L’automne fendait déjà les feuilles des arbres ainsi que la terre du village. Rin laissa échapper un soupir serein devant la beauté des paysages saisonniers : il y avait un charme certain à voir la nature flétrir progressivement avant d’hiberner et de revenir en force. Renouvellement permanent et homéostasie de l’état naturel, quelque peu à l’instar de ce qu’il se produisait dans le corps humain avec l’apoptose permanente des cellules et leur renouvellement afin d’éviter tout problème. Pensif alors qu’il avançait ces quelques distances le séparant du village Inuzuka, l’Akimichi se demandait si la nature se préservait de cette façon des mêmes problèmes que le corps humain – combien même dans une approche plus épurée de la chose il s’agirait ici surtout de lutter contre les parasites et autres pathogènes pouvant affecter les cultures ou les arbres. Seuls les animaux restaient seuls à devoir se débrouiller dans cette histoire, mais ici encore… Ils pouvaient de plus en plus compter sur l’être humain.

S’arrêtant un instant, il se pencha et ramassa une feuille rouge presque écarlate qui venait de tomber à ses pieds. Il y avait quelque chose de presque cruel à la voir obtenir un summum de beauté si intense alors qu’elle venait de mourir – son seul espoir pour garder forme et ne finir ni en compost ni en broyat étant quelqu’un qui la prendrait, la placerait soigneusement entre deux pages d’un livre et la laisserai sécher en conservant sa beauté. Souriant légèrement, il la lança dans les airs pour l’observer virevolter dans les airs avant de tomber, une fois de plus, à même le sol. Oui – il y avait une beauté inhérente à cette saison qui représentait l’âge des gens mourant et le renouveau des générations.

Pourtant, malgré tout ce que l’on puisse en dire et malgré l’humidité ambiante presque écrasante, il faisait bon au petit matin – certainement un vestige de l’été encore trop récent dans le cœur des gens.

« Ah, le voilà enfin… »

Le Village Inuzuka – dire qu’il avait peur de s’être perdu… Souriant une fois de plus, Rin accélère la cadence pour arriver jusqu’à l’endroit.

« Bonjour ! Je recherche Inuzuka Shizu, elle m’a fait savoir par courrier qu’elle serait là aujourd’hui. Savez-vous où elle est ? »

Rapidement, quelqu’un lui indiqua la position et il suivit les instructions pour éviter de se perdre. De la bourgade que c’était jadis il ne restait que le vestige : l’endroit s’était développé avec une vitesse étonnante et n’avait aujourd’hui presque rien à envier au monde. Tournant la tête tantôt à droite, tantôt à gauche, l’Akimichi contempla quelques instants le contraste qu’il faisait avec la population locale, athlétique et au corps élancé pour la majorité – comparé à eux, il était on ne peut plus boursoufflé. Et dire que sa mère le considérait comme maigre, il faudrait qu’il vienne se promener ici un jour avec elle pour lui montrer…

Le seul avantage de son retour à Konoha, se dit-il lorsqu’il frappa à la porte de l’endroit où devait résider la jeune femme, était que les chiens n’aboyaient plus systématiquement à son égard. La distance prise avec Kimimaro, occupé au chevet de Dame Miko, avait finalement laissé passer ne serait-ce qu’en partie l’ensemencement félin de son odeur. Pourtant, il aurait préféré que cela ne survienne dans d’autres circonstances... Note à soi-même : Ecrire une lettre à Kimimaro pour prendre de ses nouvelles.

Pleuvrait-il aujourd’hui ? Rin se le demandait – malgré le ciel dégagé et presque immaculé, la teinte grisâtre de l’automne avait imposé son empreinte et rendant l’atmosphère quelque peu lourde, bien qu’absolument incomparable à l’étouffante chaleur estivale. Il soupira doucement, perdu dans ses pensées… L’humidité de l’air ambiant avait-elle un effet quelconque sur l’enfant de sa patiente Gogyou ? C’était peut-être un axe à explorer après tout – il ne s’était pas posé la question de l’impact de l’exposition à l’eau exogène sur le fœtus, et si ce dernier était probablement moindre si tant est donné qu’il existait, il s’agissait là d’un facteur environnemental relativement simple à évincer pour améliorer le confort de la jeune femme. Quelque part dans son esprit, il nota qu’il serait important de lui demander comment vivait-elle les changements de météo et de saison de façon générale, et d’autant plus pendant la grossesse, à la consultation suivante. Ce n’est que l’arrivée de la jeune femme qui le fit redescendre sur terre.

