Soupirant délicatement, le Mamoru adressa un maigre au revoir à son jeune Maître avant de se diriger vers la Voie Illusionnée. Une mission avec une équipe – ce n’était pas quelque chose qui l’enchantait particulièrement, mais il savait faire avec. Laisser Akihito seul et être à distance de lui, ce n’était pas habituel. Pourtant, tous les deux savaient très bien à quel point il était important pour le Garde de s’intégrer au village du Sable et de participer de façon active à sa vie. De toute façon… Kiara continuerait de garder un œil sur le noble : la seule chose qui changeait, c’était que le médium n’était plus capable de fendre la distance qui les séparait, et donc d’intervenir. Il secoua calmement la tête. Il n’avait pas le droit de se préoccuper de telles choses alors qu’il partait en mission, car ce ne serait qu’un échec profond de sa part. Il inspira, expira et inspira de nouveau, continuant son trajet. A ses côtés, les quatre cardinaux s’assuraient qu’aucun des esprits persistant dans la région ne vienne le déranger – il y en avait toujours autant, malgré tous les efforts qu’il mettait à apaiser les âmes du village. C’était… Il ne voulait pas y penser. Des drames de cette envergure n’étaient, heureusement, pas monnaie courante – cette pensée lui suffisait pour pouvoir continuer d’espérer.

Sur le lieu du rendez-vous, trois personnes attendaient déjà – parmi elles, Ema qu’il avait déjà eu le plaisir de rencontrer. C’était peu, mais ça mettait le Mamoru en confiance : elle connaissait à peu de choses près l’étendue de son art, et la logique voulait qu’elle soit la Chûnin responsable de l’équipe. Du moins, les informations qu’on lui avait fait parvenir allaient dans ce sens. La bonne personne au bon endroit : il l’espérait du moins. Accélérant légèrement la cadence, il arriva au niveau des deux autres, juste à temps pour les entendre parler. Ils n’avaient pas probablement pas remarqués sa présence, pris dans leurs présentations. Vingt-deux et Dix-neuf ans. Akio était donc le plus âgé de l’équipe. Serrant son poing, il s’empêcha de jurer. Si ce n’est pour les blessures et la fatigue de son corps, il n’aurait peut-être pas perdu sa puissance d’antan. Celle qui lui permettait de s’assurer que son jeune Maître demeurait en sécurité. Il soupira délicatement, attirant l’attention sur lui sans même le vouloir – au loin, Sei lui adressa un petit sourire moqueur.

Il ne pouvait pas se permettre de se remémorer le passé et le regretter. Combien d’esprits s’étaient perdus dans la folie, refusant de comprendre qu’ils étaient morts ? Combien d’autres se sont rendus prisonnier d’un monde qui n’était pas le leur par le regret et le souvenir ? Ce n’était pas un avenir qu’il voulait connaître. Non. C’était même une chose qu’il ne voulait laisser personne connaître. Il n’y avait… Se rendant compte qu’on le fixait, il se racla délicatement la gorge.

« Bonjour. Je… Je m’appelle Konokose Akio. Je suis également un Genin du Sable et… Me semble-t-il… »

Il chercha le regard d’Ema avec le sien, comme pour se redonner du courage. On avait beau ne pas y croire, le brun n’aimait pas parler – ses pensées suffisaient pour rester en contact avec l’au-delà, donc l’intérêt des mots… Sa lame lui suffisait à protéger celui pour lequel il donnerait sa vie sans hésiter. Les mots étaient l’arme d’Akihito.

« Je suis le dernier membre de cette équipe. »

Sur ses mots, il se redressa pour donner un peu de consistance à ses propos. Ses quatre acolytes démoniaques avaient les yeux rivés sur lui, curieux de voir comment il comptait se débrouiller cette fois-ci. La voix basanée et quelque peu absente du Mamoru creusait l’écart qu’il avait déjà avec son équipe, ne serait-ce qu’en terme d’âge – pourtant, il n’y prêtait guère attention et espérait ne pas être retenu comme tel. Il avait juste besoin de se concentrer pour éviter les problèmes de la dernière fois...

