De bonne heure, Gen s’était rendu au palais du Raïkage où il avait été convoqué par le maître des lieux en personne. Il ignorait totalement ce qui l’attendait. Le clan venait à peine de commencer à s’installer dans les bâtiments récemment construits par les Kumojins. L’un d’eux s’était présenté à leur arrivée aux portes il y a quelques jours mais Gen ne lui avait pas prêté attention. Son père était plus doué pour la diplomatie que lui qui était déjà un peu plus brut de fonderie. Il ne mâchait pas ses mots et avait du mal à prendre sur lui lorsque quelque chose l’énervait. Comme ce type qui s’était permis de venir leur demander leur pedigree.

Peut-être était-ce pour cela qu’on lui demandait de se rendre chez le Kage. A cause de son comportement ? Sans que son père ne soit convié ?! Trop étrange. Non il devait s’agir d’autre chose. Gen tâcha de se souvenir ce qu’il avait bien pu faire pour qu’on lui demande de se rendre là-bas mais rien ne lui venait. Il verrait sur place dans ce cas. C’est que c’était pour une demande ou une conversation toute autre. Mais en quoi pouvait-il intéresser le Raïkage ?

Les rumeurs au sein du clan éventuellement. Lui qu’on voyait comme le digne héritier de son père. Il ne se le tenait pas pour acquis et préférait garder la tête froide. Ce n’était pas à son niveau actuel qu’on risquait de lui confier les rênes de son clan. Il devait obtenir plus de force et apporter véritablement quelque chose à sa famille. Ce que son père avait fait. Il leur avait donné un héritage, un patrimoine et maintenant une maison. Et que leur avait donné Gen dans tout ça ? De la désillusion. De la poudre d’escampette. Tous pensaient qu’il finirait chef de clan mais il en doutait lui-même. Ce n’était pas avec ses simples bases de Ninjutsu qu’il serait à la hauteur ou digne de prétendre à cette place.

Arrivé au pied de l’édifice, il grimpa les quelques marches et entra. On l’arrêta une première fois pour lui demander la cause de sa venue. Deux gardes armés qui lui demandaient ça. il avait encore un peu de mal avec l’autorité mais étant donné la personne qui l’attendait, il courba l’échine pour cette fois.

-Monjara Gen. J’ai été appelé à me présenter devant le Raïkage.

L’un d’eux s’absenta tandis que l’autre resta à côté de lui à le surveiller. A le dévisager serait plus précis. Toutes ces personnes qui fixaient ses cicatrices, ça en devenait gênant et même agaçant. Si seulement il pouvait s’amuser à juste faire passer quelques fils par-là histoire de le dégoûter. Il aurait tant aimé ! Mais aujourd’hui c’était lui qui représentait son clan. Et devant le dirigeant du village qui avait accueilli sa famille et ses proches. De la tenue et la discipline par conséquent. Il agissait donc à la fois contre et pour son libre arbitre. Contre car il avait tendance à ne pas mâcher ses mots et pour car il se tenait à carreaux pour faire honneur à son clan et en donner une bonne image. Le garde tantôt parti revint en lui indiquant que c’était bon.

Gen suivit le chemin qu’on lui avait indiqué et il se retrouva face à une porte massive. Il toqua quelques coups et attendit qu’on lui permette d’entrer. Ce qui finit par arriver. Il posa sa main parcouru d’une énième cicatrice sur la poignée de la porte et fit ainsi son entrée dans le bureau. Le Raïkage se tenait là, devant lui.

Lorsque Gen fit son entrée, il fit d’abord face au Raïkage assis derrière son bureau, le nez encore plongé dans la paperasse. Ce dernier avait juste levé la tête pour le regarder arriver. Un type au physique plutôt atypique d’ailleurs. Le teint plutôt pâle. Des tatouages partant des yeux comme des larmes coulant jusqu’au menton et s’arrêtant là. Il devait avoir à peu près le même âge que Gen, si ce n’est légèrement plus vieux de quelques années. Les deux jeunes hommes restèrent là à se fixer alors que le Sandaime s’était appuyé sur le devant de son bureau et adoptant ainsi une position mi assise mi debout.

Le Monjara attendit que son hôte parle comme l’exigeait les règles de politesse. Il n’était pas expert de l’attente sauf quand cela était vraiment exiger. Là en l’occurrence il devait faire bonne impression et était seul représentant de son clan alors il fallait se tenir impeccablement et si cela devait passer par le fait de se regarder dans les yeux pendant deux heures en attendant que l’autre parle, alors soit. Tant que c’était pour le clan, il ne broncherait pas le moins du monde. Même si ça commençait à le peser. Il s’était passé quoi là ? Au moins une journée ? Bon peut-être pas mais c’était vraiment long !

Et finalement vint le glas de la délivrance. Il se mit à parler. Gen aurait bien lâché un soupir de soulagement mais il resta bien droit et propre sur lui. Le Raïkage se souciait du confort des Monjara dans leurs nouvelles maisons. Le questionné s’apprêta à répondre mais le Kage continua en expliquant qu’il n’était pas là pour échanger des balivernes. Un état d’esprit intéressant et qui concordait avec celui du Monjara. Les hommes qui ne passaient pas par quatre chemins et allaient droit au but étaient de loin ceux qu’il préférait pour en faire partie. Il l’écouta donc formuler sa demande. Après quoi il s’absenta pour revenir avec un petit carton qu’il ouvrit pour en tirer un bandeau qu’il envoya vers Gen. Ce dernier, un peu surpris, ne put saisir sa chance du premier coup. Sa main ne parvint pas à empoigner directement le bandeau frontal qui passa à quelques centimètres de son avant-bras. Et près d’une des fameuses cicatrices du Monjara.

