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Il arrive un moment où quand on n'a plus d'argent bah on a plus d'argent -oui oui-. Dans ce cas il y a plusieurs choix qui s'offrent à toi: le vol, le racket, l'arnaque, faire le sale travail... Moi je n'avais pas décidé de participer à des tâches aussi glorieuses, j'étais parti pour accomplir un bon petit contrat et ramener la tête d'un bonhomme afin de me renflouer les poches. Pour récupérer un contrat, j'avais juste eu à signaler ma présence et en peu de temps, on m'avait filé un morceau de papier pour me résumer ma mission. Ce n'était pas toujours facile ce boulot, je me rappelais d'une fois où on m'avait donné un partenaire car la mission était dite « dangereuse ». Alors euh, la lumière qui avait classifiée la mission de dangereuse était très loin du compte puisque j'avais du utiliser mon partenaire comme bouclier humain. Bon finalement je m'en étais sorti, c'était le plus important. Mon partenaire, il lui manquait quelques membres et étrangement, j'ai entendu des rumeurs assez récentes qui disaient qu'il était à ma poursuite...

Pour en revenir à mon superbe contrat, j'avais à retrouver un dénommé Jôki Eita, ancien lieutenant des forces armées de Yu no Kuni. Le malin avait déserté ses rangs après avoir multiplié les sévices dans les villages les plus reculés du pays. Il était accusé de vol, racket, viol, abus de pouvoir et meurtre. En gros il s'était bien amusé pendant ses années de service. Ce n'était pas forcément écrit mais peut-être détenait-il aussi des secrets militaires à ne pas divulguer ? Pas impossible mais bon, je m'en fichais. J'avais un boulot à accomplir et j'allai faire en sorte de le remplir. Comme l'autre fois, on m'avait collé un partenaire. Je travaillais mieux seul mais si j'avais besoin -à nouveau- d'un bouclier humain, pourquoi pas ? Et puis peut-être pourrais-je même le manipuler afin d'avoir des massages crâniens le soir ? Alalalala, tant d'idées me venaient à l'esprit, les dieux n'avaient pas fait le bon choix en me laissant hériter de ces pouvoirs ; un jour ils le regretteront assurément.

Après une bonne nuit de sommeil qui m'avait permis de réfléchir à la mission. Je ne me fichais plus de connaître ce qu'il se tramait réellement derrière cet Eita. Le clan Jôki aurait habituellement souhaité traiter eux mêmes ce type d'affaire. Ça me semblait louche qu'ils envoient deux chasseurs de primes afin de faire le sale boulot. Eita n'était qu'un nom parmi tant d'autres à mes yeux mais si au sein de son clan il avait une quelconque influence, cela pourrait expliquer l'inaction des siens. La politique du clan, les traditions et tout, j'en avais rien à faire. Par contre l'information vaut de l'or en ce monde et si je pouvais l'utiliser à mauvais -bon- escient, je ne me gênerai pas. Il me paraissait possible de me transposer malencontreusement dans notre colis si l'occasion se présentait...

Mon petit sac d'écolier étant prêt, je me dirigeais vers le point de ralliement. Je devais rencontrer mon majordome pour cette mission, j'en étais presque pressé ! Ma route étant semée d'embûches, j'avais quelques grosses minutes de retard. Lorsque j'arrivai finalement à destination, je ne vis qu'une femme dans les parages. Une femme ? Non, ce n'était pas possible. Un peu confus, je sortis le vieux papier qui me servait « d'ordre de mission » et le montrai à la damoiselle. Je me trouvais à une dizaine de mètres d'elle. Malgré ça, je pus lire sur son visage que c'était la bonne personne. Oh merde, donc en plus de me foutre un partenaire ils m'avaient foutu une femme ? Bon il y avait possibilité de massages crâniens après une dure journée de labeur mais à côté de ça... Non non, je devais me focaliser sur les bons côtés : cuisine, ménage, bouclier humain-.. Je pouvais faire un paquet de chose avec elle.

