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Un groupe de civils en quête de découvertes touristiques souhaite visiter la ville portuaire de Senun. Seulement, voilà: les routes ne sont pas sûres, en ce moment, et il n'est pas exclu que leur convoi se fasse attaquer par des bandits errants en chemin. Aussi ont-ils demandé à être escortés. À vous de jouer ! Votre mission est de faire en sorte que tout le monde arrive sain et sauf à destination.

Nouvelle mission annoncée il y a peu. Elles s’enchaînaient ces temps-ci plus que de raison, parfois sans que je ne le demande moi-même et cette fois en était le cas. J'étais de nouveau avec Akane pour cette mission, alors même qu'officiellement je n'étais ni son sensei ni son supérieur, nous passions de plus en plus de temps ensemble et nous devions donc apprendre malgré nous à nous connaître. Je voulais, par fainéantise sans doute, confier cette mission à Batz, qu'il me remplace et me permette ainsi de vaquer à d'autres occupations. Il refusait pourtant, en prétextant qu'il avait autre chose à faire lui-même et qu'il me rejoindrait s'il le pouvait. Autrement dit, je ne le reverrais pas sans doute avant de revenir de cette mission. J'arpentais les rues tranquillement, déjà prêt et équipé pour servir d'escorte à une bande de touristes. Si la mission ne m'enchantait guère, elle était déjà bien plus dans mes cordes. Par les temps présents, je perdais un peu de la saveur de vivre, surtout.

Un Shinobi devait nous rejoindre Akane et moi pour nous mener à une bâtisse où nous allions rencontrer la clientèle et c'est donc en état de cause que j'y retrouvais la jeune fille qui ne s'était pas encore empêché de faire les courbettes dont elle avait la manie quasi génétique. Je ne lui répondis que d'un sourire accompagné d'un hochement de tête, sans faire de remarque, j'avais perdu espoir qu'elle accepte de me considérer comme son égal sur ce plan avec le temps. J'étais plus froid que d'habitude, ce n'était pas tellement sa faute, c'était plutôt que j'avais du mal à préserver ma douceur habituelle en ce moment, même si pour un oeil extérieur de mon cercle intime, je devais encore parvenir à paraître le plus doux des hommes, c'était une autre histoire avec Akane et c'était bien elle qui me coûtait le plus d'effort pour me préserver de ses regards ou des doutes qu'elle pourrait avoir sur l'état de mon moral.

Je nous laissais diriger avec Akane dans la pièce par un shinobi donc, où nous découvrîmes deux personnes. Je toisais ces personnes avec une certaine hauteur sans cacher le désintérêt que je pouvais leur porter au-delà de la mission que je devais honorer. L'ambiance qui suivait ne m'enchantait pas, ce marchand était trop expansif à mon gout et ses manières aux vis-à-vis d'Akane me laissait non seulement perplexe, mais mais donner en plus de le calmer aussi sec. Je demeurais pourtant silencieux, droit et ferme tandis que le Shinobi présent nous expliquait la mission plus en détail. Je tournais alors le visage sur celui qui semblait être un riche marchand et je me demandais, où était le groupe en question. Il n'y avait là pas assez de personnes pour parler d'un groupe en fait. De plus, il m'avait ignoré, je le trouvais impoli et un peu trop intéressé par les dames, surtout que Akane, qui paraissait désarçonnée par ses compliments qui ne dépassaient pas le stade de la flatterie n'avait semblait-il pas le temps d'en placer une non plus. C'est alors que le Shinobi présent apportait ses détails sur la mission, coupant le bonhomme dans le même temps heureusement. J'aurai presque soupiré, si je n'avais pas su ce qu'était les bonnes manières. Nous étions maintenant là, et j'estimais qu'il était temps pour moi d'intervenir.

-Monsieur Rapsodie. Je suis Snow, j'aimerai pour commencer, et pour assurer votre sécurité, que vous ne détourniez pas ma coéquipière de sa mission. Elle est présente ici pour vous protéger, alors si vous souhaitez regarder, vous le pouvez, mais pas toucher. Lui disais-je comme un avertissement. J'aimerai par ailleurs savoir où est ce groupe à escorter, car je ne vois que vous ici. En espérant que vous ne soyez pas trop nombreux, cela nous compliquerait notre tâche. Senun n'est pas la porte à côté, je ferais ce trajet à cheval pour ma part et je vous demanderais de respecter les consignes de sécurité que j'ordonnerai pour votre bien.

Je tournais en suivant mon visage sur Akane, une façon de lui signifier de ne pas se laisser impressionnée ou prendre par les flatteries d'un homme manifestement très enclin à profiter de la naïveté des jeunes filles. Je n'allais pas laissé passer cela éternellement. Batz me manquait à ce moment, je savais que sa présence suffirait à calmer les ardeurs de cet imbécile, mais pour le moment, je ne pouvais que déplorer cette absence en espérant la voir comblée un peu plus tard. Après le bref regard lancé à Akane je retournais mon œillade vers le marchand.

-Conduisez-nous vers le groupe à escorter s'il vous plait. Je vous stipulerais alors les consignes de sécurité à appliquer durant le trajet, sans négociation possible bien entendu.

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Le marchand, selon mon opinion, n'avait pas bien comprit où j'avais voulu en venir. Il ne m'inspirait aucune sympathie, pourtant il était le client et je m'efforçais de lui paraître compréhensif. Il en remettait une couche avec Akane, comme si mon avertissement avait eut autant d'effet que si j'avais pissé dans un violon. Je préférais donc me taire quand il parlait, le marchand, en arborant un visage tout à fait serein et strict en apparence, jusqu'à ce qu'il accepte enfin de nous conduire vers la troupe que nous devions escorter. Tout son discours et son exubérance m'exaspérait en réalité, mais je n'en fis aucune preuve, je me contentais d'un silence et d'une posture droite tout le long du temps où il se pavanait devant Akane. Je prenais alors les devants et sans les regarder, tandis que je prenais la porte je m'adressais à Akane d'un timbre suave et doux, comme à mon habitude. J'aurai pu et dû les suivre sans doute, puisque le marchand souhaitait nous "conduire", mais la porte est je savais où elle était et je n'avais pas besoin de lui pour m'y rendre.

-Je te rejoindrais à la porte, je vais chercher mon cheval.

C'est ce que je fis, je me rendis à l'une des rares écurie de Kumo, où j'avais l'habitude de déposer ma monture, et la préparant comme il se devait, tout en vérifiant qu'il vu bien ferré, je montais dessus pour me rendre à la porte est. C'est alors que sortant de l'écurie, je retrouvais Batz, qui venait lui aussi chercher son cheval. Il y eut un silence durant quelques secondes, mais il n'allait pas tarder à être rompu par Batz.

-Finalement j'ai décidé de vous accompagner. J'allais chercher mon cheval.
-Tu ne seras pas de trop. C'est une mission qui est plus dans nos cordes.
-C'est-à-dire ?
-Une mission d'escorte. Nous devons amener des touristes à Senun.
-Le transport de convoi hein... Comme au bon vieux temps ? Akane n'est pas avec toi ?
-Elle est à la porte est avec les touristes. Elle m'attend.
-Je vais prendre un cheval, j'arrive.

Il avait donc décidé de venir cette fois encore. J'ignorais ce qui avait pu le faire changer d'avis, mais je savais que ses rapports avec Akane enjoliveraient sa journée. La jeune fille par ailleurs serait sans doute aussi heureuse qu'il soit des nôtres et pour une si grande troupe à escorter, une troisième personne ne serait pas de trop. Nous nous dirigions tous les deux donc vers la porte est, pour y retrouver la masse de touristes qui nous attendait là. En arrivant, Batz se dirigeait immédiatement vers Akane, sans descendre de son cheval, il lui fit un petit sourire en guise de salut et entamait directement la conversation.

-Je suis venu prêter mon épée. Vu le monde ça ne sera effectivement pas de trop.

Batz était comme souvent, vêtu de son énorme et épaisse armure, il paraissait s'être adoucis depuis quelques temps, à l'inverse de moi qui m'était endurci, et il en faisait toute la démonstration à Akane par la teneur de son faciès qui, même s'il demeurait résolument mortuaire, paraissait en même temps plus docile. Le marchand venait à lui, le regardant d'en bas, car Batz qui était déjà un grand gaillard paraissait d'autant plus haut sur un cheval. Il tentait bien de jouer à nouveau à l'exubérance, de faire preuve de sa présence et de sa jovialité surfaite, mais Batz y restait parfaitement insensible et ne répondit même pas à la moindre de ses paroles. Pendant ce temps de mon côté je regardais une carte, pour savoir quelle route nous emprunterions. La mission ne paraissait pas bien difficile, mais je ne voulais prendre aucun risque. Une fois que j'avais prit ma décision, je me retournais vers Batz et Akane, toujours sur mon cheval, bien lentement. Même Batz ressentait que quelque chose clochait alors même que mon visage était toujours aussi tendre, comme un bloc de glace figé. Il y a de ces émanations hélas que nous ne pouvons contrôler, mais il n'en fit aucun commentaire et fort heureusement pour lui.