Des fils en jaillirent et s’enroulèrent autour du bandeau, arrêtant sa course et le ramenant dans sa main alors que les tentacules noirs reprenaient sagement leur place dans le corps du shinobi sur son ordre. Il observa l’emblème gravé dans le métal. Le signe des Nuages. La signature de Kumo. Son village maintenant apparemment. Ne s’attardant pas plus sur l’esthétisme du bout de métal, il apporta une réponse aux dires du Kage :

- Oui les maisons sont parfaites merci de vous en soucier seigneur Raïkage. Quant à votre demande, je l’accepte personnellement et je suis sûr que tout homme et toute femme en capacité de se battre fera de même. Vous nous avez accueillis au sein de votre village et il serait normal que nous vous rendions la pareille en sacrifiant cette nouvelle vie que vous nous avez offerte pour vous.

Il était resté très sérieux et impassible lorsqu’il avait proféré ses paroles. Il s’était étonné à lui-même faire preuve d’une telle aisance avec les mots. C’était d’ordinaire son père qui était doué là-dedans. Lui pour sa part il se contentait d’agir et de foncer dans le tas de temps à autre. Son père aurait été sûrement fier de l’entendre donner cette image du clan. Car c’était la plus fidèle qui soit. Puis sans un mot, Gen noua le bandeau autour de son bras droit. Puis il reporta de nouveau son regard sur son nouveau Kage officiel à qui il tint ce langage :

- Puis je vous être utile d’une quelconque autre façon Raïkage ?

En effet le Raïkage n’en avait pas fini. La demande du Monjara aurait pu paraître impolie et il ne s’en était rendu compte que trop tard. En même temps il n’était pas entraîné pour mâcher ses mots. Faire des courbettes et tout le tralala ce n’était pas le fil conducteur de sa ligne de conduite. Son père était bien plus doué que lui dans le domaine. Il faut dire qu’il avait tout intérêt de faire les yeux doux et le dos courbe à Kumo, même si selon Gen c’était fait à l’excès. Un homme devait garder sa part de fierté quand bien même sa famille comptait pour lui. De par ses actes, Homare avait prouvé de nombreuses fois que sa propre existence lui importait peu par rapport à l’avenir du clan. Une conduite exemplaire mais que Gen ne trouvait pas adéquate pour un chef de clan. Tout chef qui se respecte doit imposer une stature et démontrer une figure d’autorité sous peine de se faire marcher dessus par ses subordonnés.

De même qu’un chef de clan se doit de ne pas faiblir face à d’autres dirigeants. Au final, il l’avait plus ou moins fait face à Bakushô Soroshiya mais ça avait payé. Et puis contrairement à d’autres, le Sandaime Raïkage était un homme qui dégageait de l’honnêteté et de la franchise. Pas le genre de rats à s’immiscer et à profiter qu’un homme baisse sa garde pour s’y attaquer. Le père de Gen avait limite supplier le dirigeant des Nuages d’accepter son clan et l’homme avait accepté. N’ayant pas assisté à la conversation, il avait dû se contenter du récit de son oncle qui lui avait soufflé que le Raïkage lui-même avait réclamé à Homare de se redresser et de ne pas implorer sa pitié comme ça. Voilà un homme dont Gen partageait la bannière et les idéaux. Ce qui n’était pas toujours le cas avec son paternel.

Le Monjara écouta donc attentivement ce que lui dit le Bakushô alors qu’il se tenait impeccablement. Une posture presque militaire pour un nouveau membre dans les rangs Kumojins. Le bandeau était déjà noué autour de sa tête pour orner son front. Et il prêta une oreille des plus attentives à ce qui se disait. Et il aurait été bête d’en rater une miette étant donné l’ampleur de la proposition qui lui était faite. Soroshiya lui proposait ni plus ni moins qu’une place dans son équipe personnelle. Etre former par le Sandaime Raïkage. Un gain de renommée pour son clan et pour lui-même. La chance d’être formé par la tête pensante de la nation. Un véritable honneur pour ce jeune homme désireux de faire ses preuves et de montrer sa valeur. Il serait en première position pour représenter son clan. Et il ne faillirait pas à sa mission.

Lorsque Soroshiya termina de parler, il n’eut pas besoin de trente secondes pour réfléchir. Les mots se formèrent d’eux même et furent portés par sa voix forte :

- Ce serait un véritable honneur de vous avoir comme mentor seigneur Soroshiya. Ou devrais-je dire senseï ?

Un léger sourire. Il en accordait à de très rares occasions. Mais là n’était pas un jour comme les autres. Aujourd’hui il venait d’intégrer l’équipe personnelle du Sandaime Raïkage. Il avait hâte de commencer sa formation et d’annoncer la nouvelle à son père qui serait fier de sa progéniture. Puis le Bakushô lui indiqua qu’il recevrait prochainement de ses nouvelles et qu’il n’avait plus qu’à attendre sa lettre. Gen le remercia en s’inclinant légèrement, les bras le long du corps et il quitta les lieux sans plus de cérémonie. Une fois dehors, il s’arrêta et regarda une dernière fois le bâtiment. S’érigeait devant lui la demeure du Sandaime, son senseï. Un autre sourire s’empara de lui. Sans qu’il le veuille néanmoins. Il fallait qu’il arrête. Il commençait presque à s’y faire !