Fin de la journée. Après avoir rencontré l'un des miens au petit resto attitré des Inuzuka ce midi, et quelques heures passées à marcher au soleil dans les rues si familières du grand village qu'était Konoha jusqu'à ce que la nuit tombe; la soif que j'avais pourtant bien étanchée se manifesta à nouveau. Bouche sèche, gorge qui gratte -mais pas trop- et goutte de sueur sur le front; tous les signes d'un manque flagrant de cette boisson dont je m'abreuvais sans restriction depuis maintenant à peu prés cinq ans. Un art de la boisson auquel j'avais été initiée par l'une de mes nombreuses cibles et victimes. Je me souviendrai toujours de cet homme. Il était gentil, mais vraiment gentil. Même Raki semblait l'aimer, c'est dire. Une personne qui connaissait et avait pu, à son insu; me livrer une grande partie des ennemis internes de la feuille et du feu. Bien évidemment, je ne pouvais pas dire qu'il fut mon ami, loin de là; malgré qu'il l'ait cru. Enfin, un homme que je ne pourrais jamais assez remercier pour m'y avoir fait goûter, au Sake.

Cet alcool était devenu comme une drogue, j'aimais la sensation qu'il me procurait et l'état dans lequel il pouvait me mettre lorsque j'en abusais. Certains auraient pu dire que j'étais devenue une alcoolique, ce qui dans le fond n'était pas complètement idiot, ou faux; mais malheureusement, personne ne me connaissait vraiment non plus, dans le fond. Ceci dit, je n'avais pas l'impression d'en être dépendante; mais lorsque j'en avais envie, je finissais toujours par trouver le moyen de m'en procurer. Donc, peut-être que si en fait... Enfin, ma constitution sans doute, et mes gênes plus probablement; me permettaient de rester lucide et même presque clairvoyante, dans la majorité des cas. Mais dans le reste des cas -soit un peu moins de dix pour cent, environ- je me réveillais souvent au milieu de la forêt, d'un champ ou au bord d'un ruisseau; au petit matin, avec un goût de sang dans la bouche et des ecchymoses un peu partout. Allez savoir pourquoi.

Ainsi, j'arrive dans une ruelle, dans les quartiers résidentiels; un peu à l'écart du tumulte des commerces et des restaurants du centre du village. Ici il n'y a pas grand monde, un ou deux Konohajins sur le chemin, qui me dévisagent, moi et Raki. Puis, d'un coup; mon odorat superdéveloppé se met en route sans que je le lui demande, j'ai repéré l'odeur si caractéristique du grain de riz fermenté, de ses levures. Instinctivement, je me dirige vers la source de cette émanation comme je pourrais pourchasser une proie. Un croisement de rue, un virage à droite et je m'arrête net. Là, je vois des hommes titubant tant bien que mal, visiblement un peu amochés. Des soldats, ou de futurs soldats pour la plupart, même quelques ninjas; des genin tout au plus. Le bouge d'où semble s'extraire tous ces mécréants est devant moi. Un sourire s'esquisse d'entre mes lèvres, j'avance, pousse les quelques résidus d'humains qui trainent à gauche à droite et enfin la cliche de la porte est entre mes doigts. Raki me fixe, son regard est clairement désapprobateur -du moins c'est comme ça que je le perçois- mais pas grave, je lui fais signe d'attendre ici, et entre.

Pas si mal famé que ça l'endroit, on aurait pas dit pourtant vu la populace qui s'en extirpait. Cependant, je vis clairement qu'il venait d'y avoir une... bagarre ici. Verres brisés, chaises cassées... J'arrivais donc quelques minutes trop tard ? Bien dommage, j'aimais ce genre d'événement où je gagnais toujours. Enfin, pas important. Ce qui comptait vraiment résidait derrière le bar, et je ne pensais ni au patron qui m'observait -ou qui observait la plaque Konohajin rouillée sur les bords, bien usée, rayée, griffée, tordue, et portant même encore un peu de sang séché; qui était fixée à mon bras gauche, en haut- ni à la serveuse qui, elle, ne semblait pas oser croiser mon regard. Pourquoi, Puais-je ? Puis elle s'éclipsa pour servir deux types assis à une table. Assise sur un tabouret haut, je les observe un peu en coin, sans grande discrétion. Vue leur apparence, des ninjas, c'était sûr. Néanmoins, l'un portait un déguisement et l'autre... ben l'autre quoi. Je me retournai, de nouveau face au patron qui attendait que les mots fatidiques, libérateurs même; sortent de ma bouche.