-Nous suivrons cette route. Disais-je en la montrant du doigt sur la carte. J'ouvrirais la marche et Batz la fermera. Akane restera dans le cortège, puisque monsieur Rapsodie y tient. Cette route est sur un chemin entouré de plaines dégagées qui nous donneront une large vue sur ce qui nous entoure. J'aime autant cela. Mettez les chariots en file indienne et nous avancerons lentement, pour ne pas épuiser les bêtes. Des questions ?
-Pourquoi des touristes ont besoins d'une escorte ? Demandait simplement Batz.
-C'est pas à moi qu'il faut la poser celle-là. Répondais-je tout aussi simplement.

Je me dirigeais ensuite vers l'avant du cortège, le casque posé sur la scelle et l'air indifférent en attendant que tout le monde se prépare à partir. Batz me suivit du regard quelques instants avant de le retourner vers Akane l'air questionneur.
-C'est pas quelqu'un de très causant déjà de base, mais là... Il vous ait arrivé quelque chose ? La dernière fois que je l'ai vu comme ça... Mais il ne finit pas sa phrase. M'enfin, fais attention, il a l'air calme, mais là en lui ça bouillonne, je le connais, il l'a mauvaise.

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Je vérifiais, du haut de ma monture, en passant le long du cortège que tout le monde était installé dans les chariots et ce, jusqu'à atteindre Batz à l'arrière qui avait la charge de fermer la marche. J'avais refusé de suivre l'itinéraire du marchand bedonnant, pour la simple raison que les élucubrations touristiques me paraissaient bien moins importantes que la réussite de la mission et la sécurité de nos passagers. Quand j'atteignais mon ami, je voyais immédiatement sur son visage que quelque chose clochait, il avait ce regard qui l'air de rien en disait beaucoup, un regard que je connaissais depuis que nous étions devenu intime.

-Quoi ? Lui disais-je.
-Mais rien... Répondit-il simplement.
-Batz.
-Tu es tendu, ça ne te ressemble pas. Qu'est-ce qui se passe ?

Je lui portais un regard d'abord difficile, puis il s'adoucit, lentement mais sûrement, si de mon visage, se perdit la hauteur, la confiance et la sérénité, je devais vite la retrouver, car ce jeu d'acteur était une nécessité à ma survie. Il remarquait alors qu'il changea du tout au tout sans que je ne lui réponde et détournait son propre regard en retenant un soupire. Je comprenais facilement ce que cela voulait dire. Je n'en fis aucun cas, et je reprenais sans attendre réellement de réponse.

-Ce marchand ne m'inspire pas confiance, il en fait beaucoup trop. Sois prudent.
-Arrête d'être inquiet, quoi qu'il arrive on s'en sortira. On s'en sort toujours.
-Un jour, la chance pourrait bien tourner.
-Tu es plus aux aguets que d'habitude...
-Cela fait des années que j'ai pas vu l'homme au masque, que rien d'étrange ne s'est produit, et il y a peu au Mont Infinité...
-Je vois... Plus les choses deviennent paisible plus tu crains le drame.
-L'expérience m'a apprit que le calme ne dure jamais.
-Mon épée est là, la tienne aussi.
-L'épée repousse la mort mais pas le malheur.

À cela, Batz ne répondit rien et je retournais mon cheval pour trotter jusqu'à l'avant du cortège, passant devant le chariot où Akane se tenait, je m'y arrêtais quelques instants pour lui faire un topos avant que nous ne partions enfin vers la destination choisie de ces touristes.

-Au moindre problème Akane tu sais ce que tu dois faire je pense. Ce n'est pas parce que la mission a l'air simple qu'elle le restera.

Je ne remettais pas mon casque, quand je me dirigeais vers l'avant du cortège, preuve que je demeurais tout de même aussi confiant que méfiant. La vérité, c'est que je ne comprenais pas la nécessité de cette mission, et qu'il me paraissait très étrange que cet homme aura demandé expressément la présence d'Akane. Pourquoi ? Pour le moment je ne voulais pas l'évoquer, avec elle ou avec lui, mais cela me paraissait trop peu anodin pour ne pas en être, comment dire, curieux... Je restais pour cette raison, donc, encore une fois, très méfiant. Je me satisfaisais par ailleurs de ne pas avoir céder au marchand qui voulait nous faire passer dans des coupe-gorges uniquement pour le plaisir des yeux. Quant à tous ces touristes, depuis quand des touristes se rendent à Senun ? En état de guerre, tout ceci était trop étrange pour que je n'apparaisse pas méfiant à leur égard.
Enfin, d'un mouvement de main, j’annonçais le début du voyage et alors que nous nous mettions en marche, je regardais vers le ciel pour y trouver Gi, énorme soulagement qui en suivait, la chance était peut-être de notre côté, contrairement à la mission du Mont Infinité où il était absent.

PNJ:

Nous avancions lentement, très lentement, mais le soleil était avec nous, la compagnie de mon faucon me rassurait, et nos passagers, compagnons de voyages, semblaient satisfaits et détendu. Passer des heures sur mon cheval ne me dérangeait pas, j'en avais non seulement l'habitude, mais je me sentais aussi très bien là-dessus, il y avait une certaine hauteur, une sensation de légèreté, de sécurité et de liberté. La route pouvait nous paraître longue, à Batz et moi qui étions chacun à une extrémité et aux aguets, nous n'avions pas en effet la directive de tailler la bavette avec tous ces gens. D'ailleurs, pour être tout à fait honnête, non seulement je me méfiais du marchand, mais je me méfiais en plus de toute cette petite troupe. C'était très étrange que l'un d'entre eux reparte au village lorsque je refusais de suivre l'itinéraire choisit par le bedonnant marchand. Cela m'avait interloqué et ce n'était pas l'excuse qui sonnait fallacieuse que me Rapsodie m'avait donné qui allait me convaincre que quelque chose ne clochait pas. Je ne pouvais pas non plus commencer à interroger tout le monde, c'étaient nos clients, mais je n'oubliais pas que tous ces gens pourraient ne pas être ce qu'ils disaient être.

Peut-être aux yeux de beaucoup, je serais paru paranoïaque, peut-être étais-je d'ailleurs trop souvent méfiant, toujours en alerte, tout en m'efforçant d'ailleurs ne pas en avoir l'air, mais n'était-ce pas ce qui m'avait maintenu en vie ? Chaque relâchement, je l'avais durement payé, plusieurs fois, je ne commettais plus cette erreur aujourd'hui. Peut-être pas que rien ne m'échappait, que m'obligé d'avoir l'air sans cesse serein et assuré de moi-même me coûtait beaucoup de concentration pour peu de choses aussi, mais je jouais depuis si longtemps un rôle que j'avais finit par devenir ce que je voulais être, d'une certaine façon... Je ne perdais cependant de vue plusieurs vérité, du moins ce qui m'apparaissait à moi comme des vérités. Ce ne sont ni le prestige ni le statut social qui gagnent les guerres, peu importe que l’on soit de sang royal, noble ou modeste. A la guerre, ceux qui échouent meurent. Je l'ai su dès les premiers instants de mon entraînement, et aujourd'hui encore, alors que je ne sers que d'escorte pour une mission en apparence aussi classique que dérisoire, je le sais bien, à chaque instant, si je porte une épée, c'est que ma vie est en jeu. Je m'étais satisfait dans une vie routinière, en pensant que mon destin viendrait à moi seul, comme il l'a toujours fait, mais lors de la mission du mont infinité je l'ai comprit, ce n'était pas si simple, je devais redevenir ce que j'étais avant d'avant d'arriver à Kumo.

Batz à l'arrière était dans une optique quelque peu différente, il s'assagissait avec le temps, abandonnant la vie vagabonde, il redécouvrait ce que cela faisait d'avoir une famille, d'avoir un endroit ou dormir, il redécouvrait le plaisir d'avoir un pied à terre et quelqu'un pour veiller sur lui, moi entre autre, si nous n'avions pas clarifiés toute notre situation et qu'il restait encore beaucoup de malentendu dissimulé, pour lui comme pour moi, c'était plaisant de se retrouver, d'être à nouveau ensemble, je remarquais en fait avec plaisir qu'il retrouvait un semblant de joie et qu'il oubliait un peu le passé. Il n'avait jamais été un homme tourné vers l'avenir, mais avec mes filles, et Akane qui paraissait petit à petit lui porter un certain intérêt, je ne m'inquiétais plus que du moment où je ferais revenir Laya, Luka et Gondo, même si nous n'en n'étions pas encore là.

