Trouver des gens pour Kiri, trouver des gens pour Kiri. Il en a de belles lui. Ce n’est pas facile du tout, de motiver la populace pour un projet aussi vaste que bancal, qu’est la reconstruction du village caché de la pluie. Bancal oui parce que ça plus l’air d’un rêve que d’un véritable projet. Mais pour autant, c’est notre foyer, notre chez nous, c’est notre devoir que de rebâtir ce qui a été balayé autrefois. D’aider le phénix à renaître. C’est aussi ce qu’aurait voulu ma mère, que j’ai enfin un endroit où me poser, ou vivre en paix. Ça avait bien commencé avec le Shoraizen, et puis l’autre poufiasse a tout foutu en l’air … Cette fois ce ne sera pas la même, certainement pas !
Tous les Kaguya en état de travailler avaient rejoint les troupes du Shukaï dans la reconstruction. Beaucoup voyaient cela d’un mauvais œil, moi aussi je dois bien l’avouer, et pour les rassurer il a fallu leur promettre qu’ils ne rejoindront jamais l’Empire, sauf s’ils le désirent eux-mêmes. Que ce n’était pas parce qu’ils œuvraient ensemble qu’ils étaient dans le même camp. Au moins ils ne tournaient plus en rond, à passer leurs nerfs à se battre entre eux, et les familles avaient un logement. Bon ce ne sont que des tentes encore, et en plus aux couleurs du Shukaï mais c’est mieux que rester cloitrer dans une grotte. Ainsi ils peuvent voir le soleil !

Bon et du coup maintenant il nous faut des alliés. Hum, je pourrais aller proposer à Yuki, elle avait l’air de tenir énormément à cet archipel aussi. Ou alors à Tsukiko, de quoi lui offrir à elle aussi un foyer où on ne voudra pas sa mort. Ni que l’on passe notre temps à la rabaisser pour ses erreurs passées. Ce serait comme un nouveau départ ! Mais comment la trouver ? La dernière fois qu’on s’est vu, c’était à Konoha. Mais depuis elle peut être n’importe où, et partir faire une chasse à l’homme – ou une chasse à la femme en l’occurrence – c’est chose impossible pour le moment. Il va falloir se débrouiller avec ce qu’on a sous la main, comme bien souvent.
Enfin je ressortais de ce tunnel ! Il est vachement long en fait. C’est le dernier encore en état qui permet d’accéder à Kiri. Et il se termine sur un petit patelin d’une dizaine de maison tout au plus. Trop petit pour avoir un nom sur une carte certainement. Peut-être qu’autre fois c’était le même genre de ville que ce que l’on avait au Shoraizen, une ville de passage pour acheminer la nourriture, le matériel, le commerce quoi ; tout en restant discret.
Mais maintenant ça a l’air complètement abandonné. Pas une âme en vue. Ah si ! Un homme là-bas qui frappe à la porte d’une maison. C’est sans doute le facteur. Quoi que … attendez, il rentre étrangement vite pour un facteur. Et la personne qui lui a ouvert ? Hum, approchons-nous. Et sur la pointe des pieds s’il vous plait !

Le temps d’arriver et je jetai un coup d’œil discret à travers l’une des fenêtres du rez-de-chaussée. Cela donnait sur un salon, l’homme était de dos et on dirait qu’une personne de petite taille lui faisait face. Mais difficile d’en savoir plus jusqu’à ce que cette dernière ne s’effondre au sol. Je restai stupéfaite, immobile pendant que le présumé assassin allait s’installer comme si de rien n’était, dans le canapé de la propriétaire des lieux. Une femme âgée semble-t-il. N’écoutant que mon courage, ou ma stupidité ça dépend du point de vue, j’accourrai devant la porte et donnai un puissant coup de pied dedans. Celle-ci vola à travers la pièce pour s’écraser sur le mur d’en-face, de l’autre côté du fameux canapé.