"Saké!"

Dis-je avec une pointe d'excitation dans la voix. L'homme me sert, et me regarde faire, boire. Une traite suffit pour que je vide le godet pas assez rempli à mon goût. Qu'à cela ne tienne, j'en demandais un nouveau. Et bien rempli cette fois. J'avais plus ou moins de quoi payer... Ou du moins, le clan en avait sans doute les moyens... huhu. Mais cette fois, avant d'absorber une nouvelle dose; j'adresse quelques mots au patron en pointant du pouce, dans mon dos, les deux assis un peu plus loin.

"Vous servez les enfants ici maintenant ? Enfin, j'dis ça, vous faites ce que vous voulez; ça ne me concerne pas." Achevais-je de nouveau avec cette discrétion qui m'était propre, et somme toute, très relative.

C'était exactement ce que j'attendais, sentir la brûlure de l'alcool de riz se répandre dans ma gorge jusque dans mon estomac. Cette sensation était formidable, et c'était pour cette unique raison que buvais; plus que pour le goût de cette boisson qui était en fait plutôt fade. Mais l'insipidité de mon breuvage fut, comme bien souvent, rehaussé par cette petite pointe de piment que je pouvais apporter à une atmosphère, un savoir faire dont j'étais fière, et sûrement la seule en fait. Un comportement qui, j'en avais parfaitement confiance, m'avait régulièrement posé quelques menus désagréments. Oui, parce qu'au final j'aimais ça alors ce n'était si gênant. Alors que je m'attendais à ce qu'ils s'énervent ou aient un peu de répondant, le moins singulier des deux rétorqua que sa fierté était au repos. Vraiment ? La fierté pouvait être en vacances ? Cela me semblait impossible. Ceci-dit, j'oubliais que j'étais à Konoha, ici les gens étaient plus... conciliants.

Mais, je n'avais pas dit mon dernier mot. Me demandant quel genre de personne pouvait ainsi se défaire du respect de soit ? En général les Akimichi faisaient preuve d'une certaine abnégation, comme les Hyuuga. De quelles familles faisaient partis ces deux là ? Des Aburame peut-être bien. Ceux là ne devaient pas avoir beaucoup d'amour pour héberger des insectes, comme les Inuzuka un peu; oui, nous visions avec et sentions le chien... Pour dire. Alors, je me levai et fis quelques pas vers les deux assis à leur table. Toujours sans grande discrétion, évidemment. Je me penche sur celui qui porte un masque et le renifle, comme si c'était normal. Et me redresse en posant mon regard ambré sur lui. Son odeur me dit vaguement quelque chose. Je réfléchis un instant et ça me revient d'un coup. Ca sent Haï no Kuni. L'odeur est humainement imperceptible, mais pour moi, et plusieurs de mes congénères c'était juste... simple.

"Hum... Toi tu viens d'un autre pays. On ne l'appelle pas le pays des cendres pour rien... Et, tu dois être un Yamanaka non ? Vous avez ce petit je ne sais quoi dans votre odeur corporelle... M'enfin, vous êtes des gros fourbes, comme les Nara."

Repris-je en faisant le signe "attention" avec l'index.

"Quant à toi..."

Il sentait un peu plus fort que l'autre, 'fin, pour moi. Mais étrangement je fus incapable de dire ce qu'il était exactement. Ca ne sentait pas l'humain, pas complètement du moins. Ca ressemblait un peu à l'ours, mais non, pas vraiment non plus. Mais une chose était sûr : ça sentait la bestiole. Peut-être était il genre d'Inuzuka, mais avec un autre genre d'animal ? Hum, non peu probable. J'avais pas son compagnon... Donc..

"Toi par contre... Tu sens bizarre. Tu viens d'où exactement ? Et, t'es quoi au juste ?.. Je ne connais aucun clan avec un sens de la répartie aussi... pathétique."

