Ordre de mission:

- Fin du printemps de l'année 16 -

Debout, une main posée sur le bastingage d'un bateau en bien piteux état, la Natsumi fixait l'horizon. Le dos tourné à la grande île qu'ils venaient de quitter, la jeune femme tentait de vider son esprit de toute pensée.

Le petit bateau dans lequel la jeune femme s'était embarquée était surchargé de ravitaillement et ne possédaient pas d'assez grands voiles pour être poussé correctement par la brise qui était pourtant bien présente. La Natsumi regrettait presque de ne pas avoir loué plutôt une barque qu'elle aurait avancée en pagayant au lieu d'avoir payé un passage dans navire marchand qui avançait à la vitesse d'une limace. La jeune femme se demandait même si le navire allait arriver à destination un jour.

Ne désirant réfléchir à ce qui l'attendait, ni à la raison qui l'avait poussé à se diriger vers la direction qu'elle prenait présentement, la samouraï rentra dans un état de semi-médiation. Chose qu'elle avait apprise durant son enseignement pour suivre la voie du bushido. Les yeux grands ouverts, elle ne pensait plus à rien mais tous ses sens étaient en éveil. Le moindre bruit lui parvenait distinctement. Des voix des passagers à bord à l'eau de mer qui se fracassait mais en douceur sur la coque du navire qui avançait d'une lenteur sans nom.

La grande île où se trouvait le Village Caché du Pays de L'eau finit portant par disparaitre complètement mais un incident qui s'annonçait assez fâcheux se présenta rapidement.

- Un bateau pirate ! Cria un homme tout en pointant du doigt le bateau qui se profilait à l'horizon.

Un navire de taille bien modeste - pour pouvoir certainement se faufiler plus facilement entre les îles - s'approchait à une vitesse rapide contrairement à l'escargot qui servait d'embarcation à la Natsumi et ses compagnons de circonstance. Celui-ci arborait fièrement un drapeau noir orné de la tête de mort si singulière qui permettait d'identifier sans détour l'intention de ceux qui se tenaient sous l'étendard bien provocateur.

- Je pensais qu'il n'y avait plus de pirates depuis la reconstruction du Village Caché ! … Qu'est-ce qu'on va faire ?
- On n'a qu'à leur laisser prendre ce qu'ils veulent à bord pour qu'ils épargnent notre vie !
- Mon Dieu ! Si j'avais sû, je n'aurais pas pris la mer !

La panique ne tarda pas à gagner l'équipage. Seule la Natsumi avait gardé totalement son sang froid parmi les passagers à bord.

Mizu no Kuni avait été longtemps abandonné au banditisme en tous genres après la chute de son Village Caché. Étant reconstruit que récemment ce dernier n'avait pas encore assez d'influence pour dissuader toutes les vermines qui avaient imposé leur loi - en mer comme sur la terre ferme - au sein du grand archipel d'abandonner leur occupation criminelle. Le Rokudaime Mizukage essayait actuellement de remédier à ce problème mais sécuriser le pays tout en entier était une tâche qui demanderait du temps.

La Natsumi avait été mise au courant de la situation et s'attendait donc à tomber sur un incident du genre durant son déplacement. Ce qui ne semblait pas être le cas cependant des marchands qui reprenaient la mer pour la première fois depuis la renaissance de Kirigakure no Satô. Ceux-ci pensaient de toute évidence que leur trajet se déroulerait sans ennui.

Alors que les infortunés marchands étaient en proie à la panique, sortant de son état de semi-méditation, sereinement la Natsumi abandonna sa position pour se placer du côté où le bateau pirate s'approchait. Une main fermée sur le manche de son katana la samouraï attendit que le navire fût assez proche avant de dégainer son sabre tout en fendant l'air devant elle dans l'élan. Aussitôt la Natsumi rengaina son sabre tout en gardant les yeux rivés sur le bateau en bois qu'elle venait de cibler.

Le navire pirate se divisa en deux puis chaque morceau commença tout doucement à sombrer alors que des cris de panique s'élevèrent dans les airs. De leur côté ce fut par contre le silence complet. Abasourdis, les marchands regardaient la samouraï des gros yeux un moment puis soudain un commença à crier victoire et aussitôt ses compagnons l'accompagnèrent dans son hilarité. La Natsumi se contenta de fixer ses compagnons de voyage dans le silence et le visage complètement placide.

- Nous … nous vous remercions beaucoup, finit par lâcher timidement le chef d'équipage alors que les hommes finirent par se rapprocher de la femme qui venait de les secourir. Puis-je me permettre de demander qui vous êtes ?

La Natsumi fixa un instant les hommes si naïfs qui l'avaient fait monter à bord moyennant quelques ryo sans chercher à savoir son identité bien qu'elle était armée de plusieurs sabres. Tout ce qu'ils savaient c'était qu'elle désirait se rendre sur la même île qu'eux.