La main droite levée, je la saluai tout en me rapprochant d'elle.

« Enchanté, moi c'est Seigi, ton merveilleux partenaire pour cette traque à l'homme. Et toi quel est ton prénom ? »

Une idée me vint à l'esprit, quelque chose qui pouvait fondamentalement changer le cours de la mission.

« Dis moi niveau cuisine t'es plutôt plats chauds ou plats froids ? Je t'avoue être content de t'avoir, une femme pour cuisiner des petits plats, il n'y a rien de mieux. »

La Rébellion se montrait particulièrement active tout comme l'organisation de Red, pourtant, ce n'était pas avec une guerre pour laquelle nous prenions position de manière non lucrative, simplement pour défendre notre nation, que nous allions nous remplir les poches. Non pas que les finances me manquaient mais le contexte de crise touchait tout le monde et je ne supportais pas de faire des concessions dans mes habitudes : comme devoir boire chaque jour un thé bien moins fameux que d'ordinaire ! C'était bien simple ! Le moment du thé suffisait à lui seul pour me rappeler la guerre !

Un exutoire, c'était ce que je recherchais en supplément de la prime : s'en prendre à quelqu'un d'autre que des impériaux. Toutefois, je n'avais pas prévu devoir supporter la présence d'un poids mort durant la mission. Pourtant c'était bel et bien ce qui était écrit noir sur blanc sur la missive...

Lassée d'avance, je m'étais rendue jusqu'à Yu dans cet état d'esprit. Partir si loin pour me retrouver avec un binôme dont je n'avais que faire... J'espérais bien que cette escapade en valait le coup !
Je n'avais pourtant pas demandé à m'y rendre pour y faire du tourisme malgré que cela soit l'activité principale en ces lieux. Pourquoi donc rendre obligatoire la communication avec la population locale en ces conditions ?
Toujours était-il que je préférais la compagnie de mon félin violet bipède. Il était certes dérangé mais au moins parvenait-il a se faire la conversation tout seul.

Finalement sur place depuis déjà un bon moment, je tirai ma montre a gousset de ma poche et en consultait le cadrant avant de soupirer... Oui... Il était bel et bien en retard en prime.
Je me jurais de partir seule s'il ne se pointait pas dans les cinq minutes mais une fois le délai presque écoulé voilà que j'apercevais au loin un homme tenant dans sa main un parchemin sensiblement similaire au mien. Levant les yeux au ciel un instant, j’acquiesçai pour lui faire comprendre qu'il s'agissait bien de moi.

A ses airs on aurait presque pu le croire affilié à mon clan. Il avait probablement le même âge que moi ou pratiquement et ne me dépassait que d'une tête à peine. Pourtant il me semblait être le pigeon idéal... Une lueur perfide s'afficha dans mon regard avant de redevenir plus naturel à son approche.

« Yami. »

Me contentai-je de lui répondre sans bouger le petit doigt pour le saluer.
Il n'était pas question de faire ami-ami non plus et cela même en simple apparence. Toutefois il pourrait se révéler utile, surtout s'il était natif de la région. Peut-être même que je pourrais lui faire faire les basses besognes sans avoir à me salir les mains pour rafler la prime !

Je me sentais ravie à cette idée jusqu'à ce que ses paroles changent drastiquement mon état d'esprit. Arquant un sourcil, je l'observais avec un certain dégoût. Venait-il vraiment de dire ce que je croyais avoir entendu ?

« Je suis plutôt viande froide. »

Affirmai-je, incisive avant de renchérir :

« Gardez vos remarques pour vous, tout comme votre tutoiement, si vous ne voulez pas finir en repas du soir. »

Là dessus, j'étirai un large sourire pour lui montrer mes canines effilées afin d'appuyer mes propos.
Tant pis pour le larbin. Rien ne précisait de toute façon qu'il fallait maintenir son « coéquipier » en vie.

