Spoiler:

Je ne sais pas ce qui manque le plus dans cette cellule étriquée, le vent sec qui vous arrache la peau du visage, ou bien le soleil ardent qui la dessèche, à moins que ce ne soit le froid glacial des nuits passées à faire le guet, ou bien les trois à la fois peut-être. C’est vrai que l’on peut me prendre pour fou, mais quand vous avez passé une année enfermé sans avoir personne avec qui parler, sans jamais voir le soleil, sans jamais sentir autre chose que l’odeur de la merde et de l’urine tout autour de vous, il y a facilement de quoi devenir dingue. Mais ce qu’il y a de plus dingue dans tout ça c’est que cette prison c’est mon clan qui l’a créée, j’y ai même participé, dans une certaine mesure certes, mais je l’ai construite aussi de mes propres mains, et voilà que j’y suis enfermé, triste ironie du sort n’est-ce pas ?
Soudain la porte du couloir s’ouvre au loin, je le sais non pas parce que je la voie, car les cellules sont placées de telles sortent qu’elle ne voit le moins possible d’éléments du monde extérieurs, mais je le sais de par le bruit émis et si singulier de son déplacement sur ses gonds :

-Visite !

Beugle le garde au loin, alors qu’un bruit de pas se fait entendre au loin, avançant petit à petit dans le couloir. Assis sur mon lit, je regarde mes mains posées sur mes genoux, ou du moins ma main droite en métal, et ma main gauche d’origine et tout en les regardant je me concentre pour deviner pour qui est cette visite. Pas pour le jeune Kazuo, il est dans la première cellule et le bruit des pas les as dépassé, le pauvre, il en aurait bien besoin il est ici pour accusation de meurtre, mais quand je le regarde pendant les moments de pause je dois dire qu’il n’a clairement pas le cran des tueurs, ou du moins des vrais et comme on l’accuse d’un meurtre avec préméditation, je suis sûr qu’il n’en a rien fait, alors en ce moment il doit bien déprimer et cette visite lui aurait peut être remonté le moral. Ce n’est pas non plus Tetsuo, pour la simple et bonne raison que personne ne lui a jamais fait la moindre visite depuis que je suis ici, il ne parle à personne, on ne sait pas ce qu’il a fait, on connait son nom juste grâce à l’appel du matin pour vérifier la présence de tous. Cela aurait pu être pour Gaara s’il n’avait pas été privé de visites pendant deux semaines suites à une rixe avec Akira qui lui a fini en cellule d’isolement deux étages plus bas, sans même avoir la lumière du jour pour s’éclairer :

-Fils de pute !

Se met à crier mon voisin de gauche alors que l’individu passe devant, je ne fais pas attention de savoir s’il lui répond ou non, mais apparemment il continue son chemin pour finalement passer devant le mien, et s’arrête net devant ma cellule. Tient je n’aurais jamais pensé que ce serait moi que l’on viendrait voir, je lève alors ma tête pour voir cette personne qui daigne me voir et je laisse alors échapper une simple syllabe, pas vraiment dite par surprise, mais plus comme une sorte de déception :

-Oh…

Spoiler:

Apparemment le psychiatre n’a pas tout noté de ce que je lui ai dit, mais il est vrai aussi que j’avais été assez évasif sur ce passage lors de mon rendez-vous. Comment peut-on admettre que l’on a tué de sang-froid quelqu’un de parfaitement innocent ? N’importe qui vous prendrait pour un fou, un psychopathe ou bien n’importe quel autre type d’aliéné mental rejeté par la société car considéré comme une tare aux yeux de tous. Mais le génie n’en est souvent pas loin car souvent incompris par le commun des vivants. A quoi bon expliquer le dégoût que j’ai pu ressentir à ce moment-là pour cet élève, puisqu’il paraitrait monstrueux alors qu’il n’est que pure logique. Comment peut-on me juger sur ce crime, comment peut-on juger de ma vie ou de ma mort sans véritablement savoir ce que je suis, ce que j’ai vécu et ressenti durant mon existence ? Celui qui se prétend ainsi capable de trancher uniquement sur ces quelques instants qui ne sont que quelques secondes de ma vie ne vaut pas mieux que moi finalement…
La peine de mort ? Voilà une chose de bien embêtante, moi qui pensait que j’allais pouvoir me sortir de là d’ici peu grâce à un comportement exemplaire, je me retrouve face à un évènement inattendu qui semble totalement effacer ce qui s’est passé auparavant. On ose ainsi parler de justice là où se forme une injustice, quelle ironie du sort, mais pourquoi se forcer à être juste envers quelqu’un qui ne l’a pas été pour un autre ? Sauf que si l’on a suivi ce que j’ai dit, comment peut-on me juger en tant qu’injuste sur ce moment uniquement quand on ne connait pas toutes les variables de l’équation ? Alors ce système est faux, incroyablement faux et bancal, mais comment me faire entendre alors que je suis à leurs yeux un criminel ? Et même si j’en réchappais je n’arriverais pas à leur rendre raison, tout comme le sage ne le peux face à une centaine de fous qui se suffisent dans leur folie. Ainsi il ne me reste qu’une seule chose à faire : me fondre dans cette normalité, ou du moins la feindre, faire comme le sage que les fous traitent d’hérétique, se faire passer pour un fou…
Je me perds ainsi dans cette réflexion pendant un instant, bien après que l’homme ait fini de parler, sans même faire attention s’il s’impatiente ou quoi que ce soit, non je réfléchis un peu puis je dis :

-J’ai une question pour vous : Pourquoi mon crime aurait-il plus ou moins de valeur en fonction de la raison pour laquelle je l’ai fait ? La vie d’un homme n’a pas de valeur en soit, alors que ce meurtre ait été fait pour des raisons excusable ou non, il n’en reste pas moins un meurtre la chose la plus horrible qui soit en ce monde. Alors pourquoi chercher à monter un plaidoyer ? Pour tenter de me faire passer pour un déséquilibré mental et que ce n’est pas vraiment de la faute que je l’ai faite, mais de mon double dont je suis le seul à entendre ? Foutaises ! Vous connaissez le résultat de ma consultation avec le psychiatre et je ne suis en rien schizophrène. Je n’ai pas d’excuse pour mon acte et je ne vais pas en inventer car je n’ai pas envie de mentir ou bien même de me compromettre pour obtenir une liberté. Savez-vous comment on m’a arrêté ? Je me suis tout simplement rendu auprès des autorités, sans me battre, sans rien, je l’ai fait de mon propre chef sans qu’on ne me le demande car je connaissais les conséquences de mes actes. Je n’ai pas cherché à fuir, j’ai eu un comportement exemplaire de mon arrestation jusqu’à maintenant, en passant par mon jugement. Alors je vous pose une nouvelle question : Pourquoi me condamner à mort ? Je ne suis pas fou, ni psychopathe assoiffé de sang, et je peux vous assurer que la prison m’a appris une chose simple : plus jamais ! Je suis même prêt à reprendre les armes pour Suna, à être envoyer comme chair à canon, peu importe, surtout que vous avez besoin d’hommes avec la guerre…

Voilà je crois que tout mon plaidoyer est fait et dit, je n’ai rien d’autre à ajouter si cet homme n’est pas d’accord il peut toujours tenter de me convaincre par une ou deux phrase bien tournée mais cela m’étonnerait fort…

