre de vous briser les os. Les vôtres, et ceux de tous ceux de vos mercenaires qui refuseront de repartir.
- Qu- Quoi ??!! Vous- Yanosa-dono, c'est bien ça ? Écoutez, c'est de votre coopération dont nous avons besoin, pas de... de... »
La neutralité avec laquelle le guerrier rouge se mit à regarder le porte parole de la délégation ne trahissait que trop bien à quel point tout ce qu'il pourrait dire ne pourrait plus rien changer. Il avait encore le choix, au fond : si il faisait preuve de suffisamment de lucidité et de courage, il ferait signe à sa petite armée tant militaire que bureaucratique de faire demi-tour, mais... avait-il seulement le pouvoir de donner une telle consigne ? Si il restait là à réciter les lignes qu'il avait appris comme un singe savant, il ne restait en tout cas que peu de doute sur ce qui l'attendait. Derrière le porte-parole, la tension monta également de plusieurs crans très rapidement, certains soldats en uniforme portant la main à la garde de leur katana, et les nobles qu'ils escortaient commençant à dodeliner sur place en signe de nervosité. On devait certainement avoir promis à ces hommes et ces femmes, se dit Yanosa, une place de choix au sein d'un nouveau gouvernement qui reprendrait totalement les rennes laissées vacantes par Kakeshuou. Aucun ne devait avoir réalisé, ici comme à Jukusui, que tout ce pouvoir qu'avait eu le Kamui n'était pas « vacant ». Il avait bel et bien disparu.
Samui Ryûga
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En une poignée de minutes à peine, tout fut fini. Les corps meurtris, brutalisés, parfois même sans vie des mercenaires de longue durée qui formaient la garde rapprochée de la délégation gisaient tous au sol, dans des états allant de la simple inconscience jusqu'au démembrement sanglant en passant par des lots d'os brisés. A peine essoufflé, Yanosa regardait de toute sa hauteur le porte parole ramassé sur lui-même à ses pieds, ses deux genoux disloqués et un côté de son visage ravagé par une claque monumentale. Il n'avait aucune espèce de remord à briser ainsi physiquement un homme qui avait voué sa vie à servir aveuglément les maîtres de l'argent et de la politique, et avait même eu le luxe de prendre son pied au cours de ce pugilat général contre ses mercenaires. Asuka jeta un œil vers l'Oterashi, presque heureuse de le voir comme ça. Elle s'était doutée de la façon dont les choses allaient tourner, et n'avait pas pu résister à l'envie de le laisser participer. Au cœur des gémissements de douleur autours d'elle, parfois d'agonie, elle essuya négligemment la pointe de sa lance sur le dos de l'un des mercenaires morts.
La myriade de shinobis et de soldats de la citadelle présents dans la cour de l'entrée et en poste sur les murailles n'avaient pas bougé. Pas parce qu'ils n'approuvaient pas, ni parce qu'ils avaient pris peur devant la déferlante à laquelle ils avaient assisté : leurs regards, pour la grande majorité neutres et impassibles, laissaient plutôt entrevoir une approbation de ce qui se déroulait sous leurs yeux. Lentement, Asuka détailla chacun des hommes au sol, fichant violemment son pied dans les côtes d'un noble qui tentait de ramper vers la sortie.
« Quoi, vous pensez pouvoir repartir dans cet état ? Mais vous avez quoi dans l'crâne ? »
Yanosa, prenant une grande inspiration, ramena son regard sur le porte-parole à ses pieds, qui gémissait de douleur, puis s'accroupit près de lui.
« Hmmmm... Je savais bien que ça finirait par arriver, mais aussi vite... tes patrons n'ont vraiment pas perdu de temps, n'est-ce pas ? Les gens de ton espèce... sont incapables de comprendre que le pouvoir qu'ils croient détenir... dit-il en attrapant une poignée de roche poussiéreuse au sol, puis en la soufflant à la figure de l'homme brisé, n'est que de la poudre aux yeux. As-tu vraiment cru... que tout se passerait comme le pensaient tes maîtres, hm ? Qu'ils réussiraient... à s'accaparer le contrôle sur tout ça ? Dit-il en balayant la citadelle derrière lui d'un large mouvement du bras. Ce qui m'atterre le plus... c'est qu'ils l'ont sûrement bel et bien cru, eux, dit-il en se redressant.