- Je suis juste une samuraï au service du Rokudaime Mizukage. En son nom, je vous prie de l'excuser de l'insécurité actuelle du pays mais comprenez qu'après tant d'années livré à lui-même, il faudra du temps pour sécuriser tout Mizu no Kuni mais c'est une tache sur laquelle le nouveau Mizukage se penche sérieusement actuellement.
- Nous comprenons très bien et puis ... vous nous avez sauvés, fit l'homme avec un sourire intimidé tout en se grattant l'arrière-crâne comme s'il avait honte d'avoir été secouru par une femme. Veuillez transmettre notre reconnaissance au Rokudaime, ajouta-t-il ensuite d'une voix plus sérieuse.

La Natsumi se contenta d'incliner légèrement le haut du corps en guise d'acceptation.

Le reste du trajet se déroula sans encombre et même dans une bonne ambiance alors que la samouraï avait été invitée - pour ne pas dire forcée - à se mêler au reste de l'équipage. Les hommes se permirent enfin de lui demander la raison qui l'amenait sur Honryuu, l'île de leur destination. Un territoire appartenant à l'archipel de Mizu no Kuni et actuellement dénué de civilisation mais dont l'atmosphère était étrangement imprégnée de chakra. C'était comme si les plantes qui y poussaient dégageaient cette source de pouvoir de shinobi. Ce qui faisait donc de l'île un lieu propice à l'initiation au ninjutsu. Voilà pourquoi aujourd'hui le nouveau Mizukage avait entrepris d'y construire un établissement où sera enseigné l'art de manipuler le chakra à qui désirerait apprendre à se défendre afin de protéger les siens. La mission de la Natsumi était de superviser l'avancée des travaux ...

Lorsque le petit navire accosta Honryuu, la baie aménagée en port de circonstance de l'île était en pleine effervescence. Des hommes s'affairaient pour vider un bateau bien plus grand que le leur des matériaux de construction. Ils entassaient des planches, des poutres et d'autres objets destiner à bâtir sur la plage que d'autres hommes s'occupaient de transporter les uns après les autres dans la forêt.

Un homme dans la quarantaine se précipita vers les nouveaux arrivés alors que la Natsumi et le capitaine du bateau de ravitaillement posaient pieds à terre. Ayant appris la raison de la présence du petit navire, l'homme fit venir quelques hommes pour aider à transporter les denrées et autres premières nécessités qui se trouvaient à bord.

À peine vidé de ses cargaisons, le petit bateau qui avait transporté la Natsumi regagnait déjà le large. L'équipage ne tenait pas à naviguer durant la nuit alors ils repartirent aussitôt que possible et avec la peur de rencontrer de nouveau des pirates en chemin. La Natsumi aurait pu leur proposer sa compagnie pour le retour vers la grande île mais elle-même ne savait pas combien de temps elle restera sur Honryuu. Ses anciens camarades de navigation n'avaient eu donc d'autres choix que d'affronter leur frayeur et de miser sur la chance pour arriver au bon port sans encombre. La samouraï les rassura en leur exposant que les attaques maritimes étaient en voie de disparition et que l'incident de tout à l'heure n'était que fruit de la malchance et ne risquait pas de se reproduire de sitôt. De plus leur bateau vide n'intéresserait certainement pas les pirates et leur permettrait de fuir plus aisément en cas de besoin.

Priant que rien n'arriverait aux marins, Mairu fixa leur navire qui s'éloignait. Ce fut la voix de l'homme qui était chargé de gérer le débarquement des matériels qui détourna le regard de la samouraï

- Vous n'êtes pas avec eux ?
- Non. J'ai été envoyé par le Rokudaime Mizukage pour superviser l'avancement des travaux.
- Vous êtes une cheffe de chantier ? ... Vous n'en avez pas l'air, fit l'homme dont le regard se bloqua sur l'opulente poitrine de la jeune femme.
- En effet je n'en suis pas une, se contenta de débiter la Natsumi tout en se dérobant du regard vicieux de son interlocuteur en allant suivre les hommes qui s'éclipsaient dans la forêt avec les matériaux et ravitaillement.

Les hommes lourdement chargés la fixaient étrangement se demandant certainement ce que la jeune femme pouvait bien faire là mais cette dernière ne leur accorda la moindre attention à part celle d'essayer de ne pas les gêner dans leur avancée.

Suivant le sentier fraichement tracé à travers la forêt, la Natsumi ressentit la présence de plusieurs auras éparpillées dans la nature alors qu'elle déplorait ses sens pour analyser les environs. Elle reconnaissait deux des signatures auratiques les ayant déjà identifiées à Kiri. Celles-ci appartenaient à deux chuunin fraichement promus. Les présences dont elle était certaine que les ouvriers ne soupçonnaient même pas l'existante arrachèrent un sourire en coin à la Natsumi alors que ses pensées allèrent vers Shinda Michiki.

