Michiki y était enfin. Il avait été accepté au village de Kiri. Il tira de sa poche un bandeau à l’effigie du village. Il observa les quatre vaguelettes qui composaient l’emblême gravé dans l’acier. Il éprouva une fierté non dissimulée. Ses lèvres minces s’étirèrent en un sourire carnassier. Il rangea ensuite le bandeau dans sa poche. Il venait d’aller le chercher au palais du Mizukage où un Chûnin mal aimable lui avait tendu l’objet de sa venue avec une certaine réticence. Cela ne l’étonnait pas. Les techniques qu’utilisaient Michiki n’étaient pas vues d’un très bon œil. Mais il s’en moquait éperdument. Il n’allait pas renier ce qu’il était pour faire plaisir à des bureaucrates ou même à des jeunes shinobis qui faisaient leur premier pas en tant que Kirijin. Il se trouvait actuellement dans la forêt de la Brume.

Ce nom convenait parfaitement aux lieux. Les arbres qui se tenaient-là étaient entourés d’une brume épaisse qui empêchait de voir très loin devant soi. A peine quelques mètres. Mais Michiki ne s’en faisait pas. Il connaissait parfaitement l’endroit pour y avoir été de nombreuses fois dans son passé. Il marchait paisiblement entre les troncs des chênes et des bouleaux. Il était concentré sur son objectif. Maintenant qu’il était Genin, il allait devoir accomplir des missions pour le compte de Kiri et il devrait se battre. Il fallait apporter des modifications à son arsenal. Sa bouche, revenue à l’état de simple trait, reprit la forme courbe d’un sourire. Sourire qui s’effaça quand il aperçut entre les arbres, l’objet de sa quête.

Devant lui se profilait une petite maison de plain-pied. Son aspect extérieur laissait présager qu’elle était inhabitée. Il s’approcha de la bâtisse. L’air ambiant devint difficile à respirer et il sut que ce n’était pas à cause de l’environnement. Sa respiration devenait difficile. De vieilles émotions ressurgirent. Il arriva devant l’entrée. La porte était fermée mais il savait qu’il suffisait d’une légère pression pour qu’elle s’ouvre. Il resta ainsi pendant quelques minutes. A observer les vestiges de ce qui était la maison de son enfance. Quand il se débarrassa de son sentiment de nostalgie, il longea la façade nord de la demeure pour la contourner afin d’aller derrière. Le spectacle qu’il y trouva ne l’étonna guères.

Il se trouvait face à de multiples tas de terres. Certains étaient petits, d’autres étaient plus larges et plus grands. Chacun était surmonté d’une petite fleur qui avait fanée depuis longtemps. Il devait y avoir au moins une centaine de petits monticules de terres. Tous étaient arrangés de façon ordonnée. Ils formaient des lignes et étaient assez espacées pour permettre à un homme adulte de marcher dans ces curieuses allées. Michiki accorda un bref regard sur tous les tas puis son regard fut attiré par deux en particulier. Plus gros que tous les autres, ils étaient placés à l’écart, recouverts de dalle en pierre grossièrement taillées. Il s’approcha. Il eut un moment de silence dont il profita pour se recueillir devant ce qui était les tombes de ses parents défunts. Il fit demi-tour pour se diriger vers un petit abri construit à même le mur de la maison. Il ouvrit une petite trappe et y découvrit du matériel de jardinage. Il se saisit d’une pioche et d’une pelle puis il retourna aux tombes de ses père et mère.

Il planta la pelle à côté, saisit la pioche des deux mains, la leva bien haut au-dessus de sa tête et entreprit de briser les dalles qui recouvraient les tombes improvisées. Le silence environnant fut perturbé par le tintement de l’outil sur la roche. La tâche s’avérait assez simple. Au bout de dix minutes, Michiki avait terminé de réduire les dalles en petits cailloux déplaçables aisément. Il les retira donc pour libérer deux tas de terre semblables à tous les autres. Il alla placer la pioche près de la pelle pour ensuite se saisir de cette dernière. Il se plaça près de la première tombe. Il ignorait qui de son père ou de sa mère se trouvait là. Il eut un dernier recueillement puis il planta sa pelle dans la terre pour la lancer loin derrière lui. L’effort était considérable et Michiki ne tarda pas à transpirer. Il continua néanmoins son travail. Il finit par sentir une sensation différente de la terre sous le bout de sa pelle. Il la déposa à côté. Il n’avait pas eu à creuser de beaucoup. A peine quelques centimètres. Il mit les pieds dans la tombe, piétinant quelque chose de mou. D’un mouvement de main latéral, il déblaya la terre et il découvrit le visage défiguré de ce qui semblait être son père. En déblayant encore un peu, il eut la confirmation qu’il s’agissait de son père. Il sortit le cadavre de la tombe et l’allongea à côté. Il réitéra sa tâche morbide avec la tombe de sa mère. Il la déterra également. Il la prit par les pieds pour venir l’installer à côté de son père. S’ils n’avaient pas eu tous deux le visage lacéré et ravagé par le temps passé sous terre, ils auraient pu avoir l’air d’être paisiblement endormis l’un à côté de l’autre. Michiki les observa un instant. On ne reconnaissait rien de leur visage décidemment ! Les coups de scalpels qu’il leur avait infligés étaient très violents. Il s’agenouilla à leurs pieds et il sortit un rouleau d’une petite sacoche accroché à sa ceinture. Il le déplia pour découvrir un tas de symbôles étranges écrits dessus. Deux immenses cercles étaient tracés côte à côte. Il concentra son chakra, regarda ses parents et apposa ses mains sur le papier. Les deux cadavres disparurent dans un écran de fumée épaisse et les deux cercles étaient maintenant remplis des mots : « Otousan » et « Hahaoya ». Il replia le rouleau et le rangea dans la même sacoche dont il l’avait retiré plus tôt. Il se releva et observa les autres monticules. Il sourit à pleine dents.

« Heureusement que je suis venu de bonne heure »

Quand il repartit de son domicile familial, il était fourbu et plein de sueur. Mais au fond de lui il était satisfait. Sa vie de shinobi allait enfin pouvoir commencer. Son arsenal était prêt. Il laissa donc derrière lui ses souvenirs et la centaine de tombes presque toutes vides de leur contenu.