Il y avait face à moi toute mon équipe, le Kakumeigun. On était une bonne petite trentaine dans la salle de réunion, Lenka était à ma droite tandis que tous les autres eux étaient assis sur des chaises installées face à moi. J'avais besoin de faire un point, comme on le faisait souvent dans l'organisation. Cette fois-ci ce n'était qu'un petit briefing, des encouragements peut-être ? Je n'étais pas si fort que ça pour encourager les autres, j'étais plutôt du genre à les pousser dans leurs retranchements pour qu'ils deviennent plus forts... Ici c'était totalement hors sujet. Ces derniers mois avaient été très mouvementés, certains Sunajins avaient d'ailleurs du mal à vivre dans cette ambiance de guerre. Tandis que d'autres faisaient tout simplement semblant d'ignorer la menace approchant. Konoha était notre ennemi, on devait les anéantir mais ça c'était sur papier. Peut-être que le futur nous offrira une échappatoire, peut-être avais-je un rôle à jouer dans celle-ci ? Je n'étais pas assez doué avec mes pupilles pour faire un bond dans le futur, malheureusement. Je saluai l'assemblée en abaissant légèrement le haut de mon corps. Suite à ça, je m'assis sur mon bureau. Lenka me poussa pour avoir une petite place, sans gène. J'esquissai un sourire forcé avant de prendre la parole.

«  Merci d'être venu en ce jour, fiers membres du Kakumeigun. Vous êtes en quelque sorte l'élite du village, vous avez été choisi pour vos dons et vos aptitudes. Aujourd'hui plus que jamais, vous allez pouvoir prouver votre valeur. Notre pays est en guerre et nous avons besoin de chacun de vous. Je vais commencer par le plus contraignant, les procédures... »

Je m'imaginais déjà endormir Tetsui par exemple mais ce n'était pas très grave tant qu'elles étaient respectées. Dans un premier temps, j'avais indiqué à chacun des organismes de défenses de Suna -dont l'Ergastule- des nouvelles précautions. À la moindre suspicion, un soupçon d'attaque, un traître, un enlèvement, une fuite... Tous les protocoles devaient être modifiés. Les Saibogu devaient changer les accès et tout notre système d'information. En guerre, on ne pouvait se permettre la moindre erreur. J'indiquai alors à mes membres ces nouvelles dispositions, comme dit c'était contraignant mais c'était en effet pour assurer notre sécurité. J'évoquai ensuite le tunnel menant hors de la ville, celui qui servait à évacuer les civils. Il devait être utilisé, quelques hommes -dont des Kawaguchi- étaient en train de le rénover. Il pouvait être utilisé à bon escient et par de nombreux organismes. Je fis un sourire à Ema en prononçant ces mots avant de me concentrer sur la suite. Mon visage se fit plus neutre, plus sérieux.

«  Nous devons parler à nouveau du dirigeant des Yamada, Arashi. Il a été pris en otage et de par sa position, on ne peut le laisser très longtemps entre les mains du village de la feuille. Certes, il ne pourra nous faire du mal avec ses informations mais il reste un des nôtres. »

J'en venais donc au sujet des infiltrations, parmi nous se trouvaient de très bon senseurs. Si j'avais été sélectif, c'était pour de très bonnes raisons après tout. Je souhaitais composer de bonnes équipes et mélanger les aptitudes afin d'établir une complémentarité dans chacune des escouades.

« Nul n'est intouchable et encore moins Konoha, de ce fait j'ai déjà réfléchi à une équipe d'infiltration pour récolter des informations et extraire le Yamada. Nous connaissons bien sûr les grands axes du pays, une flotte à Nami no Kuni, une bonne puissance de frappe-.. Cependant ce n'est pas une raison pour rester sur la défensive. Ils ont montré leurs vrais visages en nous abandonnant suite à l'attaque lors de l'examen Chûnin. Konoha est notre ennemi et ça ne fait aucun doute. »

Je marquai une pause de quelques secondes, levant mon index comme pour attirer l'attention sur les prochaines paroles.