« Trêve de bavardage. Nous avons un homme à retrouver et à épingler. »

Poursuivis-je tout en sortant la carte du Pays de ma poche pour la consulter.

« Nous devrions rendre visite aux Jôki pour en savoir plus sur notre cible et trouver des indices sur sa planque potentielle. Je nous ai toutefois facilité le travail car j'ai questionné le tavernier en chemin.»

Tout le monde savait qu'en arrivant dans une ville pour dégoter des informations, la meilleure chose a faire était encore de se rendre à la taverne et d'écouter ce qui s'y disait.

« Apparemment, ce « Eita » a beau être une raclure qu'il n'en attire pas moins les femmes et cherche même à se ranger tranquillement, peut être pour tromper les apparences. Le tavernier a en effet affirmer qu'Eita comptait se marier et montrait à toute la salle de beuverie la fameuse bague. Avec qui ? Mystère. »

Il serait peut-être judicieux de se rendre dans les bijouterie de la ville pour en apprendre plus sur cette femme, ou cet homme...

Après s'être exprimée sur ses goûts, ma nouvelle connaissance m'avait demandé d'un ton très chaleureux, de rester à ma place. J'appréciais vraiment ce genre de répartie, je n'étais donc pas tombée avec un déchet ou une nunuche de bas étages. D'après ma première analyse, hormis qu'elle était plutôt pas mal, elle semblait puissante. Je ne connaissais rien d'elle pour le moment si ce n'était ses préférences culinaires et son prénom, je devais rester sur mes gardes. Je plaçai mon avant-bras parallèlement à mon ventre avant d'abaisser le haut de mon corps, le sourire aux lèvres.

« Je ferai selon vos désirs ma dame. »

Comme Yami le disait si bien, nous n'avions pas de temps à perdre. La damoiselle en avait profiter pour faire un petit tour de la ville et écouter aux portes. Elle avait pris les devants et en plus de cela, ses informations allaient assurément nous aider pour la suite de nos aventures. Le Eita était en phase d'être ligoté à une femme pour le reste de ses jours. Yami m'avait ôté les mots de la bouche, je me demandais comment une espèce d'ordure dans son genre pouvait espérer avoir une vie tranquille. C'était sans compter que nous avions été quémandé pour cette affaire. Je ne laissais jamais mes proies s'en aller, celle-ci n'allait pas faire exception à cette règle.

«  Vu que vous avez pris les devants reine, nous allons peut-être nous passer des Jôki pour le moment, qu'en pensez-vous ? Notre présence indique qu'ils souhaitent justement éviter d'ébruiter cette sombre affaire. Je doute qu'ils soient très bavards face à des chasseurs comme nous...Dans cette optique, suivre la piste du mariage me semble être une bonne option. »

A l'aide de ma main droite, j'indiquai à ma partenaire de prendre la route. Je me mis aussitôt à ses côtés afin de marcher à son allure. En y réfléchissant je n'avais jamais assisté à un seul mariage de ma vie. De ce que j'en avais entendu, c'était une cérémonie un peu débile afin d'unir deux débiles. Les femmes étaient d'ailleurs très attirées par le concept de cette union, plusieurs me l'avaient proposé d'ailleurs. Bien sûr aucune des femmes que j'avais fréquenté n'était à la hauteur ! Mais ça c'était une autre histoire. Tout de même, une idée m'excitait particulièrement. Cela pouvait paraître un peu sadique mais l'envie de gâcher la fête m'était passée par la tête. Débarquer en pleine communion et mettre un terme à ce type de cérémonie, ça me semblait amusant aux premiers abords. De plus j'avais une partenaire idéale pour cela, au vu de ses canines elle allait pouvoir faire son effet... Bon l'heure n'était pas à l'amusement, plutôt à la recherche.

