Tsubaki s'allongea sur le sable, observant chaque étoile brillant dans la voûte de jais qui s'exposait dans l'immensité du monde céleste, le bruit doux et langoureux des vagues s'échouait, pareil à elles, sur les rives d'or obscur qui présentaient à l'océan leurs courbes généreuses. Le calme des lieux lui rendait quelque agréable sensation de bien-être dans cet environnement de tension constante dans lequel elle s'était volontairement plongée. Elle n'en éprouvait cependant aucun regret, observant dans le cœur brillant d'une étendue constellation le propre reflet de ce que sa sérénité éclairait en elle : la paix et la bienveillance. Après toutes les épreuves qu'elle avait traversées avec l'esprit de la terre, elle avait senti, jour après jour, coup après coup, son éthique, sa morale, son moral partir dans l'immensité de la tristesse humaine, dans cette nature vengeresse qui n'était pas la sienne. Elle avait quelque peu ouvert les yeux depuis qu'elle avait rêvé de son invitée. Qui elle était, quel était le but qui l'avait attiré hors de ces lieux qu'étaient les pleines contrées du monde spirituel, le monde d'en-dessous, comme disaient souvent les humains. Tout cela se bousculait dans sa tête, cherchant à se faire une place dans cet ensemble de connaissances, de questions, de réponses, d'autres questions engendrées par ces dernières. Le maelstrom qui tournoyait avec force dans son esprit risquait à quelque occasion de la rendre complètement folle, elle le savait pertinemment, mais, cependant, n'y pouvait rien, sinon tenter de garder le contrôle et la possession de ses moyens pour tenter de rester saine le plus longtemps et le plus efficacement possible.

La Lune était magnifique, dans ses robes blanches immaculées que cachait un voile noir et implacable. Les plaines célestes ne voyaient en aucune obstruction quelque partisan de la tempête, dont la présence n'aurait possiblement pas plus renforcé l'obscurité du domaine de Tsukuyomi, qui parvenait déjà à une grande influence dans ce monde endormi. Comment ne pas apprécier pareil spectacle, tel ballet que donnait déjà en représentation la troupe stellaire, ne souffrant comme les hommes de la douce chaleur d'une nuit d’Été, jouissant de la fraîcheur de l'espace, immense et mystérieux, comme le théâtre de leur art. Nulle autre musique que celle de la nature n'aurait pu les accompagner dans cette fabuleuse danse nocturne, qui laissait dans les cœurs de ceux qui les pouvaient voir un sentiment d'accomplissement, d'épanouissement, de paix, de sérénité. Les chants des grillons, encore éveillés dans cette chaude saison, accompagnait harmonieusement les doux cris des oiseaux de la nuit, qui dans leur sommeil n'offrait en rien la magnificence de leur accord à ceux qui semblaient trop fou pour ne pas vouloir passer la nuit à les écouter. Les clapotis de l'eau finissait la complétion du tableau musical, dans un rythme constant et apaisant, comme cherchant à déverser sur la plage les accords de la mer.

