Une nuit chargée d’étoile s’annonçait, en cette paisible soirée. Bientôt, la nuit allait tomber. Plus qu’une petite heure, pour que le Soleil ne se couche enfin. Cette journée allait donc s’achever, aussi chargée qu’elle a été. Ah ça, oui, il s’en était passé des choses aujourd’hui. Tout cela expliquait l’état dans lequel je me trouvais présentement. Assis sur une grande pierre, dans un point culminant du village, replié sur moi-même, j’observais ce spectacle magnifique. Jamais je ne me suis intéressé à un coucher de Soleil, à l’exception d’aujourd’hui. C’était une source de réconfort, et à la fois, c’était comme une page qui se tournait. J’essayais de me dire ça, mais je savais pertinemment qu’il n’en serait rien. Il était tout à fait impossible que je tourne la page. Pas si vite, en tout cas, bien que je ne pense pas m’en remette un jour. Ce n’était pas simple.

Akimichi Nai n’est plus. Le voila le problème. Cela faisait plusieurs mois qu’elle était dans cet état, et a finalement craqué. Le plus dur dans tout ça, c’est quand on sait que c’est moi qui ait mis fin à ces jours. Je l’ai fait pour elle. Mais dans le fond, je me dis que cela n’aurait pas dû se passer comme ça. Elle aurait encore dû vivre. J’aurais pu trouver une alternative. Peut-être qu’elle aurait encore pu être à mes côtés ce soir. Tuer sa propre élève, sa meilleure amie… C’est dur. Très dur. Même si on sait qu’elle allait dans tous les cas mourir. Je ne peux m’empêcher de penser qu’il y avait peut-être une autre solution, que je n’ai pas su trouver au bon moment. Je n’ai pas été là pour l’empêcher d’ingurgité cette pilule de malheur non plus… Je me hais, vraiment.

La seule chose que je pouvais faire pour elle maintenant, c’était d’accomplir sa dernière faveur. Avant de mourir, elle m’a fait passer un message, qu’elle voulait que je transmette au Hokage. La lettre était dans ma main, et j’ignorais complètement son contenu. Expliquait-elle la situation, ou c’était quelque chose d’entièrement différent. Je n’en savais strictement rien. De toute manière, ce n’était que le cadet de mes soucis d’en connaître le contenu. Tout ce que je voulais, c’était la faire revenir. C’était complètement impossible, maintenant que toutes ces techniques de résurrection n’avait presque plus aucun secret pour moi. En faire un pantin à moitié vivant serait impensable.

Dans la soirée, je comptais aller à la rencontre du Godaime pour lui transmettre ce message. J’ai juste voulu être tranquille avant. Une bonne heure, ou peut-être deux. Trente minutes peut-être aussi. Je n’en savais rien, la notion du temps m’avait complètement échappée. Tout ce que je voyais, c’était l’astre solaire se coucher, pour laisser place à la Lune et aux étoiles. Je l’avais tuée juste ici. Je n’ai pas eu la force de m’en éloigner. À sa demande, j’ai gardé son corps, et l’avait placée dans mon plus beau parchemin, pour une meilleure conservation. Une chose était sûre, je ne m’en servirai pas lors d’un combat. C’était impensable.

Dans un silence macabre, je me relevai. L’heure était sans doute venue de transmettre le message de l’Akimichi, celui qu’elle voulait transmettre à notre chef. Je vis que les lumières de son Palais étaient toujours éclairées. Tant mieux, ça ne me fera pas trop attendre après tout. Il n’était pas impossible qu’il soit trop tard. Comme je l’ai dis, je n’ai pas fait attention au temps qu’il passait. Il faudrait que je songe à rentrer aussi. Mais bon, plus tard. Je craignais de devoir fournir des explications. Au Hokage, il saura tout ce qu’il veut, puisqu’il est concerné dans l’histoire. Mais je ne tenais pas à ce que cette histoire se répande… Je préfèrerais éviter ça. Inutile de préciser que je ne voulais pas être vu comme une personne qui a tuée son élève et sa meilleure amie… Pas tout le monde ne pourrait le comprendre. Même moi, j’ai du mal à me comprendre.

Quelques minutes plus tard, je me retrouvais dans l’enceinte de son Palais. Maintenant, il fallait que je rejoigne ses bureaux, pour pouvoir le rencontrer. Il devait s’y trouver. Je ne ressentais pas grand-chose au sujet de ce message. C’était juste sa dernière volonté. J’appréhendais un peu sa réaction par contre, mais je pense qu’il peut me comprendre. Je pense, et j’espère. Devant la porte, je frappai deux coups, avant d’entrer quelques secondes après. Je fis quelques pas, puis je posai un genou au sol, tout en abaissant légèrement la tête.


- Maître Hokage, j’ai un message à vous transmettre… De la part d’Akimichi Nai.