Après presque une heure de marche, la Natsumi et les hommes qu'elle avait suivis atterrirent sur un endroit bien dégagé et où un début de chantier avait déjà commencé à pousser. Sans perdre de temps, après avoir interrogé un ouvrier pour savoir où elle pouvait trouver la personne qu'elle cherchait, la jeune femme se retrouva dans la tente d'un certain Oshida, le chef de chantier en cours. C'était un bonhomme trapu avec une charmante barbichette.

- Attendez ! Si j'ai bien compris, le Rokudaime vous a envoyé faire mon travail à ma place ?
- Non. Je ne suis pas là pour dicter ce que vous devez faire, ni donner des ordres aux ouvriers mais juste m'assurer que tout se déroule bien.
- En gros vous êtes là pour surveiller si nous faisons correctement notre travail ?
- Prenez cela comme il vous plaît mais j'ai reçu un ordre. Si ma présence vous déplaît, vous n'avez qu'à vous plaindre auprès du Mizukage.
- Êtes-vous un shinobi ? Demanda l'homme tout en fixant le daisho de la samouraï.
- Non.
- Donc vous n'êtes même pas en mesure d'assurer notre sécurité. Votre présence n'a donc aucun intérêt !
- Transmettez donc votre opinion au Rokudaime ! Sur ce, si vous permettez …

Sans plus attendre, la Natsumi s'éclipsa de la tente après une légère inclinaison à l'intention de son interlocuteur.

En vérité, Mairu non plus ne comprenait pas vraiment l'intérêt de sa présence en ce lieu. Elle devait assurer la bonne conduite des travaux mais le chef de chantier n'était pas déjà en charge de ce devoir ? La réponse n'intéressait pas réellement la jeune femme qu'elle ne s'attarda pas plus longtemps sur la question. La samouraï était du genre à obéir sans se poser de questions tant que l'ordre donné ne la poussait pas à enfreindre ses propres principes. Le Mizukage l'avait envoyé en mission ici et elle ferait tout pour mener celle-ci à bien. Ce fut dans ce but que la Natsumi effectua un premier tour du chantier sous les regards inquisiteurs et non dénués d'égarement sur ses formes généreuses des ouvriers …

- Où est encore passé ce satané marteau !? Je suis sûr de l'avoir posé là !
- Tu en es certain ?
- Puisque je te dis que j'en suis sûr !
- Non mais c'est le troisième que tu égares !
- Tu insinues que je les ai caché exprès ?
- Non, ce n'est pas ce que …
- Je peux savoir ce qui se passe ici ? Gueula Monsieur Oshida qui, alerté par les cris des deux ouvriers, s'était précipité vers ces derniers.
- On a volé mon marteau !
- Voler ? Es-tu sûr de ça ?
- En tout cas on me l'a pris parce que je suis sûr de l'avoir posé là, ici là ! Insista l'homme tout en désignant du pied l'endroit où il était certain avoir posé l'objet perdu à son retour de la pause-déjeuner.
- C'était le troisième marteau qu'on te confiait. À ce rythme, on ne va plus en avoir assez pour finir les travaux ! … Et comment se fait-il qu'il y a que toi qui perds ses outils ?
- Qu'est-ce que j'en sais moi !? Quelqu'un est peut-être en train de me faire une mauvaise farce ! En tout cas, je vous rassure que je les ai pas volés vos marteaux, si c'est ce que vous pensez !

Monsieur Oshida fixa un moment celui qui cherchait à s'innocenter tout en caressant délicatement sa barbichette. D'un regard suspicieux et concentré, il essayait de sonder l'ouvrier qui se tenait devant lui afin de savoir si ce dernier disait vrai ou mentait.

- Prends le poste d'Ishida et renvoie-le ici ! Finit par lâcher le trapu à la barbichette.

L'ouvrier s'exécuta en allant prendre la place du dénommé Ishida qui se trouvait parmi le groupe charger de mesurer et de couper les planches, poutres et autres matériaux du genre.

Debout un peu plus loin, la Natsumi avait assisté à la scène et avait écouté avec la plus grande attention ce qui se disait puis elle attendit que le chef de chantier s'éclipsât de nouveau dans sa tente pour aller le retrouver.