- Gnnnnnhhh ! Kkh- Qu'est-ce que vous allez faire ?! Hein ?! Me tuer ??!
-Ta vie ne vaut rien à mes yeux. Mais peut-être qu'à ceux de tes commanditaires, ceux qui pilotent ce genre « d'initiative », elle vaut encore quelque chose. Je ne doute pas, au fond... qu'une existence même aussi pitoyable que la tienne n'ait pu t'enseigner au moins quelques concepts utiles. Le monde a toujours besoin de marchands, après tout...
- Sensei, vous comptez faire quoi ? Si... Non. Quand, ils apprendront la raclé qu'on a foutu à leur délégation, là bas à Jukusui, on risque de se retrouver avec une guerre civile sur les bras. Même si je voyais pas non plus d'autre conclusion que celle-là, de toute façon...
- Une guerre ? Il n'y aura pas de guerre. Aucune que ces gens là ne puissent espérer gagner en tout cas. Mais au cas où ce genre de « message » ne soit pas assez clair...
- Oh, alors vous allez y aller directement, c'est ça ? Votre logique... est trop simple pour être aussi belle. Ou l'inverse.
- Je te l'ai dit déjà maintes fois, Asuka. La loi du plus fort n'est pas à comprendre comme la loi du dominant. »
Yanosa regarda à nouveau autours de lui, détaillant les visages de tous ces soldats, attentifs, dans l'expectative, qui ne pouvaient se résoudre ni à acclamer ni à décrier quoi que ce soit. C'est alors que l'évidence commença à le frapper de plein fouet, tel un marteau cognant obstinément sur une porte en béton. Écarquillant les yeux en réalisant progressivement le rôle que lui et Asuka allaient devoir remplir, son cœur palpita de façon erratique pendant une poignée de secondes, avant de finalement rentrer dans le rang. Ils étaient à n'en pas douter une seule seconde plus forts et plus aguerris que n'importe lequel de ces soldats, simples gardes sans ambition ou shinobi d'élite confirmé. Leur loi, celle du plus fort, allait devoir servir de ligne directrice à cette force collective, tout comme elle l'avait fait à Kusa. L'échelle avait de quoi donner le vertige... et tandis qu'Asuka respirait profondément en sentant venir le changement prochain, elle hocha la tête avec une compréhension intrinsèque de ce qui allait se passer.
« On fait ça à deux ? »
Yanosa se contenta de hocher lentement la tête en guise de réponse, puis se retourna vers les témoins de la scène.
« Soldats, shinobis. Habitants de la citadelle... Vous n'avez plus d'Empereur. Mais vous aurez toujours un guide. »
Samui Ryûga
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Le duo de guerriers rompus à l'exercice apparut juste à côté du commandant des forces armées de Jukusui, la capitale économique et autrefois politique du Pays de la Roche. Le leader local, posté sur les remparts à l'entrée de la ville, sursauta vivement en apercevant le guerrier rouge et la valkyrie aux cheveux roses, et les soldats en poste tout autours de lui firent de même en brandissant leurs armes par réflexe. Ou peut-être un peu plus que par réflexe. Si les hommes au pouvoir fantoche qui avaient gardé une main mise sur la grande cité lovée dans les montagnes avaient envoyé leurs émissaires prendre les rennes de la citadelle d'Iwa, alors il y avait fort à parier qu'ils s'étaient préparés à attiser les braises de certains mécontentements, tel celui partagé par Yanosa et Asuka. Leur tête respective était bien connue dans les grandes villes de Tsuchi, et les voir ici, arriver aussi abruptement, ne devait pas mettre très à l'aise la petite armée qui était jusqu'à preuve du contraire rangée du côté des politiques de Jukusui. Ni le commandant de ladite armée, qui ignorait que le parchemin qu'il portait à la ceinture était aussi le point d'ancrage que venait d'utiliser l'Oterashi pour le rejoindre en compagnie de sa plus charmante et capable alliée.