La route n'allait pas éternellement permettre à mon esprit de remettre ses idées en ordre cependant, car nous avions déjà un petit problème, l'un des chariot avait perdu son essieu. Sur une route aussi facile, c'était quand même un comble, ils auraient pu vérifié leur matos. Je faisais demi-tour pour aller voir ce qu'il en était, le cheval trottinant vers le coeur du problème tandis que Batz me rejoignait lui aussi rapidement. Heureusement, je n'avais pas besoin de m'alarmer, selon le marchand et les deux hommes vigoureux qui allaient s'en occuper, ce serait réparé au bout d'une heure. Ce qui me paraissait rapide d'ailleurs pour le remplacement d'un essieu, mais enfin, s'ils le disaient, je n'allais pas m'en plaindre. Batz arrivait à ce moment au petit galop.

-Foutu chariot, tout ça pour un trou ? Heureusement qu'on a pas prit un chemin de montagne.
-Une heure ils disent.
-Qu'est-ce qu'on fait en attendant ?
-Rien, qu'est-ce que tu veux faire.

Ainsi terminais-je en reprenant les reines du cheval pour l'emmener un peu à l'écart du cortège et veiller aux environs. Batz préférait se rapprocher d'Akane, perché sur l'un des chariots, pour une fois qu'il la regardait d'en bas, elle lui paraissait plus, attrayante, pour utiliser un terme courtois.

-Tu fais ta belle ? Ça va être assez calme, tu veux venir avec moi ? Y'a un ruisseau plus bas en amont, Snow peut bien surveiller tout seul.

Je regardais pendant ce temps l'horizon, touché par une curieuse sensation, mon corps me disait quelque chose, mais je ne savais pas encore quoi tandis que mon faucon se posait sur mon épaule. Instinctivement, je remontais le regard vers ce marchand et le guettait comme s'il fut ma proie, le perçant de mes yeux bleus. Par bien des fois mes sensations ne m'avaient pas trompés, et même si j'étais dans le faux, je restais prudent.

PNJ:

Même moi, je commençais à me laisser prendre. Prendre par la saveur de la quiétude, un relâchement bucolique, puisque le paysage y invitait, comme ceux qu'évoquent les poètes éponymes. Gi recevait sur mon épaule quelques baies, et cela suffisait à le contenter. Nos regards se croisèrent quelque instants, et il reprit son envol, satisfait de ce qu'il avait obtenu. Sous le soleil, nous brillions, plus loin, je regardais les hommes à la tâche et ces touristes rirent entre eux, comme si rien dans le monde ne pouvait noircir leur gaieté. Instant de nostalgie, quand il y a plusieurs années, je me rappelais avoir planté l'épée dans la neige avec la ferme intention de ne jamais m'en resservir. J'avais tellement honte que Laya soit dans cet état, et pas moi. De n'avoir su la protéger. Batz nous avait quittés depuis un moment, et je n'avais toujours pas trouvé comment la soigner... Pourquoi rendre les armes, m'avait demandé Luka. Parce que mon épée a causé trop de mal lui avais-je répondu. Gi s'était alors posé dessus, un soir d'hiver, je trouvais dans son regard quelque chose d’étonnamment commun avec un homme que j'avais connu jadis. Et plus je le chassais de ma lame, plus il persistait à s'y poser. Pourquoi voir tous ces gens heureux me rappelait cela, je l'ignorais, mais je me figurais devoir trouver de la joie dans cette vision idyllique. L'homme au masque ne m'avait-il de toute façon pas prévenu, plus je fuyais mon destin, plus il me punirait... J'étais destiné à rester un soldat pour avoir le droit un jour au bonheur. Je ne savais pas, je ne savais plus vraiment. Quand je cherchais des réponses en tout, je ne trouvais rien qui pouvait dissiper mes doutes. Alors plutôt que de paraître chaque jour dépressif et d'être celui qui ignorait sa vie, je décidais de paraître le plus serein qui soit, une sorte de représentation concrète de l'attente de tout être humain sur un visage angélique et imperturbable. Je crois qu'alors que j'essayais d'être "tout" pour ne jamais échouer, je finissais pars n'être plus rien.

Sans le casque, qui demeurait sur la selle, mon visage s'adoucissait, les cheveux au vent comme à une époque où j'ignorais ce que pouvait être la peur, où les questions n'avaient pas de valeurs, car je n'attachais alors d'importance qu'aux réponses. Une époque où ma chevelure était brune. Aujourd'hui blanchie par le stress et les ténèbres. Puis je voyais Batz et Akane qui se parlaient, et cela m'amusait. Le chien fou devenait docile fallait-il croire. J'avais cru devoir, fuir, le passer, et pourtant, là, à cet instant précis, j'avais l'impression que je reconstruisais quelque chose de similaire à autrefois. Une famille, un état, un but. Je relevais le regard vers le soleil, qui me tenait tête, lui qui ne se laissait jamais regarder sans brûler, si puissant qu'on ne pouvait se fixer sur lui. Gi qui s'y promenait si facilement, un faucon blanc, comme un ange bercé dans ses rayons qui veillait sur le monde. Et je me demandais, en ignorant quelque secondes le reste, si ce rêve de chaque nuit, n'avait pas finalement la forme illusionnée de mes simples désirs inassouvis. Avec cet homme, figuration d'un père de cœur, qui m'empêchait de m'y envoler. Jamais je n'avais réellement compris ce rêve, mais en voyant tous ces gens heureux, c'était comme ce qu'il y a de vérité, qui nous paraissait si limpide un instant, jusqu'à vouloir y mettre des formes et des raisons et qu'elle nous échappe à nouveau.

Je trottais vers le groupe à ce moment, pour faire le tour du cortège et jouer mon rôle de chien de berger. Ou d'ange gardien comme le racontait l'expression consacrée. Batz peu avant était ébloui par Akane, du haut de son chariot, rayonnante à la lumière, il l'avait pour la première fois regardé différemment. Je l'avais remarqué, mais je laissais faire de loin, appréciant de voir qu'il aura pu se laisser amadouer par autre chose que mon épée et les regards innocents de Laya...

Quand elle eut l'air gênée de sa remarque, il se mit à rire, un véritable rire, comme je n'en avais pas entendu de lui depuis 10 ans. Il se sentait plus grand, il se sentait plus utile, il se sentait simplement plus vivant. Quand elle bondissait du chariot et acceptait sa proposition, entortillant ses cheveux dans son doigt comme le font les jeunes filles en batifolage, je ne pouvais retenir un sourire. Ces deux-là, sous ma protection se laissaient aller à des élans qu'ils n'avaient pas l'air de comprendre eux-mêmes. C'était alors à Batz d'être gêné quand elle lui parlait de baignade. Et discrètement dans mon coin, je n'avais pas pu retenir un petit rire, lui qui était si bourru se retrouvait désarmé devant une petite fille.

-Mais... Je vais donner à boire à mon cheval c'est tout... Lui répondit-il à la cime du bafouillage.

Batz restait sur son cheval, emmenant avec lui Akane plus en bas, jusqu'au ruisseau, ils étaient alors assez éloignés pour qu'on n'entende pas ce qu'ils pouvaient se raconter, et même assez pour que leurs silhouettes lointaines ne laissent pas apprécier ce qu'ils faisaient non plus. Mais j'avais confiance en Batz, je savais qu'il ne ferait rien de répréhensible, je doutais d'ailleurs qu'il soit capable d'oser quoi que ce soit avec n'importe quelle femme. Arrivé au ruisseau, il descendait de sa monture et laissait son cheval s'abreuver. Lui, déposait son épée sur le sol et s'asseyait dans l'herbe. Là, il retirait son faux bras en métal et le posait à côté de lui aussi. Batz avait l'air plus paisible que d'habitude, la vie à la ville l'avait reposé, il se sentait moins à l’affût, il avait l'air de simplement moins chercher un, je ne sais quoi qu'il ne comprît pas non plus. Batz se contentait de regarder devant lui, peut-être même qu'il évitait les regards d'Akane d'ailleurs. Il l'avait amené ici à l'écart, car il souhaitait lui parler de quelque chose loin de moi.

