Lorsque je me réveillai, un léger frisson malgré la saison estivale ne fit que plus cruellement ressentir l’absence d’Akamori et de Seimori dans l’appartement. D’habitude, ils sont toujours là pour agir en tant que couverture supplémentaire et avec le temps mon corps s’était habitué à la chaleur que dégageait les corps de mes deux ninkens, à un tel point que maintenant qu’ils n’étaient plus là j’avais l’impression qu’il me manquait une pelure; c’était à croire que leur fourrure était devenu la mienne. Déjà de mauvaise humeur – eh oui, la journée commençait vraiment mal – je me dépêchai d’enfiler un yukata qui, je l’espérai, ferait passer ce frisson et entamai ma routine matinale. Cette dernière complétée, je me retrouvais avec plus rien à faire, me laissant souvent vaguer sur les désirs divers de mes ninkens. J’attrapai alors une revue de manga que cela faisait longtemps que je n’avais pas touché seulement pour la laisser de côté quelques minutes plus tard, incapable de me concentrer sur les dessins qui défilaient devant mes yeux. Affalé dans mon salon, les yeux fermés, je restai sans rien faire pendant un temps incalculable avant que je n’ouvre finalement les yeux. Je savais ce que je pouvais afin d’améliorer un peu cette journée.

Mettant mon yukata de côté pour mettre des vêtements un peu plus convenables pour l’extérieur – je ne connaissais personne qui sortait de chez lui en pyjama – je quittai mon appartement avec un endroit bien précis en tête : l’hôpital vétérinaire Inuzuka. Situé dans le quartier Inuzuka, il était rare que je fasse le détour jusque dans cette partie de la ville, préférant aller à la petite clinique non loin de chez moi, mais la gravité de leur état avait demandé à ce qu’ils soient traités là-bas. Je ne voulais en rien discréditer les autres cliniques vétérinaires qui faisaient un travail extraordinaire à chacune de mes visites, mais il n’y avait personne qui connaissait mieux les ninkens qu’un Inuzuka. Lors de notre retour à Konoha ces derniers ne s’étaient toujours pas réveillés et nous les avions immédiatement amenés là-bas. Heureusement, personne n’avait posé de question lorsqu’ils avaient vus l’état dans lequel ils étaient, après tout ils savaient mieux que de poser des questions, et s’étaient contentés de les prendre en charge afin de les traiter pour leurs divers maux, en particulier les éclats de cristal autour desquels les blessures avaient cautérisés et partiellement commencés à cicatriser, donnant presque l’impression que les cristaux étaient incrustés dans la chair de mes ninkens. Depuis que nous les avions apportés à l’hôpital Inuzuka, ils n’en n’étaient toujours pas ressortis.

Après plusieurs minutes de marche pendant lesquels je me détendis en admirant le spectacle qu’était Konoha en été. Décidément, c’était la plus belle saison dans laquelle vivre à Konoha! Bien sûr, toute cette belle détente s’envola en fumée lorsque j’arrivai devant le fameux édifice tandis qu’un beau nœud commençait à se former là où en temps normal se trouvait mon estomac. Les voir ainsi me rendait toujours un peu nauséeux et cette fois-ci ne ferait probablement pas exception à la règle. J’avais toutefois fait tout ce chemin pour me rendre jusqu’ici, je n’allais pas battre en retraite parce que je n’aimais pas voir mes ninkens enveloppé de bandages. Montant les marches, je rentrai dans le bâtiment et saluai les réceptionnistes qui hochèrent dans ma direction sans arrêter leur travail. Au nombre de fois que j’étais venu je n’avais pas besoin d’indication pour me rendre jusqu’à eux et la plupart du personnel me connaissait. Empruntant quelques couloirs et un escalier, j’entrai enfin dans la salle où on traitait Aka et Sei. Ces derniers se reposaient, mais ne resteraient sans doute pas longtemps insensibles à l’odeur familière qui venait d’entrer dans la salle.