« Ouwho !! Vous !! Qu'est-ce que vous faites là ?!
- Nous venons rendre visite à « ces » messieurs, tous simplement. »
Sur quoi, Asuka commença à se diriger vers les escaliers intérieurs qui menaient vers la grand place de la ville le plus naturellement du monde, sous le regard comme impuissant du commandant, qui ne savait guère quel ordre il devait donner. Yanosa suivit nonchalamment, un léger sourire en coin à l'idée du tourment dans lequel devait se trouver le chef local de l'armée. Ferait-il « cette » bêtise ? Au besoin, l'Oterashi n'aurait de toute façon aucun mal à remplacer un homme tel que lui, qui s'était ramolli dans son bureau depuis des décennies maintenant en évitant soigneusement de s'embourber dans le moindre conflit qui aurait pu le mettre personnellement en danger.
« M- Mais qu- »
Yanosa se retourna, laissant Asuka prendre un peu d'avance en contrebas dans l'artère principale qui rejoignait au loin l'ancien palais attribué au feu Daimiyô. Il envoya un regard chargé d'une sourde menace au commandant, comme une promesse aux conséquences inexorables.
« Oui, « Commandant » ? Y a-t-il par hasard un « ordre » que vous aimeriez donner ? Une consigne, peut-être ? Vos hommes n'attendent que ça, allez-y. Je suis sûr qu'il seraient ravis de mourir pour défendre une douzaine de nantis trop ambitieux.
… Non ? »
Son sourire s'élargit en constatant l'immobilisme du chef local de l'armée, paralysé par l'indécision et une forme de peur ancestrale, celle qui dictait à tout organisme vivant de se préserver avant toute autre chose. Il le remplacerait, se dit alors Yanosa, car quoi qu'il arrive, avoir un tel pleutre incapable de prendre une quelconque position par lui-même ne valait même pas son propre poids en viande. Il le tuerait, certainement, au cours d'un duel en bonne et due forme. Ou bien il l'exilerait. Ou encore, peut-être, fondera-t-il un moindre espoir de le voir changer une fois envoyé à Kusa pour une « adaptation » des plus nécessaire. Mais peu importait pou le moment : repérant au loin les cheveux lilas de la Jisetsu, le guerrier rouge la rejoignit rapidement et dans le silence le plus total, en traversant la cité en pleine effervescence, le duo mit le cap vers le palais qui abritait aujourd'hui l'ensemble des administrations commerciales et politiques du pays. Ce ne fut qu'une fois arrivé sur place, devant une large et grande porte close et étroitement gardée, qu'ils rencontrèrent pour de bon de la résistance. Un petit régiment, rassemblé là tout sauf par hasard, dont le Capitaine en armure s'avança avec une main sur la garde de son sabre et l'autre main paume vers l'avant.
« Halte ! Mes Seigneurs ! Vous ne pouvez pas entrer, pas sans y avoir été invité. Par ordre de-
- Par ordre de mon cul, coupa Asuka. Vous allez dégager, ou vous allez morfler, c'est aussi simple que ça.
- Asuka-dono ! Je vous en prie, soyez raisonnable, je suis sûr que-
- La raison a sans doute abandonné ceux qui vous ont donné vos derniers ordres depuis quelques temps, déjà, coupa à son tour Yanosa. Laissez-nous vous retourner le conseil, et écartez-vous. La Roche aura besoin de ses guerriers : ne m'obligez pas à en abîmer plus que nécessaire... »
Un moment de flottement plus tard, après avoir jeté plusieurs fois un coup d'oeil vers son régiment avec nervosité, le Capitaine esquissa un pas sur le côté, bientôt imité par ses troupes. Asuka alla immédiatement ouvrir la grande porte d'un coup de pied retentissant qui brisa les verrous mis en place de l'autre côté, faisant valdinguer un mercenaire en poste à l'intérieur. Tout en emboîtant le pas à la Jisetsu, Yanosa lança quelques mots de plus au Capitaine.
