Les températures sont tout de même plus douces à Iwa. Mais mon clan me manque. Mes parents m’ont laissé partir avec une partie de leurs économies et avec le soutien de Sugako, notre cheffe de clan, j’ai traversé les montagnes dans la plus grande discrétion. Même si les rumeurs disent que l’Empereur est tombé, notre Daimyo reste une menace sur mon Pays. S’enfuir du Givre est un acte dangereux, mais Sugako semblait y tenir, elle a été un soutien pour moi. Elle a appuyé mon envie de partir vers ce fameux village d’Iwa, sans elle, mes parents ne m’auraient pas laissé partir, surtout que je suis le seul enfant qui leur reste… Mais je vais leur envoyer un message par le biais d'un ami de Sugako. Elle m'a dit que c'était une manière de rester en contact avec mes parents, car cet homme était en ville à Shimo. Les courriers ne sont jamais sûrs d'arriver à destination, mais avec lui, ça devrait aller !
Le regard apeuré et triste qu’elle arborait se porta sur son annulaire qui portait l’anneau de cristal ; souvenir de son frère.
Le Kage de ce petit village est un Samui. Sait-il d’où je viens et qui je représente ? Il y a tellement de monde ici, comparé aux montagnes, et tout semble si… raffiné. Je me demande comment les gens trouvent leur nourriture ou leurs vêtements. Tout est tellement différent. Et les gens me regardent bizarrement lorsque je leurs réponds avec mes mains, ne connaissent-ils pas le langage des signes ? Ou c’est moi qui suit bizarre, vu que ne je parle pas…
La neige était toujours présente. Les pas de la jeune adolescente traçaient un sillon au sol, qui s’effaçait au fur et à mesure des minutes qui s’écoulaient.
Même loin de ma famille, à des milliers de kilomètres, je marche sur la même neige blanche et froide recouvrant les montagnes qui abritent mon clan. Oniisan… Tu me manques tellement. Ma famille me manque tellement. Mais j’ai choisi cette vie pour toi, je veux vivre la vie que tu voulais. Je vis pour toi, Oniisan.
Le village fourmillait devant les yeux observateurs de Taya qui était perdue devant tant d’activité.
Hm… Quelle est cette odeur… ? Oh, ça vient de cet établissement ! Ham-bur-ger… ? c'est quoi ?
- Arrête, c’est des conneries tout ça ! Yama ça existe pas, c’est juste un mec qui sait pas quoi faire de sa journée, alors il se prend pour c’qui l’est pas ! Un autre saké, Gyaruson ! - Mais si j’te jure ! Il a trop raison ! Un Samui qui remplace un Samui, tu parles ! Que des mensonges, tu crois vraiment tout ce que le gouvernement te dit toi hein. Ça ne te paraît pas bizarre que le Kamui se fasse remplacer par un même membre de son clan ? T’es con ou quoi ! - Hmpf… Tu parles trop, Genkichi, tu parles vraiment trop.
Les conversations d’arrière-plan étaient vives, Taya n’était pas habituée à autant de vacarme.
Malgré l’odeur alléchante, la Kunoichi avait encore du mal à agir « comme tout le monde », autant de monde concentré dans un seul espace c’était vraiment quelque chose de tout nouveau. Et ce bruit, tellement de bruit !
- Oi ! Bienvenue chez Rei ! J’vous sers quelque chose, Komusume ?
Taya ouvrit de gros yeux lorsqu’un homme d’une quarantaine d’années vint à sa rencontre pour lui proposer leur spécialité : le hamburger. N’ayant pas le réflexe de dire non, la Kunoichi hocha sa tête vivement ce qui plu au vieil homme.
- Allez vous asseoir, j’vous ramène le plat dès qu’il est prêt !
Encore une journée d’hiver… Mais aujourd’hui, Hiko s’était réveillé sous un spectacle magnifique. La rue, les toits… Tout était recouvert d’une fine pellicule de neige, rendant ainsi la vision du village sous un angle complètement différent. Le rendant presque… Attrayant ?
Ce fut donc du bon pied que l’enfant se leva ce matin, il prit rapidement sa douche et profita de sa journée de permission hebdomadaire pour buller un peu dans son deux pièces. Il n’était pas très grand, mais il commençait à l’apprécier. Lui qui avait toujours vécu comme un nomade, il commençait à s’attacher au symbole le plus représentatif du sédentarisme.
Mais une journée comme celle-ci, aussi fraîche puisse-t-elle être, ne méritait pas qu’on rester terré dans son appartement. Ce fut donc pourquoi l'enfant s’habilla de ses chauds habits de shinobis et prit la direction de la porte pour sortir. En passant, il vit alors son bandeau shinobi, marque d’appartenance au village caché d’Iwa, posé sur la commode. D’ordinaire, il n’y aurait même pas prêté attention… Mais là, il se décida à le prendre et à l’accrocher au niveau de son biceps droit.
