Ses mains étaient moites, son front était davantage ridé et ses yeux exprimaient une profonde tristesse. Elle sentait que la situation échappait entre ses mains, et davantage en se sachant la « fautive ». Elle n’avait guère été attentive aux activités des Shinobis ces dernières années, et maintenant, elle en payait le prix en travers d’une trahison cuisante et inattendue. Il y a peu, on avait attaqué sa personne dans son propre Palais suite à l’annonce d’un Empire et de sa destitution arbitraire de son poste de toujours de Daimio de Yuki no Kuni.

« Une trahison par les hommes et femmes qui avaient promis de les protéger … Quelle ironie » pensa-t-elle tristement, ne pouvant s’empêcher de s’inquiéter pour sa famille. Allait-elle bien ? Avait-elle été blessée ? Avait-elle subi des pertes ? Cette dernière perspective lui offrit un frisson sur toute son échine … Vieille et pourtant à l’aube de la plus grande crise de Yuki no Kuni … Si seulement elle avait été plus jeune, elle ne resterait pas sagement assise dans un tel lieu.

- Samui Kakeshuou, l’homme à qui j’ai confié la justice, l’homme issu d’un clan à qui j’ai offert asile sur nos terres, l’homme issu d’un clan à qui j’ai tout autant confié des postes clés comme conseillers à mes côtés ou petits seigneurs féodaux …

Des paroles qu’elle prononça calmement dès que le vieil homme entra dans la pièce. Son regard était dur vis-à-vis de cet homme, et très accusateur.

- Est-ce à moi de vous saluer tout en ployant genoux et échine ? demanda-t-elle plus par « ironie » que par réelle « sincérité ». Que se passe-t-il ?

Sa patience était à bout. Elle avait attendu la venue de cet homme plus que jamais, et peu de gens venait la voir ou la tenir au courant des derniers événements dans tout le Shukai. En effet, on l’avait « trainé » de son Palais à un lieu qu’elle ne saurait situer sur la Carte – entre les siestes ou les bandeaux sur les yeux, il était difficile de se situer.

- Attaquée dans ma propre demeure, traînée au loin comme un vulgaire chiffon mal propre, isolée des miens … Ce traitement honore le nouveau régime. Avez-vous d’autres usages à me communiquer, notamment par rapport au traitement fait ou réservé à ma famille, ou à mes amis ou à mes plus fidèles ?

Effectivement si « Empire », et si destitution de sa fonction de Seigneur Féodal, alors cela signifiait qu’il va y avoir du bruit et – plus important – de la résistance. Que se passait-il actuellement ? Défendait-on son honneur et nous à gorge déployée à leur risque et péril, ou complotaient-ils en secret ou alors patientaient-ils, se cachant, de peur ?

- Vous n’avez semé que la discorde et la peur et la colère en travers d’une profonde trahison à l’égard de plusieurs nations et individus, et vous ne récolterez que cela … En êtes-vous conscient ?

Etait-ce folie ou acte réfléchi, avec un but bien précis ? Il était temps de connaître qui était cet homme vraiment …

La vieille dame tiqua lorsque sa famille fut évoquée, et plus particulièrement sa seule et unique et adorée petite fille, Gin. L’idée qu’il puisse arriver malheur à ces membres, et surtout à la frêle jeune fille, la rendait folle de rage, malheureusement une rage qu’elle se devait contenir. Elle était à l’intérieur, il était à l’extérieur … et sa famille était à l’extérieur. Elle ne pouvait plus rien faire, si ce n’est écouter et comprendre le raisonnement du traître qui lui faisait face.

« Ma dame … Quel respect pour celle qu’il a voulu tuer … » se disait-elle. Ou plutôt celle qu’on venait de destituer de ses fonctions, et de sa vie. Qu’allait-elle devenir ? Allait-elle mourir aujourd’hui sous paroles de velours ? Allait-elle être confinée quelque part jusqu’à ce que ces vieux os gèlent ? Ou alors devait-elle adhérer à un plan terrible ?

- Qu’arrive-t-il à ma petite-fille ? finit-elle par demander d’une voix sèche et inquiète. Comment pouvait-elle s’être intégrée alors qu’on menaçait sa grand-mère ? C’était tout bonnement impensable, à moins que la notion d’intégration n’ait également changé avec la nomination de l’Empereur.

Un ninja, présent dans la pièce, s’absenta un court instant pour venir avec des boissons et mets délicieux. Qu’est-ce donc cette mascarade ? Etait-elle donc une petite fille qu’on pouvait tromper avec quelques sucreries et jolies cadeaux ? Peut-être pouvait-on tromper Gin, mais nullement Oge.

- Je n’ai guère d’appétit, finit-elle par dire, les traits amincis par le souci et les questions multiples sans réponse. Le bien du Shukaï … Tout tournerait donc autour du « Bien » du Shukaï ?

Un petit rire ironique résonna dans la pièce. Comment pouvait-on prétendre pour le bien d’un peuple sans l’avoir consulté au préalable ? Est-ce que le dit peuple désirait une monarchie ? Préférait-il un régime militaire, comme ces villages Shinobis ?

- Le bien du Shukaï aurait dû se décider en travers d’un Grand Conseil, réunissant tous les Capitaines et tous les Seigneurs Féodaux. Vous étiez notre bras armé, nos défenseurs, notre Justice. Nous vous avons fait confiance. J’ai accordé ma confiance à votre peuple en l’accueillant sur nos terres lors qu’il n’avait plus de toit ni terre et en offrant des postes au sein du Shukai ou même de mon humble conseil personne.

Elle se tut.

- Cependant, vous avez décidé du bien du Shukai par votre propre chef, et en destituant ceux qui vont donner le pouvoir de leur siège ! Si ce n’est pas de la trahison, Samui, dites-moi ce que c’est.

Les hommes avaient une vision vraiment décalée de la réalité, une fois au sommet du pouvoir. Est-ce que ce vieil homme s’était laissé leurrer par cette malheureuse distorsion, et se pensait-il Roi de tout ce monde ?

- Je suis tout ouïe. Je n’ai guère d’autre choix que d’écouter.