« Vous avez plus de jugeote que votre commandant. Tsuchi a besoin d'hommes et de femmes qui savent ce qu'ils font, où ils vont, ce qu'ils sont. Ces gens-là... ne répondent à aucun de ces « critères ».»
Le Capitaine se laissa dépasser sans tourner la tête, mais tiqua au dernier moment. Il se retourna vivement vers le duo qui s'éloignait déjà à l'intérieur du palais.
« A-Attendez ! Ce ne sont pas des gardes de la ville à l'intérieur, ils ont enrôlé des mercenaires pour leur garde rapprochée ! Je doute qu'ils, enfin...
- Serait-ce de l'inquiétude, « Capitaine » ? » répondit simplement l'Oterashi sans se retourner, plein d'ironie.
Quelques secondes plus tard à peine, au détour du premier grand couloir, Asuka esquivait un coup vertical lancé par l'un des mercenaires en question, qui s'était caché dans une alcôve sur le côté. Une esquive et une parade plus tard, la lance d'Asuka trouva son flanc, puis son cœur. La Jisetsu relâcha un soupir dédaigneux et résigné en attendant que le guerrier rouge le rattrape. Puis, sans un mot de plus, le binôme s'attela au gros du travail. Yanosa déploya ses sens dans tous les couloirs, coursives et impasses du palais, détectant toutes les formes de vie à l'intérieur et repérant précisément chaque point de passage plus solidement gardé que les autres. En détectant finalement la signature d'une dizaine de personnes regroupées au milieu d'une salle deux étages plus haut, il sut exactement quel itinéraire ils devraient emprunter et prit les devants. Les politiques et autres détenteurs de vastes réseaux commerciaux qui s'étaient regroupés dans la pièce en question devaient avoir assez largement et allégrement payé leurs mercenaires, car aucun d'entre eux n'hésita à risquer ouvertement sa vie à la moindre occasion pour barrer la route au duo.
Les passes d'armes s'enchaînèrent le long des couloirs, chaque fois avec le même résultat. Une alerte générale fut sonnée au premier étage, ce qui fit converger la force de défense mobilisée par les richissimes nobles vers Asuka et son mentor. Mais peu importait au fond leur nombre, car aucun ne pouvait espérer approcher le niveau d'expertise dans le domaine du combat de ces deux machines à tuer. Certains furent laissés là, au sol, inconscients ou brisés de toute part, tandis que d'autres voyaient leur nuque brisée ou leur cœur perforé mettre un point final à leur existence. Yanosa et la valkyrie se souciaient peu, voire pas du tout, du sort de ces lames à louer, et leur esprit affûté et décidé était focalisé sur leurs cibles... qu'ils ne tardèrent pas à rejoindre. Frappant la lourde porte richement décorée avec le plat du pied, le guerrier rouge l'enfonça sur le coup, faisant tressaillir, et dans certains cas même crier, tous les hommes et femmes qui se terraient derrière. D'un geste de sa lance, Asuka empêcha fermement le plus proche de s'enfuir, le repoussant dans la foulée. Tous apeurés, l'un des leurs parvint malgré tout à rester devant ses confrères pour faire office de porte-parole.
« Yanosa-sama ! Asuka-dono ! V-Vous ici ! C'est un honneur m-mais...
- Oh par pitié épargnez-moi ça. Vous savez très bien que si nous sommes là, votre petite délégation de peignes-cul s'est déjà heurté à... quelques problèmes. Des problèmes que vous auriez du anticiper, d'ailleurs, puisqu'ils deviennent maintenant les vôtres.
- V-vous êtes des patriotes, tous les deux, vous avez autant à cœur que nous les intérêts du pays n-n'est-ce pas ? On ne va pas s-se laisser aller, et-
- Vous en avez pas marre ? J'veux dire, ça se voit comme le nez au milieu de la figure que vous essayez désespérément de trouver un « angle » d'approche, un discours qui pourrait, je sais pas... nous retourner la tête ? Les gens comme vous... on dirait qu'ils pensent toujours avoir une échappatoire. Enfin, le fait est que vous en avez une...