Kumo, quant à lui, appréciait la nature des lieux et du temps, lové sur le sable fin, bercé par la mélodie enchanteresse de cette magnifique nature, qui ne lui offrait que plus ses délices. Il fallait le voir, de son pelage blanc aux lignes dorées par la plage ressortait uniquement les montées de sa respiration, chassant chaque fois les minuscules grains intrusifs qui tentaient de colorer, non sans beauté, les poils de son manteau naturel. Qu'il était chou, le petit félin, dans cette image de paix perpétuelle qui le caractérisait tant lorsqu'il s'adonnait à son activité préférée : le sommeil. Il était l'incarnation d'une paix possible dans l'ensemble de l'humanité, aux yeux de la jeune femme. Elle voyait en lui toute la tendresse et l'amour que l'on pouvait porter à un être vivant. Quelle adorable petite boule de poil que ce charmant bonhomme que laissait doucement les rayons lunaires, reflets même de la lumière de cet astre magnifique qui prodiguait chaleur et lueur à l'ensemble de la planète. Elle avait envie de rester dans la magie de ce moment, la beauté d'un instant volé au fil inexorable et interdit du temps, le temps d'une danse qui faisait perdre l'esprit des hommes dans la beauté perdue de la valse. L'art lui vint alors en tête, couplé par la question de la connaissance des ressources que rendait nécessaire la préparation et l'organisation d'un pareil événement. Elle se décida de réfléchir à ce point plus tard, mais de profiter tout d'abord de la magie de cet instant avec son charmant petit compagnon, observant dans la nuit l'immensité des deux océans qui se faisaient face depuis l'aube de temps immémoriaux dans le cœur des hommes et des dieux. Tant de beauté en un domaine qui menait à la sérénité tout être prenant ne serait-ce qu'une mince parcelle du fil de sa vie pour tenter de communier en ses corps et esprit avec l'unicité du cosmos ambiant. La vie n'avait qu'une source sûre dans le chaos qui emplissait le cœur des hommes : elle se trouvait dans la bienveillante nature, qui en tout temps avait accompagné les enfants de la vie, dans leur joie et leur tristesse, l'abandon et l'espoir, dans l'existence et le trépas. Elle resta sur la plage, se promenant le long du lit que l'étendue de sable s'était approprié, transformant des langues de terre argileuses ou rocailleuses en longues prairies d'or et d'ivoire, laissant l'océan lécher langoureusement ses courbes par chacune de ses visites insolentes et repoussées à son encontre. Observant les étoiles et la lune, les forêts et les montagnes qu'elle trouvait de tous côtés et qui ne faisaient que l'enivrer que plus dans sa transe déjà surréaliste. Nulle ne pouvait lui retirait la plénitude qu'elle éprouvait en ce moment précis, la délivrant des chaînes de la souffrance humaine. Aussi, satisfaite et impatiente, elle rejoignit les profondeurs de sa riche demeure, afin d'y perpétrer quelque billet.

Tsubaki se mit à son bureau pour consulter les registres des missions qu’avaient répertoriées les ninjas du Shôraizen. Il devait bien y avoir quelque chose qui pourrait l’aider à organiser son magnifique projet. Il fallait qu’elle trouve vite, vite et très vite ! Elle fit courir mains et yeux sur les parchemins qu’on lui avait fournis, elle marqua plusieurs aller-retours vers la bibliothèque pour s’assurer de bien tout avoir sous la main. Ses recherches furent longues et peu agréables, mais elle finit par trouver la perle rare : une quête d’un riche homme d’affaire qui cherchait où s’implanter dans le pays. C’était parfait ! Elle connaissait à merveille la géothermie des terres sur lesquelles elle s’était installée, et cela ne lui demanderait que peu d’efforts, pour une récompense qui se verrait être alléchante. Elle prépara les affaires nécessaires au trajet, laissant Kumo deviner que sa maîtresse allait encore une fois bouger, ce dont il avait l’habitude, à présent. Il passait beaucoup de son temps libre à jouer avec les chats appartenant aux membres de l’organisation. Néanmoins, il n’était toujours que plus ravi de pouvoir passer quelque temps avec sa fleur bien-aimée.

Le départ de la Buta n’étonna que peu les gardes dans son existence, sinon dans sa position temporelle, dans l’heure avancée de la nuit, alors que la Lune n’avait elle-même pas fini sa course dans la voûte bleutée de la coupole céleste. La jeune femme s’élança dans la nuit, n’attendant en rien le début du jour, cherchant au maximum à économiser son temps pour attraper l’occasion plus proche et propice à l’obtention de son but du moment, qui lui emplissait à présent l’esprit plus aisément qu’un gaz n’occupait le volume qu’on lui permettait d’occuper. Elle eut besoin de quelques pauses avant d’atterrir dans le milieu du pays, là où se présentait le client tant convoité pour ses ressources financières, sans aucun doute encore plus convoitées que lui. La course de l’aurore aux doigts teintés par les fleurs commençait dans le champ céleste qui se réveillait doucement, accompagné de la vie de la campagne. Les rayons de rose et de miel dessinaient de magnifiques formes aléatoires et souvent symétriques, au grand bonheur de Tsubaki, dans le ciel. Tout était magique dans la nature, elle n’en était que plus sûre.