J'avais beau essayer de me souvenir d'une odeur similaire, impossible. Peut-être venait d'une contrée lointaine ? Tout d'un coup mon intérêt pour une éventuelle altercation s'évanouissait avec le désir d'apprendre, de savoir ce qu'il était.

Spoiler:

Ah, de la répartie, quand même. Voilà qui devenait intéressant. Rares étaient les personnes avec un tel sens de l'humour, et l'utilisation du mot chienne dans cette situation pouvait revêtir tellement de sens. Une insulte pour certains, certaines; qui ne faisait que m'amuser. En effet, on pouvait sans doute dans bien des aspects des ma vie me considérer comme une chienne. Dans le fond c'était presque un compliment avec le respect que je pouvais porter à la race canine. Par contre le ton employé... Je ne pouvais pas dire qu'il me déplaisait; puisqu'il signifiait clairement que le jeune homme voulait en découdre. Un revirement de fierté ?

Alors que j'allais lui répondre de manière plus physique, je fus soudainement prise d'un sentiment de peur à la vue du jeune homme. Une peur irrationnelle que je ne comprenais. La peur était quelque chose qui ne m'était pas familière, et souvent c'était le sentiment que j'inspirais aux personnes qui m'affrontaient sérieusement. Mais alors que je fis un pas en arrière sous l'effet de cette crainte grandissante, la porte de la taverne vola en éclat, et surgit Raki. D'un bond il se retrouva entre moi et le dénommé Natsuu et me mordit le mollet sans pour autant me l'arracher. Il en aurait été capable. D'un coup, je repris mes esprits et mon regard se posa sur celui qui était resté à sa place.

Raki courba le dos, grogna en montrant les crocs au ninja mi homme mi autre chose afin de le tenir en respect, et je me tournai vers le Yamanaka et l'agrippai par le col.

"Je le savais que t'étais aussi fourbe que les autres."

Achevais-je en aplatissant mon poing sur le masque qui recouvrait son visage tout en relâchant mon emprise pour le laisser décoller du sol en toute quiétude. Puis je me retournai vers l'autre.

"Toi, au moins, t'assumes. Calme Raki!"

Aussitôt le chien loup s'assit, et observe le jeune homme avec une certaine méfiance. Puis en pointant mon poing vers lui, j'ajoutai :

"Mais ça ne veut pas dire que tu ne vas pas y passer."

Lui souris-je.

ps:

Si la fourberie avait une odeur, ce serait sans doute celle de ce Yamanaka. Je n'avais pas eu conscience que pour lui ce petit échange revêtait un aspect bien plus sérieux que pour moi, si bien qu'il en était arrivé à dégainer un genre de petit couteau dépliable, un canif en gros; mais qui restait une arme pouvant s'avérer, si bien utilisée; plutôt mortelle. Heureusement, mon expertise du corps à corps et mes sens passablement surdéveloppés me permirent d'éviter un drame; enfin, pas pour moi; mais pour lui. En effet, si j'avais été blessée plus que de raison ma réponse aurait été bien plus persuasive.

Cependant, je gardais bien à l'esprit qu'aucunes des personnes présentes dans ce bar n'étaient mon ennemi; et même plus, ils étaient mes alliés, en fait. Ce fut pour cette raison que j'avais intimé à Raki l'ordre de se calmer. J'étais sûre qu'à lui seul il aurait pu tailler en pièce chacun des occupants, comme cela avait déjà pu se produire. J'observais toujours l'autre, Notsuu qui s'était accroupi devant Raki. Et m'adressa un genre de... compliment. Sentir la chienne ? Avait-il un problème avec les chiens, ou chiennes et leur odeur ? Un de mes sourcils s'arqua d'étonnement.

Un claquement de doigt et la bête mi-loup mi-chien revint à mes côtés pour s'asseoir face au Yamanaka encore au sol, alors que son comparse semblait ne pas avoir apprécié être si facilement manipulé. Sa façon de parler me semblait un peu... en décalage avec le reste, m'enfin cela n'avait que peu d'importance puisqu'au final que ce soit l'un ou l'autre, ils n'avaient de tout façon pas le niveau. Néanmoins, s'il y avait bien une chose que je pouvais souligner, c'est bien qu'aucun des deux n'avait eu peur de l'affrontement. Je soupirai à la fin de sa phrase.