Plusieurs options s'offraient à nous : costumes, robes, bijoux, salle... tant de choses qui me paraissaient tellement ennuyantes et pourtant, on devait bien commencer quelque part. Sans même avoir besoin d'en discuter, nous entrions dans la première bijouterie. L'établissement était quelque peu classe, un homme habillé en costume nous attendait à son comptoir. Je l'observai quelques secondes avant de balayer le paysage autour de moi.

« Je vous salue joaillier. Dites moi, nous sommes à la recherche d'une bague bien précise. Vous savez qu'on ne refuse rien à une femme et celle à ma droite n'en démordra pas. » Je fis un sourire quelque peu ironique à ma partenaire avant de m'adresser à elle. « Cette bague, elle ressemblait à quoi exactement ? »

Sans même attendre sa réponse, je décidai à nouveau de discuter avec le bijoutier.

« Un homme, un dénommé Eita semblerait avoir acheté à sa promise cette bague. Vous êtes au courant de cela ? Si oui, vous allez grandement nous aider dans nos recherches et éviter de me faire perdre du temps car sans cette bague, elle ne me lâchera jamais la dame, je peux vous l'assurer. »

Moi je m'amusais bien, était-ce le cas de la dame aux pupilles écarlates ? Boh, toujours dans mon jeu d'acteur je lui fis un grand sourire avant de passer ma main droite derrière son dos.

Bien qu'il m'horripilait déjà à souhait, je décidais de me ranger de son côté, pour le moment, et suivre la piste du mariage plutôt que de celle des Jôki. A bien y réfléchir, le clan n'en savait probablement pas beaucoup plus que nous sur ce « Eita » sans quoi ils se seraient chargés de son cas sans aide extérieure.

Naturellement et non sans écœurement, nous rentrions dans la première bijouterie de la ville. L'établissement chic laissait comprendre que la joaillerie ici n'était en rien de la quincaillerie. Comme toute femme de mon rang, j'appréciais la vue de ses pierres et même d'en porter, mais cela était plutôt rare. La guerre ne permettait pas de s'apprêter pour de belles occasions et les bijoux gênaient en général fortement les mouvements pour combattre si bien que cette frivolité ne m'était plus d'actualité. Malgré tout, mon regard bifurqua sur les vitrines juste par curiosité sans toutefois sans perdre de vue ma mission en ces lieux.

Les facéties étaient nombreuses pour obtenir des informations, et jouer un rôle, se faire passer pour quelqu'un que nous n'étions pas, en faisait partie.
Aujourd'hui, cette manigance était de celle qui me laissait un goût amer... Je voyais bien le tournant que prenaient les choses et cette apparence de jeune couple que cet idiot de coéquipier avait instaurer pour justifier de notre présence ici. Après tout, un homme, une femme, dans une bijouterie... quelle couverture parfaite ! Mais au combien irritante...

« Elle possédait une magnifique émeraude au centre visible par tout ceux présents, même les plus éloignés, tant la pierre brillait sous l'éclat de la lumière environnante ! »

Lui répondis-je quant à l'aspect de la bague.
Je n'avais pas la moindre envie de surjouer en ce sens ni même que cet énergumène pose la moindre main sur ma personne si bien que je me mis a contenir ma rage lorsqu'il le fit malgré tout, entourant mon dos. Mon regard laissa poindre une lueur incisive l'espace d'un instant avant d'arborer un air bien plus doux à l'encontre du bijoutier. Il fallait qu'il puisse y croire. C'était pour la mission. Pour rafler la mise. Je n'échouais jamais...

L'homme au comptoir se mit à nous présenter plusieurs modèles ressemblant à la description sans que cela ne nous avance. Il n'eut pas l'illumination lui faisant dire « Oh mais oui Jôki Eita ! Je vois tout à fait ! Il est venue avant hier et comptait partir à tel endroit. Il va se marier avec Mlle truc ! Tenez voici son adresse ! » Bien sûr que non !
Ce n'était même pas certains qu'il ait acquis la bague dans cette bijouterie précisément... Hors de question que le manège soit récidivé à toutes les joailleries ! C'était la seule que l'on ferait en jouant cette comédie ! Autant dans ce cas prendre sur soit et jouer les choses à leur paroxysme pour croître en crédibilité et obtenir les réponses que nous souhaitions...