Comme de fait, Aka fut le premier à ouvrir un œil quelques secondes après mon entrée, puis l’autre alors qu’il voyait qui venait d’arriver et se levait pour venir trotter vers moi. Sa peau avait cicatrisé là où on avait extrait les éclats de cristal et sa fourrure commençait à repousser là où elle avait été brûlée par le feu, mais il semblait avoir plus d’énergie que la dernière fois que j’étais venu. Sa guérison était sur la bonne voie. Je le flattai avec affection alors que Seimori levait son imposante carcasse pour venir me saluer. Pour lui aussi le pire semblait être passé et il alla même jusqu’à me lécher dans le visage, laissant une trace de salive sur ma joue. Je l’essuyai en ricanant et les attrapai chacun par un bras.

- Vous me manquez, vous le saviez ça, les gars? L’appartement à l’air vide sans vous deux pour le remplir.

Je restai ainsi quelques minutes, sentant leur odeurs à pleine narines pendant que je les avais auprès de moi avant de desserrer mon étreinte et de les éloigner de moi. J’avais les yeux embués, mais je parvins à étouffer mes émotions et rester maître de moi-même. Je me relevais en me raclant la gorge pour enlever le nœud qui mystérieusement était passé de mon estomac à ma gorge. C’est alors que je me rendis compte qu’une autre odeur était maintenant présente dans la salle et ce n’était que maintenant que je m’en apercevais. Depuis combien de temps était-elle là? Qu’avait-elle vu, entendu? Je me retournai alors pour faire face à cette personne qui s’était incrusté dans notre moment à mon insu.

Spoiler:

Détaillant la jeune femme qui venait d’apparaître devant moi, je vis sa longue chevelure brune descendre en cascade derrière et ses yeux pétillants, mais plus que toutes autres choses je vis les crocs qui étaient dessinés sur ses joues. Ainsi, elle était une Inuzuka. Pas très étonnant vu que nous étions dans l’hôpital dirigé par notre clan, mais cela ne répondait toujours pas à la question qui me restait dans la tête : que nous voulait-elle? Elle était bien trop jeune pour être celle qui s’est occupé de l’opération de mes ninkens, je ne pouvais donc que déduire qu’il s’agissait d’une assistante ou d’une infirmière quelconque qui venait s’assurer de l’état de mes compagnons. Comme de fait, elle s’excusa rapidement de s’être introduit de cette façon dans notre bulle avant d’expliquer sa venue, mais le tout fut rapidement pardonné lorsque j’entendis qu’ils pouvaient peut-être ressortir aujourd’hui. Ce n’était pas trop tôt!

Je me tassai et je laissai donc la place à la jeune Inuzuka qui était venu faire son travail. Il y avait toutefois quelque chose dans sa démarche ou dans son port, qui trahissait l’entraînement d’un shinobi; sûrement était-elle une Genin cherchant encore sa voie. Le métier de vétérinaire en est un de plus respectés parmi la Meute puisqu’il est vital si nous voulons garder nos frères en santé, je pouvais très bien voir l’intérêt que cela pouvait avoir de passer ses journées à dorloter des ninkens comme elle était en train de le faire en même temps d’évaluer l’état des blessures et de leur guérison. Clairement ce n’était pas les miens qui allaient s’en plaindre, mais je pouvais voir d’un simple regard que la jeune femme avait le tour avec les animaux même pour une des nôtres. Un mouvement du coin de l’œil me fit détourner le regard et j’eus la surprise de voir deux têtes poilues apparaître dans l’embrasure de la porte. Il me semblait bien avoir senti autre chose! Je les regardai entrer alors qu’ils se rapprochaient du trio au sol et qu’ils commençaient à s’échanger des coups de museaux entre ninkens.

- Tu sembles me connaître, mais pardonnes-moi si je ne te reconnais pas. Qui donc dois-je remercier pour avoir pu supporter… euh, je veux dire pour avoir pris soin de mes deux compagnons?