« Ah, Shizu-san, bonjour ! Non, non, ça va – je connaissais déjà la position de l’endroit par le passé… Mais je dois avouer être sincèrement étonné par l’ampleur que ce dernier a pris ! »

Hochant calmement la tête, il regarda la brune partir à la recherche du petit chiot. S’il la savait jeune, il ne doutait aucunement de ses capacités en tant que Shinobi. Sa silhouette fine et allongée, ornée de longues jambes et d’une musculature marquée sans être saillante promettait nombre de prouesses physiques dans ce corps qu’il serait erroné de juger frêle. Un corps qui promettait pour l’avenir une beauté resplendissante, même si l’Akimichi avait la petite tendance à penser qu’en dehors de tout ce qui est hôpital, cette dernière devait savoir se montrer forte tête et était donc l’un des meilleurs défis pour chaque jeune homme qui chercherait à l’aborder… Ah, les déboires de l’amour et de la jeunesse… Une phase qu’il avait passée à apprendre et travailler sans qu’elle ne lui manque particulièrement. Après tout – et il entendait là déjà la voix de sa mère résonner pleinement dans sa tête – un Akimichi qui arrive à ne pas avoir le temps de manger ne pouvait pas avoir le temps d’avoir une femme. Il soupira calmement pour soi-même et tourna rapidement le regard à nouveau vers le Refuse pour en voir sortir son hôte – une fois de plus – avec le petit Aoki. Sans hésiter de trop, il adressa un sourire à l’Inuzuka et s’approcha du petit pour le caresser, avant de tendre ses mains pour qu’il ne lui grimpe dessus à la proposition faite.

« Mais bonjour toi ! Je vois que tu vas déjà beaucoup mieux, ça fait plaisir à voir tu sais. »

Une fois le petit chiot confortablement installé dans ses bras, délicatement grossis pour accueillir au mieux leur invité, Rin tourna son visage vers Shizu, un air sévère au visage.

« S’il y a des frais particulier à couvrir pour son séjour… Faites-moi parvenir la facture, d’accord ? »

D’un instant, son visage se détendit de nouveau et il adressa un léger sourire de plus à la jeune femme, loin de la désinvolture de son visage. D’un geste de la main, il invita la Kunoichi à prendre les devants, ne connaissant pas exactement la position du parc dont elle faisait mention.

« Je disais donc, depuis combien de temps le village est-il si développé ? Dans mes souvenirs, ce n’était que quelques tentes agencées de façon proche non loin de Konoha… C’est fou ce que le temps passe vite et que le monde évolue. Il y a quelques années encore, nombre de tout ce qui se passe autour de nous n’aurait jamais été envisagé… C’est un bien triste cadeau que nous faisons à votre génération. »

Après quelques minutes de marche, ils arrivèrent enfin au parc, le petit chiot toujours confortablement installé dans les bras de l’Akimichi. Durant la route, il était resté relativement calme, sinon à mordiller innocemment la peau offerte à lui ou japper de temps en temps. Quelque part, son comportement ressemblait à celui d’un enfant, mais quoi de plus normal pour un chiot après tout ? C’est à contre-cœur que Rin le laissa descendre pour qu’il aille s’amuser, ses yeux rivés sur le par cet suivant le petit chien à l’instar d’un ami proche que l’on quitte ne serait-ce que pour quelques instants quand nous nous sommes enfin habitués à sa présence…

Rin hocha calmement la tête lorsque les questions d’argents furent abordées, même s’il nota quelque part dans son esprit qu’il insisterait probablement une fois ou deux encore pour être sûr que tout soit couvert. S’il n’en était pas encore au point de se baigner dans son argent, il n’en restait pas moins qu’il avait plus qu’assez pour prendre en charge les soins de son petit protégé à distance. Note à soi-même : Ecrire à Kibini-san.