Un signe de fierté d’appartenir à cette puissance militaire ? Non… Il ne fallait pas abuser non plus. Hiko l’avait pris car il devait faire bonne impression s’il voulait un jour pouvoir repartir. Jour après jour, mission après mission… Hiko payait sa dette pour le meurtre du Jônin. Et le jour viendra où il aura totalement remboursé Iwa. Et ce jour-là…
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Sortant de son appartement, Hiko respira une grande bouffée d’air. On aurait dit qu’il était plus pur. Comme si toute cette neige supprimait toutes les toxines liées aux différentes activités industrielles se trouvant dans les bas quartiers. Il ne savait pas ce qu’il allait faire de sa journée, mais son corps oui…
Car un énorme grondement se fit entendre. Il provenait de son ventre. Il avait sauté le dîner d’hier car il était revenu trop tard de mission. Il était tout juste l’heure du déjeuner, et ce fut donc pourquoi il prit la direction du quartier des restaurateurs. En arrivant, au bout de quelques minutes de courses mêlées à des glissades enfantines dans la neige, il remarqua alors qu’il n’était sûrement pas le seul à avoir aussi faim. Tous ses restaurants favoris étaient pleins et aucune chance d’avoir une place. Ce fut donc pourquoi il rentra dans un restaurant qui venait d’ouvrir.
En arrivant, il vit alors qu’il n’y avait qu’une seule place de disponible. C’était en face d’une jeune fille. Sans prendre le temps de demander, Hiko se rua alors dans le petit box et s’assit en face de la jeune femme. Il saisit alors le menu qui était sur la table sans lui décocher un mot, et leva son bras pour appeler une serveuse. Une fois arrivée, Hiko lui fit un grand sourire et lui passa alors commande.
- Salut ! Je vais vous prendre un triple cheese-burger avec des… Frites ? Et en plus de ça je vous prendrai ce poulet grillé accompagné d’une grande boisson énergétique s’il vous plaît !
La serveuse la regarda alors bouche bée. Il lui fit alors un grand sourire et ajouta, en faisant semblant, fièrement.
- Eh oui ! Quand on est un shinobi aussi fort que moi, on mange beaucoup pour reprendre des forces !
Puis il partit dans un petit rire bruyant.
Pendant ce temps-là, les deux quidams qui avaient évoqué le groupe « Yama » tout à l’heure le regardèrent d’un œil mauvais et l’un des deux ne put s’empêcher de faire un commentaire.
- Voilà à quoi on en est réduits. On doit faire confiance à des gosses qui n’ont même pas encore mué pour assurer notre protection ? Franchement… Ce village devient n’importe quoi. Il mériterait qu’on lui foute une raclée pour la ramener aussi fort ce petit con !
Hiko entendit évidemment ces paroles, tout comme la jeune femme devant lui. Mais il ne réagit pas, et garda en apparence son sourire. Il la dévisageait maintenant en silence, mais restait attentif à ce qui se passait autour de lui. Nul doute qu’ils allaient s’énerver, le problème était… Hiko répondrait-il du tac-au-tac ?
Il y a trop de monde. Je ne suis pas à l’aise, j’aime pas ça. Heureusement que les gens d’avant sont partis, sinon j’aurai dû rester debout à attendre pour une place. Oniisan, comment as-tu pu désirer une telle vie, c’est fou !
Ses yeux perdus dans la foule, elle ne remarqua qu’au dernier moment qu’un jeune garçon prit la place assise devant elle. À la même table. Juste comme ça, là.
Si je souris, il devrait se sentir à l’aise ! En tout cas, il a une sacrée faim.
- Votre commande arrive bientôt, finit la serveuse avant de repartir.
Ah tiens, les gens sont plutôt méchants ici. Et une peu stupide s’ils s’imaginant qu’on ne les entend pas dis donc. Aller, calmons les esprits, continue à être souriante, il faut qu’il se sente bienvenu à ma table et qu’il oublie les autres grincheux !
Taya prit les devants, attrapant de sa main gauche celle de son voisin de table afin de capter son attention. Son premier contact allait être simple, elle se contenta de le saluer, mettant sa main sur son menton et en l’avançant paume vers l’avant devant le jeune adolescent, tout en mimant le mot avec ses lèvres. « Bonjour » en langue des signes.
« COMMENT - VAS - TU ? » continua-t-elle en bougeant ses mains d'une manière contrôlée.