J’ai eu un peu de mal à prononcer son nom, sans que cela ne me déchire le cœur. Tout en me redressant, je fis quelques pas afin de lui tendre l’enveloppe qui contenait son message. Mon visage était toujours légèrement abaissé. Ma mine devait être décomposée, sombre, dure… Je n’aime pas qu’on me voit dans un tel état. Mais je ne cherchais pas vraiment à m’en cacher.

Le soir tombait et l’obscurité commençait à gagner l’extérieur alors que le Palais de l’Hokage s’animait de milles et une lumières. La nuit n’annonçait pas le repos de ce dernier qui avait encore du travail à gérer. Peut-être même verrait-il le jour se lever ! Mais ça c’était dans sa vision la plus pessimiste de la chose. Après il n’était pas dit qu’il en viendrait à cette extrémité. Sauf s’il continuait d’avoir autant de conviction sur sa réussite. Un peu plus d’optimisme et de motivation ! Il terminerait avant la fin de la nuit ! Ou pas…Et merde ! Retour en force du pessimisme.

Alors qu’il se battait intérieurement avec ses problèmes de motivation, quelques coups firent retentir la porte. Relevant la tête, Daiki appela son invité surprise à entrer. Ça lui changerait de la compagnie bien triste et fade du papier. Atsue n’étant pas là pour annoncer la personne, il vit donc un jeune garçon pénétrer dans la pièce. Il semblait vraiment jeune. Des cheveux et des yeux violets. Assez atypique le garçon. Dixit l’homme aux cheveux gris et yeux jaunes. Mais c’est un débat parfaitement stérile et inutile de toute façon. Le jeune garçon posa un genou à terre. Une chose que Daiki n’appréciait guères.

Il se savait capable de faire preuve d’autorité pour se faire obéir si la nécessité s’en faisait sentir mais il ne tenait pas à laisser l’image du chef d’Etat qui réclamait une soumission totale. Du moins il ne trouvait pas que c’est ce qu’il était. Il n’était certes pas le mieux placé pour juger après tout. Il s’apprêtait à faire une remarque sur cette marque de soumissions qu’il n’affectait pas particulièrement. Même pas du tout pour être honnête. Mais le jeune se manifesta le premier et donc le Godaime le laissa annoncer la raison de sa venue ainsi que l’origine de cette dernière qui n’était autre qu’une fille du clan Akimichi. Il lui tendit une lettre que Daiki saisit et lut. Le message qu’i découvrit ne lui plaisait pas particulièrement.

Il apprit la mort de cette fameuse Akimichi et les circonstances de cette dernière. Il devina que le garçon face à lui était Aku. Il termina de prendre connaissance de cette missive avant que ses yeux dorés ne se reportent du blanc maculé de traits grossiers au jeune garçon à terre. Il ouvrit la bouche et prononça sur un ton chargé en émotions :

Relève-toi. Après de tels actes, tu n’as pas à subir le contact du sol.

Il désigna une chaise et attendit que le garçon prenne place avant de continuer. Il tenait à discuter d’égal à égal, homme à homme. Et non pas à un simple subordonné. Ce garçon venait certainement de faire la chose la plus difficile en ce monde et il en avait assez bavé. Inutile d’en rajouter avec des sermons à deux balles. Une fois Aku installé, il reprit :

Le fardeau n’est pas trop lourd ? Ou souhaites tu que nous éludions ce sujet peut-être ?

J’y étais donc. Le Hokage lisait présentement la lettre de Nai que je lui avais confié. Bien que j’ignore ce qu’elle a pu y écrire, je connaissais assez mon élève pour m’en faire une vaste idée. Elle n’a pas dû se gêner pour pointer du doigt d’une manière ou d’une autre le fait que sa maladie a été mal traitée, ou bien trop prise à la légère. J’imagine qu’elle ne s’est pas trop foulée pour expliquer tout en détail ce qui s’est passé. Ca, ça veut dire que c’est sûrement moi qui vais m’y coller. Et en plus, je vais peut-être prendre à sa place, pour des potentielles insultes ou autre dans cette lettre. Après tout, l’Akimichi n’était pas celle qui se retenait le plus dans ses paroles. Loin de là même. Au point où j’en étais, ça ne me faisait ni chaud, ni froid.

Il m’ordonna donc de me relever, pour me désigner une chaise sur laquelle je pouvais m’asseoir. Sans ne rien dire, je m’exécutai, prenant ainsi place sur le siège indiqué par le Hayashi. D’après les paroles qui suivirent, cela ne le dérangeait pas d’en parler, pour que je puisse un peu expliquer ce qu’il s’est passé, et éventuellement pour qu’il puisse placer des remarques personnelles. Il en avait le droit. Il pouvait même m’en blâmer si ça le chantait, je pourrais parfaitement le concevoir. En tout cas, pour le moment, je ne saurais dire si c’est ce qu’il voulait. Je ne pense pas vraiment.


- Il est lourd, oui. Mais ça ne me dérange pas d’en parler, je suis venu pour ça après tout.