«  Cependant, nous n'allons pas faire nos sauvages et sauf en cas d'extrême nécessité, on ne touchera pas aux civils. Des dommages collatéraux se produiront sûrement mais ça ne sera pas notre priorité, nous devons surtout nous concentrer sur leur potentiel militaire. Est-ce compris ? »

J'attendais un signe de leur part, certains semblaient déjà un peu plus motivés et j'en étais content. Après quelques hochements de tête, je pris à nouveau la parole.

«  Je demande à chacun de vous de me prêter sa force, gagnons cette guerre, récupérons le chef de clan et montrons au monde que Suna peut être aussi rayonnant que jadis. Le sang coulera, certains d'entre nous n'auront sûrement pas le plaisir de revoir leurs proches mais au moins, nous nous serons battus pour notre patrie et nos convictions. »

J'esquissai un sourire à mon élève Ruri, elle qui comprenait très bien le sens du mot « honneur » devait me comprendre. Je fis de même pour mon partenaire le Yamada, certains mots lui étaient destinés, il ne devait pas perdre espoir. Ema faisait aussi partie de mes plans, elle pouvait même être une pièce maîtresse. Je continuais pendant quelques minutes avant de mettre fin à la réunion. Je fis alors un signe de la main droite à Kazushi. Je devais sérieusement lui parler. Une fois la salle vidée -Lenka compris- je décidai de parler sérieusement à mon élève.

«  Kazushi, je vais avoir besoin de tes talents. Konoha n'est pas la seule menace et comme l'histoire nous l'a prouvé, en nos murs résident des parasites. Et en principe, on éradique les parasites. »

Le message étant passé, il prit lui aussi la porte.

Journée au Kakumeigun, à bosser, la routine. Mais une routine un peu changée, voire agitée, depuis les dernières menaces et annonces de guerre entre notre village et celui de la feuille. Enfin, annonce officielle ou pas, l'enlèvement de mon père et les actes de notre Kazekage avaient parlé d'eux-même. Et sincèrement, je ne comprenais pas où voulait en venir mon sensei dans tout ça, car lui avait toujours soutenu l'idée de paix. Du coup, l'approche empirique me faisait dire que chaque personne atteignant le poste si glorifiant de Kage du village se faisait pousser des envie de conflit ou de guerre, peu importe les formes qu'elles prenaient. Finalement, pour ma part, Yamada Kioshi avait été un bon parti au nom de la paix, malgré sa réputation. Ce n'était pas mon lien de parenté qui me faisait dire ça.

Cette journée était bouleversée, ou mise en pause plutôt, par notre supérieur Toshiro Ogami qui nous réunissait pour faire un point. Sûrement avait-il de belles paroles, des directives ou quelques annonces à nous faire. J'étais moi-même debout les bras croisés, entre plusieurs têtes de mes camarades, j'en dépassais même certains à cause mon assez grande taille.
Blabla nous étions l'élite du village, grand bien me face, car je ne me voyais pas comme tel. Mais si ça pouvait en encourager d'autres c'était bien dit. Moi, je restais stoïque, j'écoutais. Même pour les procédures, je prenais sur moi pour ne pas m'ennuyer. Cela faisait un an que je travaillais sur ma nature d'ennuyé à toute épreuve, pour la contrôler au moins en public. Au Kakumeigun encore plus, c'était l'environnement où il fallait se montrer le plus sérieux et le plus professionnel pour un shinobi de Suna. Il n'y avait pas de place pour des signes qui montraient ma flemme ou autre. Parce qu'au départ on m'avait un peu critiqué là dessus. J'avais d'abord emmerdé le collègue qui m'en avait fait la remarque jadis, mais j'avais compris.