-Je pense que je vais rester avec vous. À Kumo. J'aime cette vie en fait. Et ici mon épée a une valeur. Je ne suis pas juste un chien errant, ça me plait. Je sais que Snow n'attend que ça. Mais toi, tu es toujours avec lui, ça t'ennuierait pas ? Je veux dire...
La force des hommes, la première, c'est la force de croire. Batz était dans une sorte de transition, enfermé dans l'ombre et le désir de vengeance depuis si longtemps, sans le savoir, une lumière lui apparaissait, mais il n'avait jamais su comment exprimer ce qu'il ressentait, la simplicité des actes et des idées lui avait toujours convenu. Aujourd'hui, il souhaitait en quelque sorte cesser de courir, trouver autre chose, peut-être que vieillissant la fatigue l'obligeait de voir le monde et la vie avec plus de nuances, et quand il baissait le regard sur l'eau pure du ruisseau, son cheval immergé jusqu'aux chevilles, que le temps et cette mission étaient si paisibles, il se sentait comme poussé vers cette idée simple du bonheur. Pas de passion, pas de grand mot, pas de grandes tirades, une simple et résonnante aspiration qui lui apparaissait subtilement à mesure que les jours passaient sous Kumo.

-Avec le temps, je crois que nous avons moins de fougue, moins de passion. On aspire à autre chose. C'est ici que je pense trouver cette chose. Avec vous... Je voulais te dire ça loin de Snow, tu sais que lui et moi c'est compliqué. Mais nous nous respectons. Je ne sais pas pourquoi nous ne pouvons simplement nous dire les choses. Nous demander simplement pardon l'un à l'autre. Je sais que tu as une influence sur lui, il redevient petit à petit celui que j'ai connu, avant son mariage avec Laya. Et c'est beau. Je veux voir, ce qu'il a obtenu, ce qu'il lui reste à obtenir encore.

Batz regardait un instant sa main droite, l'ouvrant et la referment, la force de celle-ci se ressentait rien qu'au craquement de ses os.

-Je crois qu'ici, malgré tout, on va avoir le droit au bonheur. Ouais, je le crois.

Le moment n'était pas bien choisit, pour une transition profonde et intime, dans les intentions de ces deux hommes qui se cherchaient depuis toujours sans avoir jamais cessé de se perdre, mais voyant que la simplicité du bonheur pointait le bout de son doigt sur eux, que quelque chose de concret se construisait et que le temps comme cette mission semblait profiler un avenir radieux, chacun, sans le savoir pour l'autre, se redécouvrait, comme une nouvelle jeunesse, et sortait enfin du long labyrinthe dans lequel ils s'étaient enfermé depuis le drame de Kiri. L'avenir appartiendrait peut-être, non... Serait nuancé et décoré désormais de rire, du moins, c'est ce qu'ils avaient l'impression tous les deux de sentir.

PNJ:

Si nous étions aveugles, ce n'est pas parce qu'on ne verrait pas le soleil, que l'on pourrait nier son existence, sa chaleur n'en serait que plus importante pour celui qui ne le verrait, cette chaleur qu'il sentirait, serait pour lui la preuve ultime de son existence. Il sentirait, sans le voir, la direction du soleil, et sans le voir encore, il saurait quand il est levé, et quand il est couché. Ces élucubrations tarabiscotés de philosophie primitive n'intéresse personne, et pourtant les idées les plus anodine, qui sonnent comme des bavardages de comptoirs sont la plupart du temps lourde de sens. La chaleur du soleil, c'est la figuration imagée et sincère de l'amour, que l'on sent, sans pouvoir le voir ou le toucher, mais que l'on voit quand il est là. Supputer qu'il s'agissait d'amour lorsque Batz s'adressait timidement à Laya était présomptueux, l'attirance physique et spirituelle sont si transparentes, si difficile à saisir et définir, qu'on ne pouvait s'assurer que Batz était sous le charme de la jeune fille. Néanmoins, il lui trouvait incontestablement quelque chose de plus qu'à d'autres. Cette innocence, cette façon simple de regarder et de faire lui rappelait les élans qu'il avait pour Laya, lorsqu'elle avait en plus la capacité du combat il ne suffisait que d'un pas pour qu'il la confonde.

Il ne se rendit hélas pas compte de cela, qu'il trouvait en elle ce qu'il avait perdu autrefois chez Laya quand elle perdît elle-même la raison. Mais encore une fois, dans son esprit s'interposait quelque chose, quelque chose d'extérieur, un être, un ami, qu'il appelait Snow. Il savait comme il avait la manie de cette hauteur sur autrui, sans fausse modestie, parce qu'il était né avec un le "je ne sais quoi de plus" et qu'il considérait déjà que ceux qui l'entouraient lui appartenait sans qu'il n'y eut besoin de l'ordonner, sauf bien sûr au plus indomptable de tous, c'est-à-dire à Batz, qui fut gagné à l'épée il y aura des années de cela maintenant. Quand elle lui parlait, lui répondait, il ne savait que dire, des moitiés de mots sortaient de sa bouche sans qu'il n'avait pas la force de les achever. Un conflit opérait en lui, l'amour d'une autre, la conviction de trahir une seconde fois son ami, dont il aurait eut besoin de l'approbation sans la capacité de pouvoir la lui réclamer. Snow serait sans doute, bien au contraire, gracieusement ravis de savoir ce rapprochement entre ces deux personnes qu'il aimait sincèrement, mais jamais cela ne viendrait de lui, ni ne lui viendrait à l'idée qu'un animal fougueux comme Batz ressente de telles retenues.

Pas un instant Batz n'osait porter le regard dans celui d'Akane. Il avait peur de voir quelque chose qu'il ne pourrait pas assumer. Ce n'était pas que la vue de la jeune fille le repoussait, bien au contraire, c'était justement ça le problème. Comme ces vieux guerriers qui craignent de déposer trop longtemps l'épée pour être à même de la reprendre efficacement en main le moment venu. La voir ainsi, à la lumière scintillante de l'eau, les jambes de la jeunesse en état de sublimation, il se sentait trop vieux et démérité pour avoir le droit à une nouvelle chance d'acquérir le bonheur, quelle que soit sa forme. Elle qui pensait ne pas avoir tant d'influence que cela sur Snow, elle ignorait sans doute que le rêve de Snow était...

-Snow, ne vit que pour les autres, contrairement ce qu'il donnerait à penser. Il veut créer un monde parfait, il est convaincu que c'est ainsi qu'il soignera sa femme. Que sa maladie est liée aux maux du monde. J'sais pas pourquoi. Même si j'ai ma petite idée. Quand il prend quelqu'un aussi longtemps près de lui sans le repousser, c'est que son avis compte et qu'il souhaite ne pas décevoir. Crois-moi, tu as de l'influence sur lui. Il ne cherche pas le bonheur pour lui-même. Il le cherche pour tous. Je veux bien croire qu'il faille accepter le bonheur pour le posséder. Mais ne doit pas t-on y avoir le droit avant de l'accepter pour l'obtenir ?

Le visage de Batz se penchait sur son bras, du moins ce qu'il en manquait. Il se l'était arraché lui-même, pour se dépêtrer de ce qui l'empêchait de sauver ses amis. Il l'avait fait à coup de couteau rouiller. Et à ce moment, la colère le rongeait si hardiment qu'il n'en avait même pas senti la douleur. Malheureusement ce sacrifice fut inutile, et c'est en cela qu'il considérait que parfois, sans que l'on puisse affirmer de pourquoi, certains n'avaient pas ce droit, au bonheur. À cet instant, son visage se durcissait, retrouvant cet air froid, sec, animal, qui faisait normalement sa nature coutumière. Comme si la douleur ne pouvait jamais quitter son visage qui porterait tous les malheurs du monde en ses traits. Il n'y avait que dans les romans que ceux qui souffraient paraissaient attirants normalement, alors il ne comprenait pas pourquoi Akane semblait avoir tellement d'empathie à son égard. Lorsqu'il se relevait, c'était ainsi qu'il dévoilait son immense stature abattue pourtant par un poids si lourds à porter qu'on aurait de la peine à l'imaginer. Ses épaules larges semblaient être taillées justement pour cela, porter sur lui ce qu'il y a de sombre, parce qu'il était né avec cette force et cette capacité. Il observait soudainement Akane d'un autre regard, différent, sans voracité, sans violence, mais il n'était pas non plus joyeux, il n'avait pas de candeur, il était résigné, et désolé, Batz intérieurement, décidait de ne pas se laisser prendre par des élans sentimentaux, il craignait en réalité qu'il arrive un nouveau drame dont Akane serait cette fois la victime. Et cela se disait-il, s'il venait à l'aimer, il ne le supporterait pas une seconde fois.