- Que, je suis sûr, vous emprunterez sans avoir besoin de trop y réfléchir. Vous représentez... la lie de ce monde, dit-il en s'approchant et en agrippant fermement le menton tremblotant de l'un des nobles, un cancer, un creuset corrompu ou viennent se moudre la souveraineté individuelle de chacun des hommes et des femmes qui sont venus de leur plein gré se loger sous votre coupe. Une mauvaise herbe, que j'ai une furieuse envie d'arracher, là, tout de suite, pressa-t-il en augmentant la force de sa prise jusqu'à briser la mâchoire de l'homme, qui se mit à hurler en saignant par la bouche. Mais... pour le moment du moins... nous nous contenterons de votre pleine et entière coopération, finit-il en s'éloignant du noble à l'agonie.
- Notre coopération ?! Et en quelle qualité, hein ?! Vous n'êtes que des sauvages ! Tous les deux !! s'emporta le noble le plus éloigné.
- En quelle qualité ? Quoi, même à ce moment précis, alors... que vous pourriez mourir... vous pensez aux titres et aux protocoles ? Asuka et moi... sommes les guerriers les plus puissants de ce qui reste de l'Empire de Kakeshuou. La voilà notre « qualité ». Celle qui nous permet aujourd'hui d'exiger de vous, non pas de la soumission... mais un changement « drastique » de vos priorités. Et je pèse mes mots.
- Les plus puissants, hein, trancha un noble à la barbe blanche soigneusement torsadée, qui était resté étrangement serein au milieu de ses collègues du consortium. Cela restera encore à prouver, mais... là n'est pas ce qui importe vraiment, à ce moment précis. Yanosa-dono, Asuka-dono. Vous avez visiblement... des projets. Des projets qui ne coïncident en rien avec les nôtres, et... je doute effectivement de notre capacité à vous convaincre de quoi que ce soit. Nous suivrons votre... bon conseil, au mieux de notre capacité, déclara-t-il en déclenchant un tollé silencieux autours de lui. Cependant... nous nous devons d'afficher... une « image », aux yeux du reste du monde. Un visage, qui soit témoin et dépositaire à la fois de la volonté qui guide le Pays de la Roche. Le Kamui... faisait cela très bien, mais... Sans prétendre vous connaître, l'un comme l'autre, je doute que vous soyez enclin à prendre son trône vacant, n'est-ce pas ?
- Ooook, je savais que ça partirait dans cette direction tôt ou tard, mais clairement ce sera sans moi, j'ai assez donné dans le registre.
- ... Ne reste donc que vous, Yanosa-dono. Pour endosser le rôle de Tsuchikage. »
Un silence, uniquement rompu par les gémissement incontrôlables du noble à qui la mâchoire faisait défaut, s'installa dans la pièce. Le guerrier rouge avait eu le temps, en se frayant un chemin jusqu'ici, d'anticiper non sans irritation le moment ou cela arriverait. Un sourire narquois naquis sur son visage, et qui se mua rapidement en rire incontrôlable, presque nerveux.
« Ghaha... Gwhahahahaaa ! Haaaa... Tel est pris qui croyait prendre, n'est-ce pas ? Vous... voyez un peu plus loin et plus clair que vos « collègues ». Très bien. Vous m'appellerez bien comme vous voudrez ça m'est égal. Une Ombre... reste une Ombre, contrairement à ce que semblent penser celles des autres pays. Soyez en tout cas bien sûrs... vous tous qui êtes ici... que je serai dans la vôtre si vous ne faites qu'esquisser la moindre tentative entrave aux changements à venir. »
Se retournant vivement vers la sortie, dont la porte était démolie, Yanosa poussa négligemment le battant en bois épais pour rejoindre le couloir, bientôt suivi par la valkyrie de lilas qui suivit son rythme soutenu à grandes enjambées.
« D'habitude, pour le commun des mortels, c'est le genre de chose qui se fête. Mais... s'agissant de vous Sensei.... j'ai plus envie de vous plaindre qu'autre chose. »