« Woh woh woh woooh ! Qu’est-ce tu branles mec !? Ça va pas la tête ?! » Lui hurlai-je avant de me précipiter sur la vieille dame. Plus de pouls, la température de son corps était glaciale, comme si elle était morte de froid. Pourtant il faisait plutôt bon ici. « Qu’est-ce que tu lui a fait ? Et pourquoi surtout ? Accouches ou je t’en colle une de suite ! »

Je refaisais face à cet homme que j’avais pris pour un facteur il y a peu. Des cheveux bleus, une peau claire, un air de délinquant sous des vêtements sombres. Si ça se trouve je fais totalement fausse route mais bon, il y a quand même énormément de faits accusateurs. Pourquoi maintenant, pourquoi alors qu’on s’évertue à rebâtir une ville entièrement ? Bon sang ce sont des alliés que je veux, pas des problèmes.

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L’homme prit la parole d’une voix calme, comme la présence d’un cadavre à ses pieds ne lui posait pas le moindre problème. Rien qu’avec ça, il y a un truc qui cloche. Soit il est complètement dérangé, soit il a tout du vrai psychopathe. Et dans ce dernier cas, la prudence voudrait que je file d’ici en vitesse.
Hum, en l’écoutant il semble en fait que ce soit un peu des deux. Il serait question d’un dédoublement de personnalité, avec un côté gentil et un côté méchant. Que selon lui, le méchant est resté trop longtemps caché et que du coup il ne contrôle pas sa méchante gratuite.
Au fur et à mesure de sa tirade, mon sourcil droit se fronçait quelque peu tandis que son voisin prenait de la hauteur. Le genre d’expression que l’on a lorsque l’on est face à quelque chose de bizarre, d’étrange.
Et il continua de parler et de parler, et de parler. Bla bla bla … Je revins aux côtés de la vielle dame et essayai de la ranimer avec un massage cardiaque. Je n’y connais rien en premier secours mais peut-être que ce sera utile quand même.

« … Et le mal en cette personne prend une telle proportion, que le concerné ne peut la renier, et devient la victime de ses propres actes … » Continua l’assassin, à présent de nouveau assit dans le canapé.

Il aime se donner un genre ce type ce n’est pas possible. Et en plus il cherche à se voiler la face, quel lâche. La conclusion de ce monologue arriva finalement, mais n’ajouta rien de nouveau. Selon lui ils seraient deux en lui, la partie maléfique aurait tué cette pauvre femme, alors que j’avais devant moi la partie bénéfique.
Je passai la main au-dessus des lèvres de la dame, pas un souffle, et toujours pas de pouls. C’est donc définitivement foutu pour elle. Je me redressai, faisant face à l’interlocuteur toujours aussi calme.

« Ça n’a aucun sens. Absolument aucun sens. Une histoire tirée par les cheveux ! Tu ne vois pas que tu viens de tuer quelqu’un ?! » Je lui montrai le corps comme il venait de le faire juste avant pour illustrer ses propos. « Tuer ! C’est fini pour elle. Foutu ! Tu percutes ? Elle ne se relèvera pas là, hein ! C’est pas un jeu. J’en ai rien à foutre que tu cherches à te sauver les miches en prétextant que ce n’était pas de ta volonté ! C’est son sang que tu as sur les mains ! Je t’ai vue, pas la peine de nier ! P’tit con ! »

Ça y est je m’emballe. Un fichu défaut ça, qui m’obligeai à me taire un moment et à souffler. En plus la vue de ce corps, brr … cachons ça. Mais attention, toujours garder un œil sur le type, c’est pas comme si l’on pouvait le sous-estimer. S’il est capable de tuer quelqu’un de sang-froid, en restant aussi calme c’est bien qu’il faut grandement s’en méfier.
D’une main j’attrapai la nappe étalée sur la table de la salle à manger, juste derrière le canapé, et revint couvrir le cadavre avec. Bien, là au moins c’est déjà mieux. Revenons à nos moutons.

