La mission avec Doli venait de prendre fin. Orion disposait donc d'une permission de quelques jours pour profiter du grand air et du pays. Les immenses plaines verdoyantes étaient un spectacle encore tout récent à ses yeux, c'est pourquoi elle tenait à les graver dans sa mémoire, d'en retenir chaque détail afin de pouvoir les reproduire sur papier. Son engouement pour le dessin se poursuivait. Même si elle n'était encore qu'une débutante en la matière, la jeune femme parvenait à se complaire dans sa courbe de progression. Chaque essai était un peu mieux réussi que le précédent et ce simple fait prévalait sur les longues heures d'investissements passés à griffonner où à peindre. Jugeant qu'elle serait plus libre sans s'imposer un matériel, elle se contenta de fusain et de feuille pour assurer ses premières estampes. Il s'agissait également pour elle d'une occasion de sortir en dehors de la capitale de Tori. Voyager, explorer, découvrir faisaient désormais parti de son quotidien depuis qu'elle avait quitté sa montagne à Taki. Ce fut donc en suivant la course de l'aube, levée au petit matin que la demoiselle partie s'aventurer à travers le pays jusqu'à la frontière. Quelques heures après le soleil commençaient tout juste à se détacher de l'horizon, mais n'en perdait pas moins ses coloris vifs et chaleureux.

Ses lueurs teintaient la verdure, imprégnée par la rosée matinale en des milliers de nuances de mauves et d'émeraudes, contraste d'autant plus saisissant. Avec sa large palette de couleur, Ori avait de nombreuses possibilités, elle tentant donc d'imiter ces somptueux reflets en reproduisant le chant de verdure baignant sous la lueur du soleil levant. Petite excentricité, elle se permit même d'essayer de dessiner son ombre au milieux des quelques rares fleurs. Après deux bonnes heures, alors que son modèle perdait de plus en plus de sa superbe sous le joug du cycle céleste, l'adolescente en vint à un résultat qui put la convaincre. Ce n'était nullement transcendant, elle en était parfaitement consciente, mais il y avait au fond d'elle ce petit sentiment de satisfaction juvénile similaire à celui d'une enfant présentant un gribouillage à ses parents et recevant toutes les félicitations du monde en retour. Cette pensée la ramena à sa famille qu'elle avait perdu et qui continuait de lui manquer affreusement. Chassant ces visions de son esprit, elle tenta de garder son cœur léger pour le trajet retour. Ce début de journé s'était effectivement révélé reposant et elle espérait qu'il en soit de même lorsqu'elle se prêterai à esquisser les pourtours des montagnes au nord du pays.

Rangeant ses affaires dans sa sacoche elle entreprit de prendre la route quand des silhouettes perdus dans le lointain attisèrent son attention. Son manque d'expérience couplé à son ignorance ne furent pas suffisant pour l'empêcher de comprendre que quelque chose n'allait pas chez ces individus. Leur tenu, leur manière d'être ne concordait pas avec l'image qui se dégageait de l'empire. Pour autant elles ne ressemblaient pas à des brigands. Deux femmes, étais-ce cela ? Le regard de l'Heishi balaya comme si elle espérait trouver une réponse ce qui se fit naturellement sans grand succès. Son instinct lui disait de s'éloigner tranquillement, mais elle craignait d'éveiller leur attention, aussi se contenta-elle d'aller trouver refuge en s'asseyant dans les hautes herbes, attendant que ces dames passent leur chemin pour de sorte à ce qu'elle puisse à son tour emprunter le sien.

Nureru, l'esprit invisible et dont la constance échappait au monde matériel continuait de graviter autour de sa maîtresse à l'image d'un astre, calme et impassible, il semblait totalement se détacher de la situation. Si la situation devait dégénérer, Orion espérait pouvoir compter sur lui bien qu'elle préférait mille fois éviter tout conflit.