Le long de la route, Aoki ne cessait de jouer avec l’Akimichi pour le grand plaisir de ce dernier – il y avait une sorte de chaleur, de force presque supérieure qui brisait si facilement la carapace de son inexpressivité relative… C’en était perturbant de tomber ainsi sous le joug de quelques jappements et de ces yeux bleus, mais il ne savait que trop bien qu’à chaque instant qui passait, il n’était que plus attendri encore par la petite créature, regrettant de plus en plus amèrement de n’avoir guère le temps de l’adopter. Dans un autre monde, avec moins de responsabilités peut-être. A moins de ne proposer à quelqu’un de proche de lui de l’adopter, mais restait-il à savoir si le petit chiot était plus en confort en présence d’autres pour jouer, ou avec un propriétaire. Comparer la situation à celle d’un enfant dans un orphelinat était tout de même on ne peut plus délicat et osé compte-tenu des différences fondamentales entre les deux.

« Ah ! Vous voyez clair à travers mon jeu. »

Il s’arrêta quelques instants pour rigoler à la remarque de la jeune Inuzuka. Oui, cela faisait un moment qu’il n’était pas passé dans le coin, et dans la quantité de travail qu’il avait lors de ses retours ou brefs séjours il n’y avait guère de temps pour s’intéresser à ce qu’il se passait à côté. Heureusement que sa mère lui écrivait des courriers réguliers avec une mise à jour sur les grands événements importants, lui permettant de se tenir au courant à minima des choses dont l’ignorance ferait de lui un étranger dans son propre village.

« Disons que j’ai… Beaucoup voyagé à travers le continent. Pour murir, en partie, mais surtout pour approfondir mes connaissances en médecine en les confrontant à des modes de penser et soigner différents. Si j’en ai quelque peu profité pour acquérir çà et là des connaissances plus diverses et variées, notamment dans les arts Shinobi… Disons que je n’ai pas vraiment eu le temps de m’attarder sur l’évolution du village. Les quelques fois où je rentrais, le travail me prenait d’assaut rapidement, et finalement… J’ai suivi Aburame Daimyo-dono lors de son investiture pour être médecin à sa cour et parfaire mes connaissances sur la gestion de santé de populations humaines… Mais je vous endormirai à force de tout vous raconter avec trop de détails. »

Il soupira légèrement. Quel âge avait-elle exactement ? A en juger par le développement de ses caractères sexuels secondaires, l’état de sa peau et la répartition des adipocytes chez son interlocutrice, l’Akimichi estimait son âge à tout au plus une fin d’adolescence. Dix-sept ? Peut-être même déjà dix-huit, guère plus. Cela faisait au moins dix ans d’écart… Avait-elle eu l’occasion de voyager ? Envisageait-elle de le faire ? Il soupira calmement, préférant taire ces questions et voir si elle en parlerait d’elle-même.

Lorsque le petit chiot parti enfin rejoindre ses comparses pour s’amuser, sous l’œil attentif des deux shinobis le surveillant, Rin se tourna, gardant son sourire, vers la jeune femme.

« Avez-vous pensé peut-être à l’offre que je vous ai faite en quittant la clinique ? »

« Vous avez encore le temps, en effet – mais si un jour l’envie d’organiser un tel voyage vous prend, n’hésitez pas à venir m’en parler. Je pourrais vous donner quelques conseils voire même quelques recommandations concernant quelques lieux qui méritent d’être visités, et ce qu’importe les objectif de votre voyage. »

Oui, c’était énormément de bons souvenirs et de bonnes rencontres qui se ravivaient dans les souvenirs de Rin à l’évocation de ses voyages. Des personnes hautes en couleur, d’autres plus discrètes, quelques cadeaux, quelques gestes à travers le continent. S’il était plus jeune et moins ancré dans le village qu’actuellement candidat à un poste à responsabilité, il n’aurait guère hésité à en refaire un, ne serait-ce que pour recroiser certaines connaissances et leur faire part des progrès dans la médecine qui ont été obtenus à Konoha. Le regard quelque peu pensif, perdu dans ses mémoires, il continuait d’avancer en jouant avec le petit chien.

Il adressa un large sourire protecteur presque à la jeune femme lorsqu’elle lui annonça être volontaire pour un petit entraînement. C’était on ne peut plus plaisant de voir sa détermination et sa motivation à apprendre, et certainement qu’elle ferait un excellent élément dans le village – si tant est donné qu’elle ne l’était pas déjà. D’un simple hochement de la tête, l’Akimichi accepta de la suivre s’amuser avec les divers canins présents dans le parc, acceptant une période d’adaptation où il manqua de peu de se faire uriner dessus. Souvent lui avait-on dit qu’il était une montagne, mais de là à être marqué comme territoire… Il éclata doucement de rire, caressant le potentiel coupable. De longs passages en pédiatrie lui avaient appris à devenir maître de l’esquive urinaire.