Silencieux et dressé, Akio écouta calmement la réponse de la Chûnin. Qu’on l’appelle Ema. Ce serait… Tellement étrange. Comme s’il lui était permis d’appeler Akihito par son prénom. Il ne pouvait se le permettre et, ne voyant aucune obligation dans le ton de la jeune femme, il décida pour lui-même qu’il garderait la politesse qui était de mise. Il n’était qu’une arme. Un objet au service du Jeune Maître – par la même, il devait le respect à tout le monde. Néanmoins, par simple mesure de politesse, il acquiesça aux mots de la dirigeante. Non – il s’autorisa même un très discret sourire lorsqu’elle leur souhaita la bienvenue à tous les trois. C’était un arrangement qui convenait parfaitement au Mamoru : savoir qu’elle était consciente de ses capacités l’assurait qu’elle serait en mesure de l’utiliser à bon escient, combien même le jeu serait différent qu’avec son Noble. D’habitude, il ne faisait que réagir de façon spontanée, s’arrêtant tout juste lorsqu’on le lui ordonnait – là, il lui était demandé d’obéir avant toute chose. Rin siffla de façon insolente lorsqu’il pensa ces quelques mots, lui montrant clairement à quel point elle désapprouvait ces nouvelles règles. Décidément, aujourd’hui il serait difficile de compter sur l’Oni. Continuant d’écouter ce que disait la fille aux cheveux violet, Akio se concentra sur lui-même une fraction de seconde.

*Rei, Mei, Sei, Kei ! Une fois dans le désert, laissez les âmes s’approcher de moi une à une… J’espère qu’il n’y en aura pas beaucoup et… Elles pourraient nous aider à trouver ces personnes.*

A sa façon, chacun des cardinaux lui fit comprendre qu’il était d’accord. C’était encore l’utilisation la plus sage qu’il pouvait faire de ses dons. Sans trop attendre, la responsable du Centre s’élança en avant – c’était d’une évidence cruelle qu’il convenait de la suivre. D’un geste le plus discret possible, le médium appela Kei, le messager du sud, à ses doigts et l’apposa sur son torse, laissant le démon prendre place confortablement dans son corps. Il ne pouvait garder la technique active pendant trop longtemps et – surtout – il ne comptait pas utiliser tout son Chakra dans le déplacement, aussi n’utilisa-t-il son compagnon violet que pour égaliser la vitesse de la Chûnin. Il était plus grand et plus entraîné au corps à corps qu’elle, visiblement, car il arrivait à la suivre en tête du cortège sans aucun problème.

Furent-ils à peine fait quelques distances dans le désert que la première âme fut alloué à sa présence par le biais des cardinaux. Tournant légèrement sa tête, il adressa son regard inerte vers le vieillard devant lui – il ne faisait que demander de l’eau, encore et encore. C’était certainement une victime du désert, mais ce n’en était pas moins cruel – sans cesse, il appelait ses petits enfants qui avaient certainement abandonné le fardeau âgé. Fermant les yeux et retenant une larme devant une telle intransigeance vis-à-vis de la sagesse, Akio secoua la tête. En l’espace d’un instant, l’âme se dématérialisa en la petite flamme qui continuait à prier tous les vivants passant par-là, mais inconscients de sa présence. Tournant calmement sa tête plus encore pour ne pas croiser le regard de la Chûnin, le brun regarda derrière lui pour s’assurer de la présence de ses compagnons d’armes.

« Akio… Il y… Droite. Âmes… Fuient. »

Sans hésiter un seul instant, Akio s’arrêta net dans son mouvement, s’attirant l’attention du trio.