« Va falloir que tu t’expliques mieux que ça. Parce que dire non c’est pas ma faute, c’est lui. C’est une preuve de lâcheté ! C’est ça tu es un lâche ! Un sale morveux même pas capable d’assumer ses propres conneries ! D’ailleurs qu’est-ce que tu fous ici ? »

Une idée venait de me traverser l’esprit. Une idée folle certainement mais s’il se repentit, s’il présente des excuses à cette pauvre femme, il y a moyen d’en faire quelque chose. Après tout, Kiri a besoin de main d’œuvre. A défaut de trouver un allié, je pourrais voir en lui un masson, un bâtisseur qui se rachèterait en travaillant. Mais bon ça c’est pour plus tard, et seulement sous pas mal de conditions.

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L’encapuchonné s’était levé lentement pour se rassoir à nouveau mais non plus sur le canapé, plutôt sur l’une des chaises du salon. Vraiment très bizarre ce type. C’est vraiment à croire qu’il n’est effectivement pas tout seul dans sa tête. Serrant son poing, il explosa la table qu’il avait à portée, faisant voler quelques débris ici et là. Bizarre, colérique, instable, bipolaire, il les collectionne dites donc !
Je le regardai en silence, hésitant entre le soupire de lassitude et l’interrogation profonde. Il prit une voix bégayante et instable pour m’ordonner de ne pas lui parler comme ça. Qu’il n’était pas celui que je croyais …
Finalement ouais ce ne serait même pas une bonne idée que de l’avoir pour reconstruire Kiri. Même pas en tant que maçon. Ce serait un coup à se retrouver avec une rébellion sur les bras, avec les ouvriers qui gueuleront « Pas content ! Pas content ! », qui demanderont de ne travailler que trente-cinq heures par semaine et à avoir en plus des jours de congés. Donc nan, pas une bonne idée. Ah, il se relève maintenant. Est-ce qu’il a fini son caprice ?

Je jetai un coup d’œil par la fenêtre, et la porte aussi puisqu’elle n’existait même plus. A l’extérieur, les villageois avaient entendu le vacarme et commençaient à s’approcher, comme des curieux aux airs de charognards. Les gens sont toujours comme ça, quand il y a quelque chose de nouveau, il ne faut jamais longtemps pour qu’un public se forme. Ce qui pourrait être embêtant s’ils continuent de s’approcher, avec l’autre tordu en capuche.
Ce dernier prit la parole, répondant partiellement à ma question sur sa présence ici. Selon lui il n’y avait pas de raison, tout n’était que guidé par le destin. Comme quoi c’était son destin d’être ici maintenant, et que c’était le destin de cette femme que de mourir ainsi. Quelle ignoble façon de se laver les mains de ses péchés.

« N’as-tu jamais tué ? Je suis persuadé que tu as déjà tué. » Me demanda-t-il.

« Si, bien entendu. Beaucoup de sanglier, de biche, de lapin aussi. C’est tellement bon le lapin, mariné dans une petite sauce aux champignons, avec des pommes de terre cuites au feu de bois. Mmmh, un délice. Mais non, je n’ai jamais tuée le moindre être humain. Jamais. »

J’hésitai à rajouter que moi j’étais encore vierge de tout assassinat. Encore pure. Mais il aurait pu le prendre mal. A la place, je l’observai créer d’un mouvement de bras un mur de glace dans l’entrebâillement de la porte. Un Samui ? Comme Yuki ? Ils se connaissent peut-être. Il ne devrait pas y avoir tout à jeter chez lui dans ce cas.
Il demanda ensuite si on allait pouvoir parler calmement ou s’il fallait s’énerver. Il menaça même de s’en prendre aux autres habitants si cela devait arriver.

« Même pas en rêve mon grand. Ces gens sont sous ma protection à partir de maintenant. Si tu veux te défouler va faire ça à Kumo, ils ont pleins de têtes à claques prêtes à s’en prendre plein les dents. »

Toujours cette même rengaine contre le pays de la feuille et celui de la foudre, depuis la chute du Shoraizen. Et il y a de très fortes chances pour que ça dure encore un bon moment. Cela dit, si j’envoie un détraqué à Konoha, il serait capable de s’en prendre à Yusei ou Nozomi. Alors qu’à Kumo, je ne connais personne, donc pas de problème.