"Vous êtes tous les deux très... intéressants. Un peu au dessus de la moyenne, mais loin d'avoir les capacités de faire respecter votre honneur. Surtout lui là."

Dis-je en montrant du pouce le Yamanaka derrière moi. Vers lequel je me tournai d'ailleurs en lui tendant une main amicale alors que Raki avait reprit la surveillance de l'autre amateur.

"T'inquiètes, je ne ferai jamais, vraiment; de mal à un Konohajin. Même si celui-ci tente de me tuer."

Lui dis-je avec un léger sourire. Effectivement, il n'y avait rien de plus important pour moi que le village, ses habitants et ses ninjas. Jamais il ne me viendrait à l'idée d'en tuer un. Cependant, casser un bras ou une jambre... C'était encore une autre histoire.

Une fois remis debout, je lâchai le fourbe masqué et m'approchai de la table pour y déposer les quelques ryos qui avaient survécu à mon long périple dans le Yuukan. Deux billets froissés, quatre pièces en cuivre; suffisamment pour couvrir les consommations de ces deux là. Je pris la bouteille de Sake que le patron avait posé sur le comptoir et lui demandai d'envoyer la note au clan Inuzuka, au chef de préférence.

"C'est pour le dérangement." Adressais-je aux deux comparses en me dirigeant vers la porte défoncée.
"Si vous voulez vous améliorer, vous avez qu'à me faire signe." Continuais-je en faisant signe de la main.

Raki était resté assit entre les deux hommes, attendant que je l'appelle. Une fois que je fus sur le pallier de la porte, ou ce qu'il en restait; je me retournai une dernière fois. J'avais oublié de répondre à Notsuu... L'effet de l'alcool surement.

"Ah oui! Takeo... Je l'ai rencontré ce matin!" Achevais-je en les saluant de la main.

Et une fois que j'eusse passé le trou servant d'entrée, Raki s'en alla tranquillement à son tour. Ainsi, accompagnée de mon fidèle compagnon et de mon meilleur ami : Sake-kun; je pris la direction de l'endroit qui m'hébergerait pour la nuit, un lieu où je pourrais prendre une douche...

ps:

Je fis signe à Raki de me suivre, le chemin de ma nouvelle destination était déjà tout tracé dans mon esprit : maison-douche-lit. Mais alors que je fis mes premiers en dehors du bouche, j'entendis un nouveau bruit familier dans mon dos. J'eus à peine le temps de voir ce qui venait de se passer que le Yamanaka se retrouvait encore en fâcheuse posture, derrière lui l'autre, Notsuu répondait à une question que m'avait sans doute posé le Konohajin masqué, et que j'avais assez vaguement entendu. Alors retournée, j'esquissai un sourire et Raki lâchait un aboiement, comme s'il affirmer la réponse.

"C'est ça, devenir meilleur. Vous ne savez pas qui je suis, à part une Inuzuka. Y'a quelques années, j'entrainais des genin, ils ont tous abandonné. Et on a jugé que mes compétences seraient plus utiles... ailleurs. Mais vous, vous m'avez l'air d'avoir un esprit assez combatif pour endurer mon enseignement."

Le Yamanaka n'avait pas hésité user de ses fourberies pour se défendre, allant jusqu'à retourner son comparse contre moi; c'est qu'il devait bien y avoir quelque chose à tirer de lui, malgré tout. Et Notsuu... C'était davantage une question de comportement, le genre de gars qui me plaisait bien, sur un plan strictement professionnel bien entendu. Deux ninjas qui a première vue sauraient se montrer digne de recevoir mon enseignement, bien que celui-ci soit certainement moins orthodoxe que la plupart des autres senseï que pouvait compter Konoha. Un entrainement qui pourrait les rendre bien plus forts, sans aucun doute.

On aurait pu dire, dans un système démocratique; qu'ils avaient le choix, mais ce n'était pas le cas. Je ne leur laissai pas en fait. Ils seraient bientôt intégrer de force dans la formation d'équipe que j'allais soumettre à Mizuki-sama, laquelle l'accepterait bien évidemment.

"Vous pouvez considérer que je suis votre supérieure à partir de maintenant."

Leur dis-je accompagné d'un signe de la main, en reprenant mon chemin.