Retrouvailles derrière les barreaux [feat Oterashi Yanosah]

Nous y voilà... Les geôles de Gyamda. Rien que la froideur des murs me faisait frémir de terreur. Mais je devais mis rendre ... Je savais que Kakeshuou venait de rendre visite à mon prisonnier, car soyez en certain, quoi que dise le vieux lion de glace, ce prisonnier était le mien et non pas le siens.
J'avais d'ailleurs préférer attendre que le vieux fou remonte avant de m'engager d'une démarche fine et souple dans les profondeurs de la terre, ma lourde cape de fourrure finement ouvragée voltigeant derrière moi malgré la lourdeur qu'elle faisait et sa capuche rabattue sur ma tête et dissimulant en partie mon visage.
J'étais attentive au moindre bruit, au moindre murmure qui éveillerait une présence indésirable en ces lieux. Passant devant la salle des gardes, je saluais ces derniers d'un bref hochement de tête pour leur signaler ma présence dans les couloirs de la prison et demandais à l'un d'eux de m'accompagner. Enfin, je continuais à m'enfoncer dans les profondeurs, me dirigeant à présent vers les cellules. L'odeur était putride, j'arrivais à la percevoir même avec le nez complètement bouché. Je suivais le garde qui me conduisait là ou je l'avais demandé.
Finalement, j'arrivais devant la cellule ou se trouvait Yanosah. Le distinguant à peine à travers les barreaux, J'observais sombrement son état avant de déverrouiller la porte de la cellule. Le garde essaya de m'en empêcher et je lui jetais le regard le plus noir que j'étais capable de produire à mon jeune âge, ma capuche retombant sur mes épaules :

"La prochaine fois, vous obéirez à mes ordres sinon, c'est vous qui prendrez sa place ! Maintenant laissez moi passé et verrouiller la cellule quand je serais dedans ! Je vous appellerais quand je désirerais sortir !"

Je crois que jamais je n'avais parlé aussi froidement à quelqu'un. Toujours étant qu'il déverrouilla la porte de la cellule et me laissa rentrer dans cette dernière avant de la refermer dans un bruit sourd derrière moi. Je restais quelques secondes à l'entrée, observant le nukenin de loin. Oserait-il m'attaquer ? Je n'en savais rien et je m'en foutais bien. Même s'il était méprisable, il restait avant toutes choses un être humain que j'espérais peut être un peu trop faire changer. Mais là n'était pas la question pour le moment. Je demeurais à l'entrer de la cellule l'observant longuement avant qu'un petit soupir ne s'échappe de mes lèvres et que je baisse les yeux vers la longue natte que formaient mes cheveux. N'hésitant plus je m'avançais vers le nukenin en marquant un avertissement.

"Un geste ... Je vous tue !"

La menace était claire nette et le ton de ma voix montrait clairement que je ne rigolais pas, pas plus que je n'avais peur de lui.
Je tenais dans mon bras gauche, mon bras, encore, valide surtout, une lourde couverture que je déployais en m'approchant de l'homme aux cheveux rouge. Je la déposais alors sur ses épaules sans éprouver la moindre peur :

"Je me doutais bien qu'ils ne vous traiteraient pas comme je l'avais demandé ! Allongez-vous ! Que j'examine vos blessures !"

Il était difficile de dire pour Yanosa si l'entrevue avec le Gouverneur de Yuki s'était oui ou non bien déroulée. Le face à face avait été, quoi qu'il en soit, d'un très grand intérêt, et le Nukenin se plaisait, bon gré mal gré, à entrer dans les petits jeux politiques d'individus tels que ce Kakeshuou. Dire que l'homme n'était pas dénué d'ambitions pour son pays était un doux euphémisme, et les opportunités que lui offrirait cette promiscuité toute nouvelle avec cet homme aguerri et surfant sur la vague des velléités contemporaines promettaient au jashiniste de ne pas manquer d'action. Il ne put toutefois se défaire de cette moue, qui ne le quitta pas jusqu'à ce que de nouveaux bruits de pas se fassent entendre au bout de la coursive, et qui traduisait sa méfiance extrême envers le Gouverneur et ses projets nationalistes. Inutile d'y penser plus que de raison, se dit le guerrier rouge, toujours contraint à l'immobilité par l'épaisse masse d'acier trempé qui lui entourait le cou et qui même pour un rude gaillard comme lui, il fallait l'avouer, pesait lourdement sur ses épaules déjà meurtries par quelques blessures et les douleurs encore très significatives provoquées par le contre-coup du combat.

La réflexion fit donc une nouvelle fois place à l'expectative, Yanosa se demandant quel genre de visite il pourrait bien recevoir après celle du maître des lieux en personne. La légèreté des pas qui se rapprochaient de son cachot lui donna tout de même un indice, malgré la lourdeur d'une autre série de pas qui masquait presque la première. Emmitouflé dans d'épais drapés de fourrure et dissimulée sous une capuche, la silhouette de Yuki apparut clairement à Yanosa, qui ne put retenir un bref éclat de rire lorsque le garde qui l'accompagnait tenta de l'empêcher d'entrer. La jeune fille fit alors rapidement savoir qu'elle ne tolérerait pas plus d'insubordination de la part d'un troufion à peine capable de rivaliser avec un Genin de l'académie et s'enferma avec celui que beaucoup s'accordaient à placer sous le drapeau des criminels, la main sûre et chargée de matériel médical. Voulait-elle vraiment le soigner ou bien avait-elle fait passer des ustensiles peu indiqués à la pratique de la médecine dans ses affaires ? Pour Yanosa, cela aurait été une formidable surprise de constater que la jeune kirijin possédait cela en elle, cette pulsion revancharde même une fois l'ardeur du combat retombée. Mais il n'en était rien.

Après un bref avertissement qui était placé là plus pour la forme qu'autre chose, Yuki alla placer une couverture sur les épaules en souffrance du Nukenin, arrachant à ce dernier un haussement de sourcils plein de perplexité.