On attaqua le sujet du chef Yamada, mon père. J'étais bien heureux qu'Ogami ne précise pas aux autres que le chef remplaçant du clan se trouvait dans la pièce avec eux : c'était moi. Quand la vie vous prenait un truc, parfois vous vous retrouviez quelque part sans le vouloir, avec des responsabilités que vous auriez bien laissé le plus loin possible. Aujourd'hui, je me trouvais en plein dedans. C'est moi qui avait la tête d'un groupe qui se considérait comme une grande famille. Et c'était bien pour ça qu'ils n'avaient pas bronché sous les conseils de l'ancien pour que le fils d'Arashi prenne le relais en attendant la régularisation de la situation. Une famille. Nul doute que dans des clans plus durs et plus autoritaires cela ne se serait pas passé de cette manière.

Je tiquais un peu en entendant l'idée d'une infiltration de Konoha et de la formation d'une équipe spécialisée dans ce but. Pareil à l'évocation de Konoha en tant qu'ennemi. Mais c'était la réalité : abandon lors de l'examen chûnin, enlèvement de mon plus proche parent, ils ne méritaient plus la sympathie que j'avais voulu leur témoigner pendant l'examen chûnin. Sans compter que c'était ce village qui m'avait pris ma mère lors d'une guerre passée. D'ailleurs, je me demandais qui avait bien pu venir à bout de mon père et s'il avait été seul ou s'ils s'y étaient mis à plusieurs. J'espérais le leur faire payer un jour ou l'autre. Il était vrai que j'étais rancunier pour certaines choses, et un peu revanchard. Je n'aimais pas qu'on se joue de moi, ni qu'on s'en prenne à moi de manière directe ou indirecte alors... Les futures opérations avaient intérêt à être bien menées me disais-je en écoutant mon camarade parler.

Le sang coulera, et des gens ne reverront pas leurs proches en effet. Moi j'allais sûrement devoir affronter ma propre aimée un jour ou l'autre. Chaque guerre était une blague. Quand la réunion se termina et qu'Ogami n'avait plus rien à dire à l'ensemble du groupe, je choppais son regard et lui fis un signe de tête témoignant de mon respect et mon amitié. Puis je m'en allais reprendre le boulot comme les autres. Je refusais cette situation mais il fallait l'accepter.

Je n'ai pas grand-chose de prévu aujourd'hui, si ce n'est une séance avec le chef du Kakumeigun et tous les autres. Depuis que la guerre a commencé avec Suna, il règne une ambiance gênante à Suna, personne n'a oublié l'attaque qui a eu lieu lors de l'examen chûnin, encore moins l'abandon de nos "amis" de Konoha. Je ne sais pas comment je réagirais dans une telle situation, face à une personne que j'ai déjà côtoyé par le passé, mais à mon avis, Suna passerait avant tout. La force et la sécurité de Kaze, Suna et ses habitants est tout pour moi. Bien sûr, Ruri est aussi pour moi quelqu'un de très importante, il n'y a encore rien d'officiel, mais j'ai bon espoir. Au moins, j'ai la chance de ne pas devoir me battre face à mon aimée, pas comme mon compagnon du Kakumeigun, Yamada Tetsui, qui en plus, son père a été kidnappé par nos ennemis à tous.

Il est l'heure de me rendre au quartier général des forces spéciales Sunajines afin de ne pas être en retard. J'arrive enfin sur place et découvre un Ogami, occuper à préparer son discours ainsi que quelques têtes connues, je repère rapidement celle de Ruri avant d'aller m'asseoir à côté d'elle.

"Bonjour, Ruri, comment vas-tu ?"

Ne pas paraître trop amical, nous sommes ici au travail et personne ne se doute de rien, si ce n'est peut-être Ogami. En parlant du Toshiro, celui-ci nous salue tous comme à son habitude en baissant légèrement le torse avant de s'asseoir à son bureau. Guerre, Konoha, fierté, enlèvements, honneur, tous ces mots résument assez bien le discours du Bras-Droit du Kage. Le jeune homme continua de parler tout en nous présentant quelques idées de plans et de groupes afin de faire des opérations face à Konoha et j'écoute donc attentivement tout ce que celui-ci a à dire. Il termine son discours assez rapidement et, comme tout le monde j'allais m'en aller lorsque j'ai pu remarquer qu'Ogami m'appelait. Je salue brièvement Ruri avant de rejoindre le Toshiro à son bureau.