Son homme avait élu domicile provisoire dans un petit hameau, sûrement histoire de ne pas payer trop cher un hôtel plus en luxe. Ou peut-être avait-il de la famille à cet endroit. Ce n’était pas les affaires de la kunoichi, qui n’allait pas gaspiller de son précieux temps pour des questions sans importances telles celle-ci. Elle se présenta donc à la place animée du village afin de demander la présence urgente de l’homme d’affaires. Elle dut cependant attendre que le marmot se prépare afin de ne pas se présenter en pyjama, mais bien dans la tenue qui pouvait seoir à pareil individu de son milieu social. Ils eurent une brève discussion quant à l’endroit où il souhaitait établir son projet. Il lui expliqua qu’il cherchait à créer un petit village touristique dans un coin sympathique des terres de Yu No Kuni, dans les vallées ou sur les côtes, même dans les plaines, ce point-là ne l’importait dans le fait qu’il avait comme unique soucis la possibilité d’avoir à portée de la géothermie. Elle demanda comme il allait pouvoir s’établir ainsi tout seul, et il lui répliqua qu’un groupe d’amis et connaissances allait arriver par la suite, pour l’aider, apportant la main-d’œuvre, puisqu’il avait avec lui l’argent du projet. Cette remarque n’échappa pas à la jeune fleur, qui dut se faire fureur pour ne pas penser à lui dérober ses avoirs. Cette fois, elle allait gagner honnêtement, sans avoir à tuer ou tromper ses amis comme adversaires. D’autant qu’elle n’avait personne à affronter, cette fois. Du moins l’espérait-elle.

Il décida de prendre avec lui ses affaires, et de laisser un mot à ses amis, achetant de quoi tenir en pleine nature, pour préparer quelque peu les lieux avant leur arrivée. Un homme d’affaire qui se salissait sur le terrain. Cette attitude fit sourire Tsubaki, qui le lui fit remarquer, d’un grand sourire charmeur. Elle se rendit compte que le trentenaire n’était visiblement pas insensible à sa personne. Peut-être jouerait-elle dessus pour obtenir un petit supplément. Elle l’emmena dans un coin de montagne situé au Sud des sources de Chikagai, où les ressources thermiques étaient affluentes. Ils cherchèrent pendant plusieurs heures durant un point optimal où implanter le projet du client lorsque la jeune femme tomba sur ce qu’elle ne pensa pas trouver alors, bien qu’elle sache pertinemment que le pays en regorgeait : une caverne. Cependant, celle-ci ne semblait pas avoir été colonisée dans le passé, ce qui rassura la jeune femme quant à la préservation historique des lieux. Elle décida de prendre quelques dispositions en visitant la cavité pendant que son compagnon installait son camp, et partit dans sa grande exploration. Elle y découvrit une place relativement correcte pour un projet tel que celui dont il était question en ces jours et lieux, ainsi qu’une température digne d’un des meilleurs spas du pays. Le surface rocheuse, d’un gris mat, ne semblait pas trop dure à travailler, ce qui laissait de bonnes chances à ce lieu de finir en tant que nouveau site touristique, pour peu qu’un minimum de publicité soit fait. Elle ressortit annoncer à son client qu’un bon coin avait été trouvé. Elle se posa à l’entrée le temps qu’il puisse lui aussi visiter, observant les courbes généreuses des montagnes ensoleillées, par la chaleur estivale d’un midi dégagé. Elle faisait ici ce que son éthique lui commandait : aider des gens, des gens qui voulaient profiter de la vie et de leur succès. Cela lui inspira un bon souffle de joie de vivre, alors qu’elle entendait revenir le jeune homme qui semblait, à son rythme de marche, être content de ce qu’il avait vu. Elle esquissait déjà un sourire à l’idée de sa récompense qu’elle entendit :