- Pourquoi n'êtes-vous donc pas en train de faire votre travail ? Lâcha sèchement Monsieur Oshida à peine avait-il remarqué l'arrivée de la Natsumi comme s'il l'attendait. Il me semble que le Rokudaime vous ait chargé de faire en sorte que tout se passe bien et nous avons actuellement un problème qui peut prendre de l'ampleur si cela continue. La perte des matériels peut paralyser un chantier si cela persiste !
- Les autres fois c'était quand ? Se contenta de demander sereinement la samouraï, ignorant le sarcasme de son interlocuteur.
- La première fois c'était il y a trois jours, la seconde tout juste hier.
- D'autres pertes de matériels autres que … ces marteaux ?
- Pas à ma connaissance.
- Continuez de faire comme si vous n'accordez aucune importance à cette affaire et faites comme si je n'étais pas dans la confidence.

Sans attendre une réponse de la part de l'homme qui ne semblait pas trop l'apprécier pour une raison que la Natsumi ne cherchait même pas à comprendre - bien qu'elle devinât d'où vînt l'antipathie qu'elle qualifiait personnellement de bien déraisonnable du petit bonhomme - la samouraï s'éclipsa.

Ne pas ébruiter le fait qu'ils accordaient de l'importance à la disparition des trois marteaux était pour éviter d'éveiller la suspicion du coupable. Si ce dernier prenait connaissance que la samouraï cherchait à le coincer, celui-ci pourrait alors cesser son acte incompréhensible hors Mairu désirait lui mettre la main dessus. La jeune femme jugeait qu'il était primordial de coincer le responsable afin d’étouffer le risque que cette histoire ridicule ne recommence lorsqu'elle devra s'absenter.

La Natsumi trouvait cette affaire bien ridicule et pensait même que celle-ci n'était réellement qu'une mauvaise farce comme l'avait annoncé celui qui avait perdu les marteaux mais c'était surement pour éviter ce genre de désagrément, minime était-il, que le Mizukage l'avait dépêché ici. C'était donc pour accomplir son devoir et non pour faire plaisir au chef de chantier qu'elle avait accepté de résoudre l'énigme assez grotesque mais la nuit finit par s'installer et la surveillance qu'elle avait déployée discrètement durant l'après-midi n'aboutit à rien. Aucun autre incident ne se produisit et elle n'avait aucun suspect potentiel en vue, ayant lavé de tout soupçon celui qui avait perdu les matériels car elle ne voyait aucune raison qui pousserait celui-ci à dérober ses propos outils, sachant qu'il serait le premier à être accusé. Selon Mairu, le coupable était un autre et surement quelqu'un qui en voulait au premier mais restait à découvrir qui. Peut-être que le responsable agirait durant la nuit que la samouraï s'apprêtait à passer en conséquence les sens éveillés.

Une nuit blanche en perspective pour une histoire des marteaux disparus. La Natsumi elle-même trouvait cela risible mais son devoir l'obligeait à s'y plier …

Malgré l'aversion qu'il entretenait à l'encontre de la jeune femme envoyée - selon lui - pour les espionner, Monsieur Oshita aménagea un coin pour dormir à la Natsumi dans la tente destinée à abriter des matériaux sensibles aux intempéries. Difficile de savoir si parce que la samouraï avait été envoyée par le Mizukage ou simplement parce que le trapu à la barbichette n'était pas un homme complètement déraisonnable au fond qu'il avait daigné accorder un abri pour la nuit à la Natsumi qui était venu avec aucun matériel de couchage. Décision à laquelle Mairu - fidèle à son indifférence presque méprisable - ne chercha point à comprendre. Elle se contenta de remercier le chef de chantier comme il se devait avant de disparaitre aussitôt sous la tente où elle ne resta pourtant pas bien longtemps. Une fois tout le monde endormi, excepté ceux qui avaient été désignés de garde pour surveiller le chantier durant la nuit, Mairu sortit discrètement de sa tente pour se hisser sur un arbre à l'écart et d'où elle pouvait avoir une vue d'ensemble sur le campement illuminé par des feux de camp ici et là.

Fermant les yeux pour rentrer dans un état de semi-méditation lui permettant de déployer tous ses sens, elle guetta le moindre mouvement d'aura dans les environs. Chose qui lui était étrangement si aisée car outre le calme qui lui permettait une facilité de concentration, le bienfait de la forêt semblait booster sa faculté de perception. L'étrange énergie similaire au chakra qui dégageait de l'île y était surement pour quelque chose.

Rapidement, la samouraï détecta que les auras qu'elle avait senti dans la forêt en chemin s'étaient rapprochées du campement mais aucune ne s'aventurait dans le périmètre du chantier. Les présences étaient immobiles et séparées en deux groupes distincts et en nombre illégal. Le premier n'était composé que de trois personnes, dont les deux qu'elle avait réussis à identifier les signatures auratiques, alors que l'autre était formé d'une dizaine d'individus. Chose que la samouraï trouva suspecte. Si elle avait une idée sur le pourquoi de la présence du trio, elle avait cependant une forte suspicion concernant celle de la grosse équipe. Ainsi, dès que l’aube fut assez claire pour lui mettre de voir où elle mettait les pieds, la samouraï fila en direction de l’endroit où se trouvait le plus gros groupe. Lieu qu’elle ne mit pas longtemps à atteindre. L’attroupement se trouvait à l’intérieur de ce que la Natsumi supposa être grotte bien dissimulée par la nature bien abondante autour car mis à part deux hommes assoupis contre un arbre, elle percevait les présences mais ne les voyait pas physiquement.