-Tu es une belle jeune fille maintenant. Au talent certain. Snow a de la chance d'être tombé sur toi. Dit-il en ramassant son bras métallique qu'il refixait à son moignon. Toi tu ne seras pas déchirée entre deux fous...

Cette petite phrase qu'il lâchait bassement comme un soupire entre ses lèvres, alors qu'il replaçait son épée dans son dos, était lourde de sous-entendu, peut-être pas pour elle, mais au moins pour lui. Et quand il se retournait, l'on pouvait saisir, de son dos, une allégorie malfaisante, son aura de chien maltraité qui était devenu fou à force de coups, et qui luttait en lui pour s'emparer des dernières parcelles d'humanité qui subsistaient en son sein. Un animal noir, aux yeux de figurant la folie sanguine, qui, s'il fut dessiné, évoquerait certainement tout ce que le primitivisme humain avait de plus horrible quand il s'agissait d'assurer sa propre survie. De dos, il était une montagne, immense, impénétrable, indomptable. Alors qu'en son cœur, un éclat de lumière fut sauvegardé pour ne pas devenir simplement aussi fou que ces hommes des cavernes l'auraient été, si soumis à autant de traumatismes que lui. Il s'avançait dans l'eau, jusqu'à la hauteur de la jeune fille, et posait ensuite la main sur sa tête, geste étrange, entre l'envie de protection paternelle et la preuve d'une affection moins amicale qu'amoureuse, car le regard qui accompagnait le geste, de son unique œil, était aussi perçant qu'une lance.

-Je te remercie de m'avoir écouté. Dit-il en repartant, son cheval à côté tenu fermement aux reines qu'il agrippait.

Plus loin de là, Snow se tenait sur son cheval, il regardait Batz remonter, à pied, avec sa monture à côté de lui, il avait alors le regard sondeur sur lui, comme s'il sentit que quelque chose s'était passé, alors qu'il le voyait à peine et ne pouvait pas réellement voir son regard. Derrière lui, les hommes étaient encore à leurs œuvres, la réparation continuait de bon train, mais Snow avait perdu l'intérêt qu'il avait à leur surveillance. Il pressentait que Batz, rien qu'à l'aura qui émanait de sa personne, avait quelque chose à retenir, particulièrement à son vis à vis. Quand le guerrier noir arrivait vers Snow, les regards qu'ils se lancèrent, étaient un mélange savant entre la recherche et l'hypocrisie. L'un et l'autre ne sachant pas réellement, et se trompant, sur ce qu'ils pensaient. Se connaissant tellement, craignant tellement de se blesser mutuellement, ils étaient sans cesse sur la retenue et cela ne faisait que creuser le lien qui les unissait alors qu'il était déjà si... Profond.

-C'est une belle jeune fille n'est-ce pas.
-Personne ne dit le contraire.
-Laya avait le même âge, quand nous l'avons rencontré.
-Elle n'avait que quinze ans. Akane est plus âgée je crois.
-Quelle bonne mémoire tu as.
-Elle est sélective. La tienne est normalement infaillible. Est-ce que tu vieillis ?

Snow ne répondit pas, ce petit jeu entre les deux hommes, qu'ils seraient peut-être seuls à comprendre, n'était ni plus ni moins qu'une conversation de non-dit où cette fois, ils se comprenaient parfaitement, car comme quoi, parfois, il en fallait bien peu. Batz passait à côté de Snow, qui ne le suivait pas du regard, il était simplement fixe, droit devant lui et Akane, qu'il trouvait tout aussi rayonnante que Batz l'avait désignée un moment plus tôt.

-Tu m'appartiens. Ne l'oublie pas.
Et Batz, baissant la tête, ne répondit pas.

D'une oreille inattentive et extérieure, cela résonnerait comme la parole d'un homme arrogant et personnel qui ne voulait pas perdre son jouet. Il y avait effectivement de cela, mais c'était plutôt un avertissement, "ne lui fait pas de mal, et qu'elle ne t'en fasse pas". Et cela Batz l'avait très bien compris. Lorsque Snow disait, qu'il lui appartenait, c'était en réalité une preuve d'amour, que la hauteur et la dignité de cet homme ne savait exprimer autrement. Que personne ne se mette alors en travers de leur lien, craignait-il, car il serait impitoyable, sans la moindre haine aucune, uniquement parce que c'est ce qu'il avait décidé. Snow ne détestait ni ne haïssait jamais rien, mais il protégeait en même temps à tout péril tout ce qui lui était cher.

PNJ:

Les hommes achevaient la réparation de l'essieu, quand Akane remontait la pente du ruisseau jusqu'au cortège. Snow, juché sur son destrier restait sur son passage, et c'était bien entendu intentionnel. Quand elle arrivait à sa hauteur, il baissait les yeux sur elle, lui portant un regard inquisiteur, sans violence, ses yeux se posaient ainsi sur elle, avec l'intention d'y trouver ce qu'il cherchait de réponse. Il sentait que quelque chose lui échappait, et loin de là, Batz qui remontait sur son cheval observait lui aussi, craignant malgré lui que Snow ne dise quelque chose qui porterait préjudice à leur groupe. Mais le visage de Snow s'éclaircissait à mesure que le temps passait sur le regard d'Akane. "Quelle jeune fille innocente, sans commune mesure, au destin brumeux et l'avenir incertain", pensait-il silencieusement. Il n'était pas dupe, il savait ce qu'il se passait, et ne laissant rien passer de ses pensées dans son regard, il retrouvait le timbre de voix qu'il avait lors des premiers jours passés avec Akane.

-Il est fragile. Plus qu'il ne le laisse paraître. Les animaux sauvages sont comme des chevaux jamais montés, prend le temps de l'apprivoiser si c'est ce que tu veux vraiment, mais ne t'interpose jamais entre lui et moi.

Le ton ne laissait pas entendre s'il s'agissait d'un conseil, d'une menace ou d'un avertissement, il était las et froid, le Snow d'avant le Mont Infinité revenait petit à petit. Fier, assuré, confiant à l'extrême. Il retrouvait un semblant de passion en lui, mais avec cela venait également son besoin de contrôle absolu sur tout ce qui l'entourait. Il fit demi-tour avec son cheval, et remontait, laissant voir son dos Akane, vers le cortège lui aussi et particulièrement vers le marchand. Celui-ci restait joyeux, et n'avait rien à voire avec les entremêlements émotionnels du trio récemment formé. Snow ne lui laissait pas réellement de quoi faire de grands étalages de sa présence, il l'écrasait d'une certaine façon, sans réellement y faire attention.

-Nous allons pouvoir repartir ?
-Oui, dans quelques minutes.
-Très bien, répondit Snow avec un léger sourire.

Il se dirigeait à nouveau vers l'avant du cortège, prêt à jouer son rôle. Pendant ce temps, Batz qui était remonté sur son cheval, regardait Akane remonter la pente. Quelque chose en lui s'étouffait, quelque chose d'à la fois sourd et puissant, mais il n'en montrait rien autour lui. Le moment ne s'y prêtait peut-être pas. À l'avant nous avions le chevalier blanc, le guerrier noir quand à lui, irait à l'arrière, et au centre, Akane... Le marchand fit tout de suite de grands signes à la jeune fille, pour l'inviter à reprendre place à côté de lui. Il était tout sourire et guilleret à l'idée que le cortège puisse repartir.
Batz passait pendant ce temps tout du long du cortège jusqu'à l'arrière, silencieusement, le visage bas et le regard ailleurs, devant les touristes, il paraissait extraordinaire, masse de muscles imposante à l'air impénétrable, mais lui intérieurement se moquait éperdument de leurs regards. Snow était à l'inverse apprécié et admiré quand il passait devant les touristes pour sa tenue irréprochable, cet air noble et digne, qui émanait la perfection, la confiance et la sérénité comme on ne la voyait pas souvent. Mais à dire vrai, pour ceux qui l'ignorait, on pouvait se demander qui était réellement le maître de l'autre, qui était l'ami de l'autre aussi. C'était pas une femme qu'ils furent pour la première confrontés tout deux, ce serait encore le cas un jour, cette après-midi l'avait prouvé.

Quand Batz arrivait à la fin du cortège, pour fermer la marche, et que Snow arrivait à l'avant, il redressait le regard vers le soleil, que lui, contrairement à Snow, détestait, il aimait la lune, il était la lune, et aurait aimé un jour la voire voiler le soleil. Allégorie lourde de sens si il en est, mais c'était sous le soleil, que le cortège repartait.