"Bonne fin de journée Ruri !" Lui glissais-je juste avant de prendre la direction d'Ogami.

Lorsque je me suis retrouvé face à lui, celui-ci attendit que la salle ce vide avant de prendre un air sérieux et de me dire que la guerre ne se fait pas uniquement à l'extérieur, mais aussi intestine. Que les parasites qui fourmillent à Suna et Kaze doivent être éliminés. Il ne m'en fallait pas plus pour que je comprenne quel serait mon rôle dans les jours à venir.

"Bien, j'attends tes ordres."

Ce sont les seuls mots que je lançais-je à mon ami. Il n'a pas tourné autour du pot, je ne vais pas le faire. J'ai baissé le torse légèrement afin de la saluer avant de me retourner pour prendre la porte, comme tous mes camarades précédemment.

Une année s'était écoulée depuis ma promotion. J'étais devenue Chûnin, mais pas seulement. J'avais l'impression que cette année s'était écoulée à toute vitesse. Beaucoup de changements s'étaient produits dans ma vie, et en même temps pas beaucoup. C'était assez paradoxal. J'avais l'impression de pouvoir dresser une liste de tous ces changements, mais quand j'y pensais plus précisément, il n'y avait pas énormément de choses qui me venaient à l'esprit.

Premièrement, j'étais toujours muette. Je me débrouillais de mieux en mieux pour communiquer avec les autres, mais de la même manière, l'absence de parole me faisait de plus en plus défaut. J'avais beau essayer ; rien. Avais-je réellement envie de parler ? Peut-être pas. Ce serait tellement plus facile... Et en même temps une épreuve insurmontable pour moi.

Deuxièmement, j'avais fini ma deuxième Marionnette. Une araignée, immense, dont j'étais assez fière. Elle m'avait demandé énormément de travail et de matériaux, mais elle m'apportait assez d'opportunités pour que cela vaille le coup. J'arrivais également à manipuler les deux en même temps, ce qui demandait beaucoup de concentration pour les faire se mouvoir individuellement.

Troisièmement, je m'étais fixé un nouveau but : gravir les échelons de la Confrérie. Rien de plus évident, étant donné que je baignais dedans depuis toute petite. J'étais actuellement Prestidigitatrice, mais j'aspirais à monter beaucoup plus haut. Devenir la seconde de Nigure Shinda, notre Souffleur.

Quatrièmement... mes relations sociales n'avaient pas vraiment évolué. J'étais toujours dans l'équipe d'Ogami, je ne m'étais pas fait de grands amis. J'étais plus ou moins engagée dans une relation secrète et platonique avec Kazushi. Il avait compris que s'il me voulait vraiment, il devrait se préparer à attendre. Et la situation semblait lui convenir. Physiquement, je ressemblais de plus en plus à une femme et moins à une enfant. Des formes féminines s'étaient développées et je laissais mes cheveux pousser. Une façon comme une autre de marquer un changement.

Et dernièrement, ce qui valait ma présence dans cette salle... J'étais entrée dans l'unité d'élite de Suna : le Kakumeigun. Qui était dirigée par mon sensei, Toshiro Ogami. Kazushi se trouvait là lui aussi, accepté quelques mois avant moi dans l'organisation. Je reconnaissais Yamada Tetsui, avec qui j'avais fait une mission il y a longtemps. Les autres visages me devenaient petit à petit familiers. La femme du Kazekage était aussi présente, mais nous n'avions pas encore eu l'occasion de faire connaissance.

La création de cette liste mentale avait fait que je n'avais écouté le discours d'Ogami qu'à moitié. Un discours plein de fierté, honneur, courage, comme à son habitude. Kazushi, - qui se trouvait assis à côté de moi -, se leva d'un bond, ce qui me fit sortir de mes pensées. Je le saluais également avant de sortir, non sans remarquer qu'il allait s'entretenir en privé avec le chef du Kakumeigun.