« Elle ne semble pas ici... »

Annonçai-je avec une moue pleine de déception pour appuyer ma tristesse fictive.
Je n'en avais de que faire de cette bague en revanche...

« Je suppose que toutes les bijouteries de la même enseigne que la vôtre, dans la région, dispose du même catalogue de joaillerie ? Cela serait donc vain de nous rendre chez l'un de vos comparses pour espérer y trouver le modèle que je désire ? … »

Le regard emplit de supplique, je me tournai vers mon « fiancé », entourant son bras de mes deux mains tandis que ma tête vint reposer contre son épaule :

« Qu'allons nous faire mon amour ? C'est celle-ci que je veux... »

Erk... C'était à vomir...
Sans perdre un instant, je me redressai subitement, rivant mon attention sur le bijoutier :

« Ne pouvez vous pas regarder dans votre registre de vente si Jôki Eita a effectivement acheté cette bague dans votre filiale ? Cela remonte à une semaine ou deux maximum ! Quel bijou magnifique a-t-il trouvé... Son prix doit en être à la hauteur mais tout cela n'est que détail. »

J'attisai son esprit commercial en jouant sur l'aspect financier qui n'était aucunement un soucis.

Jouant les impatientes pleine d'espoir devant sa lecture en quête de la vente, je vins attraper la main du dénommé Seigi entre la mienne pour l'attirer à l'écart sous prétexte.

« Il te faut aussi choisir ta bague mon amour... »

Une fois suffisamment éloignés, observant à moitié les bagues pour les hommes, je vins coller ma tête contre la sienne pour être en mesure de parler suffisamment bas pour que lui seul m'entende.

« Si ce Eita ne l'a pas acheté ici cela ne sert à rien de faire le tour des joailleries. Cela nous prendra trop de temps. Les boutiques de vêtements de mariage sont bien moins nombreux que les bijouteries, cela sera une piste plus viable.Quoi qu'il en soit... soyez certains que vous me payerez cette mise en scène... »

Conclus-je sur un ton acerbe.

Lorsque j'eus l'audace de poser ma main sur elle, je sentis tout de suite son mécontentement. Seulement, étant de nature un peu taquin, j'avais décidé de continuer dans cette voie et de m'amuser de la situation. J'étais en bonne compagnie alors pourquoi ne pas en profiter ? Elle semblait un peu plus dangereuse que les autres mais je pensais pouvoir gérer la situation. Mon plaisir se décupla lorsqu'elle se mit à jouer le jeu, à son tour. J'imaginais sa colère et ce qu'elle pouvait bien penser dans sa tête, ce qui eut le don de me faire sourire, quelque peu bêtement.

Pour en revenir à la bague, elle n'était pas dans les parages. Au fond de moi je n'avais pas espéré trouver des informations si rapidement, c'était un peu trop facile. Sur un coup de chance ça aurait très bien pu mais elle n'était pas mienne aujourd'hui. Yami, toujours dans son rôle, posa sa tête sur mon épaule avec un air désespéré. C'était presque risible comme situation, je me contenais mais à ce moment-là j'eus envie de rire.

«  Comment allons-nous faire ? Je ne sais pas mon rayon de soleil, je me le demande... »

Bon en effet je provoquais quelque peu ma camarade de mission mais au vu de nos premiers échanges, je ne pouvais m'en empêcher. C'était bien plus amusant de me comporter de la sorte avec une femme de caractère. Une nunuche aurait presque acquiescé, elle non. Après avoir fait une demande au bijoutier, elle m’emmena à l'écart pour échanger sur la mission. Ma partenaire avait raison, nous allions perdre notre temps en investiguant toutes les bijouteries du coin. Yami voulait fouiller plus dans les boutiques de vêtements, c'était une bonne idée, je ne pouvais que confirmer ses paroles. Comme je m'y attendais, mon rayon de soleil fit une petite remarque sur notre pièce de théâtre. Je fermai les yeux brièvement avant de faire un signe de la tête comme pour acquiescer à ses paroles.