Je ricanai à moitié en posant la question, conscient de ce qui allait venir ensuite. Comme je m’y attendais, mes deux frères commencèrent alors à rouspéter faiblement, plus pour la forme qu’autre chose. C’était un truc entre nous, une vieille blague que nous ne pouvions nous empêcher de nous faire. Malgré tout ce que je disais contre eux, c’était simplement pour montrer à quel point il me manquerait quelque chose sans eux. Qui aime bien châtie bien comme on dit, hein? La jeune femme me répondit après avoir observé quelques endroits là où je me rappelais que se trouvaient quelques morceaux de cristaux – jamais je ne pourrais oublier l’état dans lequel ils étaient – et retourna ensuite dans son examen sommaire. Quelques palpations çà et là, un coup d’œil à travers la fourrure qui recommençaient à pousser, tout ça avait penchait vers le constat que je pourrais repartir avec eux.

- Alors, de quoi ont-ils l’air? Passent-ils l’examen du docteur?

Loin de moi l’idée de vouloir la pousser, mais j’étais plus qu’impatient de retrouver la présence rassurante de mes ninkens à mes côtés. D’un autre côté, je ne pouvais que constater le lien que la jeune femme avait réussi à créer avec les ninkens alors que cela ne faisait que deux semaines qu’ils étaient là et me dire que j’avais rarement vu une personne aussi étroite avec les ninkens. La voir entourée de quatre ninkens en même temps était un spectacle qu’il était rare de voir. Peut-être que je resterais un peu plus longtemps finalement.

À peine les premières paroles sorties de la bouches de la jeune fille que je me sentis complètement idiot. Bien sûr qu’elle me connaissait, je ne venais tout récemment d’être nommé comme successeur à Motari-sama! Ils restaient encore quelques détails à régler avant de pouvoir dire que j’étais officiellement le chef de la Meute, mais c’était l’histoire de quelques jours avant que je ne prenne les rênes. Il fallait croire que je n’étais pas encore totalement habitué à être la personne la plus connue de la Meute, celle vers qui tout le monde allait se tourner. J’allais devoir m’y mettre rapidement puisque d’un jour à l’autre j’allais être appelé à prendre le flambeau. Autre erreur de débutant : mon nom figurait sur la liste du rapport médical – sans doute comme étant leur maître – donc étant celle qui s’était occupée d’eux elle avait forcément vu ledit rapport à nombreuses reprises. Peu importe comment je le voyais, donc, il y avait toutes sortes de raisons pour qu’elle sache mon nom. Mais cela ne me dérangeait pas, puisque je voulais simplement savoir à qui j’avais affaire et qui je devais remercier pour avoir pris soin de mes ninkens.

Ainsi il s’agissait de la jeune Shizu-chan qui s’était occupé d’Aka et Sei qui je savais que, malgré mes boutades, s’étaient comportés comme des anges avec la jeune femme. Comme s’il fallait qu’ils convainquent qui que ce soit, les deux bêtes concernées levèrent la patte et tapotèrent la jeune Inuzuka en quête d’affection alors que cette dernière se repenchait sur les dernières petites parties de son examen médical tout en les cajolant. Comme quoi je n’étais pas le seul à avoir développé cette technique, c’était vraiment efficace lorsqu’ils ne voulaient pas coopérer. Je les regardai encore pendant quelques minutes le temps qu’elle termine le tout et lorsque je la vis se relever je sus que c’était terminé. Ne pouvant attendre plus longtemps je lui demandai aussitôt des nouvelles, savoir s’ils pourraient bel et bien repartir avec moi pour de bon. Cela devenait une vraie torture de devoir les laisser ici à chaque fois que je venais visiter. Heureusement pour moi, Shizu-chan avait de très bonnes nouvelles : ils étaient prêts à quitter! Cependant, même s’ils pouvaient revenir à la maison je devais quand même attendre une autre semaine pour compléter la cicatrisation avant de pouvoir reprendre des tâches sérieuses pour le village. Comme c’était dommage, un congé forcé d’une semaine!

Au moment où j’allais la remercier profusément pour tout ce qu’elle avait fait, cette dernière m’informa qu’ils étaient ces derniers patients avant sa pause et donc qu’elle avait une vingtaine de minutes de libre avant de recommencer son quart de travail. Elle m’invita alors à rester un peu afin de discuter avec elle avant de quitter l’hôpital, du moins si rien d’autre ne m’attendait. Je n’avais évidemment rien d’autre de prévus, mais j’hésitai quelques secondes à jouer la carte de l’homme occupé qui pouvait bien se libérer. Au final, je rayai cette option, le gag n’étant pas vraiment de circonstances. J’y allai plutôt avec l’honnêteté.