« Tu es un Samui, c’est ça ? » Lui demandai-je en m’éloignant du cadavre pour aller m’adosser à côté de la fenêtre, c’était un peu trop déstabilisant pour moi. « J’ai connue une Samui l’an dernier, très sympathique et adulte. Tout l’inverse de toi en fait, à faire des caprices et à soi-disant suivre ce que ton destin a choisi pour toi. » Petite pause de soupire. « Bon, répond maintenant. Qu’est-ce que tu viens faire ici, d’où viens-tu et où vas-tu ? En fonction de ta réponse, je pourrais éventuellement t’emmener hors du village, loin des populations pour que tu continues ta vie d’assassin eskimo loin de Mizu no Kuni, loin de Kiri, loin de ma terre. »

Et j’étais très sérieuse dans ma démarche. Ce genre de type, il faut s’en débarrasser le plus rapidement possible, mais sans y aller trop fort sinon il pourrait se retourner contre nous. Délicatesse et tact. Deux mots qui me sont bien souvent étrangers.

Désormais, j’étais questionné sur mes origines. L’atmosphère restait tout de même pesante, mais la violence laissa place à la conversation. Je n’aimais pas réellement ce qui se passait. Quelque chose me retenait de me jeter à sa gorge et lui transpercer la trachée d’une glace éternelle. Elle semblait sure d’elle. Un charisme si imposant que même moi, le frère cadet du prestigieux Shodaime, ne puisse rien faire ? Je ne saurais le tolérer. Néanmoins je contenais toute cette violence qui sommeillait en moi dans l’unique but de lui répondre. Après tout, je n’avais rien à cacher. Je me mis assis à terre, adossé contre la paroi de la demeure tandis que je repliais l’une de mes jambes pour poser mon bras dessus. Sans même daigner la regarder, je commençais à lui donner ce qu’elle voulait.

« Je suis effectivement un Samui. A la fois le frère et le côté obscur du Shodaime Mizukage : Samui Mahan. Tu as donc connu une Samui, c’est très bien. Beaucoup sont différents de moi, pourtant beaucoup me ressemble. » Je m’arrêtai alors tandis que mon regard vint se poser sur elle. « Tu as donc jamais tué… Tu n’as jamais eu le sang d’une de tes victimes sur les mains… Je comprends mieux pourquoi tu réagis de la sorte… Tu n’as jamais eu le plaisir d’avoir ce liquide rouge sur toi, prouvant ta supériorité aux yeux de ton défunt adversaire… Je ne peux t’en vouloir. »

Je levai la main et l’abaissai légèrement tandis que le mur de glace qui avait remplacé l’ancienne porte commençait à disparaitre ne laissant qu’une flaque d’eau. Derrière elle, toujours autant de civil qui hésitèrent à rentrer. Il valait mieux pour eux qu’ils restent à l’extérieur, sinon ils subiraient le même sort que la vieille, qu’importe la réaction de mon interlocutrice. Néanmoins, je devais la renseigner sur un dernier point.

« Mes plans sont simple. Je recherche un dossier très important, et je souhaite la résurrection de Kiri. Je commençais à hésiter, et j’allais changer d’avis quant à la reconstruction du village… Mais finalement, je suis fixé. Je veux que Kiri renaisse de ses cendres, et j’arriverais – un jour – à atteindre le rang que mon défunt frère a atteint. Et dès lors, je ferais de Kiri, la plus grande puissance militaire – comme ce fut le cas jadis ! »

Serait-elle de mon côté ? Serait-elle contre moi ? Je n’en avais aucune idée. Une seule chose était claire dans mon esprit : qu’importe mes actes, je ne perdrais pas la vie aujourd’hui. Elle n’a jamais tué, et je ne serais pas le premier : j’en suis certain. Je me dirigeais à ses côtés, lentement… Il émanait de moi un tout autre flux, bien plus apaisant… On peut le dire clairement, j’agissais tel un ami. Une fois proche d’elle, je posais ma main lentement, tout en lui montrant que je ne comptais pas être menaçant… Ou du moins, je ne l’envisageais plus. Une lueur bleue jaillit de la paume de ma main qui était face à la table de chevet. Lorsque je relevais ma main, une rose de glace était là. Une tentative de drague ? Non. Une simple preuve de bonne volonté.