Au premier mot qui sort de la bouche de l’homme, un sourire apparait sur mon visage : conneries. Voilà qui est bien étrange, il a suffi que je dise quelques mots pour déclencher chez lui une réaction assez humaine et normale de l’énervement. L’aurais-je poussé à bout ? Non certainement pas, si cela avait été le cas il serait sorti d’ici d’une marche rapide et décidée, sans me dire au revoir et en claquant la porte. Non je l’ai juste titillé, voir sa réaction et comprendre ce qu’il a dans ses tripes. Il tente de me jauger pour faire un plaidoyer, et bien moi aussi je vais le faire, cela me semble logique. Par contre je dois admettre que je ne m’attendais pas à une telle répartie de sa part, qu’il me répondrait ainsi, je dois rire qu’ils sont rares les shinobis qui peuvent prétendre à un tel vocabulaire et un tel esprit d’analyse, s’il n’occupe pas un poste important je veux bien être pendu, d’ailleurs chose assez étonnante il me parle du Kage, s’il avait voulu citer un shinobi il se serait cité lui, mais soit... Enfin quand il finit de me « sermonner » et de répondre à ce que j’ai dit, je bascule ma tête en arrière contre le mur de ma geôle regardant le plafond monotone, pour finalement la rabaisser quelques secondes plus tard, soupirant et regardant droit dans les yeux l’homme :

-Conneries ? Si vous le dites, je n’oserais pas utiliser un tel terme avec vous car je vous dois aussi un minimum de respect, mais sachez que ce que vous me dites me blesse énormément.

Ça c’est une connerie, oui ! Comme si de simples propos émanant de quelqu’un que je ne connaissais pas pouvaient m’atteindre ?

-Oui l’art du shinobi est de tuer, mais il le fait uniquement quand il est nécessaire et c’est souvent quand la vie d’un autre ou de lui-même en dépend. Et cela n’a rien de contradictoire avec ce que je dis puisque la vie humaine n’a pas de prix, c’est juste un constat… D’ailleurs pourquoi choisir celle d’un homme plus que celle de l’autre ? N’est-ce pas tout ce qu’il y a de moins objectif que de tuer quelqu’un pour des principes d’honneur ou de vengeance ? Si l’on veut être le plus arbitraire possible autant lancer une pièce et tirer ça au hasard, mais malheureusement ceci est bien souvent impossible…

Je me lève alors de ma position assise, je fais quelques tours dans la salle tandis que je continue de parler calmement et le plus sereinement du monde, après tout cela faisait longtemps que je n’avais pas eu quelqu’un avec qui échanger sur de tels points, car souvent la plasticité cérébrale des shinobi est un concept abstrait à cause d’une éducation qui ne laisse aucun loisir à la réflexion et qui vous demande d’obéir aveuglement :

-Qui vous a dit que j’avais agis sans raison ? N’interprétez pas le fait que je ne vous réponde pas par une absence véridique de réponse et le fait de me rendre ne signe pas un manque de cohésion de ma part. Si le Kazekage comme vous dites doit faire face à un choix qui quoi qu’il arrive aura des conséquences sur le village, fera-t-il l’autruche en tentant de fuir ses responsabilités ? Je ne crois pas que nous vivions dans un désert de sable pour nous y enterrer la tête…

Puis enfin je m’approche de la grille, à moins d’un mètre de l’homme et encrant profondément mon regard dans le sien, je lui réponds finalement :

-Mais je ne compte pas mourir prématurément, que ce soit sur l’échafaud ou bien sur le champ d’honneur… Alors si vous y tenez tant je vais vous dire pourquoi je l’ai fait.
Ma vie, mon existence, sont le fruit d’une série d’évènement entrainés par mon code génétique, mon environnement qu’il soit social ou naturel, qui m’ont irrémédiablement conduit à l’acte qui s’est passé il y a de cela exactement un an et donc par conclusion : Ici !

Et en disant ce dernier mot je me recule en écartant les bras et je dis :

-Alors qui condamner puisque personne n’est véritablement coupable ?