Progressivement, il fut accepté au sein des chiens et commença enfin à jouer vivement avec eux, tantôt avec des jouets, tantôt avec son propre corps, tantôt en courant quelque peu en cercle avec eux. Il y avait une sensation de joie intense à être si proche de ces petits, de les voir en bonne santé et enclin à s’amuser, profiter de la vie. Comme s’ils s’attendaient à ne pas voir la journée finir, comme si… Il secoua rapidement la tête pour faire fuir ses pensées morbides et se concentrer pleinement sur les petits jeux. Même son écran voluptueux de chagrin arrivait à se dissiper, le poussant à rire de cœur-joie durant ces deux heures si candides et innocentes. Si bien que lorsqu’il fut temps de faire ses adieux à son petit Aoki – car mentalement, il avait déjà adopté le petit – c’est une sensation soudaine, violente et déplaisante, de vide qui s’installa en l’Akimichi. Il fallait qu’il trouve quelque pour le petit chiot. C’était… Nécessaire.

« C’était on ne peut plus plaisant ! Une pause qui était franchement bienvenue dans ma routine quotidienne si vous voulez tout savoir… Et pourquoi pas pour la clairière, je vous suis ! »

Rapidement, ils firent le trajet – elle était vraiment proche, tout comme l’avait dit l’Inuzuka. Arrivant sur place, Rin regarda rapidement les environs avant de se tourner vers son guide.

« Avez-vous des préférences particulières pour l’entraînement ? Si j’ai nombre de techniques à mon compte, autant que ce dernier vous profite au plus – parlez-moi un petit peu de votre façon de combattre, avez-vous peut-être remarqué quelques points faibles dans votre style ? Nous pourrions chercher à les combler, qu’en dites-vous ? »

De ce que son expérience portait, le médecin savait que le clan Inuzuka avait besoin de deux choses pour combattre au maximum de ses capacités : leurs compagnons et un espace permettant une mobilité suffisante.

L’Akimichi hocha la tête devant la réponse de la jeune femme. Elle allait plus ou moins dans le sens de ses connaissances ce qui n’étonna guère, et il ne put s’empêcher d’esquisser un sourire. S’il y avait bien une chose devant laquelle il n’avait pas le moindre problème, c’était bien les immobilisations d’autrui...

« Je vois oui… Mais ne vous inquiétez pas, vous êtes encore jeune et on peut vous pardonner d’avoir quelques faiblesses – c’est avec le temps que vous apprendrez à les contrer en fonction des adversaires que vous aurez en face de vous… Regardez-moi par exemple, cela fait tellement longtemps que je n’ai affronté personne maitrisant le Genjutsu que je ne suis même plus certain d’être capable de m’extraire d’une illusion basique ! En attendant… Regardez. »

Rin lui adressa un sourire de plus, tout en réfléchissant à comment préparer le terrain pour son apprentissage. Montrer l’équivalent de sa technique et l’ajustement qu’il en avait fait à autrui était probablement le meilleur début, car c’était ce que la jeune fille devrait faire. Après, il suffirait de l’immobiliser et la pousser à se libérer avec tous les efforts de son corps. Rien de bien compliqué à priori, mais la technique était piégeuse. Fermant les yeux un bref instant afin de rendre son mouvement le plus lent possible, Rin concentra son Chakra et subitement, il gonfla un peu en augmentant le volume de son corps entier avant de revenir à sa forme initiale. Heureusement que ses vêtements usaient des fibres extrêmement étirables mises en place par son clan, car sinon il serait rapidement problématique pour lui de faire autre chose.

« Voilà. Bien sûr, je sais que vous ne pouvez pas augmenter le volume de votre corps pour briser des liens qui vous bloqueraient, mais la base de la technique est toute autre. Théoriquement, il s’agit d’utiliser de son Chakra pour augmenter brusquement sa force afin de détruire les liens par la contraction de ses muscles – seulement, cela nécessite une dose de Chakra adaptée pour ne pas briser ses os et ses muscles. J’en mets un petit peu plus et laisse mon corps éponger la dose. Mais je pense qu’il serait préférable que vous essayiez de vous-même. »

Il s’arrêta un bref instant, laissant s’ancrer les mots qu’il avait dit à la jeune femme. Oui, c’était un risque. Mais l’expérience montrait que même le plus basique des Jutsus portait en soit un risque inconsidéré s’il était mal établi en termes de Chakra, une réalité médicale que la population générale se contentait généralement d’ignorer pour sa propre assurance. Dommage, car cela faisait beaucoup de blessés pour rien à l’hôpital. Note à soi-même : Faire une campagne de sensibilisation sur les abus du Chakra.

