Nettoyer les égouts n’aura pas été de tout repos mais nous sommes venus à bout de cette tâche. Les rats sont partis faire un tour du côté du labo et les installations ont été correctement traités.
Une fois le boulot accompli, Yu et moi nous sommes ensuite séparés. De retour chez moi, je m’empresse de passer sous la douche. Je ne sens pas la rose et n’ai pas envie que l’odeur s’imprègne dans mes vêtements ou dans mon appartement. De son côté la Genin de la brume doit être rentrée chez elle à l’heure qu’il est. Une fois sorti de la salle de bain, je m’installe sur un fauteuil et ferme lentement les yeux. À bien y réfléchir, j’aurais peut-être mieux fait de prétexter un rendez-vous ou je ne sais trop quoi encore. En procédant de la sorte, j’aurais pu zapper la rédaction de ce rapport et flâner ici. À défaut de ça, je vais devoir me rendre à la Mésange Bleutée afin de consigner nos actes de la journée ; Super.

Je suis curieux de voir à quoi peut bien ressembler l’auberge de Yu. C’est cette curiosité qui me pousse à rouvrir les yeux et me lever de mon siège. La journée n’est pas finie. Je laisse plusieurs de mes affaires ici, dont ma pochette de kunais et de senbons et m’en vais : direction l’auberge que m’a indiquée Yu. Je suis les instructions que m’a donnée la jeune femme et fais bientôt face à un bâtiment à la façade moderne. J’imagine que c’est ici et entre dans l’auberge. L'endroit a l'air plutôt bien entretenu.

Il y a du monde mais pas de Yu en vue. Il est possible que j'ai été plus rapide que prévu. Quoiqu'il en soit, je m'installe à une table, demande un verre d'eau et patiente gentiment. La Kosobayui ne devrait pas tarder j'imagine. Enfin j'espère. Selon toute logique, se laver ne prend pas une éternité.
« Hum. »
Perdu dans mes pensées, je vois mon verre arriver plus vite que prévu. Ils sont plutôt rapide ici. Je sirote tranquillement ma boisson tout en songeant à ce fameux rapport. Ça fait un moment que je n'en ai pas rédigé. Il faut dire qu'à l'époque au Misutô, la rédaction n'était pas notre fort. Il est même plus exact de dire que nous ne consignions rien. Nos actions étaient secrètes et devaient le rester. À ce titre, aucune trace de nos agissements n'étaient conservées. Ah. C'était le bon vieux temps.

Mano … Comme un enfant, je souris à l'écoute de ce surnom … À moins que ce soit vraiment son prénom auquel cas ses parents ne devaient vraiment pas l'aimer celui-là. En effet on croirait entendre le nom d'une boisson énergétique aux ingrédients douteux. Je vois de là un spot publicitaire où une horde de singes aux gros bras s'évertuent à nous vanter les mérites de « Mano, la super boisson des shinobis ». Mais trêve de pensées idiotes, revenons à l'essentiel ; à savoir la rédaction de ce fichu document officiel. Yu semble vouloir être le scribe de cette session et me demande s'il y a des choses que j'aimerais voir figurer sur ce rapport. Je réfléchis un instant et hausse les épaules :
« Pas vraiment, non. »

Il nous faut mentionner les rats, leur taille, leur sexe, les dégâts qu'ils ont pu occasionnés sur la tuyauteries et la localisation des installations les plus fragilisées par la présence de ces rongeurs. C'est à peu près tout je pense. Je ferme les paupières et me frotte les yeux en essayant de me remémorer les zones les plus touchées par le temps et les rats mutants.
« Je viens d'y songer que maintenant mais il nous faudrait les plans des égouts. Ce serait peut-être plus simple pour les autorités de voir quels endroits nous avons ratissés, où avons-nous trouver les rats et quels sont les zones où la tuyauterie est la plus défaillante. Du moins en supposant qu'ils lisent réellement les rapports, ce dont je doute. »

Sur un malentendu, il se peut qu'ils prêtent attention à ce que nous écrivons et, afin de parer à cette éventualité, nous ferions mieux de prendre la chose avec sérieux. Ceci-étant, je demande à ma partenaire si elle a chez elle ou à sa portée un plan des égouts. Étonnamment la réponse est non.
« Bien … J'espère que tu es bonne en dessin. »

Qu'on se le dise, il n'y a pas besoin d'être une artiste pour réaliser des plans d'un endroit aussi simple. Je me souviens plus ou moins des lieux et de la position de chaque bifurcation et peux aider Yu à réaliser le plan le plus correct qui soit. Nos verres arrivent. Je porte la mixture à ma bouche et suis étonnamment surpris. Ce n'est pas mauvais. Loin de là. Pour être tout à fait franc, c'est même plutôt bon. Seul bémol, je ne sais pas ce que c'est … J'aurais peut-être dû m'abstenir de boire avant de demander. C'est … Intrigant.
« Qu'est-ce au juste ? »

Je crains le pire. Une boisson réalisée par un gars appelé Mano … J'aurais forcément dû me méfier.