Perchée discrètement sur un arbre, Mairu analysa avec la plus grande attention les deux endormis supposés certainement monter la garde. Chacun était armé d’un sabre que ses yeux exprès pour analyser ce type d’arme jugèrent de bien piètre qualité en plus d’être mal entretenu. Les accoutrements des deux hommes révélaient plus de ceux des bandits de chemin que des êtres civilisés. Les deux personnages n’étaient certainement pas des camarades shinobi du village de la Brume comme l’avait supposé la samouraï au départ. Ce qui l’amena à se demander ce que le groupe pouvait bien faire dans les environs.

Des bandits qui se reposent pour la nuit ? Se demanda silencieusement la jeune femme. Non, ils se sont installés bien trop loin de la côte pour n’être là que pour une simple halte nocturne.

Le mystérieux groupe avait réussi à dénicher une caverne en plein milieu de la jungle. Mairu supposa alors qu’ils devaient bien connaître le coin sinon ils avaient eu une sacrée chance d’être tombés sur celle-ci car même depuis sa position, la samouraï ne parvenait pas à distinguer l’entrée de la grotte qui devait être dissimulée derrière des plantes sauvages.

Surement des brigands qui ont choisi Honryuu comme cachette, finit par conclure intérieurement la Natsumi qui décida ensuite de retourner sur le chantier de construction alors que le soleil menaçait de se pointer.

La samouraï préférait éviter de se faire repérer pour que la mystérieuse troupe continue de faire comme si personne n’avait réussi à démasquer leur présence dans le coin. Peut-être commettrait-elle un impair qui pourrait alors la pousser à les arrêter mais pour l’heure, elle n’avait aucune preuve de leur mauvaise intention même si elle supposait que celle-ci n’était composée que des malfrats. La samouraï ne tenait pas à arrêter des êtres sur des simples suppositions. Acte que même le Mizukage en personne n’approuverait certainement pas car malgré ce que beaucoup pensaient, Shinda Michiki n’était pas un tyran …

Un nouveau jour finit par s’installer. Comme à la coutume, les activités reprirent très tôt sur le chantier. Bientôt des bruits des marteaux et les cris de Monsieur Oshida ordonnant à ses ouvriers d’exécuter correctement leur travail s'élevèrent dans les airs

Se tenant à l’écart pour ne gêner personne, la Natsumi surveillait discrètement tout ce qui se passait et avec la plus grande attention. Monsieur Oshida faisait correctement son travail alors la jeune femme n’avait pas grand-chose à faire si ce n’était que celui de surveiller et d’attendre qu’un incident nécessitant son intervention n’eût lieu. Chose qui ne se produisit que le lendemain en fin de matinée suite à un accident bien grave. Un échafaudage venait de s’effondrer provocant plusieurs blessés dont deux si grièvement qu’après les premiers soins d’urgence les victimes furent rapatriées rapidement sur l’île dotant d’un hôpital la plus proche.

Suite à cet incident plus que fâcheux, la Natsumi demanda l’arrêt total des travaux le temps de vérifier l'état des structures encore debout. Après une minutieuse inspection, supervisée par le chef de chantier en personne, ces dernières se révélèrent bien stables. Leur solidité éveilla même en Mairu un sentiment de suspicion. La jeune femme n'arrivait pas à croire que l'un de ces échafaudages qui s'avéraient si résistants s'était écroulé tout seul. La samouraï soupçonnait un sabotage.

- C'est récurrent un tel accident ? Chercha à se rassurer la Natsumi auprès de Monsieur Oshida alors qu'ils se trouvaient côte à côte à surveiller les ouvriers qui de nouveau s'activaient.
- Vous comptez rapporter auprès du Mizukage que je fais mal mon travail ? Rétorqua l'homme sur la défensive.
- Personnellement, je pense que vous effectuez plus qu'à merveille votre travail Monsieur Oshida, se contenta de lâcher Mairu d'une voix calme, ignorant une fois de plus la mésestime qu'elle suscitait auprès de son interlocuteur. Je souhaite juste m'assurer d'une chose : que l'échafaudage s'est bien effondré par pur accident.
- Alors vous aussi, vous pensez à un sabotage ? La samouraï fixa le petit bonhomme à la barbichette d'un regard l'encourageant à poursuivre. C'est la première fois qu'un accident du genre se produit sur un chantier que j'encadre. Un échafaudage est monté de sorte que ça puisse résister aux intempéries, même à une tempête de violence moyenne alors il m'est inconcevable que ça tombe sans avoir essuyé un violent choc.
- Votre supposition ?