- Non, bien sûr que non! Pour être tout à fait honnête je commençais même à trouver le temps un peu long sans eux alors la moindre distraction sera la bienvenue! Par contre, sortons au moins d’ici et allons marcher un peu.

Sans vraiment attendre sa réponse, je me dirigeai vers la sortie et mes ninkens me suivirent rapidement, plus contents que quiconque de sortir de cette pièce. Je ne voyais pas pourquoi elle ne me suivrait pas, c’était un peu lourd de faire la jasette dans une chambre d’hôpital. Lorsque Shizu-chan me rejoint, nous marchâmes quelques secondes en silence avant que finalement je ne commence la discussion. Je n’étais pas certain si elle avait voulu discuter de quelque chose en particulier, mais pour ma part je voulais simplement en savoir un peu plus sur elle. J’allais bientôt devenir le chef de la Meute, s’il était humainement impossible de se rappeler de tous les visages de mes membres, je ferais au moins l’effort d’en connaître le plus d’entre eux.

- Alors, Shizu-chan, cela fait longtemps que tu travailles ici? Tu m’as l’air très jeune pour travailler dans un tel milieu et pourtant tes gestes ne trahissaient aucune hésitation.

J’étais réellement curieux puisqu’il était rare de voir des shinobis jongler entre deux emplois comme ceci. Je l’avais reconnu dès son entrée comme une shinobi et l’avoir vu avec mes ninken ne faisait aucun doute qu’elle n’en n’était pas à sa première journée entre ces murs. Bien sûr, Kibini-san le faisait avec brio comme bon nombres de vétérinaires Inuzuka, mais ils s’agissaient tous de shinobis d’expérience et un tel dévouement à cet âge était pour le moins rare. Si elle continuait dans cette voie, elle deviendrait une kunoichi d’exception; d’autant plus de raisons pour commencer à bâtir un lien avec elle.

Sûrement était-elle heureuse de quitter son lieu de travail pour sa pause syndicale puisqu’elle me suivit sans rien à l’extérieur de la chambre pour marcher nonchalamment dans les couloirs. Pendant un moment aucune parole ne fut échangée, en partie parce que je n’avais aucune idée de quelle sujet abordée avec elle. Je savais que les personnes travaillant dans ce genre de métier avaient horreur de parler de leur boulot parce que c’était le sujet le plus couramment amené, ainsi je devais faire l’effort de trouver un sujet adéquat. Ce n’était cependant pas une chose facile à faire lorsque c’est la première fois qu’on rencontre quelqu’un et qu’on ne connait rien à propos d’elle; ne me rappelez même pas que par-dessus tout cela j’étais son nouveau chef de clan! Finalement, je pensai avoir trouvé un bon filon et m’empressai d’initier la conversation avec la jeune Inuzuka. Cette dernière sourit avant de me répondre qu’elle était en fait en stage ici sous la supervision de Kibini-sensei. Je compris alors d’où venait son assurance : elle était là-dedans depuis l’âge de douze ans. Bien évidemment j’eus la galanterie de ne pas lui demander son âge pour mettre cet âge en perspective, mais le simple fait qu’elle ait commencé à un si jeune âge était gage de ses compétences.

- C’est important de faire ce qui nous passionne dans la vie; sans quoi celle-ci devient rapidement ennuyante.