« Nous n’agissons pas pareil, mais je suis persuadé que nous trouverons – un jour – un terrain d’entente. » Je jetai un coup d’œil sur mon œuvre avant de reprendre. « Cette glace est éternelle. Gardes là sur toi. Je suis sûr qu’un jour nous allons nous recroiser. Ton discours sera alors différent. Considère ça comme une preuve de bonne foi. Je ne suis pas celui que tu crois. »

C’en était terminé. J’en avais terminé. Je passais à côté d’elle, frôlant son épaule avec la mienne, et je quittai la pièce sans même me retourner. A la sortie, un comité d’accueil remplit de civil faible munit de fourche et autre ustensile de jardinage en guise d’arme blanche. Je n’allais pas réagir comme je l’aurais fait il y a encore quelques heures. Je fermai les yeux tout en baissant le regard. J’avais pitié d’eux. L’envie de les envoyer dans l’autre monde était présente, bien sûr… Mais je préférais garder cette haine en moi, et lorsque le moment sera venu… Je la libérerais ! Il ne fallait en aucun cas que je sois le jouet de ces envies meurtrières… Au contraire, celle-ci allait être mon arme !

« Si j’étais vous, je baisserais les armes. La vieille est morte, cela sera suffisant pour aujourd’hui… »

C’est sur ces dernières paroles que je commençais à quitter le village… Est-ce qu’elle allait me rattraper, gueulant à son habitude pour avoir des infos ? Ou allait-elle simplement prendre cette rose de glace, et patienter notre prochaine rencontre qui était inéluctable ?

Le Samui s’assit à terre, l’air détaché de toute provocation, et répondit être le frère de Samui Mahan. Machinalement je fronçai levai les sourcils. Le premier Mizukage ? Ouah, avec ça je comprends qu’il ait besoin de frimer. L’héritage doit être lourd à porter. Autant que ce qu’a laissé Kaguya Tenzo à sa mort, une place de chef de clan vacante durant des années et un titre de kage en suspend.

« Tu as donc jamais tué … Tu n’as jamais eu le sang d’une de tes victimes sur les mains … Je comprends mieux pourquoi tu réagis de la sorte … Tu n’as jamais eu le plaisir d’avoir ce liquide rouge sur toi, prouvant ta supériorité aux yeux de ton défunt adversaire … Je ne peux t’en vouloir.

- Je préfère prouver que je suis la meilleure en laissant mes adversaires en vie, qu’ils voient de leurs propres yeux la différence et qu’ils s’avouent vaincus, autant physiquement que mentalement. Tuer son ennemi, sauf dans des cas bien précis, ça revient à ne pas valoir mieux que lui. »

Indirectement je le traitais de moins-que-rien, mais cela pouvait aussi sous-entendre qu’il avait la possibilité de choisir ses actes. De ne pas être esclave de ses pulsions meurtrières, et d’avoir plus d’importance qu’une simple machine à tuer. Après ça demande de la volonté, et ce n’est pas sur qu’il en ait beaucoup, au vu de son précédent discours sur le destin.
Un nouveau mouvement de bras et la porte de glace fondit presque instantanément, ne laissant au sol qu’une vaste flaque d’eau. Dehors les civils restaient à distance mais observaient toujours la maison. Tant qu’ils restent loin, normalement il ne devrait pas y avoir de problème. Mais restons aux aguets, il a déjà prouvé qu’il était bipolaire, une nouvelle crise et hop, un massacre est si vite arrivé.
Cependant il se contenta de reprendre la parole, et pour annoncer quelque chose de plutôt surprenant là encore. Monsieur devait trouver un dossier très important, et souhaitait la résurrection de Kiri. Tu commences mal mon gars, avec ce meurtre froid et sans pitié, sans mauvais jeu de mot s’il vous plait.