« Tu t'en doutais, et pourtant tu les as laissé faire, Yuki... lança-t-il en saisissant la couverture et en l'envoyant voler à travers la cellule.

Tu pourras toujours tenter de me contredire, mais je te connais désormais assez bien pour pouvoir te comprendre, petite. Tu possèdes en toi un grand pouvoir, une puissance qui parfois peut te dépasser, tu le sens. Et pour éviter de « mal agir », tu te cantonnes à faire ce que l'on t'as appris à identifier comme « le bien ». Peut-être est-ce dû à ton âge, mais tu n'es pas encore capable de prendre les bonnes décisions, je le réalise à présent.

Tu es toutefois capable de reconnaître un paradoxe, aussi vais-je te soumettre celui-ci : tu laisses ton ennemi aux mains de gardes que tu sais violent et capables de maltraiter un prisonnier, à plus forte raison un Nukenin, et tu accours pour soigner ce même Nukenin quelques heures plus tard ? »

Yanosa laissa s'écouler une poignée de secondes, redressant son dos dans une position assise semblable à celle de la méditation avant de rajouter.

« Je n'ai que faire de ta fausse compassion Yuki. Je n'accepterai pas que tu soulages ta conscience en venant ici pour te purger de tes indécisions et de tes peurs ! »

La colère du Nukenin ne fit qu'accroitre la mienne et j'attendis qu'il ait fini son monologue, ce dernier durant un certain temps avant d'enfin décider de bouger de ma position. Mon regard n'exprimait que la colère, le dégout, l'envie de l'étouffer. Pourtant, mon corps se contenta de se retourner et d'aller récupérer la couverture qu'il avait jetée dans un coin de la cellule. Je ne le laisserai pas gagner à ce petit jeu-là cette fois-ci.
Je m'approchais donc une nouvelle fois de lui pour remettre la couverture sur ses épaules ensanglantées tout en le fixant droit dans les yeux avec un petit sourire joyeux :

"Peut-être que si tu n'avais pas mis Yusuke dans l'état où il se trouve actuellement, je me saurais occupé de toi jusqu'au bout ? Tu vois ? Moi aussi, j'ai mes priorités !"

Je venais de le tutoyer et cela n'était pas anodin en soit. Notre combat nous avait vraisemblablement rapproché plus que de raison et je ne comptais pas laisser le nukenin dominer la situation. J'étais ici à l'encontre de tous et pour répondre à ma propre volonté, pas celle que l'on m'avait apprise sinon je l'aurais laissé croupir au fond de sa prison de fer, les microbes se chargeant de mettre fin à ses jours. Non, j'avais d'autres projets en têtes à présent.

"Allonge-toi!" Demandais-je d'un ton autoritaire en appuyant volontairement sur les épaules du mercenaire pour le forcer à obéir.

J'avais encore mal dans mon bras et je ne pouvais pas trop forcer avec ce dernier, mais mon bras gauche était encore bien vigoureux et je ne comptais pas le laisser dominer l'échange. M'installant sur le rebord de la banquette ou il se trouvait, je me mis à parcourir les différentes blessures qu'ils avaient endossés durant le combat. Aussi incroyable que cela puisse paraître, hormis une énorme fatigue musculaire et quelques muscles déchirés, je ne constatais vraisemblablement aucune fracture, je me contentais donc de désinfecter les plaies à l'aide d'une solution moussante et de bander les muscles que je considérais comme abimé avant qu'une question ne me vienne à l'esprit :

"Combien de portes as-tu ouvert ?"

La question n'était pas anodine en elle-même car j'avais bien compris que la force dont-il avait fait preuve au cours de notre affrontement ne pouvais être lié qu'à une technique fort poussé en taijutsu. Les portes de l'esprit, cela ne me faisait aucun doute, mais jusqu'ou avait-il poussé ces dernières pour mettre Yusuke dans un tel état.

L'entêtement était un trait de caractère que Yanosa avait appris à considérer au fil des années comme à la fois la source des plus grandes forces et des plus grandes faiblesses. Certains hommes mourraient d'entêtement, surévaluant leurs propres capacités et courant à leur perte, tandis que d'autres arrivaient à déjouer les tours que voulait leur jouer la vie à force de détermination aveugle et d'efforts qu'ils ne comptaient pas. Lorsque Yuki se mit en tête de soigner à tout prix les plaies du guerrier rouge, ce dernier ne sut trop dans quelle catégorie ranger la démarche de la jeune kirijin. Elle mettait en effet son entêtement à elle en conflit avec le sien à lui, une situation qui aurait pu aisément s'envenimer et mener à une joute intra cellule des plus charmante... Surtout lorsque l'on considérait que les murs de ladite cellule étaient recouverts de pointes acérées coupantes comme des rasoirs et que rien à part le sol humide et froid ne pouvait soutenir le jashiniste.

Le choix de la sagesse s'imposa alors à ce dernier, qui ne voulait nullement que cette entrevue ne finisse en pugilat ensanglanté et encore moins mutiler la jeune fille, qui restait après tout un atout prometteur pour ses plans à long terme. Tout en cédant donc au « caprice » de Yuki, le guerrier rouge n'en resta pas moins en position assise, résistant aux petites mains menues de cette dernière pour garder une forme de contrôle sur son corps. Il ne put s'empêcher de remarquer que la jeune fille s'était mise à le tutoyer, une forme de promiscuité grammaticale qui pouvait être synonyme d'un relâchement de sa part ou être le signe d'une tentative habile quoi que superflue de l'amadouer.