De sages paroles remplies d’expérience, rien de mieux pour impressionner les gens et en plus cela me donnait de vraies allures de chef de clan. M’étais-je soudainement assagi en endossant mon rôle de chef de la Meute? Cette question devrait être remise à plus tard puisque la jeune stagiaire continuait que parallèlement elle poursuivait également la voie de kunoichi et tirer avantage de ses connaissances médicales sur le terrain. Des objectifs ambitieux et plus que louables, c’était le genre d’attitude que nous cherchions chez les jeunes pousses. Après tout, ils seraient portés à soutenir le monde de demain; nous ne voulions pas des demeurés! Regardant autour de moi, je me rendis compte que nous étions finalement rendus à un parc aménagés sans doute pour la réhabilitation des différents patients de l’hôpital. Dès que nous fûmes à proximité les compagnons de Shizu-chan partirent à la course dans le parc alors que les miens y allaient plus modérément, sachant mon œil vigilant sur eux. Le moindre écart aux directives de l’infirmière et ils savaient qu’ils allaient le savoir. Une fois que nous fûmes seuls, le centre de la conversation changea brusquement de direction lorsqu’elle s’enquit de mes états d’âmes suite à ma nomination. Après avoir accepté ses félicitations avec un sourire modeste, j’essayais de mettre des mots sur comment je me sentais.

- Tu étais bien mieux, commençai-je en riant, mais plus sérieusement je suis heureux de savoir que tu avais confiance en moi. Pour être franc, des fois je ne sais pas trop comment prendre tout ça. Il y a des moments où j’ai encore de la difficulté à croire que cela soit réellement arrivé avant que la réalité s’installe et que je reprenne conscience que je serai vraiment le nouveau chef de clan. Il y a quelque chose de terriblement excitant à penser à tout ce qui m’attend.

Je pris une pause et un petit silence s’installa. J’hésitai un peu à poursuivre – devais-je vraiment partager ce genre d’information avec un membre de clan, une personne qui comptait sur moi? – mais en même temps cela me pesait sur la conscience et après quelques secondes où l’hésitation dut se lire sur mon visage, je décidai finalement de lui demander son avis. Après tout la confiance était quelque chose de réciproque, s’ils étaient amenés à mettre leur confiance en moi il allait de soi que je devais être capable de mettre ma confiance en eux.

- Cependant, lorsque mes pensées s’égarent, il m’arrive de me demander si je suis prêt pour tout ce qui vient avec ce poste, si je vais être capable de prendre les bonnes décisions, mais être constamment conscient des attentes de son clan est l’un des fardeaux que je devrai m’habituer à porter. Et puis, j’aurai toujours Motari-sama pour me guider dans mes décisions pour plusieurs années encore.

Je me tus pour de bon cette fois-ci et, aussitôt gêné de m’être confié ainsi à une infirmière que je venais tout juste de rencontre, je tournai le regard vers le parc où je regardai Aka et Sei s’amuser avec les loups de Shizu-chan. Ils étaient pour l’instant attroupés autour de la fontaine centrale et s’abreuvaient comme s’ils avaient couru un marathon. Qu’allait-elle penser d’un chef de clan hanté par le doute et l’incertitude? C’était loin d’être le Takeo qui avait fait le discours devant la Meute, je me demandais bien où il était rendu où lui. Allait-elle remettre en question son vote? Je regrettai aussitôt d’avoir autant partagé avec elle, me disant qu’il aurait été mieux que je garde une façade confiante et résolue. Allait-ce être ma première erreur en tant que chef de clan?

Un sourire flotta brièvement sur mes lèvres lorsque j’entendis sa tentative d’alléger l’atmosphère, la voyant très bien se lever et venir à mes côtés lors de la fameuse réunion. Cette impétuosité et spontanéité n’allaient pas sans me faire penser à moi-même lorsque j’avais son âge, moi qui venais tout juste de débarquer à Konoha avec pratiquement rien de plus qu’un gros sac de voyage. Cela dit, nous n’étions pas les seuls dans notre clan à exhiber une telle énergie puisque beaucoup d’Inuzuka étaient réputés pour leur tête brûlée ou leur mèche particulièrement courte. Tout de même, je ne pus m’empêcher de me voir alors que je l’écoutais me dire que malgré mes doutes j’avais tout de même les idées à la bonne place et ferais ainsi un bon chef de meute. Il était normal de ressentir une certaine appréhension lors d’un tel changement, mais tant que je restais qui j’étais et que j’agissais selon mes valeurs tout devrait bien se passer. Après tout, elle venait tout juste de me révéler que sans même me connaître elle avait vu un peu de Motari-sama en moi; c’était qu’il y avait bien quelque chose que je faisais comme il le fallait.