L'homme se mit à caresser tout doucement sa barbichette, l'air bien pensif.

- Certains points de fixation ont dû être délestés intentionnellement et à force ils ont fini par lâcher à cause des vibrations provoquées des hommes s'activant dessus.
- Ne vérifiez-vous pas l'état des fixations quotidiennement ?

Monsieur Oshida cessa de caresser sa mèche de barbe tout en fixant son interlocutrice d'un regard froissé.

- Cela se voit que vous ne connaissez rien en chantier ! Lâcha l'homme sur un ton sévère. Une fois un échafaudage dressé, on s'assure de sa solidité avant la première utilisation. La structure doit être montée de sorte à pouvoir tenir jusqu'à la fin du chantier. En général on ne vérifie sa stabilité et minutieusement que suite à un incident qui aurait pu entrainer des dommages comme une tempête par exemple, cependant, dans le cas d'un chantier à long terme, on doit vérifier régulièrement l'état de celle-ci mais pas nécessairement tous les jours.

L’homme fournit un cours détaillé sur le chantier à la Natsumi, allant jusqu’à lui donner des informations qui n'intéressaient guère la jeune femme mais qui, par politesse, n’interrompit pas son "enseignant". Elle l’écouta même avec attention mais face au sujet qu'elle trouvait fort barbant, la samouraï finit par se décrocher rapidement jusqu'à souhaiter silencieusement que son interlocuteur se taise. Souhait qui se réalisa lorsque des ouvriers vinrent à eux et l’air affolé, interrompant le discours passionné de Monsieur Oshida qui démontrait à quel point ce dernier aimait son métier.

- Que se passe-t-il ? Demanda le petit bonhomme à la barbichette sur un ton calme malgré la détresse qui se lisait sur les faciès de ses subordonnés.
- Des matériels ont disparu !
- Comme ça ? … Soyez plus précis ! Quels matériels ?
- Beaucoup, chef ! … Pendant qu’on était en pause durant l’inspection des échafaudages, nous avons laissé nos matériels sur place mais la plupart ne sont plus là !
- Comment est-ce possible !? ... Ces matériels ne peuvent pas disparaître comme ça ! Commença à s’inquiéter le petit bonhomme à la barbichette.
- Nous non plus nous ne comprenons pas ce qui se passe !
- Ce chantier est hanté ! Lâcha soudain un des ouvriers. Beaucoup d'outils qui disparaissent instantanément en plein jour sans que personne ne remarque rien, un échafaudage qui s’écroule soudainement … On dirait l’œuvre des mauvais esprits !

Face à l’histoire qui n’était pas tout à fait saugrenue au vu des circonstances, des voix s’élevèrent dans les airs. Des hommes affirmaient que l’hypothèse avancée par l'un de leur était ridicule mais d’autres la soutenaient. Quant à Mairu, elle était du premier avis. Loin d’être superstitieuse, elle ne croyait guère aux mauvais tours des êtres surnaturelles bien qu’elle n’eût aucune autre réponse pour répondre aux mystères qui planaient sur le chantier. Elle restait sur sa théorie initiale qui était un sabotage mais là n'était qu'une supposition dont elle n'avait aucune preuve. Elle ne pouvait donc affirmer à ces hommes que cette histoire des mauvais esprits n'était qu'une absurdité alors elle se contenta de les regarder débattre sur l'hypothèse ridicule, les bras croisés sous son opulente poitrine ...

Alors que les hommes - Monsieur Oshida compris - débâtaient farouchement sur la nature des problèmes qui les empêchaient de travailler convenablement et en sécurité, la jeune femme se contenta de les analyser dans le silence, cherchant à déceler si parmi toutes ces têtes ne se trouverait pas celle d'un imposteur. Observation qui se révéla vaine car elle ne réussit à trouver aucun suspect plausible.

- Pourriez-vous me montrer où avez-vous reposez votre matériel s'il vous plaît ? Finit par réclamer la samouraï à l'homme qui avait avancé l'hypothèse d'un chantier maudit.
- Puisque je vous dis que …
- S'il vous plaît ! Insista la jeune femme interrompant l'ouvrier.

Monsieur Oshida acquiesça de la tête alors que son subordonné lui avait adressé un regard pour avoir son accord puis l'homme se dirigea vers l'endroit demandé, la Natsumi le talonnant.

- J'avais posé ma boîte à clous et mon manteau ici mais comme vous pouvez le constater ... il n'y a plus rien !