« ...Très bien, fait ce que tes principes te dictent de faire. »

Yanosa resta donc assis en tailleur pendant que la jeune fille appliquait quelques onguents visant sans doute à désinfecter les plaies les plus grosses et à les panser comme il se devait en règle générale. Le jashiniste ne se couchait jamais, que ce soit sur le dos ou sur le ventre, et dormait toujours en adoptant une position de méditation qui permettait à la fois au corps de se renforcer pendant un sommeil profond mais aussi de le réveiller bien plus vite que la normal en cas de nécessité. Se laissant donc faire tout en observant avec soins les manipulations de la kirijin, qui pouvait aux yeux de Yanosa toujours faire preuve de fourberie, il fut tiré de son observation par une question qui était loin d'être anodine. La culture de Yuki en matière de taijutsu ne le surprit pas outre mesure, sa prestation passée prouvant qu'elle possédait d'excellentes bases en la matière, mais l'intérêt peut-être calculé de la jeune fille pour ses capacités pouvait cacher de bien mystérieux desseins. Refuser de répondre ? Pourquoi pas... Après tout, il ne devait rien à Yuki, et encore moins des informations à son sujet. Mais, au fond, à quoi pouvait-ce bien servir de savoir qu'un météore allait vous frapper en plein visage si vous n'aviez aucun moyen de riposter ?

« Les Portes, c'est comme ça que tu les appelles... ?... Hm. Si tu tiens à savoir quel niveau de puissance à bien pu mettre ton cher « Yusuke » dans l'état qui est le sien, je vais te le dire : il m'a suffit d'enfoncer les quatre premiers verrous pour lui briser les côtes. Je les ai senti, sous mon tibia, qui se fracturaient... »

Yanosa laissa passer un instant, levant les yeux vers le plafond de sa cellule, lui aussi recouvert de lames affûtées à l'extrême, avant de reprendre.

« Mais, ce n'est pas ta question n'est-ce pas... Tu te demandes, au fond, si j'aurais pu aller plus loin... Si... Je vous ai laissé l'emporter... Selon le folklore qui entoure ce pouvoir, relâcher les chaînes autours du huitième verrou entraînerait une mort certaine... Je ne suis pas assez fou pour avoir pris le risque de tenter l'expérience, pas encore.

Mais puisque cela t'intéresse, sache que d'ici une douzaine d'heures tout au plus, et grâce aux précieux soins que tu m'as apporté, je pourrais à nouveau déchaîner mon pouvoir... Et ouvrir la septième « Porte »... »

Dernière édition par Oterashi Yanosa le Lun 11 Nov 2013 - 19:59, édité 1 fois

Je ne pus retenir un petit rire lorsque le nukenin m'annonça que d'ici une dizaine d'heures il pourrait ouvrir les sept verrous. Qu'elle bonne ... Excellente nouvelle. Qu'elle énorme blague surtout. Je me contentais d'un petit :

"Mais bien sûr ..."

Avant de me saisir avec fermeté de son avant-bras droit gauche que serrais en son milieu jusqu'à lui faire pousser un cri de douleur. Je me remis alors à parler, mais cette fois-ci m'a voix n'avait rien de complaisant :

"Tu sais ce que ça signifie cette douleur que tu ressens là ? Quand je serre ton muscle de cette façon ?"

Mon regard était froid et sévère et je ne relâchais pas le moins du monde mon étreinte sur son membre supérieur pour continuer à lui faire éprouver de la douleur :

"Je ne suis pas medicnin et ce n'est pas avec ces vulgaires onguents ... "

Je donnais un grand coup dans les produits posaient à côté de moi, les envoyant voler avec colère contre les murs bardés de faire.

"... Que je vais pouvoir faire disparaître une telle douleur !"

Je le regardais encore plus vexer qu'auparavant et sans vraies raisons apparentes. Mes sourcils montraient bien ce coup-ci dans quel état, je me trouvais et les verrous que cet homme osait dire qu'il pouvait ouvrir comme ça, avec une nonchalance indescriptible était bien la preuve que c'était une première pour lui. Un rire froid, voir machiavélique s'échappa d'entre mes lèvres alors que je le relâchais enfin son bras :

"C'était la première fois que tu déverrouillais la quatrième porte ! Le comportement que tu as après cet "exploit" selon toi le montre bien ! Tu ne sais pas ce qui en retourne autant pour ton corps que pour ton moral !"

Je me redressais alors furieuse. Rabattant d'un geste mauvais ma capuche sur mon visage, il était clair à présent que je préférerais retourner soigner mon amant qui ne se la jouait pas indestructibles plutôt que ce crétin non-conscient de ses limites.
Saisissant alors une seringue d'anti douleur, j'enfonçais cette dernière sans ménagement dans la cuisse de l'homme au cheveux cramoisies avant de me diriger vers la porte de la cellule où je frappais trois fois, attendant que le garde viennent m'ouvrir :

"Tu vas passer une nuit douloureuse à n'en pas douter ! Nous verrons bien si dans quelques heures comme tu le dis, tu pourras ouvrir la septième porte ... Mais j'en doute fortement ! Tâche de ne pas te faire dessus !"

Le garde s'approchait pour m'ouvrir.

La « révélation » que fit Yanosa eut l'un des deux effets escompté. A vrai dire, lorsqu'un homme vous révélait qu'il possédait un pouvoir comparable à celui d'un demi-dieu et qu'il pouvait le déployer presque sans retenue, les réactions pouvaient varier d'un extrême à un autre. L'effroi aurait pu étreindre Yuki, qui terminait précautionneusement ses bandages, en acceptant cette vérité que le Nukenin lui envoyait en pleine face. Ou bien, comme elle le fit, elle pouvait se terrer dans la négation et le scepticisme pour pouvoir ne pas tenir compte des paroles du jashiniste. Il n'en resta pas moins que sa réaction suivante laissait quelques doutes sur sa perception de ce que venait de lui confier Yanosa. Aussi fermement que lui permettaient ses petites mains, elle attrapa vigoureusement l'avant-bras gauche du guerrier rouge, serrant et serrant encore pour lui arracher ce cri d'agonie qu'elle espérait sûrement entendre. Yanosa expira fortement, levant les yeux au ciel et transformant cette énergie qu'était la douleur en huile pour le moteur de sa foi. Il ressentait bel et bien cette inflammation généralisée que la petite Yuki avait cherché à provoquer dans ses muscles encore faibles, et ressentait la même chose que le tout à chacun... La différence résidait dans le fait que, pour lui, souffrir de la sorte était chaque fois un soulagement de plus, dans ce monde où la seule certitude était qu'avec la vie venait la douleur.