« Ne vous inquiétez pas pour autant avec tout ce que je dis, normalement tout devrait bien se passer. »

Et dans le pire des cas, il était là.

« Mais pour vous aider quelque peu… Je vais vous immobiliser. Si vous sentez que mes bras cèdent, vous y serez. »

Lui adressant un sourire de plus, il fit craquer ses doigts avant de composer ses signes. Déjà, ses bras grandissaient énormément et attrapaient la jeune fille, laissant seulement sa tête dépasser de la prise de chaire dans laquelle elle se trouvait désormais.

HRP:

Inspirant profondément, Rin concentra la totalité de son attention sur ce qu’il se passait autour de lui, conscient des risques potentiels qu’encouraient la jeune femme. Déjà, il la sentait progressivement exercer une pression croissante contre ses mains, et si le processus était trop lent pour la réalisation telle quelle de la technique, il savait qu’elle ne faisait que rechercher le bon point de rupture pour ne pas l’excéder de trop. Il serait certainement judicieux pour le médecin, par ailleurs, de trouver le temps d’aller à l’Académie pour récupérer quelques formations sur le principe de l’apprentissage d’une technique, ou du moins mettre à jour ses connaissances qui pouvaient être, compte-tenu du contexte, quelque peu désuètes. L’Akimichi était sur le point de soupirer doucement quand il sentit quelque chose céder entre ses mains et ne réfléchissant pas même plus devant l’absence soudaine de pression contre ses bras il profita de la taille augmentée de ces derniers pour ramener la jeune femme à ses côtés et voir ce qu’il se passait.

« Shizu-san ?! »

Elle gémit de douleur et défaisant totalement sa technique, il observa l’état de son corps. Une chose était plus frappante que le reste – son épaule gauche qui présentait une déformation des plus marquée. Merde.

« Désolé je vais… »

Doucement, il glissa sa main sur les épaules de la jeune femme dans un geste qui, dans un contexte totalement différent et un monde parallèle pourrait-être considéré comme sensuel, bien qu’il ne fût qu’une part de l’examen médical. Une protrusion antérieure et une grimace de douleur confirmèrent le diagnostic qu’il avait en tête dès le premier coup d’œil tandis qu’il soupira calmement.

« Vous vous êtes luxée l’épaule. Deux secondes… »

Composant rapidement quelques mudras, il invoqua quatre abaisse-langues.

« Ce n’est pas le plus charmant mais je vais avoir besoin… Pourriez-vous les prendre en bouche et croquer de toute vos forces ? »

Une fois la chose faite, il composa quelques mudras de surcroit pour conduire à une anesthésie locale du bras endolori, voyant un léger œdème réactionnel se former à vue d’œil. Ce ne serait pas agréable, mais si elle voulait récupérer son bras dans l’immédiat… Rin cligna des yeux à trois reprises, espérant qu’elle ne cesse de se concentrer sur les objets dans sa bouche – leur but principal étant de l’empêcher d’hurler de trop car anesthésie ou bas, réduire une luxation, notamment de l’humérus, n’était pas quelque chose d’agréable à vivre. Il figea ses yeux dans ceux de l’Inuzuka.

« A trois, d’accord ? Un… »

Sans attendre que le compte n’aille plus loin, il empoigna son bras gauche et, moyennant quelques mouvements de rotation et d’élévation avec un geste circulaire sur la fin, il conduisit jusqu’au délicat claquement qui signait que la congruence de l’articulation venait d’être récupérée – c’était l’unique traitement et la meilleure analgésie qu’il pouvait lui procurer, mais dans un élan de formation protocolaire il composa encore quelques sceaux pour détecter s’il y avait d’autres lésions… Une fracture de fatigue, peut-être deux, d’âges différents mais une particulièrement récente. Il grimaça délicatement avant d’user, une fois de plus, de ses soins pour guérir la chose.