« Votre idée pourra sûrement nous faire économiser du temps, je suis d'accord. Dans ce cas, si le bijoutier ne nous est pas utile, on se dirigera vers une boutique de vêtements. Et veuillez m'excuser pour mes écarts. Je pensais tout d'abord à notre mission, je ferai attention à l'avenir. » Dis-je en la regardant dans les yeux. Le bijoutier nous interpella pour nous donner réponse. Je pris la main de Yami et vins rejoindre l'homme.

Pendant l'espace d'un instant, je m'étais imaginé lui faire une petite tape sur les fesses. Je trouvais que ça faisait un peu trop pour nos débuts, il fallait nous laisser du temps pour construire notre relation après tout ! Et puis je n'étais pas certains de pouvoir survivre à cette action, je préférai être sur mes gardes. À la tête de l'homme, je pus comprendre qu'il n'avait rien trouvé au sujet d'Eita. Je n'étais pas vraiment déçu. Je ne discernais en lui aucune malhonnêteté, ce qui me poussa à vraiment laisser tomber l'affaire. Comme dit, nous allions explorer les autres boutiques. Mes soupçons se confirmèrent et notre interlocuteur ne nous aida guère, en revanche, il avait continué à nous proposer d'autres produits. Je levai la main droite comme pour l'arrêter dans son élan.

«  Ne vous embêtez pas plus joaillier, nous voulions absolument celle-ci. Nous vous remercions pour votre aide. » Dis-je en abaissant légèrement le haut de mon corps.

Je pris alors la direction de la porte et une fois dehors je tournai ma tête vers ma partenaire et pris la parole.

« Je vous suis Yami et cette fois-ci, je vous laisse choisir la méthode à utiliser. Que vous souhaitiez utiliser la douce ou la forte, j'en suis. Je suis assez doué pour les deux... enfin surtout la forte, j'arrive à faire parler facilement les gens. Je peux sonder n'importe quel esprit vous comprenez... »

Annonçai-je tout en fixant la damoiselle dans les yeux, le sourire aux lèvres.

Je n'en croyais pas un mot. La moindre de ses paroles, de ses excuses, respiraient l'hypocrisie et l'amusement. Je connaissais particulièrement bien ce faux semblant pour l'expérimenter moi même... Cet homme m'agaçait profondément et cela surtout parce qu'il me ressemblait sur quelques aspects, bien que je ne m'abaissais pas à une perfidie aussi frivole qu'immature.

Malgré tout, j'acceptai sa main venant chercher la mienne sans broncher, ni même s'en rien en éprouver. Ce n'était qu'un rôle, une pièce infecte mais jouée sans demi mesure pour accomplir au mieux notre objectif.
Une couverture valait parfois mieux que la violence, surtout dans un pays neutre. La guerre suffisait aisément pour apporter son lot de sang et de larmes. Toutefois, la perspective de devoir y recourir ne me rebutait aucunement si nous venions à ne plus en avoir le choix. La violence était aussi quelque chose pour laquelle je savais faire une démonstration convaincante...

Sans surprise, le bijoutier ne pu pas nous aider davantage si bien que nous quittions la boutique après des remerciements d'usages, sortant des lieux et retirant nos masques d'apparats.
Pourtant, celui que m'offrit cette fois ci mon partenaire du jour ne fit qu'attiser davantage ma méfiance à son encontre.
Ces paroles... j'étais certaine qu'elles n'étaient pas dénuées de sens... Pas avec le sourire à la fois confiant et mesquin qui les accompagnaient.
« Sonder n'importe quel esprit... » Parlait-il là de genjutsu ou d'un pouvoir plus mesquin encore tel que les capacités des Yamanaka ?
Lorsque ses iris aussi écarlates que les miennes me croisèrent, je détournai aussitôt le regard, par réflexe, consciente que bons nombres d'illusions se lançaient à travers ce biais même si je ne l'avais pas vu composer de mudra.