Yuki, il n'aurait trop su dire pourquoi, semblait en rage. En un sens, il était fier d'elle. Elle avait pu passer outre un fragment de sa ligne de conduite impeccable et plus que de vouloir faire souffrir le jashiniste, elle l'avait fait, là, gratuitement. Un résultat tardif de ses multiples provocations ou une réaction plus directe à ce qu'il venait de lui annoncer ? Ça, il l'ignorait. Jusqu'à ce que la jeune kirijin balaye d'un revers de main tous les produits qu'elle avait ramené et ressente le besoin irrépressible de remettre une fois de plus en cause la « version » du Nukenin. Ainsi donc, elle pensait pouvoir analyser son comportement à lui ? Une bien audacieuse prétention, mais Yanosa ne s'offusqua pas du comportement de la jeune fille et préféra afficher le sourire de celui qui savait... Car oui, lui savait que ce qu'il avançait était vrai, et rien au monde ne pouvait remettre en cause cette vérité. Ces années à s'entraîner dans ces mêmes montagnes qui désormais le tenaient prisonnier avait fait de son corps une arme létale, une masse d'os et de muscles capables de se muer en énergie pure et de semer la mort aussi rapidement qu'un éclair. Accepter qu'il puisse être capable de se muer en une telle bête féroce devait être difficile à appréhender pour Yuki et pour cela, il l'en excusa.

L'air vexé, la jeune fille se redressa alors, rassemblant ses affaires et rabattant sa capuche de fourrure avant de violemment injecter un anti-douleur dans la cuisse de Yanosa, toujours assis en tailleur. La kirijin était sur le départ et le garde s'approchait pour ouvrir la porte... Le moment idéal pour le Nukenin de lâcher un dernier pavé dans la marre.

« Tu es libre de croire ce qui t'arrange Yuki. Les Portes, mon supposé calvaire entre ces murs, si mon moral est au beau fixe ou non,...

Mais il y a une chose, immuable, contre laquelle tu ne pourras rien et que tu seras forcée d'accepter. Demain, je serai libéré... Tu m'as entendu, Yuki ? Je serai libre comme l'air et il n'y aura rien que tu puisses faire pour l'en empêcher... »

Spoiler:

"Tu as raison, j'ai encore le droit de croire ce que je veux ! Encore heureux qu'un malade comme toi ne soit pas dans ma tête, car la vie serait alors bien monotone !"

Les mots étaient sortis de ma bouche comme un geyser qui a besoin d'extraire la trop grande pression de son antre. Je ne jetais aucun regard au nukenin à cet instant-là. Mes yeux fixés, les barreaux de la cellule. J'attendais toujours qu'un garde vienne m'ouvrir et pendant ce temps, je devais me contenter d'écouter les paroles de ce fou furieux, cet être immonde. Mon sang recommençait à bouillonner et je commençais à comprendre pourquoi je craignais le contact avec cet homme et pourquoi je le désirais autant.
Il avait le pouvoir d'influer sur mon esprit, de faire sortir une autre moi de mon âme et cela commençait à sérieusement m'effrayer. D'impatience, je m'accrochais aux barreaux :

"Parle tant que tu veux ! Nous verrons bien si demain, tu seras encore là ou non ! Vu le somnifère que je viens de t'injecter cela ne me fait aucun doute pourtant !"

Je tournais alors la tête vers lui pour observer son expression tout en lançant une petite pique :

"Ta nuit sera sans rêve ! Tu pourras oublier un peu le dieu qui est le tien ! Cet immonde dieu qui t'oblige à avoir les pensées destructrices que tu penses être t'a destiné !"

Je poussais alors un long soupir :

"Dommage que tu t'engages à ce point sur une voix perdue d'avance !"

Puis, me retournant une nouvelle fois vers les barreaux, je secouais énergiquement ses derniers en m'exclamant :

"Ohé !!! Venez m'ouvrir, j'ai fini !"

Les gardes de ce stupide palais étaient décidément des incapables eux aussi. Je languissais de quitter cet endroit, car cet homme commençait à me donner la migraine et je n'allais pas cacher que mon état de fatigue avancée commençait à peser lourd sur mes frêles épaules. Regagner la tiédeur de mon lit et dormir tout mon saoul, c'est ce que je désirais à présent, car je savais que les prochains jours au pays des neiges allaient être difficiles. Kakeshuou ne me pardonnerait pas comme ça mon insubordination d'il a quelques heures, et il allait sans aucun doute me le faire payer en me donnant les tâches les plus ingrates qu'il pourrait trouver. Des bruits de pas s'avancer vers moi. Enfin.

La conversation était terminée, leur entrevue touchait à sa fin. Il ne restait rien à dire de plus que ce qui ne l'avait déjà été. Et pourtant. Pourtant, Yuki continuait d'adresser la parole au Nukenin qui croupissait derrière elle, sans même le regarder, comme si elle ressentait le besoin irrépressible de formuler ses pensées à haute voix pour ne pas en perdre le fil et se perdre elle-même dans les paroles du guerrier rouge. Elle en vint même à révéler sa supercherie, avouant volontiers à Yanosa que plus qu'un anti douleur, c'était un somnifère qu'elle lui avait injecté avant de faire mine de partir. Réelle volonté de nuire ou intentions cachées de préserver le jeune guerrier d'une nuit de tourments à ne pas pouvoir trouver de position confortable ? Encore une fois, les actions de la jeune kirijin entraient quelque peu en conflit avec les convictions qu'elles affirmaient à voix haute, preuve s'il en était besoin que le travail de Yanosa, subtile et insidieux, prenait peu à peu racine en elle et éveillait des pulsions qui lui était jusque là restées inconnues.