Je continuai de l’écouter parler alors qu’elle me racontait ce que son père disait souvent à propos du courage d’un homme et vis à quel point je m’étais trompé sur son compte. Certes, la peur qu’elle me juge sur ma remise en question s’était dissipée lorsqu’elle m’avait avoué trouver cela normal avec la position que j’allais prendre, mais je ne m’étais pas rendu compte de la valeur que semblait avoir ce côté imparfait, incertain, de ma personnalité. C’est ce qui faisait de moi plus qu’un dirigeant, mais bien quelqu’un d’un peu plus humain, d’un peu plus comme eux. Le chef de la Meute était censé représenté tous les membres de la meute, il fallait bien que d’une certaine manière je leur ressemble. Même si ces paroles sortaient de la bouche d’une jeune fille d’une quinzaine d’années, elles me firent tout de même du bien à entendre à voix haute. Cela me rassurait de savoir que même après que la poussière soit retombée suite à l’Appel de la Meute on ait toujours confiance en moi.

- Je devais bien être le seul à m’en faire, alors, commençai-je avec un demi-sourire, mais merci, ça fait du bien à entendre.

Je restai silencieux suite à cela, ne sachant pas trop comment reprendre la discussion. Je ne trouvais aucun sujet de discussion qui suivait logiquement ce dont nous venions tout juste de parler, ou aucun autre sujet pendant que nous y étions. La discussion avait pris une tournure soudainement dramatique qui rendait la transition à n’importe quelle autre conversation ardue. Je regardai nos compagnons sautiller dans le parc, s’étant éloignés depuis de la fontaine, même si à bien y regarder il s’agissait plus de Shira et Yoi qui bondissaient autour d’Aka et de Sei. J’aurais cru qu’avec la perspective de retourner à la maison ils auraient plus d’entrain, mais il fallait croire que leur corps était toujours en mode récupération. J’avais donc encore quelques jours de répit avant que ces derniers retrouvent leur rythme de vie habituel.

- N’as-tu pas peur que tes compagnons subissent un tel traitement un jour ou l’autre? lançai-je finalement après quelques instants de silence, sans détourner mon regard des chiens-ninjas.

Je savais bien que tout Inuzuka savait les risques que couraient leurs créatures à poils à chaque fois qu’ils étaient dépêchés, mais il y avait une grande différence entre être prêt pour l’éventualité et avoir affaire à ladite éventualité. Je parlais par expérience en disant que toute la préparation mentale que l’on peut se faire ne sert absolument à rien une fois que tu as sous tes yeux tes ninkens dans un état comme tu ne les as jamais vu avant. Elle avait beau être jeune et n’être qu’une Genin, je voulais tout de même savoir à quel point elle se sentait prête à cette situation. La plupart du temps on ne savait jamais vraiment quand cela allait arriver et, qui sait, peut-être mon expérience pourra lui être utile. D’un autre côté, elle aspirait à devenir vétérinaire; sûrement que si jamais celui lui arrivait elle n’en serait pas à sa première fois de voir des ninkens blessés, mais réagirait-elle de la même façon s’il s’agissait de ses ninkens à elle?

Spoiler:

Loin de moi l’idée de vouloir lui faire peur, mais d’un autre côté il serait naïf de croire qu’elle n’y avait jamais pensé. Shizu m’avait tout l’air d’une jeune femme à l’esprit aiguisé doublée d’une shinobi qui avançait sans broncher, je ne pouvais que supposer qu’une telle situation lui avait déjà frôlé l’esprit. Je ne la pressai toutefois pas à répondre, lui laissant le temps nécessaire pour rassembler ses pensées. Après quelques minutes, elle finit par prendre la parole et me prit de court en m’avouant qu’elle n’y avait jamais pensé jusqu’à maintenant. J’étais donc celui qui lui amènerait ce fardeau sur les épaules? Soudainement je ne voulais plus autant discuter de ce sujet. Tous les Inuzukas développent un lien extrêmement étroit avec son ou ses ninkens et qu’ils leur arrivent quelque chose reviendrait à voir un membre de sa propre famille se faire brutaliser. Cela va sans dire que ce n’est pas le genre de pensées que l’on aime avoir, mais avec un métier comme le nôtre il nous fallait être préparé à toutes les éventualités. Malgré mes soudaines réticences je ne pouvais reculer et maintenant que ce sujet était amené sur la table je ne pouvais que faire de mon mieux pour l’aider et la guider à travers cette lutte constante. Après tout, c’est bien ce qu’un chef de clan ferait, non?