Spoiler:

Maintenant je crois que le jeu est fini, le sérieux de mon interlocuteur me le fait comprendre, et si je veux espérer m’en sortir, je crois que la verve et l’esprit ne suffiront pas, même tous deux réunis. Si l’homme qui me fait face n’avait pas été d’un tel niveau je pense que même avec sa situation de supériorité j’aurais pu l’emporter sans dévoiler la vérité sur ce qui s’est passé ce jour-là. Une vérité que je comptais emporter dans ma tombe, où peut être que j’aurais osé l’écrire vers la fin de mes jours, quoi que, je n’en suis même pas sûr…
Assis sur la dure planche qui me sert de lit, je garde tout de même ce sourire que je porte depuis un bon bout de temps sur mon visage, même s’il me sert de couverture, il me permet de rester tout de même déstabilisant, après tout rares sont ceux qui gardent encore le sourire après une année passée dans ce trou à rat :

-Je ne cherche pas à fuir contrairement à ce que vous dites, mais à me protéger ! Je me protège de vous, je me protège des autres qui ne comprennent pas tout le temps, qui souvent font des amalgames sans même creuser la question. Si je vous disais pourquoi j’ai tué ce genin, il ne ferait aucun doute qu’à vos yeux je ne serais qu’un fou de plus en ce monde, juste en regardant cet acte. Et c’est ce que j’ai essayé de vous faire comprendre puisque vous semblez quand même plus vif d’esprit qu’un grand nombre de gens ici-bas.

Mon sourire s’efface peu à peu de mon visage tandis que je parle, laissant place à un air bien plus sérieux et concentré que jamais je n’ai pu l’avoir depuis le début de cette conversation, ou petit jeu comme je me suis amusé à le pensé :

-Et vous avez raison, les gens ne vous jugent pas sur la manière mais bien sur les actes, cependant il y en a qui obstruent très rapidement leur esprit, comme leur apposant des œillères et les formatant, créant ce qu’on appelle communément les préjugés. Le préjugé c’est un moyen de protection de l’individu mais c’est aussi avec le temps une de ses faiblesses. Si vous leurs dites que j’ai volontairement tué un genin, tous les autres actes que j’ai pu faire durant mon existence se verront disparaitre, caché par ces œillères, et c’est cela que je veux éviter, car je sais que je vaux bien mieux que ça. Je ne me considère pas comme profondément méchant ou fou, mais que vaut ma parole désormais puisque l’on sait que j’ai déjà tué ? Et le fou n’est-il pas le premier à se croire le plus saint d’esprit ? Alors oui ma réaction semble à s’y méprendre à une fuite, mais elle est légitime, et contrairement à ce que vous dites, je ne renie pas ce que j’ai pu penser, faire ou entrainer…

Finalement je ne fais plus que regarder l’homme droit dans les yeux, l’affrontant de mon regard, gardant toute ma dignité et mon honneur, si l’honneur est quelque chose que l’on pourrait qualifier de qualité. En effet l’honneur a entrainé en ce monde bien plus de mort et de souffrance qu’il n’a pu sauver de vie et nourrir de bouches…

-Je l’ai tué volontairement, ça vous vous en doutez puisque si cela avait été un accident, je ne pense pas que l’on me laisserait pourrir entre quatre murs…Ensuite je l’ai tué proprement et rapidement, c’était lors d’un entrainement au Kenjutsu, je lui ai tranché la gorge, ça lui a évité de souffrir trop longtemps. Si vous voulez savoir pourquoi je l’ai tué, ce n’est pas compliqué, il représentait à mes yeux tout ce que ce monde pouvait porter de plus, un shinobi faible, arrogant de par ses origines claniques alors qu’il ne valait pas mieux que le petit gamin qui mendiait à l’époque sur la grande place de Suna. Un faible méprisable qui faisait honte au village mais aussi à l’ensemble des shinobis de ce monde. Un meurtre non prémédite, mais de sang-froid, ce qui n’arrange rien à mon cas et je le sais pertinemment.

Pendant un moment je reste silencieux, l’atmosphère s’est désormais alourdi, et mon regard pars se cacher quelques instants dans un coin sombre de ma geôle. Puis quand je décide de reprendre, celui-ci retourne se fixer dans les yeux de mon interlocuteur :

-Est-ce tout ce que vous vouliez savoir, ou bien vous avez encore d’autres questions à me poser ?

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