Yuki trouva tout de même la force de caractère pour se retourner vers le Nukenin, tandis qu'elle attendait toujours le garde qui était supposé la faire sortir de ce trou à rat puant et visqueux. Elle lui promit une nuit sans rêve, lui qui n'avait que des visions, une nuit loin de son Dieu qui pourtant ne l'abandonnait jamais, même dans l'inconscience. C'était d'ailleurs alors qu'il était en passe de mourir que, sur l'île de la cendre, il lui était apparu dans sa forme la plus immaculée pour lui sauver la vie et le guider vers son idéal. Yanosa, que ce fut sous l'effet de la drogue que Yuki venait de lui administrer ou bien par pur béatitude à l'entendre enchaîner des « menaces » qui pour lui n'étaient que des non-sens, affichait un large sourire fermé, son dos commençant à s'affaisser vers l'avant par à coups sous l'effet du somnifère.

« Je me demande... Ce que ça doit te faire... Tous ces efforts, ces sacrifices, cette abnégation au service de ton pays... Tout ça... Pour quoi ? Ha... Pour que, finalement... je sois libéré presque aussitôt. Réalise, Yuki. Réalise dans quel monde tu vis. Un monde qui se veut bâti sur des principes et qui... a la première occasion profitable... les jette aux orties pour amasser un peu de pouvoir et d'influence... »

La jeune fille semblait de plus en plus pressée de sortir de la cellule, agacée, voire peut-être oppressée par les relents de putréfaction qui n’avaient rien de glamour et qui se répandaient dans toutes les geôles. Les secondes s'étiraient presque, comme si elle aussi purgeait une peine qu'on l'aurait condamné à passer aux côtés de l'individu qui, supposément, lui inspirait le plus d'antipathie et de dégoût au monde. Yanosa, toujours assis dans la pénombre ambiante, ressentait à présent très clairement les effets du somnifère mais ne résolvait pas à laisser son corps sombrer, pas tout de suite en tout cas.

« Tu es si pressée... Et pourtant tu ne sais pas ou tu vas... Je pourrais t'apprendre... tellement de choses. Accepte de m'aider Yuki... Et tu verras le monde... changer. »

Personne ne venait m'ouvrir alors que mon désir de quitter cette pièce se faisait de plus en plus pressant. Je ne voulais plus entendre les paroles du nukenin à présent, je voulais juste aller me reposer. Moi aussi, j'avais besoin d'une nuit sans rêve, sans tourment. Pourtant, une nouvelle fois, la question du guerrier aux cheveux de feu me poussa à lui donner une réponse. Mon faciès affichant désormais une fatigue sans précédent que je m'étais efforcée de dissimuler durant tout ce temps, je me retournais lentement vers l'homme emprisonné. J'ouvris alors la bouche avec difficulté avant de parler d'une voix emprunte elle aussi de fatigue. Je parlais très lentement :

"Ça me fait me sentir ... Vivante ..."

Que pouvais-je dires de plus pour essayer de le convaincre que mes principes étaient les bons ? Vraisemblablement rien qui lui fasse entendre raison, c'était une chose certaine. Et puis je n'avais plus réellement le courage d'essayer de lutter contre lui pour aujourd'hui. Il fallait que je sorte d'ici au plus vite, car je me sentais petit à petit dans les ténèbres comme ci moi aussi, j'avais reçu une dose de somnifère :

"Je sais que le monde dans lequel je vis n'est pas parfait ... Mais c'est avec des efforts comme les miens que les choses changeront petit à petit ... Un changement trop brutal ne serait pas bon contrairement à ce que tu sembles penser."

Comment avais-je trouvé la force de parler encore et encore ? Pourquoi surtout ? Je n'en savais rien. Même si ce n'était pas moi la prisonnière, pour l'instant, je me sentais comme éprise dans une cage dont je n'arrivais pas à sortir. Agrippant solidement les barreaux de la porte de la cellule, je m'écriais une nouvelle fois :

"Ohé !!!! Venez m'ouvrir !"

Pourquoi était-il si long à venir. Cette pression devenait horrible pour moi, il fallait absolument que je sorte d'ici. Je paniquais complètement et je me mis à secouer les barreaux. Non-content d'être physiquement en prison, je l'étais aussi mentalement. Je sentais mes muscles commençaient à me lâcher progressivement. Je n'avais presque plus la force de me tenir debout. La dernière phrase du Nukenin fut pour moi comme le coup d'épée que l'on abat sur le mourant. Glissant alors doucement sur le sol de la cellule, j'essayais de me défendre comme je le pouvais de cette joute verbale interne !

"Laisse-moi tranquille ... Je ne veux pas t'aider ... Vas t'en ..."

Je n'en avais pas conscience alors, mais à force de m'occuper des autres, j'en avais négligé mon propre état de santé et une violente fièvre s'était emparée de moi, cette dernière profitant de ma fatigue pour m'attaquer de pleins fouets au moment le plus opportun. Je me sentais défaillir.

Lentement mais sûrement, l'effet du somnifère prenait place dans l'organisme du jashiniste enchaîné, qui luttait intérieurement de toutes ses forces pour rester éveillé le plus longtemps possible. Après, se disait-il... Après qu'elle soit partie, pas avant. Un ergot de fierté mal placée empêchait en effet le Nukenin drogué de se laisser aller aux bras de Morphée devant qui que ce soit. Il ne l'avait jamais fait, consacrait toutes ses nuits à la méditation, et ne comptait pas faire deux incartades d'un seul coup en laissant Yuki constater sa faiblesse face à la substance qu'elle lui avait administrée. Il s'accrocha alors à ses mots, sans doute les derniers qu'elle prononçait se disait-il, pour rester conscient et continuer à stimuler les zones actives de son cortex. Se sentir vivant, voilà qui était déjà une motivation plus louable que celle d'amasser honneurs et médailles au service d'une institution corrompue. Vouloir se sentir vivant, c'était tout faire pour justifier son existence, pour trouver sa place en tant qu'être humain dans un tout cosmique qui échappait totalement à cette espèce, pourtant la plus évoluée de la planète. Un paradoxe depuis longtemps accepté et assimilé par Yanosa, lui qui luttait jour après jour contre la décadence dont faisaient preuve ses semblables, qui lui étaient pourtant si différents.