PNJ:

Snow n'avait pas relevé la circonlocution d'Akane. Il s'était retourné sur son cheval, et avait repris sa route. Ce ne fut pas qu'il ne l'avait pas entendu, mais que cet avertissement, ou plutôt ce qu'elle devait penser être une remise au point n'avait pas la moindre signification pour lui. Entre ce que l'on dit, et ce qui est, il y a bien souvent malheureusement un immense fossé. Cette phrase était si formelle, "monsieur" avait-elle dit. Snow en restait de marbre, inatteignable, il avait déjà fait ses propres conclusions et se disait intérieurement, "j'obtiens toujours ce que je veux". Cette fois pour lui ne faisait état de différence. Il n'y avait pas de contraste avec Akane. Un chien ne t'obéit pas toujours, ce n'est pour autant qu'il ne t'appartient pas. Non qu'il considérait Akane comme un animal domestique, c'était bien au-delà de cela. La fierté de certains hommes, dont l'affectivité fut mise à si rude épreuve que leur conception de l'amour donne des formes sujette à l'interprétation, ne leur permet pas d'exprimer cet amour autrement que par une possessivité. Rien de malsain en cela, Snow était en marge de la société et du monde, il ne voyait pas les choses comme la plupart des gens, il ne se laissait pas prendre par la coutume, par ce qui était admis normalement dans la société. Il faisait un amas de tout ce qu'il savait, excluant l'émotion de la donne, pas celle d'autrui mais la sienne, et avec tout ce qu'il savait, il en tirait ses propres conclusions. C'est ainsi que par exemple il avait conclu que jamais la violence ne disparaîtrait, que celle-ci était même nécessaire à l'idéale de la perfection. Akane, qui voulait certainement conserver sa liberté et s'imaginer en âge comme en droit d'être indépendante, ne concevait sans doute pas que Snow voyait les gens autrement, il ne lui retirait pas ses libertés, il les cadrait, il prenait soin d'elle à sa façon et peu lui importait qu'elle l'aime ou l'admire. Il se moquait en général de l'opinion sur lui qu'avait autrui, seul son propre jugement sur lui-même comptait à ses yeux, ce que pensaient les autres n'étaient que des paramètres en plus.

La suite du voyage pour Snow était silencieuse, il était aux aguets, il était simplement en mission, comme Batz, qui avait parfois l'esprit ailleurs, mais sachant préserver l'instinct de survie en même temps. Snow avançait sur son cheval comme s'il était à la parade, il était finalement enfin redevenu lui-même. Cette façon propre qu'il avait de toujours avoir le contrôle sur lui-même, ce qu'il montrait de lui, qui pouvait en agacer plus d'un, était pourtant sa meilleure façon de survivre. Il regardait droit devant lui durant tout ce trajet, le soleil faisait briller sa chevelure blanche. Une chevelure qu'il avait acquis à force de stress qu'on lui considérait parfois exceptionnelle. Quand au loin, on voyait les chariots en flammes bloquer la route et son cortège, il dressait la main pour stopper le tout, sans se retourner lui-même. Scène macabre pensait-il, alors que Batz galopait pour remonter le cortège jusqu'à parvenir à côté de lui. Ni l'un, ni l'autre ne se regardaient quand ils découvraient ce que l'on pouvait appeler sans exagération un massacre.

-Il voulait du tourisme, ça leur donnera un avant goût du monde Shinobi.
-Il faut pousser les chariots. On va les tirer avec les carrioles.
-Et les morts ?
-On va les enterrer. Ouvre l’œil, une embuscade de bandits à la petite semelle peut-être.
-Je sais.
-Je vais tenter de détecter d'autres présences. Prend en charge l'ouverture de la voie en attendant. On les enterrera après.
-Entendu.

Snow avançait donc vers les cadavres et les chariots en flamme, sa détection de mouvement et son anticipation en activité. Il prit la peine d'observer les cadavres plus longuement, a fin d'en apprendre un peu plus sur les circonstances de leur mort. Il ne fut pas troublé plus que cela parce qu'il voyait. C'était depuis les années une routine, dont il se serait certes bien passé, mais elle était effective et il ne servait à rien de pleurer ce qui était déjà fait dans les circonstances présentes. Du haut de sa monture, il se disait simplement, que c'était la vie. Batz revenait vers le marchand en particulier, pour lui annoncer les directives. Il le fit sans avoir l'air de donner des ordres, c'était simplement, à ce qu'il avait l'air de dire, la meilleure chose à faire.

-Nous allons tirer les chariots, et enterrer les morts, de l'aide ne serait pas de trop. Akane se chargera de votre sécurité.

Batz s'en retournait vers Snow, qui ne décrochait pas son regard des cadavres, non loin des chariots en flammes. Quand il se trouvait à ses côtés, cela lui paraissait curieux, et il lui en fit part.

-C'est pas le premier mort que tu vois.
-Ni le dernier je présume. Pourquoi les tuer et brûler leurs chariots, c'est la question que je me pose.
-Tu ne peux pas toujours tout savoir et tout comprendre.
-Peut-être.
-Allez viens, on va virer les chariots.
-Je vais bouger les cadavres avec mon cheval et de la corde en attendant.
-Tu veux les enterrer où ?
-Là. Disait Snow en pointant la prairie du doigt.
-Pas certains que les touristes aiment devenir fossoyeurs.
-Dis-leur que si c'étaient leurs dépouilles qu'on avait trouvé ils seraient plus enclin à l'accepter.

Snow fit faire quelques pas à son cheval, mais en relevant le visage au ciel il terminait.

-Où est passé Gi ?...

PNJ:

Snow commençait la sale besogne, tirant les cadavres par une corde attachée à la selle de son cheval, pour les déloger du chemin qu'ils devaient traverser. Il l'avait préalablement enroulée aux jambes d'un premier mort. Une besogne bien peu agréable, la force du cheval parvenait sans le moindre mal à traîner les corps inanimés qui laissaient dans leur sillage un couloir de sang, mais Snow n'aimait jamais devoir faire ce genre de chose. Il le faisait parce que cela devait être fait, quoi qu'il s'en serait bien passé. Batz remontait le chemin pendant ce temps, calmement, son cheval avait l'air fatigué et nerveux, mais Snow ne le remarquait pas, quand l'explosion sous le cadavre qu'il traînait fit paniquer sa monture jusqu'à l'en faire éjecter. Batz dégainait immédiatement l'épée, d'instinct, et criait son nom quand il le voyait tomber lourdement au sol. Son cheval était paniqué et s'enfuit directement après cela. Celui de Batz restait nerveux, mais la poigne de son maître savait le maintenir.

En se relevant, Snow remarquait immédiatement derrière Batz ce qu'il se tramait. Encore à genoux, il pointait vers Akane du doigt en criant "Batz !", ce qui fit retourner son ami qui découvrait la scène. Le regard du chien fou changeait du tout au tout, il lançait immédiatement le galop, en lâchant les rênes pour tenir son épée à deux mains. Dès ce moment, les autres corps se mirent tous à exploser, tout autour de Snow, sur la route, l'aspergeant de leur entrailles et de sang. Il était dès lors, dans la fumée, comme un voile blanc tâché de sang. Ce n'était pas qu'il avait eut peur, c'était le choc de n'avoir pas encore une fois su écouter son instinct qui lui disait que quelque chose n'allait pas. Heureusement, Batz était déjà lancé au grand galop vers la carriole. La folie l'emportait, "pas encore une fois", se hurlait-il intérieurement et la lame chargée, lorsqu'il passait à côté de la carriole au galop frappait le premier homme qu'il pouvait sans qu'il n'eût réfléchi un seul instant. Une tête volait et la pompe de sang aspergeait le tout sur le coup. Snow se relevait à ce moment et fit quelques pas vers eux tout à fait sereinement en dégainant son sabre. "Personne ne touche aux miens sans ma permission", pensait-il en tranchant à distance d'un coup de sabre dans le vent le marchand qu'il avait en ligne de mire. Mais l'un des hommes vit les éclats de lumières scintillants et bloqua ce coup avec un kunai sortit in extremis. Snow redressait le visage, maculé, comme son armure et sa cape, d'un sang qui n'était pas le sien. Il avait l'air confiant, malgré la situation qui n'y invitait pas. Ce n'était pourtant pas la folie qui l'avait emporté, c'était simplement que derrière ses ennemis, il y avait maintenant Batz qui brandissait son épée en l'air. Il était monté sur la carriole, sans réfléchir, il n'avait l'air plus que d'appeler du sang et Snow savait que de s'être attaqué à Akane déclencherait chez lui une de ces folies meurtrières dont il avait le secret.