Yu ne sait pas ce qu'il y a dans le verre. C'en est presque inquiétant si la patronne elle-même de l'établissement ne sait pas ce qu'elle sert à ses clients. Je me doute bien que ledit Mano n'urine pas dans le récipient mais quand même. J'observe à nouveau la mixture et rétorque :
« Ce n'est pas mauvais en effet. »
La Kosobayui me suggère d'aller demander à l'impassible Mano ce qu'il y a dans le verre. Je doute cependant qu'il me réponde et m'abstiens. C'est une perte de temps … S'il a caché à Yu pendant tout ce temps la recette de sa mixture secrète, il n'y a pas de raison qu'il me la dévoile à moi qui lui suis inconnu. J'ai cependant une idée relevant du génie. À défaut de lui demander, je vais voir par moi-même ce qu'il a mis. Mes yeux passent subitement du marron au doré et je lève le verre afin de l'observer de plus près. Dans le même temps, je murmure :
« Inutile de demander quand on peut faire ça. »
De l'orange, des figues … Du lait de noix de coco, des œufs …
« Hum. Intéressant. »

Ce cocktail est conforme aux normes ! Il n'y a rien de bien dangereux ou suspect là-dedans. Tout est dans le coup de main du monsieur et dans sa capacité à placer les fruits au bon endroit, au bon moment et à mixer le tout avec une certaine énergie.
« Ce secret sera bien gardé. »
Que Yu et Mano soient rassurés, je ne compte pas revendre la recette au concurrent d'à côté même si l'idée est tentante. À noter que je ne suis pas le seul à faire usage abusivement de mes pouvoirs puisque Yu génère une seconde plume en un rien de temps et continue la rédaction du rapport.

« Non, c'est bon. Merci. »
J'ai pour habitude de souvent refuser ce qui m'est proposé. En effet je n'aime pas abuser de l'hospitalité des gens. D'autant que je ne suis pas ici pour manger. J'aurais le loisir de commander quelque chose à mes frais plus tard si d'aventure je retourne ici.
« Ici. C'est ici que nous avons trouvé les rats. »
Je pointe du doigt une zone qu'elle a dessinée de manière bien … Disons singulière.
« Rats que j'ai déposé au laboratoire du village à … »
J'essaie de me remémorer l'heure exacte mais j'ai un trou. Si Yu pouvait m'aider, je lui en serais reconnaissant.

Ah. J'ai fait une bourde semble-t-il. Je crois que mon comportement a irrité la brune et son employé. Il est vrai que ce n’était peut-être pas malin d’utiliser mes pupilles dorées de la sorte et à la vue de tous. Même certains clients paraissent outrés par ma façon de procéder. Une demoiselle souffle que, je cite : « Il est vraiment sans gêne celui-là » et une autre soupire : « Qu'est-ce qu'il ne faut pas voir de nos jours ». Hey ! Ce n’est qu’un cocktail, que la plèbe se calme. Je ne vais pas vendre les secrets de Mano ou commercialiser sa boisson en la faisant passer pour mienne. Il n’y a pas de quoi en faire tout un plat. Agacée, Yu me rend la pareille en me faisant remarquer l’ironie de la situation. C’est de bonne guerre j’imagine même si, maître du temps ou non, je ne vois pas en quoi et pourquoi je devrais me rappeler de tout. Ma mémoire a beau être bonne, je suis à l’image de tout homme : imparfait – et je crois que ça s'est vu plus tôt. Mauvais joueur, je soupire et lâche de ma voix robotisée les mots suivants : 
« Ah-ah. Ah-ah. Ah … Ah. »

Comprenez par là : « Ce n’est pas drôle ». Je pourrais répliquer en lâchant à mon tour quelques vannes bien placées mais je m’abstiens. Certes je suis un grand enfant mais je sais me tenir quand cela est nécessaire ! Et il s'avère que dans le cas présent je juge cela nécessaire car nous avons encore quelques trucs à faire elle et moi. Nous continuons la rédaction de ce rapport et finissons par en voir le bout. L'essentiel a été consigné sur papier et dessiné par Yu. Notre rapport n'est pas le mieux renseigné qui soit mais je pense que c'est amplement suffisant. S'ils veulent les détails, ils n'ont qu'à aller voir par eux même les lieux.

Une fois notre besogne terminée, je me gratte la tête, me frotte les paupières et réponds :  
« Oui. Je vais rentrer chez moi. Je ne suis pas spécialement pressé mais j'ai un peu … Enfin bref. Peu importe. »

Un peu mal. Depuis quelques jours et à certains moments, mes pupilles n'en font qu'à leur tête. Pourtant je ne pense pas les avoir trop utilisé aujourd'hui. Quoiqu'il en soit ça va passer. Ça passe toujours en règle générale. Après une petite sieste, je serais à nouveau en pleine possession de mes moyens.

« A la prochaine. »
Nul doute que les autorités du village jugeront bon de nous réunir à nouveau au cours d'une mission quelconque. À tous les coups ils nous feront faire équipe à nouveau à la première occasion qui se présentera à eux.