La kirijin était encore jeune et malgré tout, au contact du Nukenin et sans doute d'autres fortes personnalités comme celle de son parent Gouverneur, elle développait les traits caractéristiques d'une âme indépendante, portée plus par ses propres décisions que par les idéaux que voulaient lui imposer ses paires et ses aînés. Yanosa se devait de se faire une raison : son travail s'arrêtait là la concernant. Il serait en effet bien plus sage de sa part désormais de laisser faire l’œuvre du temps et des expériences que de tenter de pousser davantage la jeune fille vers les précipices qui la guettaient de toute façon inéluctablement. Qui sait, peut-être reviendrait-elle d'elle-même vers lui, pour des raisons que même le guerrier rouge ne pouvait anticiper... Ce qui était sûr en revanche, c'était que Yuki, pour le moment, désirait avant tout s'en aller de cette cellule lugubre et balayée par des effluves putrides qui auraient fait se retourner les plus frêles des estomacs. Yanosa, les yeux à demi fermés mais toujours s'accrochant aux morsures de la réalité, décida alors d'accorder un répit à la jeune fille, qui tombait littéralement de fatigue devant les barreaux de sa prison. Il ignorait pourquoi le garde mettait autant de temps à revenir ni si la chose était volontaire ou non, et il s'en fichait. Même si, au demeurant, entendre le sbire sans cervelle se prendre une correction à l'autre bout du couloir par la jeune kirijin l'enchantait au plus au point.

D'un bref mudra de la main gauche, il activa alors le sceau qu'il avait placé sur l'extérieur de la serrure avant d'être jeté comme un malpropre dans sa cellule. L'explosion à concussion rompit alors le silence glauque et pesant des geôles, arrachant les grilles de la cellule de Yanosa pour les propulser sur les grilles d'en face, de l'autre côté du couloir, laissant un trou béant en lieu et place de ce qui constituait auparavant une porte en fer.

« Va me... dégommer cette andouille... Il l'aura... Bien mérité... »

Rien ne s’interposait plus entre Yuki et sa liberté, elle qui, à l'origine, était venue apporter des soins au prisonnier et qui s'était retrouvée, de façon aussi éphémère que désagréable, la codétenue du guerrier rouge...

Spoiler:

« Je déteste les p’tits cons qui décident de me mettre dans la merde sans que j’en obtienne la moindre compensation. »

Kakeshuou Samui, An 8.

Lorsqu’un homme aussi occupé que votre serviteur se décide enfin à se pencher sur ce rapport sur une possible recherche du Graal par une troupe d’illuminés souhaitant un lopin de terre pour y installer un château ou une autre esgourderie de la sorte, on est priés de ne pas le déranger dans son hilarité ! Il avait gardé ce document pour finir sa journée. Il voulait finir sur une note amusante, et espérait bien ne pas être dérangé. Et pourtant … pourtant !
La secousse – bien que minime – et les remous dans les couloirs laissaient entendre qu’il y avait un souci. Encore ?! Vous pouvez pas me foutre la paix, nom d’un chien ?? Je veux lire peinard, bien finir ma journée, et finir cette soirée dans un bar ou encore dans mes appartements à l’aise ! Je dois déjà surveiller ma garce de nièce, vous pensez pas que vous pouvez gérer le reste ?!

Et un long silence. La paix. La tranquillité. Pas une seule personne pour le déranger. Arquant un sourcil interrogateur, le quinquagénaire faisait preuve de patience, tout en cachant son irritation. Alors, personne ne comptait lui dire ce qu’il se passait ?? Attendez, oui, j’ai dis que je voulais avoir la paix pour finir enfin ma journée ; mais ca ne veut pas dire que vous devez me mettre à côté des évènements dans mon propre Palais ! Je reste le représentant de l’autorité de Kirigakure no Sato ! Toujours personne ? Cette fois-ci, c’en était trop. Notre homme se redressa d’une traite et marcha d’un pas inquisiteur vers la porte. Un regard dans le couloir : personne ? Ce n’est pas vrai, qu’est ce qui se passait encore …. Et voilà le Gouverneur de Yuki no Kuni en train d’arpenter à la recherche de témoins, et d’informations.
Au tournant d’un couloir, deux hommes en train de discuter. Ne pas les laisser s’échapper ! Le regard glacial dans leurs prunelles effarouchées : ils n’échapperaient pas à sa colère ! Restez là, petits cons ! Si vous me poussez à vous courser dans le Palais entier, je vous ferai connaître un lieu pire que l’Enfer : la paume de ma main !

~ Hé, vous ! C’était quoi, cette secousse. Tremblement de terre ?
~ Gouverneur … I-Il semblerait que cela venait des sous-sols …

Des sous-sols ? Non … il n’aurait pas … ! Raaaah, il faut vraiment tout faire par soi-même !! Et dans un grognement digne d’un grizzly, notre vétéran de guerre fit volte-face sans dénier remercier les deux sbires sous ses ordres, et se jeta dans le premier escalier trouvé. Dévalant les marches les unes après les autres, d’un pas rapide, notre homme ne cessait de se poser des questions. Pourquoi faire sauter la prison ?! Cela n’avait pas de sens : le Nuke-Nin venait d’accepter un document officiel qui lui accorderait liberté et plein droit de circulation dans ces terres en échange de … certaines conditions. S’échapper de la prison n’avait absolument aucun sens. A part si quelqu’un y avait mis une condition supplémentaire ! Ou qu’une visite lui avait fait changer d’avis. Ho … . Non … . Ho la petite … !!!