Sans faire attention à la remarque acerbe de l'ouvrier, la jeune femme se baissa pour examiner de plus près le parterre. Ce fut ainsi que son regard remarqua une légère différence au niveau d’un périmètre précis par rapport à la zone autour. La terre n’avait pas été retournée mais ayant déjà vu à l’œuvre des shinobi maîtrisant la terre, elle soupçonnait que l’endroit ait été écarter puis refermer. La Nastumi elle-même trouvait son hypothèse bien ridicule car non seulement la présence d’un manipulateur de dôton dans le coin était impensable mais pourquoi surtout celui-ci s’amuserait donc à semer le chaos sur un chantier sur une île sauvage ? Pourtant, ne désirant négliger aucune piste, même la plus ridicule, Mairu dégaina son wakizashi dont elle planta la lame dans le sol au niveau où la zone était un peu étrange, sous les regards des ouvriers dont certains se moquaient ouvertement de sa personne. Le sabre ne rencontra aucun obstacle alors la jeune femme recommença la manœuvre en changeant d’endroit. Au troisième essaie, quelque chose qui ne ressemblait pas à un caillou buta la lame. La Natsumi creusa alors à l’endroit suspect pour finir par y extirper une boîte à clous et un marteau ; les matériels que l’ouvrier avait perdus.

- Co … Comment est-ce possible !? S’exclama Monsieur Oshida qui se tenait parmi le spectateur qui avait fini par encercler la samouraï. Personne n’aurait pu enterrer ces matériels à cet endroit sans que quelqu'un ne l’aurait remarqué et puis, la terre ne semblait pas avoir été retournée !
- Dôton !
- Pardon ?
- La manipulation de la terre. Je ne vois que ça. Même un genin maitrisant assez bien cet élément pourrait enterrer discrètement des choses de ces tailles … Ordonnez-donc à vos hommes de déterrer à l’endroit où ils avaient reposé leurs matériels !

Le chef de chantier exécuta et rapidement les matériels perdus furent déterrés aux endroits même où leurs manipulateurs les avaient délaissés.

- Votre attention s’il vous plaît ! Cria la Natsumi alors que les ouvriers discutaient bruyamment entre eux, cherchant à comprendre la situation. Il semblerait que quelqu’un cherche à ralentir, peut-être même à faire arrêter définitivement les travaux de ce chantier et ce pour une raison qui m’échappe encore mais je compte bien résoudre ce mystère ! D’ailleurs, si le responsable de cette mascarade qui a assez duré m'entende, je l'invite vivement à se dénoncer avant que je ne le démasque, autrement, sa sentence sera égale à celui d’un criminel national ! La samouraï marqua un assez long silence avant de reprendre sur un ton moins agressif voyant que personne ne se présentait. J’aurais besoin d’un volontaire pour remettre un message au Mizukage !

Face à la sollicitation de la samouraï, les hommes se regardèrent alors que la jeune femme attendit dans le silence tout en espérant que celui qu'elle avait fini par suspecter se porterait volontaire pour être le héraut qu'elle réclamait …

- Moi ! … Je me porte volontaire ! Déclara celui même qui avait cherché à semer les troubles chez ses camarades ouvriers tout en s’avançant pour se tenir face à la Natsumi et Monsieur Oshida qui patientaient tranquillement.
- Votre nom ?
- Idioshi.
- Quelqu’un pour accompagner Monsieur Idioshi ? Quémanda Mairu à haute voix.
- Pas la peine, intervint l’ouvrier. Je peux très bien apporter le message tout seul !
- Comme il vous plaira ! Fit la Natsumi tout en fixant l’homme dans les yeux, cherchant à le sonder. Merci pour le service Monsieur Oshida, ajouter la samouraï avant de se tourner vers le chef de chantier. Auriez-vous de quoi rédiger un message s’il vous plaît ?
- Suivez-moi !

Emboitant les pas du petit bonhomme à la barbichette, la Natsumi disparut dans la tente de ce dernier d’où elle revint quelques minutes plus tard, un parchemin enroulé et maintenu par une ficelle dorée entre les mains. La jeune femme remit sans plus attendre le message à l’héraut de circonstance qui s’était patienté à l’extérieur.

Sans perdre de temps, Idioshi s’en alla accomplir sa mission alors que les autres ouvriers furent invités par le chef de chantier à reprendre leur travail tout en leur invitant de surveiller étroitement leurs matériels et de signaler le moindre comportement suspect de la part de leurs collègues. Les hommes s’exécutèrent dans des marmonnements de mécontentement. Sans doute pensaient-ils pouvoir fainéanter jusqu’à ce que le mystère qui entourait le chantier soit résolu.

De son côté, Mairu s’était éclipsée discrètement à peine le messager était parti et sans informer personne. Ce qui fit râler Monsieur Oshida qui ne la trouva nulle part alors qu’il comptait sur la samouraï pour surveiller le chantier.