Je l’écoutai donc alors qu’elle se vidait et me disait que malgré la peur qu’une telle chose arrive elle ne voulait pas que cela ne l’empêcher d’aller de l’avant. Néanmoins, elle ne pouvait s’empêcher de se tourmenter à savoir si elle n’agissait pas plus par égoïsme en amenant Yoi et Shira avec elle. Là était le cœur de ce dilemme puisque qui pouvait réellement être certain que nos ninkens nous suivaient réellement de leur plein gré? On s’entend pour dire qu’ils ne peuvent pas simplement prendre la parole pour exprimer leur opinion, alors comment savoir lorsque nos ninkens préféraient rester en arrière? Cela m’avait pris du temps avant de venir avec une réponse à ces questions, du temps pendant lequel je ne pouvais m’empêcher d’angoisser à chaque fois que nous étions pour quitter pour une mission dangereuse. Ce n’est que tout récemment, pendant qu’Aka et Sei étaient en convalescence ici et que je me retrouvais seul dans l’appartement, que je vins finalement avec une réponse. Être séparé ainsi de mes ninkens m’avait laissé beaucoup de temps à réfléchir et je pensais avoir finalement trouvé réponse.

- Dis-moi si je me trompe, mais je ne pense pas que Yoi et Shira apprécierait que tu te retiennes de faire ce qui te plaît à cause d’eux. Je n’attendais pas réellement de réponse explicite de sa part, c’était plus pour l’effet qu’autre chose, mais je pus néanmoins la lire dans son regard. Ceux-ci sont tes compagnons de vie, ta fraternité, depuis plusieurs années; eux mieux que quiconque comprennent ce qui te motive à suivre cette voie et, dans un sens, l’ont choisi avec toi. Crois-moi que s’ils n’avaient pas été d’accord au moment où tu as choisi cette voie, tu l’aurais su bien assez vite.

Je ne connaissais pas beaucoup ses ninkens donc je ne pouvais pas juger de leur caractère, mais si je me fiais à ma propre expérience avec Aka je n’aurais fait eu une longue carrière de shinobi si ce dernier avait soudainement décidé qu’il était trop feignasse pour s’impliquer dans toute cette histoire. Dans un tel cas, je ne serais probablement jamais sorti du village Inuzuka et n’aurais jamais mis les pieds à Konoha. Mais ce n’était pas ainsi que cela s’était déroulé et me voilà chef du clan et Jônin d’élite de la Feuille. Même que sans eux je ne me serais probablement jamais rendu où je suis maintenant.

- Il ne faut pas que tu oublies que ce sont des ninkens, autrement dit des chiens-ninjas. Pas qu’ils sont nés pour suivre la voie de shinobi, mais eux plus que n’importe quel autre race est adapté à ce style de vie. Ils sont faits plus durs que ce que certains peuvent le croire.

Bon d’accord ils n’étaient pas indestructibles, mais je mettrais ma main au feu que les ninkens plus que tout autre animal était adapté pour la vie de shinobi. Certes, il y avait les Dôbutsu qui partageaient un lien étrangement semblable au nôtre, mais il s’agissait là d’animaux disparates que la personne apprivoisait, se liait ou je ne sais pas trop ce qu’ils faisaient, mais il ne s’agissait pas d’une race particulière de… ours-ninjas, si on prenait l’exemple de Kuma-san. Les ninkens étaient la seule race à ma connaissance qui était réellement compatible avec la vie de shinobis, capable de choses impossible pour d’autres races comme partager du chakra ou lier nos sens les uns aux autres. J’espérais avoir rassuré la jeune kunoichi que même si elle doutait parfois si elle faisait la bonne chose pour ses ninkens, ces derniers étaient capables de savoir par eux-mêmes ce qu’ils désiraient et pour tous les ninkens que j’avais rencontré, ce désir était de suivre leur frère ou leur sœur peu importe où qu’ils aillent.