Relevant un peu plus la tête en sa direction, je songeai à ce que je pouvais dire, par quoi je pouvais commencer. Il y en avait des choses à dire après tout, pour qu’il comprenne bien les raisons qui m’ont poussé à en arriver là. Même si je n’ai jamais eu à faire à lui encore depuis sa montée au pouvoir, ça ne me dérangeait pas trop d’en parler, tout en sachant que je n’en parlerais qu’à très peu de gens. Je ne vois pas l’utilité de mettre tout le monde au courant. Il n’y a aucun mérite, au contraire même.


- J’imagine qu’elle vous a déjà expliqué les grandes lignes, par le biais de cette lettre. Tout ce que je peux dire, c’est que lorsque je l’ai vue, c’était déjà trop tard. Les médecins du village lui auraient annoncé que son sort était scellé, et qu’il ne lui restait plus que quelques jours à vivre. C’est ainsi qu’elle en ait venu à ingurgiter une puissante drogue du clan Akimichi, afin de ne pas agoniser pendant des jours et des jours sur son lit d’hôpital. Elle a donc pu profiter des dernières heures qu’il lui restait à vivre, puis m’a demandé de la tuer, pour ne plus qu’elle souffre.


Voilà, là au moins je suis sûr qu’il est au courant de tous les détails la concernant. J’imagine bien qu’elle n’a pas tout précisé dans sa lettre, ou alors ça m’étonnerait d’elle.


- C’était dur, mais j’ai finalement accepté sa requête.


Moi-même, à l’heure qu’il est, je ne réalise toujours pas. Jamais je n’aurais cru pouvoir accepter de faire ça. Dans un sens, je me suis dit que c’est la seule chose que j’ai pu faire pour elle, et qu’elle est partie le sourire aux lèvres.


- Vous savez… Je ne sais pas si j’ai fait le bon choix, s’il y avait autre chose à faire. Avec le peu de temps qui lui restait, c’était selon moi sans issue. Et puis, elle était bien déterminée à en finir. Ce que je veux dire, c’est que je suis ouvert à tout jugements, voire reproches, je le comprendrai parfaitement.


D’un sourire plus que forcé, et plutôt gêné, je me grattai la tête de la main droite, la passant dans mes cheveux. En tout cas, j’étais prêt à accepter ce qu’il peut me dire, ou ce qu’il compte faire.

Le jeune garçon commença à parler et à expliquer tout en détail. Après l’épreuve qu’il venait d’endurer, et par habitude, Daiki le laissa parler en lui prêtant une oreille des plus attentives alors que son esprit s’étonnait encore de ce qu’il venait d’apprendre. Si jeune et devoir faire face à un tel choix…Cette responsabilité le suivrait jusque dans la tombe et il devrait vivre avec. Le remords pouvait le ronger à n’importe quel moment et lui faire perdre toute motivation ou volonté durement accumulés. Il n’avait pas demandé à ce qu’une telle chose lui tombe dessus et pourtant… Le Sort avait un humour qui laissait à désirer.

L’histoire lui avait été plus ou moins expliquée dans la lettre mais Aku lui répéta le discours en y apportant des précisions. Une belle preuve de courage. Formulé à voix haute la situation démontrait une chose : le garçon avait su se défaire partiellement du deuil pour le raconter. Lorsque quelqu’un est capable de ça sans s’interrompre à cause de l’émotion, c’était plutôt bon signe. Daiki cessa donc de s’inquiéter pour son soldat. Avec un peu de temps, la blessure cicatriserait et il la porterait en souvenir sans oublier quelle épreuve il avait enduré pour en arriver là. Il saurait donc faire face à cette épreuve plutôt particulière et inhabituelle de la vie.

Le garçon ponctua son discours par une sorte de demande. Il tenait à avoir le jugement du Godaime sur tout ça. A ces mots, l’Hayashi eut presque envie de rire. Par respect, il se retint et préféra répondre aux dires du Konohajin :

Il ne me semble pas que je sois le mieux placé pour juger. En ce qui concerne la vie et la mort, tu la connaissais certainement mieux que moi. Si c’est ce qu’il y avait de mieux à faire pour elle, tu ne peux avoir que mon soutien.

Daiki se leva pour faire face à sa fenêtre. Ce qui ne l’empêcha pas de continuer :

Il n’y aura pas de sanctions sur cette histoire. Je me vois mal t’ajouter un poids à ton fardeau. Tu as fait ce qui te semblais le plus juste. Du temps du Conseil, un tel acte aurait été réprimandé mais Konoha a bien changé depuis. Et heureusement pour nous tous. Heureusement pour toi dans ce cas précis.

Il s’adossa ensuite contre le carreau pour regarder Aku avec un sourire des plus sincères.

Je n’ai rien de plus à ajouter sur tout ça. Un enterrement en bonne et due forme sera organisé conformément à sa demande. Si tu veux rester pour parler encore ou pour formuler une demande particulière, je suis toute ouïe. Sinon je ne retiens pas plus longtemps.

Et il reprit place sur son siège, attendant la réponse du garçon.