- Quelle femme inutile ! Pesta le petit bonhomme.

***

- Quelle femme idiote ! Lâcha Idioshi, un sourire fier peignant son visage alors qu’il s’enfonçait dans la forêt au lieu de suivre le chemin qui menait vers la plage où il pourrait prendre un bateau retournant vers l’île principale.

Après son départ, le messager jetait de temps à autres un coup d’œil en arrière afin de guetter si personne ne le suivait mais une fois s’être enfoncé assez profondément dans l’abondante nature, il cessa de surveiller les alentours.

S’avançant tranquillement, Idioshi finit par atterrir à l’endroit où la Natsumi avait découvert des hommes suspects qui se reposaient l’autre soir. À peine le messager avait-il posé les pieds sur le territoire que des hommes l’encerclèrent puis un s’avança vers lui.

- Qu’est-ce que tu fous là !?
- Je suis ici parce qu’il se trouve qu’une fouineuse envoyée par le Mizukage a découvert ton stratagème ridicule ! … Je t’avais dit qu’il fallait frapper fort directement !
- Tu sais très bien qu’une offensive directe n’aurait fait que rappliquer des shinobi sur l’île hors ce que nous voulons c’est qu’ils partent tous d’ici ! … Raconte plutôt ce qui s’est passé au lieu de dire de connerie !

Idioshi raconta l’histoire, de l’arrivée de la Natsumi jusqu’au rôle de messager qu’il avait choisi d’endosser.

- Idiot ! S’exclama celui qui était le chef du groupe tout en empoignant par le col Idioshi qui venait de terminer de narrer son histoire. Pourquoi as-tu accepté de porter ce message ! Tu aurais dû rester discret ! … Tu ne peux pas t’empêcher de te faire remarquer, hein !?
- J’ai fait ce que tu m’as demandé ! Ne t’acharne pas sur moi si ta stratégie pourrie n’a pas fonctionné !
- Non ! Je ne t’ai jamais ordonné de jouer à un putain de messager, Idioshi !
- Tu aurais préféré que je laisse quelqu’un transmettre le message au Mizukage pour que ce dernier envoie des renforts sur l’île . … Je croyais que c’était ce que tu voulais éviter !
- N’essaie pas de jouer au plus malin, Idioshi ! … On aurait pu intercepter le messager et faire passer sa mort pour le compte des nombreux autres brigands qui s’activent encore sur l’archipel pendant que toi, tu aurais pu continuer à semer discrètement le trouble sur le chantier ! … Mais tu as tout gâché ! Tu ne pourrais plus retourner là-bas à présent ! L’homme lâcha le rebelle et resta silencieux un court instant avant de reprendre d’une voix affaiblie. Bon ! … Il nous reste plus qu’à quitter cette île discrètement !
- Quoi ? Tu veux abandonner ! … Cette île est la nôtre ! C’est notre repère ! On ne peut pas la laisser comme ça à ces usurpateurs !
- C’est vrai, chef ! … On ne trouvera pas une île aussi bien que celle-ci ! ... C'est notre territoire ici !
- Je le sais bien mais si le chantier se termine, l’île deviendra de plus en plus fréquentée et on finira par se faire repérer ! ... Le mieux à faire c'est de partir avant que cela n'arrive maintenant que nous ne pouvons plus rien pour faire cesser les travaux.
- N’importe quoi ! Râla Idioshi avant de s’en aller.
- Tu vas où comme ça, Idioshi ?
- Je vais montrer à ces satanés ouvriers et cette sorcière aux gros lolos qui est le chef ici !
- Arrête, pauvre idiot ! Cela ne servirait à rien. Tout ce que tu gagneras seras une mort inutile !
- Franchement, je me demande pourquoi je t’ai suivi ! Lâcha Idioshi sur un ton dédaigneux alors qu’il s’était arrêté pour toiser son interlocuteur d’un regard loin d’être amical. Tu n’es qu’un lâche ! ... Fuis donc si tu veux ! Moi, je vais détruite ce satané chantier ! Je ne laisserais pas le Mizukage gagner sans me battre !

Sur ces derniers mots, Idioshi reprit son chemin alors que quelques hommes se précipitèrent pour le suivre sans lâcher le moindre mot.

- Faites ce que vous voulez ! Fit le chef, voyant que certains hommes hésitaient à rester dans son camp ou rejoindre celui qui avait décidé de le trahir. Si vous voulez précipiter votre mort en rejoignant Idioshi dans sa folie, faites-le donc ! … Ceux qui préfèrent vivre plus longtemps me suivent ! Conclut le chef des brigands avant de prendre la direction opposée au chemin qu’empruntait son ancien acolyte.

Un tiers des hommes suivirent Idioshi alors que le reste avait préféré continuer de suivre celui qui les avait toujours menés …