Un sourire éclaira mon visage et je ricanai faiblement lorsque j’entendis Shizu-chan confirmer mes dires. Nos ninkens, malgré qu’ils soient incapables de prendre la parole, communiquaient de leur propre façon et savaient très bien se faire comprendre. Si c’était le cas pour Aka et Sei, je ne pouvais que déduire que Yoi et Shira étaient pareils avec elle et je ne m’étais pas trompé. Comme n’importe quel chien-ninjas, ces derniers Il ne fallait pas trop qu’elle se mettre la pression; ils étaient tous ensemble dans cette aventure et elle devait tirer force du lien qui l’unissait à ses ninkens. Elle ne devait pas non plus oublier que ses compagnons étaient plus qu’aptes à se tenir à ses côtés puisque s’était dans leur gênes-mêmes; le nom de chien-ninja n’était pas venu pour rien. Heureusement, mes paroles semblèrent se rendre jusqu’à elle puisqu’elle était maintenant beaucoup moins tendu et appréhensive du futur. Je n’étais pas certain d’y réussir, mais j’avais bel et bien réussi à rassurer la jeune femme.

Grâce à mes paroles, la jeune femme s’était rendu compte de beaucoup de choses – des choses qui l’aiderait sans aucun à la faire avancer en tant que kunoichi – et tandis qu’elle tournait la tête vers l’hôpital un sentiment de fierté m’envahit. C’était l’une des premières grandes actions que je faisais en tant que chef de meute, je venais de rassurer l’un de mes protégés. Cependant, toute bonne chose devait avoir une fin et Shizu-chan me ramena sur terre lorsqu’elle m’annonça que sa pause était sur le point de se terminer. Sortant de ma petite transe, je jetai à mon tour un regard vers l’horloge et ne pus que constater qu’elle avait raison; je ne savais pas trop à quoi je m’attendais d’autre. Tout en se levant, cette dernière m’affirma qu’on se reverrait sous peu et suivis son mouvement.

- Le plaisir a été le mien, Shizu-chan. Au risque de paraître discourtois, j’aimerais ne pas que cela soit pour les mêmes circonstances. Le mieux ils se portent, le mieux je ME porte!

Je ris et peut-être fut-ce le bruit de mon rire ou le mouvement que nous faisons, mais tout cela pour dire qu’aussitôt nous eûmes quatre regards fixés sur nous et en quelques secondes nous étions rejoints par nos ninkens qui avaient deviné ce qui se passait. Je caressai Aka et Sei, encore une fois heureux d’enfin pouvoir retourner à la maison avec eux, puis me tournai vers Yoi et Shira afin de leur dire au revoir de la meilleure façon qui soit, c’est-à-dire avec pleine de caresses et en grattant leur point faibles qu’étaient les derrières d’oreilles. Après quelques secondes, je rompis le contact et retournai vers mes ninkens tandis que Shizu sermonnait Aka et Sei afin qu’ils se tiennent à carreau pour la semaine à venir. Lorsqu’elle les menaça qu’elle serait mise au courant de n’importe quel écart, elle me lança un rapide clin d’œil que je renvoyai aussitôt. Elle pouvait compter sur moi là-dessus.

- Allez, bonne fin de quart et prends soin de toi!, lançai à la jeune Inuzuka qui, talonnée de ses chiens-ninjas, prenait la route de l’hôpital.

Nullement pressé de retourné à la maison – en autant qu’Aka et Sei soient là cela ne me dérangeait peu d’où j’étais – je me rassis sur le banc et regardai le Soleil qui commençait à peine à montrer. J’étais arrivé de très bonne heure à l’hôpital et j’avais encore toute la journée devant moi. J’avais toutefois l’impression que celle-ci ne serait pas en haute en couleur avec mes deux compagnons qui ne voudraient pas faire grand-chose d’autre que de prendre ça tranquille. De toute façon, nous avions une ordonnance du médecin.