Kumo. Le village était encerclé par des montagnes, rempart naturel. D'un côté, le relief constituait une sorte d'entrave à la liberté de ses habitants. A moins d'être capable de se mouvoir dans les airs, on était en droit de se sentir comme coincé dans un entonnoir lorsque l'on vivait dans ce village. Les possibilités d'entrée et de sortie étaient limitées. Mais, en même temps, cela constituait une défense de premier choix. Une défense pour la paix qui régnait à l'intérieur de la cité ? Non, il était peu probable que les dirigeants, au moment de la création du village, aient choisi cet endroit en pensant de cette manière. L'environnement était avant tout un avantage militaire. Cette défense n'était peut-être pas imprenable, mais au moins très efficace face aux invasions. Le choix n'avait pas dû être dur à faire. Mais avait-il été fait pour les bonnes raisons ? Kaze, lui, ne savait pas trop quoi penser de cette géographie ; il hésitait entre prison naturelle et havre de paix. Mais il savait que nombreux étaient ceux qui ne pensaient pas comme lui.

Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas vécu au sein d'une société. Lui qui n'avait pas de famille, il n'avait pas eu à suivre son clan comme la plupart des ninjas de ce monde. De toutes façons, tous les clans avaient participé, d'une manière ou d'une autre, à la guerre. Il n'aurait j'amais accepté de suivre qui que ce soit dans une bataille aussi vaine, une simple guerre de pouvoir vide de sens. Peut importait le camp ; pour lui, Uchiwa et Senju étaient de la même trempe : ils étaient ceux qui aimaient se battre et massacrer sans raison, sans doute pour satisfaire leur ego, ou peut-être l'insatiable soif de combat présente en chacun. Et tous les autres clans, plutôt que de chercher à rétablir l'équilibre dans le monde, avaient préféré le précipiter dans un tourbillon de haine en choisissant un camp au lieu de rester neutres. Kaze ne comprenait pas comment il était possible, après avoir fait preuve d'un tel comportement, que les différentes familles de shinobis puissent encore avoir confiance les unes en les autres. Peut-être était-ce parce que, précisément, ils avaient tous agi de la même manière ? Non pas qu'il refusait d'admettre qu'après tant de malheurs, les hommes se soient rendu compte de leur bêtise et aient tenté de la réparer. Au contraire, c'était même ce qu'il espérait. Mais, pour lui, on ne pouvait pas faire confiance à ceux qui ne réfléchissaient pas aux conséquences de leurs actes – et d'autant moins à ceux qui avaient suivi leurs leaders dans une guerre absurde sans même se demander si cela ne les mènerait pas à l'encontre de leurs convictions. Il n'était donc pas convaincu que cette paix durerait, bien que ce fût là son souhait le plus cher.

Cependant, s'il avait souhaité rejoindre cette société, c'était pour en constater les changements. Il était là pour se rendre compte par lui-même de l'évolution de la mentalité globale des ninjas, et y contribuer du mieux qu'il pouvait. A condition que cette mentalité ne s'écarte pas de la direction positive qu'elle était entrain de prendre. C'était certes un peu prétentieux de sa part ; il savait qu'il était encore très loin d'être en mesure de pouvoir prétendre guider ces shinobis sur une voie sage et réfléchie. Mais, après tout, c'était aussi pour ça qu'il était là. Pour apprendre, pour découvrir, pour observer et, surtout, pour comprendre. Comprendre les motivations de chacun. Il voulait s'assurer que personne ne souhaitait le retour de la guerre. Bien que les séquelles fussent encore ancrées au fond de chaque personne qui l'avait vécue, cela ne constituait pas une raison suffisante pour avoir une foi aveugle en cette paix nouvelle, même si elle semblait inébranlable. Car n'importe qui pouvait, à tout moment, décider de profiter de cette illusion qui berçait tendrement les naïfs à des fins personnelles.

C'était malsain.

Kaze s'éloigna du centre-ville. Trop d'animation à son goût. Il était sensible au bruit, et les endroits surpeuplés, agités, bruyants, comme par exemple le centre des activités d'un village shinobi, le mettaient mal à l'aise. Il se sentait oppressé, et n'allait pas se forcer à rester dans le coin, d'autant plus que cela n'avait aucun intérêt. Se laissant guider par les sons qui parvenaient à ses oreilles, il marchait la tête baissée, sans vraiment savoir où aller. Son ouïe le mena en un endroit plus calme, significativement moins peuplé que celui d'où il venait. Il n'entendait plus que des bruits de kunai s'entrechoquant et d'autres sons typiques d'un entraînement. C'était relaxant. Une brise légère caressa le visage du Genin, qui leva la tête vers le ciel, profitant de cet agréable instant de quiétude. Mais, lorsque le vent retomba, le jeune homme fut assailli par une pensée. Toujours la même. Celle qui le ramenait à la dure réalité. Une pensée désagréable, qui revenait sans cesse, ramenant invariablement avec elle un souvenir douloureux.