Lorsqu'il l'abattait lui aussi sur le marchand, le Kunaï s'interposait, l'entrechoquement des lames déclenchait une onde qui fit plier les essieux de la charrette, et qu'un homme pusse soutenir la violence d'un coup de Batz décrochait légèrement les lèvres de Snow sous la surprise. On entendit un tintement cinglant. Parmi les touristes, c'était l'incompréhension, étaient-ils du côté de leurs ennemis, ou de simples victimes collatérales. Snow ne pouvait pas le savoir. Mais il ne fallait pas laisser une chance à ses hommes de s'enfuir alors il n'hésita pas à frapper à nouveau le vent tout en avançant toujours si sereinement. C'était cependant les chevaux qui tiraient la carriole qu'il visait cette fois. Tous décapités sur le coup. Un carnage commençait, et il avait beaucoup de peine à continuer d'avoir l'air calme. Intérieurement, il bouillonnait pendant que Batz, de son énorme épée qu'il agitait dans tous les sens à une vitesse folle trouvait les parades ahurissante du kunai de son adversaire. Snow fixait maintenant le marchand, lui qui était blanc comme la lumière, il avait l'air d'être la mort elle-même qui s'approchait. Il voulait en fait le garder vivant. Mais cela serait-il réellement possible. Heureusement, l'immense épée de Batz empêchait quiconque de s'approcher de leur combat, sous peine de prendre un coup dans la volée et le guerrier noir, quoi que plein de haine et de folie s'efforçât d'épargner Akane, désormais complètement endormie. Aucun cheval ne pouvait maintenant tirer la carriole, les hommes étaient bloqués dessus et la violence du combat entre Batz et son adversaire allait bientôt faire s'écrouler le tout.

Snow continuait d'avancer, sabre en main, sans quitter du regard le marchand, il avait l'air de le tétaniser. Genjutsu ? Oui, mais pas seulement, quelque chose de plus grand encore, comme si une montagne s'approchait, non, pas une montagne, une sorte d'ange vengeur, déterminé, qui ne ressentait ni peur ni doute. Le marchand ne savait même plus que penser. Était-il réellement pris dans un genjutsu, ou était-ce simplement la peur. Derrière lui, les coups déchiraient le vent et la fureur du combat avec son ami prenait des proportions cataclysmiques. Il était déjà impressionnant que cet homme parvienne à résister à Batz avec un simple Kunaï, mais les coups qu'ils recevaient étaient de plus en plus violents et de plus rapide. Snow parvenait alors jusqu'aux cadavres des chevaux devant la carriole. En haut les cris du faucon parachevaient le décor macabre de la scène invraisemblable de la journée. Snow portait un regard étrange au marchand, sans haine, c'était comme s'il savait, que cet homme n'allait pas s'en sortir vivant. Du moins c'était l'impression qu'il donnait, et ce n'était pas le fracas du combat derrière qui le déstabilisait ou délogeait son regard de celui du marchand. Le samouraï blanc pointait enfin son sabre contre le marchand, sans rien faire d'autre, c'était étrange, il pouvait frapper, mais se contentait d'avoir simplement supérieur, plus déterminé que ne l'avait sans doute jamais aucun de ceux qui le connaissaient.

Derrière le kunaï de l'homme finissait par céder, et l'épée de Batz le pourfendait de l'encolure jusqu'au cœur, sur toute la longue, on entendit la chaire et les os craquer sous l'impact et les souffles coupés de l'homme laissait entendre que même s'il était encore en vie, cela ne durerait pas longtemps...

PNJ:

Tandis que Snow maintenait les mains levées du marchand en le menaçant de sa lame, Batz n'attendait pas pour agir. Il bondissait immédiatement sur son cheval en délaissant la carriole, et épée en main, passait au galop à côté de Snow, pour poursuivre les ravisseurs d'Akane. Aucun des deux ne s'étaient regardé à ce moment, car Snow savait que dans cet état, Batz ignorerait tout ordre de sa part et il était fixé sur le marchand. La folie furieuse s'emparait de lui, et il pressait de coup de talons et de braillements sa monture pour se faire emporter dans un élan transpirant à la poursuite des kidnappeurs d'Akane. Ils avaient tout intérêt à courir vite, et à ce qu'Akane ne se réveille pas, car Batz tirait toute l'énergie qu'il pouvait de son cheval et comptait frapper le vent de sa lame pour trancher les jambes de ses ennemis. Lui aussi, avait en effet la capacité de trancher à distance où il souhaitait du moment que cela fut dans son champs de vision, et les coups fuseraient rapidement et sans ménagement à cette intention. Malheureusement pour ces hommes, un cheval au galop, cela allait très vite et c'était en plus, plus endurant qu'un homme, même un shinobi... Tel était l'avantage d'avoir ce genre de monture et toute la bestialité sur son visage laissait entendre la hargne qui pouvait le prendre à l'idée de se trouver encore une fois incapable de protéger une personne qui lui fut précieuse. Son esprit, durant cette course poursuite, tenait encore une fois désormais bien plus de la bête que de l'homme, l'instinct de protection prenant le pas sur la raison.

Snow savait parfaitement que Batz dans cet état était incontrôlable, qu'il ne servirait à rien de le retenir ou de lui dicter comment agir. La bête était réveillée et tant qu'elle n'aurait pas eut le sang de ses adversaires, elle n'allait pas s'endormir. C'était sans doute pour cette raison qu'aucun des deux ne s'étaient regardé d'ailleurs, quand Batz passait au grand galop à côté de Snow. Le samouraï blanc était attaché à une toute autre besogne. Il devait écouter les justifications et satisfactions du marchand qui venait de se rendre à lui. Son visage contrastait totalement avec celui de Batz, il était aussi glacial que confiant. Intérieurement, il sentait pourtant un semblant de mécontentement opérer, il avait en effet la sensation que l'on tentait de lui ravir sa propriété, Akane, que le marchand déclarait qui plus est sienne. Snow relevait la tête sur le marchand, et fit preuve de toute la confiance qu'il pouvait ressortir de lui, notamment par ce regard luisant et perçant qu'il portait sur son otage. Alors qu'il était plus bas, il avait l'air d'être pourtant plus haut... Sa réponse se fit dans un verbe confiant et serein, à la voix suave, si proche de la perfection que cela en devenait un brin malsain. En effet, il abaissait le sabre, ne craignant absolument plus le marchand, car il considérait, certainement à raison, car il y était préparé, que si le marchand osait le moindre mouvement, il serait mort avant même de l'avoir comprit.

-Akane choisit elle-même à qui elle appartient. Et vous ne la tenez pas encore.

En effet, Batz était à la poursuite des hommes et Snow ne doutait absolument pas de la fidélité d'Akane pour Kumo, cela avait été un sujet de discorde bien souvent entre eux. Il se doutait que tout ceci avait un rapport avec l'ascendance d'Akane. Une Gogyou. Mais il souhaitait plus d'informations et comptait bien les obtenir. Il allait bien faire des menaces, mais le ton était pourtant tout à fait serein. Il prenait avec une grande considération les mots du marchands et délaissait complètement les touristes qu'il abandonnait à leur sort, car la priorité était maintenant Akane, et cela se sentait. Le marchand pouvait aisément comprendre que même si aucune haine ou colère ne ressortait de lui, il n'était pas un homme du genre à ne pas aller au bout de ses paroles.

-Tu devines mes questions je suis sûr. Tu vas donc y répondre, de gré ou de force.

Les touristes ne savaient plus que faire, et certainement que de partir aurait été la meilleure solution, mais Snow s'en moquait pour le moment, restant fixé face ua marchand, avec le faucon qui partait lui aussi à la poursuite de Batz et d'Akane. Le marchand ignorait sans doute qu'il avait froissé deux homme qui n'accepteraient jamais que l'une des leurs soit emporté sans leur consentement. Et malheureusement pour lui, il ne faisait aucun doute que Snow ou Batz serait capable de cruauté dans un cas si précis.

PNJ:

Le sang fertilise la terre, dans le sang l'être humain naît, et il meurt. Batz venait une fois de plus de faire couler de sang d'inconnus. Ces hommes il ne les connaissait pas. Ce n'était pas tant après eux qu'il en avait, c'était autre chose. C'était leurs actes qui l'avait mis hors de lui. Il n'avait jamais répugné à l'idée de meurtre. Et cette fois encore, quand il leur coupait les jambes, il ne ressentit pas la moindre compassion. Pouvait-on malgré tout entendre qu'il fut un monstre. Dans un monde pourvu de si peu de logique ou la mort était coutumière de la vie avec tous ses aspects les plus médiocres, chacun était libre de se faire sa propre idée. Une idée, qui serait difficilement irréfutable, quand on voyait le grand guerrier noir, suant et au visage apaisé, tenir à genoux dans son bras la jeune fille qu'il avait craint de laisser seule à son sort. Il était vivement descendu de son cheval, une ombre noire embrassée par la lumière qui éclairait la victime d'un passé brumeux.