Observant l'horizon, je répondis à sa proposition :

« Utiliser la méthode douce permet de basculer sur la forte en cas de résistance. L'inverse n'est en revanche pas possible. »

Risquant un coup d’œil de côté sur sa personne, en contrôlant bien que ses mains ne s'agitent pas pour composer des signes, j'esquissai à mon tour un sourire fugace.

« Même si j'avoue préférer également la manière forte qui fait davantage ses preuves et qui fait gagner du temps. En plus d'être la plus amusante... »

Pour autant, même si cela me débectais, je devais avouer qu'être dans une situation où nous recherchions la piste d'un futur marié alors que nous étions nous même un duo homme/femme, était un bon moyen pour en jouer et obtenir des informations... Allais-je seulement supporter le jeu un peu trop poussé de ce Seigi ? Rien était moins sûr...

Nous nous rendions donc dans une boutique de vêtements de cérémonie, inspirant pour ma part un bon coup avant de me saisir une nouvelle fois de la main de mon partenaire pour y entrer et afficher un visage radieux par cette merveilleuse journée où j'allais choisir ma robe de mariée... Répugnant.

A peine étions nous entrés que j'expliquai la raison de notre venue même si cela me semblait évident. Malheureusement, la vendeuse nous observa avec un air quelque peu décontenancé, presque outragé.

« Mais... vous comptez choisir vos tenues … ensembles ? Sans laisser la surprise à l'autre pour le grand jour ? ... »

Hmm... C'était vrai qu'il y avait cette tradition stupide de ne pas venir avec le futur marié ou la future mariée mais accompagné de quelqu'un d'autre de la famille pour choisir sa tenue...

« Nous voulons avant tout nous renseigner même s'il est vrai que nous sommes assez pressé... Le plus beau jour de notre vie, vous savez ! »

Ce discours me donnait la nausée... Ce n'était qu'une robe... une cérémonie stupide et encore moins le plus beau jour d'une vie ! Si pour la plupart du commun des mortels mettre des vêtements particuliers et parader dans une cérémonie dont on était le centre d'intérêt était le plus beau jour d'une vie alors j'en avais déjà vécu de nombreux !
Quelle hypocrisie. Le couple se disputant pour un rien se remémorait-il leur journée d'union comme étant leur plus bel instant ? C'était d'un ridicule profond !

La vendeuse commença à nous poser des questions sans que je n'y comprenne quelque chose. Me demandant si je préférais le discret ou l'exubérant, que ma peau pâle laissait entrevoir plutôt des possibilités ivoire et non blanche pour la robe. Elle souhaitait aussi savoir si cela devait justement être une robe ou un kimono pour une cérémonie plus traditionnelle... Je répondais à tout sans y réfléchir, faisant des choix parmi ce qu'elle me proposait sans même les interpréter, me concentrant en même temps sur la boutique pour observer si une piste pouvait me servir pour obtenir les informations que nous étions venus chercher.

Des fauteuils blancs se tenaient dans un coin convivial avec une table basse sur laquelle était disposée de nombreux catalogues. Des assises encore trop loin du journal de ventes... Mon regard se porta alors sur la porte portant l'écriteau «  réservé au personnel ». Les vestiaires probablement et les bureaux. Le coin d'encaissement était limité à un comptoir sans tiroir, inutile d'espérer y trouver des documents utiles. Il me fallait donc trouver le moyen de franchir cette porte... et j'avais déjà ma petite idée.