Il ne pouvait pas se permettre d'accorder sa confiance à la légère...

Un ciel sans nuage, des oiseaux qui chantent sans cesse, quelques bruissements de feuilles malmenées par le vent… Un véritable paradis… Si seulement il n’était pas perturbé par une boule de poil d’une vingtaine de centimètres ! Debout sur une des branches d’un arbre centenaire, la patte sur son ventre rond, un petit ours chantait. Pardon, braillait. Tentant en vin d’imiter un opéra connu de tous, il hurlait d’incompréhensibles paroles d’un ton totalement faux. Heureusement, les arbres feuillus contraient l’horrible bruit qui passait à travers les fils cousant sans bouche, évitant à bien de nobles personnes de subir cet interminable chant d’horreur. Au pied de l’arbre sur lequel l’ourson était perché, une jeune femme l’accompagnait en fredonnant, visiblement insensible à la caricature un volontaire que donnait l‘ourson de cette pauvre mélodie. Ses longs cheveux roux virevoltaient au gré des coups de vent passant mais revenant sans cesse, se glissant au contour de son cou, balayant les pans de sa tunique. Reposant ainsi allongée au soleil, qui réchauffait doucement sa peau, les yeux clos, la jeune Tempo s’accordait un moment de tranquillité. Le bruit de la ville l’agaçait par moment, et il lui était impossible de rester enfermée par temps si doux. Le temps était bien variable à Kumo, se trouvant au centre des plus hautes montagnes du pays, les nuages souvent remplit d’eau se retrouvaient coincés derrière cette barrière naturelle. Mais quand l’accumulation de ces éponges se faisait trop importante, ils passaient tous d’un seul coup, envahissant le village caché en à peine quelques heures. Ainsi les habitants voyaient leur météo changer radicalement en permanence : passant d’un soleil absolu et apprécié à un orage qui pouvait être des plus violents au gré des jours, peu importe le mois de l’année…

-Woh woh woh, c'est l'amour discooooooo !!!

Changement de registre. L’ourson dansait maintenant sur du disco farfelu, tentant une danse infernale avec une pauvre feuille qui virevoltait non loin. Malheureusement pour lui, ça ne semblait pas au goût de la genin allongée non loin. Il ne comprit malheureusement qu’une fois un sac, bien remplit semble-t-il, le faucha de sa branche, sauvant sa partenaire improvisée d’une déchirure certaine. Rebondissant au sol avec maladresse, la peluche se mit à hurler au sujet de sa vie, qu’il jurait avoir vu défiler, à une jeune femme maintenant assise en tailleur, le regard remplit de fierté. Réussir à frapper ainsi le petit ours était un exploit ! Cette saleté qui ne cessait de brayer en permanence, de courir partout, de compter ses exploits contre une malheureuse araignée… Oh oui, depuis leur rencontre il y a maintenant 14 ans, Dadakko menait la vie dure à la jeune Tempo.


-Cesse de râler, chante moi plutôt la chanson d’hier ! Tu sais celle qui parle du corbeau !

-Non. Je ne chanterais pas pour quelqu’un qui m’interrompt pendant une danse enflammée !

-Mmh ?


Le gémissement peu éloquent de la jeune femme était sans aucun doute en rapport avec le fait que son horrible peluche était maintenant les pieds en l’air, la tête dans son sac. Remuant visiblement tout ce qui se trouvait sous son nez, l’ourson grommelait quelque chose d’incompréhensible. Puis dans sa main, ou du moins au bout de sa paluche, un objet brillant et malheureusement tranchant. Dans un cri de guerre, totalement ridicule, il se jeta d’un bon sur la kunoichi. Celle-ci, bien amusée par la situation, esquiva d’un simple pas sur le côté. Sans suivit évidement un petit affrontement amical dans lequel seuls les bruits de métaux s’entrechoquant, étouffant ainsi les ricanements de la jeune femme et les cris de rage de l’ourson. Celui-ci fut tellement préoccupé par sa cible moqueuse, qu’il ne sentit pas cette présence, une présence ni mauvaise ni bonne. Simplement, triste et pensive.

Mais en effet, le petit combat, ressemblant plus au jeu du chat et de la souris bien que la souris était dix fois plus grand que le chat, était tout aussi préoccupant pour les deux animaux de bas âge mental. Assez pour qu’il ne remarque pas cet homme qui c’était approché d’eux, à moins dix mètres. Mais lui non plus ne semblait pas les avoir remarqués, la tête levée vers le ciel et visiblement les pensées dans les nuages. Tout cela serait resté ainsi un bon moment si seulement, par maladresse évidement, l’ourson tenta d’esquiver un kunaï volant en sa direction. Mais malheureusement, ce ne fut pas sur la terre qu’atterrit la peluche, mais sur l’étranger dans les songes se trouvait dans les nuages inexistants en cette belle journée.


-Oups…
-Aah ! Deux contre un ! Bande de minables ! Tricheurs !




[Oui oui... Petit post et fin minable...]