Après une tripotée de minutes, notre homme arrivait aux geôles. Première réflexion : où est le garde, responsable de la surveillance ?! Encore parti pisser, ou jouer au poker dans un coin sur son téléphone portable ? Si je mets la main sur ce minable, je l’envoie aux geôles avec assez d’éléments physiques en moins pour ne pas se geler les … bon, vous m’avez compris.
En revanche, la fumerole en fond de salle était plus inquiétante. Répétition du pas accéléré, pour voir la scène finale. Et croyez-moi, elle vaut le coup d’œil ! Une blanche-neige dans les vapes, et la vilaine sorcière rouge au sol, à moitié K.O., réagissant à peine. C’était lui qui avait fait sauté la porte de la cellule ? Quel intérêt ? Il comptait fuir alors qu’il ne tenait pas debout ?

Deux doigts sur le pouls de la gamine de son Clan. Elle n’était qu’évanouie. Mais la main posée sur le front donnait des informations plus alarmantes. Elle était bouillante de fièvre ! Très intelligent ! La petite idiote avait combattu, fait son rapport, soigné son camarade, pour finir sa journée dans une prison humide et gelée, sans raison aucune. Si elle se plaignait à l’avenir d’être malade, tout ce qu’elle récolterait, ce serait une fessée déculottée en place centrale de Gyamda, comme un enfant en école primaire !
Passons au deuxième cas social. Même procédure : deux doigts sur le pouls. Il a l’air d’être toujours des nôtres. Son regard vaseux laisse même entendre qu’il est réveillé, un phénomène endurant ! Une observation rapide du personnage : affalé sur le sol, il a dû être immobilisé d’une façon ou d’une autre. Pourtant, il est encore réveillé.

~ Tu as été mis K.O. … je ne sais pas comment. C’est un miracle que tu sois encore réveillé.

Les premiers pas résonnent dans le couloir. Après dix minutes ?! Ils iront tous en cour martiale, ces minables ! La prochaine fois, ils seraient à temps une fois le pays à feu et à sang ! Il réservait le sermon, alors que trois soldats de l’Ombre faisaient leur apparition dans son dos. Lui, toujours à genou à côté de « Seth », leur porta un regard vengeur, puis s’en retourna vers le captif avec un sourire cassé.
Et un grand coup de poing en plein visage !

~ Avec ça, tu dormiras, t’inquiète pas … .

Sur ce ton un brin méchant, le poing finit sa course dans le sol gelé, allant jusqu’à faire saigner les phalanges. Crétin ! Voilà de quoi te faire dormir ! Je t’offre un cadeau avec emballage et ruban rose, et tu te débrouilles pour m’offrir un décor pareil ?? On va pas s’entendre longtemps ; et tu ne vas pas profiter longtemps de la liberté que tu avais acheté jusque-là … . S’emparant d’un morceau de papier et d’un stylo qu’il avait sur lui, Kakeshuou Samui griffonna une trainée de mots mal écrits avant de laisser le corps et le message sur place.

~ Ramassez moi cette gamine, et emmenez là à l’infirmerie la plus proche. Une fois sur pied, vous lui ferez savoir qu’elle est assignée au déblayage de la cour devant le Palais ! Et je me fous de savoir que la place fait une centaine de mètres !
Quant à lui, vous renforcez ses fers et vous refixez cette porte. Je veux que vous ouvriez toutes les fenêtres et que vous poussiez la climatisation au maximum. Je veux entendre ce misérable claquer des dents à partir de mon fauteuil !! S’il appelle, ignorez-le. Et libérez moi ce crétin sans fin et sans fond demain soir quand la nuit tombe … . Allez, au travail !

Vous voulez jouer avec le maître des lieux ? Je vais faire danser vos dents derrière vos lèvres, vous m’en direz des nouvelles, mes gaillards !

***

Kakeshuou Samui a écrit:: Pour n'avoir pas respecté notre accord, je te laisse en cellule pour le reste de la journée. Je te laisserai une dernière chance après ta libération. Suite à cela, la balle sera dans ton camp.

Les limbes du sommeil forcé se resserraient autours du jashiniste cloué au sol par ces lourdes chaînes en acier, sa tête oscillant tantôt de gauche, tantôt de droite, et ses paupières en proie à quelques spasmes provoqué par sa résilience et sa volonté de rester conscient. Devant lui, même une fois la voie pour ainsi dire complètement libérée, Yuki ne bougeait plus. De là où il était et dans son état de somnolence avancée, impossible de dire pour Yanosa si elle respirait encore ou non, un constat qui ne l’épris pas outre mesure.

« Hmpf... Tant pis... »

Mais alors que le Nukenin s'apprêtait à lâcher prise sur les dernières secondes de conscience qui lui restait, des bruits de pas se firent entendre au loin. D'abord diffus, ceux-ci se rapprochèrent distinctement des geôles jusqu'à devenir des claquements distincts, entrant en écho avec le vide de la prison et l'air glacé qui y régnait. Soudain se présenta alors dans ce qui fut l’entrebâillement de la porte de sa cellule rien de moins que le Gouverneur qui, semblait-il, était bien moins servi encore par ses hommes que par une paire de trombones. Pour ainsi dire dans le gaz, Yanosa eut à peine le loisir de laisser filtrer un sourire hagard tandis que le Samui s'enquérait de la santé de Yuki et de lui-même. Ha, ça, il pouvait ne pas apprécier, se dit le Nukenin, qui commençait à cerner le bonhomme... Trouver ses geôles dans un tel état avec sa petite parente à terre était en effet loin des projections de « collaboration » qu'il avait du se faire, et cela se ressentit lorsque, d'un coup sec, il envoya pour de bon le guerrier rouge dans les bras de Morphée. C'est ainsi que, pour la première fois depuis la première bataille de la cendre, Yanosa tombait inconscient sans aucune forme de dignité face à d'autres individus, qu'ils soient ennemis ou... collaborateurs éphémères.