Il l'observait, pas en souriant, mais au regard brillant et désolé d'avoir tellement tardé. Il en ignorait les grognements et gémissements de douleur des ravisseurs durant quelques instants, tant il était satisfait de la tenir dans son bras. Il aurait pu les achever, mais il ne fit pas. Ils mourraient de toute façon. Akane tentait de lui parler, mais il ne répondait pas, se contentant d'un petit sourire, enfin, qui laissait entrevoir un message de quiétude. "Tu es en sécurité" lui disait-il du regard. C'était comme la belle dans les bras de la bête. Il rengainait son épée et posait Akane sur son cheval en tournant le dos à ses victimes qui ne tarderaient de toute façon pas à trépasser. Il leur laissait ainsi une simple masse de dos, vêtue d'une grande cape noire usée par le temps et les combats. Akane son son cheval, lui à côté tenant les liens et avançant d'un pas lent. Ils suppliaient derrière lui d'être achevés, mais il ignorait les supplications. Était-ce humain ou malsain ? Lui ne se posait pas la question, Akane était saine et sauve et ce fut tout ce qui comptait. Aucun plaisir il ne prit à les laisser agonisant sans jambes pour s'enfuir, rien que des bras pour se traîner, ces hommes n'avaient plus le moindre intérêt pour lui.

Pendant ce temps, Snow devait décider s'il devait tuer le marchand qui ne perdait pas de sa confiance. Ne voyait-il pas que sa tentative était un épouvantable échec. Comme il sen doutait, cela avait à voir avec le passé de Gogyou d'Akane. Cela n'était pas une surprise. Il pouvait simplement l'abattre avant que Batz et elle n'arrivent, mais il voulait voir comment Akane réagirait à cela, entendre leur dialogues, leurs questions. Le marchand avait en effet parlé d'un frère, un frère vivant. Les liens du sang étaient puissants, mais Snow doutait que cela fasse trahir Akane. Il était là, pensait-il, pour y veiller de toute façon. Il restait silencieux, se contentant de l'observer silencieusement, d'un regard si inquisiteur et perçant que cela pouvait en devenir pesant.

Batz arrivait alors enfin, lui à pieds et Akane sur son cheval. Snow avait perdu le sien, une belle bête qu'il lui serait difficile de remplacer, mais ce n'était pas la première monture qu'il perdait. Quand son ami revenait il ne tournait pas le dos au marchand, il continuait de le regarder fixement, faisant toute l'étendue de son arrogance. Non pas en faisant montre d'un sourire satisfait, mais en lui affichant un regard presque désintéressé, comme s'il fut convaincu que cette affaire se terminerait bien pour lui et les siens quoi qu'il advienne. Snow était bien redevenu lui-même. Quand Batz arrivait proche de lui, il le comprit immédiatement. Le drapeau blanc tâché de sang... Le guerrier noir s'adressait alors à lui.

-Tu peux aussi bien le tuer. Nous ramenons les touristes à Kumo et ferons un rapport.

Mais Snow, même de dos, inspirait une idée plus.... subtile. Il répondait d'un timbre las et serein.
-Akane a sûrement des questions, il vient de m'apprendre quelques vérités, elle a le droit de les connaître.
-Tu veux camper ici ?
-Je ne crois pas que leur conversation ira jusque-là. Autant le ramener enchaîné à Kumo. Après tout, s'il a autant d'informations qu'il semble le croire, nous aurons plus à gagner à le remettre au Satoru.
-Comme tu veux...

Batz redressait le regard sur Akane, il lui fallait sans doute du temps pour se réveiller et se remettre. Il l'aidait à descendre du cheval pour la poser délicatement au sol alors que Snow invitait le marchand, d'un geste d'épée, à descendre de la carriole. Il comptait solidement l'attacher. Il restait maintenant à s'occuper de tout ces touristes qui n'avaient été ici finalement que pour donner du change. Voilà une belle histoire qu'ils auraient à raconter, eux qui voulait voir du pays, avaient vu du spectacle.

PNJ:

Snow escomptait une confrontation entre le marchand et Akane et il l'obtint au dépend d'elle, recueillant des élans et des réponses qui dépassaient ses espérances. Il se trouvait en retrait, tandis que Batz restait derrière Akane, sa masse sur-élevée d'elle, comme un gardien démoniaque. Ce n'était pas des réponses concernant la famille d'Akane ou encore les agissement de ce groupe dit "du lotus noir" qui l'intéressait, mais bien plutôt les considérations et réactions d'Akane. Il la regardait l'air de rien, comme s'il s'effaçait, et manœuvrait en ce sens que ce teste de la vie pour Akane était en même temps l'occasion de la tester lui-même. Batz, qui regardait de temps à autre vers son ami savait fort ce qu'il cherchait, en soumettant Akane aux espoirs vins de cet homme. Comme Snow, il n'aurait jamais douté qu'Akane reste fidèle à Kumo. Elle en parlait avec tellement de ferveur habituellement, avec même un certain fanatisme que les samouraïs parvenaient certes à comprendre, mais se trouvaient bien loin d'embrasser de bon gré.

Quand Akane sortait son arme, les yeux de Snow s'ouvrir plus rien qu'un petit instant, trahissant une certaine excitation, le visage froid et rudesse de la jeune fille était donc enfin rompu ? Ainsi, humaine qu'elle était et comme tous, le passé lui perçait l'âme quand elle s'y trouvait confrontée. Batz son énorme main sur son épaule, calmement, craignant sans doute qu'elle ne commette une erreur, comme de tuer l'unique témoin dont disposait le trio. Snow était plus pragmatique, surtout quand le marchand, si tant est qu'il en fut finalement un, parlait de famille, il tournait lentement son regard vers lui et bondissait sur la carriole jusqu'à pouvoir poser son visage à quelques centimètres au-dessus du sien. Ses yeux se plantèrent dans son propre regard, perçant d'une ardeur peu commune celui qui se targuait de connaître les liens familiaux avec tant de véhémence. Il le sondait, il le sondait sans retenue et sereinement. Lorsqu'il s'adressait à lui en suivant, prenant son menton entre les deux doigts de sa main gauche, c'était comme un geste de tendresse, malsain et étrange qui résonnait dans son murmure à peine plus audible qu'un souffle. Batz pressait plus fortement l'épaule d'Akane, en lui figurant du regard de ne pas s'en mêler, car il savait ce que Snow cherchait à faire là.

-Les liens du cœur dépassent les liens du sang. Ton lotus sera cueillit par cette jeune fille, ses pétales arrachées sans remord, et toi, tu seras oublié dans une geôle.

Snow relâchait le menton de l'homme ensuite, il tournait un peu la tête vers l'arrière pour s'adresser à Akane et Batz en rangeant l'épée au fourreau.

-Il y a tous ses touristes dont il faut s'occuper. La mission est annulée, nous retournons à Kumo, je vais le leur annoncer. En attendant Akane, cet homme est à toi, c'est ton prisonnier.

Batz souriant comme un diable en apprenant cette décision, il savait que cela n'avait rien d'anodin venant de Snow. Il retirait sa main de l'épaule d'Akane et s'approchait du marchand pour lui poser des liens solides. Le retour vers Kumo serait donc dévolu au plaisir de la jeune fille. Il fallait encore nettoyer l'endroit. Les cadavres , les chariots en flammes, tout ceci, devait être au moins dégagé de la route et Snow décidé d'employer les malheureux touristes pour cela estimant qu'il n'y avait maintenant plus aucun danger. Il laissait en même temps Akane sous la surveillance de Batz, qui était désormais une sorte de, non pas "d'ange gardien", mais de "démon gardien". Il la savait en sécurité avec lui quoi qu'il eut toujours du mal à se contrôler et en faisait encore la preuve aujourd'hui. Batz avait en effet perdu le contrôle, il le savait lui-même et savait aussi pourquoi, mais il s'en cacherait sûrement et indéfiniment.

Le guerrier noir est en proie à des maux sourds, intérieurement, des conflits de consciences qu'Akane n'était pas à même de concevoir, mais il était certain qu'il y avait plus d'affection entre elle et la bête folle qu'il ne devrait et Snow, semblait non seulement l’accepter, mais en plus en tirer profit.