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Sombre. C’était le mot. Depuis combien de temps, étais-je dans cet état ? Je n’en savais rien. Ici, la notion de temps n’existait plus. Je ne savais même pas où j’étais, à vrai dire. Ailleurs, dans l’au-delà ? Ou bien, au plus profond de mon être... dans les profondeurs de mon âme. Si tel est le cas, alors l’obscurité y régnait... était-ce bien, ou mal ? Qu’importe. Là n’était pas ma principale préoccupation. Cette journée, cette mission... c’était difficile à le croire, mais en l’espace de si peu de temps, j’avais beaucoup perdu.

Seitô... si l’on m’avait dit que je te perdrais si tôt, je ne l’aurais pas cru. Pour moi, tu représentais beaucoup. Tu n’étais pas que mon maître ; tu n’étais pas que notre chef. Tu étais un modèle à suivre, un repère, un être que je rêvais, un jour, de surpasser. Plus que ça encore, tu étais comme un membre de ma famille. Un père pour nous tous, peut-être. Mais pour moi, tu étais comme un frère. Un grand-frère. Alors oui, tu n’étais sans doute pas la personne la plus affective, la plus simple à vivre. Tu m’en as fait voir de toutes les couleurs... des punitions les plus extrêmes, aux entraînements les plus farfelus. C’est ainsi que tu m’as formé. C’est dans cette voie que je t’ai suivi...

Faire le bien ? Le mal ? Quelle importance... mes idéaux étaient tout ce qui m’importait. Seitô, tu m'as montré la voie, et je l’ai suivi... jusqu’au bout. Je me suis toujours battu pour y parvenir. Je te devais obéissance, certes... sauf que pour moi, tes actions étaient justes. Chacun n’avait pas la même conception des choses... pas tout le monde avait été élevé de la même manière. Tu m'as recueilli, alors que je n’avais plus rien : ma soeur disparue, mes parents qui n’ont fait que m’exploiter... et il y avait toi. Tu as cherché à me rendre plus fort, tu m’as poussé à grandir, à me développer de plus en plus. Pour toi ? Pour Konoha ? Peut-être, et même sans doute. Mais c’était aussi pour moi.

Tu as pris sur toi les souffrances de chacun, et tu as cherché à libérer notre monde. Seulement... ton bandeau. La Feuille, qui était scellée en toi. Après tout ce qu’il s’est passé... tu luttais encore pour son bien, pour sa sécurité ? C’est ce que je commençais à me demander. Et tu ne m’as rien dit, prenant sur toi tout ce poids, et toute cette responsabilité. Tes actions étaient mal vues, alors que ton objectif était tout à fait noble. La Fin justifie les Moyens, hein... c’est ce que tu m’as toujours dit, ce que tu m’as enseigné, dès le premier jour. Cette phrase, qui était ton nindô. Cette philosophie, qui était le deuxième commandement de l’équipe Yose. Nos débuts... tout avait commencé ici. Et c’est en suivant chacun de tes commandements, chacun de tes ordres... mais aussi chacun de tes conseils, que je m’étais hissé si haut aujourd’hui. Tout ça, je te le devais... et je ne pourrais jamais te remercier assez, pour tout ce que tu as fait pour moi. Es-tu fier de moi, malgré tout ?

Rien de moins sûr. J’ai beaucoup progressé, depuis notre première rencontre. Et pourtant... aujourd’hui, je m’étais retrouvé impuissant. Impuissant face au meurtre de mon maître, et encore toujours impuissant pour le venger... au final, elle m’avait pris ce que j’avais de plus cher en ce monde. Et elle m’avait laissé vivre... pourquoi ? Pourquoi avait-elle fait ça... ? Tuer mon maître, mais me laisser en vie ? Étais-je... aussi faible ? Aussi insignifiant que cela ? Je n’avais pas eu la force de sauver mon maître, et de tuer son assassin. Et Miko m’avait laissé en vie. De la pitié ? Foutaises. J’aurais préféré mourir aujourd’hui, plutôt que de vivre par pitié de celle qui aurait pu me tuer. Avec mon échec, je me devais d’être sanctionné.

Dans un sens, je l’étais... j’étais condamné à vivre dans ce monde, seul, souffrant. Peut-être qu’elle avait jugé cette sanction plus violente, que de seulement me tuer. Comment le prendre ? Je ne sais pas.

Condamné à souffrir. Condamné à vivre, chaque jour, mon impuissance.

Je sombrais dans les méandres les plus profondes, de mon inconscient.

Se sentir impuissant. Un sentiment bien cruel...

Une légère brise venait caresser ma peau. Un frisson finit par parcourir mon corps, alors que je revenais peu à peu à la réalité. Difficilement, mes paupières s’ouvrirent, et la lumière me parvint. Doucement. Le retour au monde réel, voilà ce qui m’attendait maintenant. Un monde, bien différent que celui que j’ai quitté, en sombrant dans l’inconscience. C’était un monde, où tu n’étais plus là.