Plusieurs heures passèrent, durant lesquelles le composé chimique que Yuki lui avait injecté empêcha l'esprit du Nukenin de s'échapper de sa torpeur. Ce ne fut qu'au milieu de la nuit, comme s'arrachant d'un cauchemar en se redressant d'un bond sur ses genoux, que Yanosa trouva la force de volonté de dissiper les dernières bribes de somnifère qui transitaient encore dans son organisme. Malgré la température qui flirtait avec le négatif et son manque total de vêtements chauds, le guerrier rouge était en sueur, l'oeil dilaté par cette expérience honteuse qu'il n'aurait su empêcher, et il passa les minutes qui suivirent là, sans bouger, se mettant en tailleur pour réguler ses forces et empêcher son corps transi de froid d'accepter en lui la moindre germe qui ne serait pas la bienvenue. Le froid était intense et lui mordait les extrémités, alors que ses plaies et ses muscles lui rappelaient encore douloureusement le combat qui s'était déroulé la veille, mais seul dans sa cellule, le jeune homme ne laissa rien de tout ça ne serait-ce qu'esquinter son armure, celle qu'il portait dans la tête et dans son cœur. Aussi inébranlable qu'un monolithe, usant avec parcimonie de son chakra pour empêcher ses tissus de pâtir du froid, Yanosa médita ainsi une bonne heure, jusqu'à ce que les premières lueurs de l'aube pointent le bout de leur nez par les sinistres puits de lumières qui peuplaient la prison.

Ce ne fut qu'alors, calmé, rééquilibré dans sa chimie intérieure, que le Nukenin aperçu le bout de papier au sol. Un bref message, vraisemblablement laissé là par le Samui après qu'il l'ait plongé dans les vapes.

« Haha..Hahahaaa ! Hahahahahaa !... Profite bien, Gouverneur... »

Aussi ferme que fut sa détermination, aussi dur à briser qu'était son corps, Yanosa ne put s'empêcher d'éprouver une insatiable impatience, tandis qu'il croupissait dans cette cellule aménagée avec goût et un certain sens du style. Ses plaies pansées et désinfectées, son corps remis du trauma infligé par l'ouverture de la Quatrième Porte la veille au matin, le Nukenin pouvait à loisir s'échapper de ces geôles d'un ancien temps, qui ne présentait aucune mesure particulière pour garder un individu tel que lui enfermé de force. Les murs étaient certes impressionnants et dissuasifs, mais quelques explosions bien placées et posées avec soin par le guerrier rouge aurait eu tôt fait de faire partir tout la structure en lambeaux et pour peu que la construction du palais ait été confié à des artisans peu au fait des techniques de maçons avancées, la destruction des geôles pouvait tout aussi bien rimer avec l'effondrement pur et simple du bâtiment tout entier. Une perspective qui donnait à Yanosa ce léger frisson de contentement destructeur... Mais en l'occurrence, s'il voulait que tout ceci ait eu un sens, il fallait s'abstenir.

Le Gouverneur était en effet un homme rigide, voir névrosé par l'exercice de son autorité, et « rompre » une nouvelle fois les termes de ce contrat qu'il s'était imaginé signer avec le Nukenin signifierait la rupture pure et simple de tout accord. Il aurait été bête d'avoir traversé tout cela sans en retirer même un petit quelque chose, le guerrier rouge en convenait volontiers... Mais rester là, dans cette prison glacée et putride, alors qu'il avait la possibilité de s'en aller lui donnait de l’urticaire. La porte qu'il avait fait sauté plus tôt pour « libérer » Yuki de l'incompétence des gardes du palais avait été promptement remplacée à la hâte, quelques boulons de piètre qualité et qui manqueraient certainement autre part tenant à peine en place la nouvelle « barrière » supposée retenir le jashiniste dans ses élans destructeurs. Une bien belle blague... Que dire de ces chaînes qui le maintenaient lié au mur, cette paroi friable qu'il aurait pu creuser à mains nues et qu'il aurait pu trimbaler avec lui sur une centaine de mètres à pleine vitesse en courant à cloche pied tout en dispensant correction après correction aux gardes incapables et incompétents chargés de surveiller la zone...

Mais patience, se disait-il, patience... Car si la confiance était un concept qui lui était quasi étranger, du moins accordée d'un être humain à un autre, il avait toute foi en Kakeshuou pour lui fournir cibles et informations comme s'il en pleuvait. Certains de ses ennemis seraient nécessairement partagés et la logistique que lui fournirait le Samui lui permettrait d'être plus ambitieux encore qu'auparavant dans ses projets. Tout ça, avant bien sûr que le vieux loup des neige ne finisse par perdre son utilité, et ne devienne à son tour une entité à abattre, une position politique à supprimer pour faire s'écrouler encore davantage le système établi... et fonder le nouveau Monde sur ses cendres.

Yanosa médita tout le jour, attendant la venue prochaine du Samui pour le mousser et lui réaffirmer avec des yeux pleins d'émotions qu'il serait éternellement à son service. Mais aucun Samui ne vint. A la place, un bête garde du palais, sa lance tenue d'une façon qui trahissait son incapacité à la manier correctement. L'homme presque bedonnant se rapprocha timidement de la cellule, se faisant aussi discret qu'une meute de sangliers pouvait l'être. Il s'approcha en tremblant, tourna la clé dans la serrure rafistolée et inutile, alla utiliser son trousseau pour délier les chaînes du Nukenin en faisant cliqueter les clés qui y étaient suspendues, puis ressorti en s'écartant de la porte avec autant d'assurance qu'il s'en était approché.

« V- Vous êtes libre, M- Monsieur... »

Yanosa se leva d'une traite à partir de sa position en tailleur, sans même utiliser ses mains et sans un bruit. Il s'approcha du garde, le regardant droit dans les yeux, puis afficha un grand sourire, plaçant sa main gauche sur son épaule un peu trop rapidement pour que le geste n'ait pas visé à intimider le garde.

« Bonne journée ! »

Et il s'en alla, un petit sceau de vision apposé sur l'épaule de celui qui fut son geôlier pendant une durée record de trente-six heures, remontant les escaliers qu'il avait emprunté sur les genoux à l'allée et humectant à nouveau de l'air à peu près sain. Un océan de possibilités l'attendait, et il allait s'empresser d'y plonger...

Spoiler:

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