Tsubaki, à cette remarque, sentit ses dents se serrer et ses yeux se lever au ciel. Il ne pouvait pas y avoir plus ironique que ce qu’elle vivait à l’instant. Elle était toute contente, et maintenant elle allait devoir détruire l’endroit pour protéger leur système de survie de toute faille extérieure. Qu’avait-elle donc fait pour mériter de souffrir tout cela ?! Elle se tourna vers son interlocuteur en prenant soin de revêtir un air surpris, et lui demanda s’il était sérieux. Celui-ci répondit que c’était le cas et qu’elle se devait de venir jeter un coup d’œil si elle souhaitait s’assurer de la véracité de ses propos. Il lui montra le chemin menant aux formations cristallines, dont la lumière étincelait sous la plateforme primaire comme un nuage d’étoiles colorées. Elle dut bien admettre que tout cela était magnifique, comme ce qu’il y avait au QG du Shôraizen, mais elle ne pouvait se permettre de laisser pareil trésor connu par un externe. Elle se tourna vers l’homme d’affaire, lui demandant la permission d’en prélever quelques-uns afin d’aller à l’extérieur, les observer. Elle emporta quelques-uns des plus gros afin de s’assurer de leur composition. Une fois exposés à la lumière du soleil, elle ne put que confirmer leur authenticité et leur appartenance à la classe des gemmes magmatiques thermophiles. Elle eut un long soupir de fatigue et de lassitude dans cette lutte sans fin contre la fuite d’informations. N’était-il possible de vivre simplement ?

Ah, tiens, s’était-elle donc éveillée, celle-ci ? Allait-elle lui épargner quelque souffrance dans l’accomplissement de ce site d’une valeur inestimable ? Non, elle devait le faire à elle seule et porter la responsabilité de sa fonction. Il y avait des choses que l’on ne pouvait toujours déroger. Et ce qu’elle allait devoir faire en faisait partie. Et cela, l’esprit l’avait tout de suite très bien compris.

Sur cela, elle repartit dans les tréfonds de son esprit, attribué il y a quelques temps déjà par Tsubaki, sur un commun accord de vie en colocation, si toutefois ce terme pouvait être utilisé dans une situation aussi cocasse. Elle dut donc retourner à l’intérieur, armée de quelques parchemins explosifs et d’un cristal rouge gonflé à bloc, histoire de faire sauter tout ça. Elle devait maintenant entraîner le businessman hors de la caverne, car elle ne tenait pas à le tuer, lui avec la grotte qu’elle s’apprêtait à détruire. Elle alla le retrouver, et le découvrit marmonnant quant à une richesse qu’il, ne le savait-il pas, n’aurait jamais. A son arrivée, il tourna la tête, un grand sourire sur le visage, et déclara :

Elle fronça les sourcils, le moins artificiellement possible, feignant de s’assoir dans le centre de la cavité, histoire de couper le pilier principal de la grotte, plaçant et cachant les outils de son forfait. Elle se remit debout et s’approcha, histoire de faire semblant de s’intéresser au bonus qu’elle savait venant en sujet de discussion. Seulement, il n’en était rien.

La kunoichi était mentalement scandalisée, mais tenta pour le moins de n’en rien montrer, et fit mine de réfléchir à l’offre que le pervers venait de lui proposer. Elle n’entendit alors plus qu’une seule chose à faire dans la situation qui se présentait à elle. Et cela semblait clair pour l’esprit également.

Un clin d’œil suivit sa déclaration, et elle commença à sortir de la grotte, remontant au niveau supérieur. Elle marchait intentionnellement d’une manière peu valorisante pour un membre de la gente féminine.

Elle reprit son chemin pendant que le vil exécutait ses ordres avec plaisir, désireux d’arriver rapidement aux desseins auxquels il aspirait. La jeune fille revint à l’entrée de la caverne, allégée de ses affaires, mais s’arrêta, se tenant langoureusement aux parois. Elle fit quelques signes et débuta son petit tour, usant de l’art de la transformation, qu’elle avait appris à la base, et se changea tout simplement en elle, dénudée, prête à l’action. Voyant son client s’exciter là où il était, se retenant de la rejoindre pour ne pas gâcher le numéro qu’il sentait venir, elle joignit à nouveau les mains et activa son parchemin, rompant le sort qu’elle venait de lancer, et rapidement, avant que l’homme n’ai pu comprendre quoi que ce soit, s’élança vers le campement. Le pauvre, ou presque, n’eut pas le temps de souffrir alors que son corps, explosé, se faisait recouvrir de débris.

Pendant ce temps, la kunoichi avait brûlé le campement et récupéré toutes les ressources de l’homme d’affaire. Satisfaite, sans l’ombre d’un remord, elle regagna la base, où elle put continuer son magnifique projet, et, de plus, enflouer encore quelques peu les caisses de l’organisation.