« Comment vous-sentez vous ? Nous… Nous pouvons arrêter si vous le préférez. »

Il adressa un sourire en réponse à la détermination de la jeune fille, espérant que cette fois-ci serait la bonne. Sans plus attendre, les deux s’installèrent et, une fois de plus, les mains de Rin grandirent et enveloppèrent le corps de l’Inuzuka. La méthode était la même et, repensant à ce qui venait de se produire, il figea son regard dans le sien pendant quelques instants avant qu’elle ne commence, comme pour lui annoncer qu’il avait encore à dire.

« Si la technique semblait bonne la dernière fois, elle était trop lente. Il faut que ce soit une explosion de Chakra, une contraction brutale de vos muscles contre mes mains. Je sais que vous vouliez trouver la quantité nécessaire à faire, mais je crains fort que ce soit justement cette part ci qui ai conduit à trop de pression chakratique au niveau de vos articulations et donc à votre luxation. »

Il s’arrêta quelques instants, pensif, dans cette position pour le moins étrange. Viendrait-il à être attaqué qu’il ne possédait pas même ses mains pour se défendre, une faille qu’il fallait revoir dans sa technique – bien que l’Akimichi possédait des alternatives plus cognées, mais là n’était pas l’objectif du jour. Il fallait qu’elle apprenne la base pour pouvoir aller dans le plus complexe, tel un enfant à qui l’on apprend la lecture. D’abord des lettres seules, puis des associations simples, puis des mots, puis des phrases basiques et enfin, les plus complexes des paragraphes. Une esquisse de sourire traversa ses lèvres – la lecture était certainement moins douloureuse à apprendre.

« Souvenez-vous des sensations que vous avez éprouvées juste avant l’épisode fâcheux. Essayez de visionner la quantité de Chakra que vous aviez à ce moment-là et, plus important, sa répartition. Parce que c’est elle qui joue le fort de cette technique. Diviser votre force sur votre corps pour que tout s’oppose à mes mains afin de sortir de celles-ci. Je sais que vous pouvez y arriver. Et surtout, si vous sentez atteindre à nouveau les seuils précédents, arrêtez avant de vous blesser. Ce n’est pas grave de recommencer encore et encore tant que vous restez à un stade inférieur à la blessure, d’accord ? »

Il hocha la tête sur ses paroles et se concentra pleinement sur ses mains, suivant les pressions appliquées sur ces dernières afin de voir comment avançait la jeune Shinobi. Il n’était hélas pas senseur et, à défaut, savait combler son manque par l’observation pure et dure des gens, par son sens clinique. Néanmoins, prise en étau entre ses deux fortes paumes, il ne voyait rien du corps de la jeune pour pouvoir la guider autant qu’il le voudrait. Rin soupira calmement. C’était à elle et elle seule de réussir, il ne pouvait guère l’aider plus.

Tel un oiseau se débattant dans sa cage, la jeune Inuzuka tentait de se libérer de l’emprise de l’Akimichi. Si les premières fois se montraient insuffisante, Rin savait qu’elle finirait par y arriver. La technique était la bonne, la méthode également, et déjà sentait-il ses mains devoir lutter contre la force provoquée par la jeune femme pour se maintenir en place jusqu’à ce que… D’un coup brusque, elle rompit les liens la contraignant en expulsant littéralement les énormes mains à distance de son corps. N’attendant guère plus, il réduisit le volume de ces dernières jusqu’à leur taille normale. Il adressa ensuite un sourire à l’Inuzuka.

« Et c’est à un Akimichi que vous le dites ? »

Dans le feu de l’instant, il se permit même un léger rire à sa propre remarque, encore détendu par les jeux d’avant avec les canidés. De toutes les journées passées, celle-ci avait son lot de bonne chose, notamment une relaxation suffisante pour le motiver à travailler plus encore pour les jours à venir. C’était certainement une pause bien appréciée, et une pause qu’il songerait à refaire. C’en était presque fou de penser qu’il pouvait ainsi se détendre par de simples petits jeux, et quelque part la culpabilité d’avoir tant apprécier de passer du temps avec des canins le frappe vis-à-vis de son ami félin. Serait-il capable de comprendre ? C’était une question qu’il était légitime de se poser, même si le moment n’y était pas.

« Vous rentrez à Konoha également ? Si oui, que diriez-vous que je vous invite à manger ? Je connais quelques bons restaurants. »

Ce qui était logique pour un membre du clan de la nourriture, n’est-ce pas ? Soupirant calmement, Rin sorti son paquet de cigarettes mais se ravisa devant la jeune femme. Non seulement c’était encore une enfant en partie, mais son odorat plus développé que celui du reste des humains devait encore moins apprécier le tabac. Et une cigarette de moins étant ces quelques instants de vie en plus, c’était presque un échange gagnant-gagnant.