Éprouvant quelques difficultés, je parvenais tout de même à légèrement me redresser. Appuyé sur mon bras droit principalement, assis sur le sol, légèrement incliné vers l’avant. Mon corps ne s’était pas encore remis des derniers affrontements. Mon bras gauche me faisait de plus en plus souffrir, à tel point que je ne parvenais même plus à le mouvoir. La blessure s'aggravait, et devait être traitée de toute urgence. Seulement... ce n’était pas ma principale préoccupation. On pouvait considérer que cela faisait parti de la sanction. Celle pour avoir laissé mon maître mourir.

Je restais un moment là, à ne rien faire, à ne rien dire. Mon regard était tourné vers le sol, là où se trouvait le corps de Seitô avant que je ne sombre. Il n’était plus là. L’Aburame avait sans doute emporté son corps avec elle. De quel droit... pourquoi ? Je ne comprenais toujours pas ce qui l’avait poussé à en arriver là. Je ne savais pas quoi faire... j’étais comme perdu. Je me sentais abandonné, sans plus aucun repère. Il ne me restait rien, hormis son bandeau. Le bandeau de la Feuille, qu’il avait caché en lui. Ma main se resserra autour de la plaque métallique, à tel point que le métal fit une légère incision sur ma peau, laissant à nouveau couler le sang.

La tête posée sur mes genoux, mon seul bras valide autour d’elle, je laissais ma tristesse découler. Ma rage avait parlé... mais ce que je ressentais n’était pas complètement extériorisé. La dernière fois où je me suis retrouvé dans un tel état psychologique... c’est sans doute lors de la disparition de ma soeur. Et encore, ça allait mieux qu’aujourd’hui. Parce que maintenant, je n’avais plus rien. Le Shôraizen ? Je n’en étais pas convaincu. À vrai dire, je commençais à me demander quel serait le prochain traître dans nos rangs. Une membre en qui j’avais confiance nous avait tous détruit. En un seul instant...

Je ne comprenais pas pourquoi. Néanmoins, un début de réponse s’offrit à moi, lorsque je remarquais la présence d’une étrange lettre, cachée entre le tissu et la plaque métallique du bandeau du Sabakyô. Dépliant la lettre, j’en lus le contenu... c’était un message… de Miko.

Elle m’expliqua les raisons de sa décision. Pourquoi avait-elle tué Seitô ? Parce qu’elle avait jugé qu’il s’enfonçait dans la folie. Qu’il nous emportait tous avec. Il avait changé ? En mal ? Quelle importance. L’important était la finalité, la réalisation de nos idéaux. Même si les moyens ne sont pas les meilleurs, ou les plus justes. Tout ce qui compte, c’est le résultat que l’on obtient. Seulement, pour moi... elle venait de briser nos idéaux, nos chances de voir un jour notre objectif se réaliser.

Elle ne le connaissait pas. Pas assez. Qui était-elle pour le juger ? De quel droit s’était-elle permise de prendre sa vie, alors qu’elle était des nôtres. C’était insensé. J’avais beau me le répéter, je ne réalisais pas encore ce qu’il se passait. J’espérais me réveiller, me sortir de ce cauchemar... mais c’était impossible. Je faisais bel et bien face à la triste et dure réalité. Une réalité où Miko avait assassiné Seitô.

Machinalement, je relisais sa lettre. Cherchant à comprendre... mais cela m’était impossible. Il n’y avait rien à comprendre, hormis une chose : elle nous a trahit. Prenant la lettre, je la scellais dans un parchemin, que je gardais précieusement avec moi. Un parchemin, dont j’étais le seul capable d’en ouvrir le contenu, celui-ci étant rempli de Fûinjutsu complexes dont j’étais le seul concepteur. Cette lettre... ses paroles... elle ne devait pas tomber entre les mains de n’importe qui. Les membres du Shôraizen n’avaient pas à prendre connaissance du contenu de cette lettre. Cela ne ferait que rendre plus délicat la situation, si des membres commençaient à douter.

Par contre... dire la vérité sur son meurtre, ça je le pouvais. Mon maître était mort, et sa mort ne resterait pas impunie. J’en faisais le serment... elle payera de ses crimes.

Maintenant, la question était de savoir ce que j’allais faire. Rentrer à la base, réunir tout le monde, et leur annoncer ce qu’il s’est passé. Les missions de chacun devraient s’être terminées... la nôtre étant la plus compliquée, et étant terminée depuis bien des heures déjà. Et après ça... je me déciderai. Le Shôraizen était ma famille... et c’était de cette famille qu’était venue la trahison. En qui pouvais-je avoir confiance ? En personne, c’était un fait.

Il serait peut-être plus sage... de ne pas m’y éterniser, et de faire ce que j’ai à faire. De continuer à avancer, même si je dois être seul. Avancer, vers un seul, et même objectif... cet objectif, c’est toi, Miko. Tu as tué mon maître... et tu mourras de ma main.