« Je… Il se passe quelque chose… A notre droite. Je pense. »

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Silencieux et taciturne, Akio observait soigneusement son entourage en analysant calmement les mouvements de ses coéquipiers tout en écoutant les mots de la Chûnin. Il était pleinement conscient qu’il ne pourrait aider tous les esprits présents en ces lieux – pourtant, voir des âmes fuir n’était jamais de bon augure dans sa confession spirituelle. L’intégralité des habitants de son collier de Jade restait tout aussi stoïque que lui, attendant patiemment les âmes qui, selon l’observateur céleste, se dirigeaient vers eux. Il était le seul à pouvoir les voir. Le seul à pouvoir interagir avec elles. Pourquoi… Un léger frisson traversa son corps devant une vague calme et insidieuse d’inconfort se propageant dans ce dernier. Ces âmes n’étaient pas sereines, et nombreuses ou particulièrement puissantes. Que leurs sensations les atteignent avant même d’arriver. Un inconfort suffisant pour que Tsuchi tente de sortir de son collier, même si ça n’arrangeait guère le spiritualiste. L’esprit de la terre était dépendant de son Chakra pour sa maturité mentale, et s’il sortait de façon spontanée… Il était bien le seul à avoir le pouvoir de se matérialiser, tant qu’Akio restait en contact avec la terre.

Hochant négativement la tête à la question de la Chûnin, il lui adressa un maigre sourire qu’il voulait plein de réconfort, combien même l’effet n’y était pas. Sueurs et pâleur l’envahissaient déjà et le Mamoru cligna des yeux à trois reprises afin de se redonner de la solidité. En l’espace d’un instant, Rin et Kruo jaillirent aider les Cardinaux dans l’assistance portée, lui permettant de récupérer un peu de son état physique. Un esprit ne pouvait blesser un vivant. Un démon, par contre… Le brun avala sa salive, adressant un regard discret à l’ensemble de son équipe rassemblée dans son dos.

*Qu’est ce qui… Un tel désarroi…*

Kruo siffla délicatement, se tournant vers lui et partageant la douleur de son ami. Dire qu’en l’espace de quelques coups, Rin et lui pourraient libérer cette zone de… Faisant volteface à Droite, Akio avança calmement avec toute l’assurance qu’il pouvait rassembler en lui – trois pas furent suffisant pour que la première de la ruée se manifeste à lui, et ce fut la seule que sa garde laissa passer. C’était… Sa gorge se serra.

« Toi… Tu peux me… Sauve-les. Sauve-les tous… Le sable… Les dieux nous ont laissé… Mourir. A l’aide… A l’aide… Suna ! Suna ! Ceci est un… Signal de… Nous… Mourir… Sauver les… Survivants… »

Avant qu’il n’ait eu temps de réagir, l’âme s’évapora devant lui devant son regard chargé de larmes. Il était le seul à avoir entendu la lamentation de l’indigène du vent. Le seul à… Il se tourna rapidement vers son équipe.

« Je ne peux pas… Expliquer. Mais… J’ai l’intime certitude que nous devons aller par là. Il y a des survivants. J’espère… »

Difficile équilibre – entre cacher ce qu’il est et faire ce qu’il doit… Il en avait certainement trop dit, une fois de plus. Ce comportement lui coûtera la vie un jour et il le savait – tant que celle d’Akihito était sauve, de toute façon, cela lui important peu. Devant eux, jonchant la voie entière, ne se trouvait rien d’autres qu’un cimetière. Un amas de corps, jonchant et enfouis dans le sable, dont les âmes appelaient aux offices funèbres. Ils ont tous échoué à fuir. Les anciens, les enfants et les femmes… Il ne voulait pas… Il secoua la tête et se tourna une fois de plus vers les membres de son équipe.

« C’est survenue en l’espace d’un éclair… S’il vous plaît ! Allons-y. »

Il connaissait ces méthodes. C’était tellement… Proche de ce qu’il se passait de temps en temps dans son pays natal. Une souffrance contre laquelle son sabre avait déjà lutté. Des âmes desséchées, malades même dans la mort – il n’y avait que… Il tuerait ces monstres s’il les trouve. Leur âme sera le repas que Rin désire tant, et Akio était résolu à en découdre. Juste… Il ne pouvait le faire seul.

« Des nomades. J’ignore la tribu. Des bandits ont… Empoisonné leur eau. Beaucoup sont morts en fuyant vers Suna après avoir émis le message de détresse. J’ignore ce que nous trouverons sur place, mais c’est un cimetière de corps enfouis sous le sable qui nous sépare là-bas. Croyez-moi… Aidez-moi à faire châtiment… A faire… Justice. »

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