Tenant toujours la main de Seigi, je resserrais ma prise pour lui faire comprendre que j'avais un plan avant de la relâcher totalement. Suivant la vendeuse de mon côté tandis que lui même était pris en charge par une autre, je conservais mon air ravi et passais à l'essayage, fort ennuyant, des chaussures à talons. J'en choisis des bien prononcés pour accentuer la suite et commençai a marcher avec feignant de chuter en me tordant le pied. J'avais l'habitude de porter des chaussures de ce type si bien que je dus modifier ma démarche pour la rendre peu assurée.
Sitôt tombée sur les fesses, je concentrai mon chakra et signai discrètement pour faire s'écouler du sang de ma cheville en un large filament écarlate.
Continuant de jouer la comédie, je jouais les blessées inquiètes à la vue du sang si bien que la vendeuse paniquée m'aida a me relever après m'avoir ôté les chaussures pour m'emmener par la porte du personnel. Elle n'allait en effet pas me faire m’asseoir sur les fauteuils blancs en velours que j'allais forcément tâcher...

Adressant un regard et sourire en coin discrètement à Seigi l'espace d'un instant, je passai finalement les portes et fus menée jusqu'à une chaise dans un bureau. La vendeuse s'empressa de me laisser pour aller chercher de quoi essuyer le sang tandis que, dans la seconde de son départ, j'allais coincer la poignée de la porte avec la chaise.
Sitôt tranquille, je fouillai les dossiers présents sur le bureau avant d'ouvrir les tiroirs, trouvant bien vite le cahier des recettes des dernières semaines. Comme je l'imaginais, ce genre de boutique notait consciencieusement le nom de leurs clients et de leurs achats ou commandes de vêtements. Parcourant les lignes et les pages du plus vite que je ne le pus, j'entendis de nouveau la vendeuse arriver, cherchant a ouvrir la porte sans y parvenir pour finalement tambouriner à la porte en me demandant si j'allais bien.
Tsss... accélérant ma recherche sans rien répondre, je finis par tomber sur le nom de Eita. Il avait fait l'achat d'un costume deux semaines auparavant et le plus important se trouvait à côté : une adresse avec un numéro de chambre. L'adresse d'un hôtel donc. Comment ce criminel aurait pu résider fixement quelque part de tout façon ? Il ne restait plus qu'a espérer qu'il se trouvait toujours sur place même après deux semaines...

Le tambourinement de la porte redoubla de puissance si bien que je rangeai tout et déchira un bout de ma veste pour m'en faire un garrot improvisé à la cheville, inutile mais crédible. Poussant la chaise d'un geste, je laissai la vendeuse entrer de nouveau, lui fournissant de fausse excuse.

« Excusez moi... j'ai dû faire un malaise l'espace d'un instant... Je suis infirmière, donc je me suis occupée moi même de ce petit saignement. Les vertiges sont passés, cela va mieux. Je vais aller voir un médecin sur le retour, ma cheville est probablement foulée. »

Elle insista un peu mais sans plus, la carte « je suis du métier je sais ce que je fais » marchant probablement. Pour une fois cela n'était pas un mensonge puisque je détenais réellement des connaissances en médecine et des capacités de soins avec mon chakra mais là n'était pas la question puisque je n'étais en revanche, pas réellement blessée.

Retrouvant mon cher et tendre en boitant pour gagner en crédibilité, je lui racontai la version officielle de ce qu'il s'était passé en assurant aller bien mieux.

« … Alors ne t'en fais pas je vais bien même si ma cheville me fait un peu souffrir... Allons voir un médecin avant de rentrer à la maison. »

Indiquai-je malgré tout dans un léger sourire, appuyant bien mes propos pour lui faire comprendre que rester ici n'était plus utile. Peut-être qu'il avait lui même trouver des choses intéressantes pendant mon absence ?

Après de nouveaux remerciements auprès du personnel, on me redonna mes chaussures tandis que la vendeuse s'amusa a souligner :

« Vous n'avez pas tout perdu ! Votre compagnon va pouvoir vous porter comme une princesse avant même les noces ! »

AHA...aha... quoi ?!