« Devenir Mizukage à ton tour ? Rien que ça ? Et bah mec, tu vas avoir de la concurrence. Je ne sais pas si t’es au courant mais le Shukai a prit possession de l’archipel, et c’est sous leur drapeau que Kiri sera reconstruite. Alors je doute franchement que l’empereur veuille en faire un camp de vacances pour son armée … »

Il faut bien l’avouer, savoir Kakeshou à la tête de tout ça, c’est une sacrée épine dans le pied. Et tant qu’il sera là, Kiri ne sera jamais vraiment Kiri mais plutôt un Shukai-bis. Il va falloir serres les dents, et les fesses. Attendre, recruter, se reconstruire et seulement ensuite on pourra réclamer notre indépendance.
L’esquimau se redressa et s’avança vers moi, d’un pas calme – le calme avant la tempête me dis-je – jusqu’à s’arrêter à une portée de bras. Tout sauf rassurée, je malaxais déjà mon chakra, les poings serrés et prêts à fracasser sa gueule d’ange. Quelle ne fut pas ma surprise quand il fit naitre une rose de glaces de la paume de sa main droite. Quel est ce nouveau stratagème ? Ça sent le piège à plein nez. Cependant il se contenta de me l’offrir, d’expliquer que cette glace était éternelle et qu’un jour nous trouverons un terrain d’entente.

« Garde-la sur toi. Je suis sûr qu’un jour nous allons nous recroiser. Ton discours sera alors différent. Considère ça comme une preuve de bonne foi. Je ne suis pas celui que tu crois.

- Bah voyons … » Fis-je en tournant la fleur gelée entre mes doigts.

Il faut tout de même avouer que c’est beau comme cadeau. Super louche mais beau. Une trentaine de centimètre de long en plus, c’est pas de la camelote. Il sortit ensuite de la maison, sans que je ne le quitte du regard. Je l’accompagnai même en restant à quelques mètres derrière lui, juste au cas où. Il annonçait à la population ne plus vouloir tuer aujourd’hui, bien. C’est déjà un début. Maintenant il faut ne plus tuer du tout. Enfin plus sauf en de très rares occasions, comme en légitime défense ou pour corriger une profonde injustice.

« Une seconde ! » Lui lançai-je alors qu’il quittait le village.

Sa fleur dans une main, je serrai l’autre et remuai les doigts avant de la rouvrir. Un anneau en os reposait dans ma paume. Pas de motif particulier, pas d’inscription, un simple anneau, tout ce qu’il y a de plus banal.

« Tiens attrape. Y a pas de raison que je sois la seule à devoir transporter un truc en plus. » Le petit bijou vola en cloche jusqu’à son destinataire. « Et comment tu t’appelles ? Moi c’est Milly. Fait gaffe à ne plus assassiner personne sur cet archipel, ou je viendrais en personne te botter le cul ! »

Après quoi, toujours en gardant un œil sur lui, je retournai auprès des villageois. Ces derniers ne comprenaient pas pourquoi je le laissais repartir après ce qu’il avait fait. Certains voulaient que je le tue pour venger la vieille, d’autres voulaient l’emprisonner et le faire souffrir. Pour simple réponse, toujours en train de faire rouler la rose entre mes doigts :

« Parce qu’un soldat qui fuit le combat et un soldat qui peut resservir. Ce type paiera pour ça, d’une façon ou d’une autre. Mais il faut d’abord qu’il comprenne la portée négative de son geste … Occupez-vous de la victime et faites votre deuil, je m’occupe de ce Samui. »

Le regard toujours pleins de défi en direction du concerné. Part l’esquimau, fait comme tes semblables, abandonne ta patrie pour rejoindre l’ennemi. C’est de toute manière ce qu’ont fait tous les Samui. Part et ne reviens jamais.