S’il ne comprend pas la langue, ça va être compliqué. Heureusement que j’ai du papier et un stylo dans ma poche. J’imagine que ce sera moins compliqué pour communiquer, enfin pour lui, pas pour moi. C’est long d’écrire. Il faudrait que je trouve un moyen plus intéressant et rapide pour ça. Je pourrais bien utiliser mon Shotôn, mais je n’ai pas envie de me faire remarquer. Il ne manquerait plus qu’un Samui soit dans la salle…
Son humeur joyeuse se transforma légèrement en petite moue, mais redevint normal lorsqu’elle glissa son carnet vers le garçon en le retournant pour qu’il puisse le lire, et comprendre.
Comment vas-tu ?
Le regard de la jeune Taya était semblable à un enfant, émerveillé, curieux, amusé et impatient. C’était la première fois qu’elle discutait ainsi avec un étranger, hors de son clan et dans de telles conditions.
C’est ça l’aventure ! J’espère que tu me regardes de là-haut, Oniisan.
- Voilà votre burger, jeune demoiselle. Bon appétit !
Haaan ! Mais c’est immense, je n’arriverais pas à tout manger. Hm… ça sent tellement bon.
Sans attendre, l’adolescente pris une énorme bouchée de ce met exotique, sans savoir que cela deviendra son repas favori et sans avoir remercié la serveuse. Dans sa bouche, mille et une saveurs s’entrechoquaient. Si sa voix n’exprimait pas son extase, ses yeux écarquillés et la rapidité de déglutition s’en chargeaient tout aussi bien.
Euh… Elle est un peu bizarre cette fille non ? Au lieu de lui parler normalement, elle lui souriait et agitait ses mains avec habilité. Hiko resta alors bouche bée, il ne s’attendait pas du tout à ce que la jeune femme devant lui soit atteinte de mutisme. Ne sachant quoi répondre, il s’était concentré sur les gestes de la jeune femme et les larmes lui montèrent alors aux yeux… Cette jeune fille lui rappelait un souvenir… Un souvenir déchirant qui avait marqué le cœur du jeune garçon lors de la Grande Guerre. Akami… Cette kunoichi aussi était atteinte de mutisme et il ne put alors réfréner quelques larmes qui perlèrent sur ses joues.
Reprenant ses esprits après ce moment de faiblesse, Hiko essuya ses joues d’un revers de la main et rigola un peu nerveusement. Il regarda alors la jeune femme qui lui avait tendu un papier, lui demanda comment il allait. Hiko lui sourit alors et lui répondit alors que son plat énorme venait d’arriver.
- Ah ah… Désolé pour ça ! Je vais bien et toi ? Comment tu t’appelles ?
Cette jeune femme l’avait attendri. Il ne s’attendait pas du tout à ce genre de rencontre et il fallait avouer que cela n’était pas terminé. Car il venait de prendre une énorme bouchée de son triple cheeseburger et c’était un vrai délice, une explosion de saveurs qui venait de s’installer dans sa bouche. Et alors qu’il s’efforçait de bien mâcher comme on le lui avait appris, il entendit que les gens commençaient à se chauffer.
En effet, les deux hommes derrière lui semblaient avoir déjà consommé de nombreuses pintes de bières et ils venaient de se lever de leur table dans un grand fracas. L’un d’eux, celui qui était contre le fait que les shinobis protègent le peuple, s’approcha de la table des deux adolescents et il posa bruyamment ses mains sur la table. En le faisant, il fit alors voler les deux assiettes qui s’écrasent et s’éclatèrent par terre dans un grand fracas. Tout le restaurant retint alors son souffle, alors que l’homme prit la parole bruyamment en désignant les deux gosses.
- J’en ai marre de voir de sales gamins qui pètent plus haut que leurs culs ! Vous vous croyez supérieurs à nous alors que vous n’êtes encore que des minots ! Et tout ça pourquoi ? Parce qu’il a été établi que vous étiez supérieurs car vous êtes des shinobis ? Franchement… Voilà ce que vous méritez !
D’un revers de la main… L’homme envoya alors une grande gifle dans le visage du jeune garçon aux cheveux blancs qui ne broncha pas et baissa la tête sans dire de mots. Il ne réagit pas à la provocation… Du moins pas directement.
- Ah ah, c’est bien ce qui me semblait… Tous les mêmes, vous n’êtes que des grandes gueules… ! Et toi la gamine ? Tu ne dis rien pour protéger ton petit copain ? Toi aussi t’es une poule mouillée comme la blanche neige assis en face de toi ?!
Hiko n’avait pas réagi… Mais ceux qui pouvaient voir son visage pouvaient voir une fureur apparaître dans ses yeux. Il était en train de se contenir, mais sa rage finirait sûrement par éclater incessamment sous peu… Un léger tremblement se saisit alors de son corps… L’explosion était proche !