« Il faudrait vraiment que j’arrête, c’est presque un réflexe chez moi… »

D’un geste précipité, il rangea le paquet dans sa poche à nouveau, attendant la réponse de la jeune femme. La relation de complicité qui se créait entre eux était agréable telle une brise fraîche dans les journées remplies de patients du médecin. Peut-être aurait-il un jour l’occasion – bien qu’il espérait formellement que non – de rendre la pareille avec la jeune femme d’un point de vue plus médical et moins vétérinaire. Il lui semblait avoir entendu son nom évoqué à l’hôpital une fois ou deux, même s’il n’arrivait pas réellement à remettre la chose dans le bon contexte.

L’Akimichi s’arrêta un instant pour réfléchir. Un restaurant qui accepterait de nourrir également les Ninkens de l’Inuzuka… C’était envisageable. Il en connaissait quelques-uns en effet, compte tenu de l’importante présence de membres de ce clan dans le Village lui-même, c’était de la pure adaptation à la clientèle. Bien évidemment, il s’agissait de deux repas en plus à offrir, mais cela ne dérangeait guère le médecin. Il avait beaucoup voyagé plus jeune, et il était quelque peu évident qu’il devait avoir les moyens pour le faire, déjà à l’époque. Il écouta les animaux grogner délicatement et adressa un sourire au petit trio, contemplant avec amusement l’affection que la jeune femme semblait leur porter. Il y avait, une fois de plus, ce côté attendrissant dans cette approche, et la brise automnale débutante, mêlant à soi quelques feuilles rougies par la saison, ne faisait que rajouter un charme certain à la scène entière, juste avant d’être repris sur sa cigarette par la jeune shinobi.

« Oui, j’en connais et ils sont même succulents, je peux vous en assurer. Avez-vous des préférences particulières ? Et en effet, il faudrait que j’arrête… Mais c’est bien plus simple à dire qu’à faire, et disons que j’ai trouvé quelques tours de passe-passe pour priver mon corps des effets néfastes de la chose. Néanmoins, je vous recommande de ne jamais commencer. Et si vous avez des questions sur votre santé de façon générale, n’hésitez pas. »

Discrète invitation à changer de sujet, glissée dans l’habitude de la conversation, arrachant un sourire de plus au médecin. Oui, aujourd’hui, il se sentait bien mieux sur un plan thymique que d’habitude, et à croire le vent et le temps… Certainement qu’un virage léger était à prévoir pour les jours à venir, telle une annonce de météo qui prévoyait de la joie et de la bonne humeur vierges de toute teinte grisâtre. La question subsidiaire, évidemment, était de savoir combien de temps cela allait durer. Soupirant calmement, il continua à écouter la jeune femme le long du trajet, échangeant çà et là avec elle les sujets. Ils ne virent guère plus passer le temps que ça, et déjà se trouvaient-ils aux portes du village. Saluant les gardes présents, ils pénétrèrent dans l’environnement quelque peu plus industrialisé, humanisé, tellement plus naturel pour le Jônin.

Retourné dans son élément naturel, il s’arrêta quelques instants seulement avant retrouver sa direction vers le restaurant correspondant aux goûts de la jeune femme, ou à ses recommandations personnelles si elle n’en avait point de particuliers. Adressant d’un geste de la main puis de la tête une chaleureuse salutation au personnel de l’enseigne, il invita l’Inuzuka à s’installer à une table, non loin de la zone dédiée à ses collègues canins. Il y avait un profond lien émotionnel entre un guerrer du clan des crocs et ses partenaires, aussi voulait-il au moins le briser. Certaines rumeurs rapportant même que la mort de l’un des Ninken Inuzuka pouvait causer un chagrin suffisant à une mort pour cœur briser.

« Et donc, avez-vous des idées de ce que vous voudriez faire plus tard peut-être ? Une orientation particulière dans votre formation ou que sais-je ? Il est important d’avoir un semblant d’idées tracées je trouve, tout en sachant ne pas se limiter à ces dernières… Moi par exemple, je voulais voyager : tout le reste n’est que le fil de l’enchaînement des événements qui se sont imposés à moi. »