J’écrase de mon pied la boulette de papier que je viens de faire avec le message de ce petit con. J’ignore qui il s’imagine être mais il a réussi à me faire rire, presque pleurer et me mettre hors de moi en l’espace d’une petite feuille de merde. C’est à la limite de l’inacceptable. On est mercredi aujourd’hui et le plus fou, dans l’histoire, c’est que je m’en vais le rejoindre comme il me l’a demandé. Ne serait-ce que pour lui arracher la queue et le voir repartir sans s’il fait quoi que ce soit qui m’énerve une fois de plus. Inspirant calmement, je cherche à me calmer alors que je m’approche et vois une tignasse blonde sur le terrain. Un Dento – je m’y attendais de toute façon. J’espère juste qu’il n’est pas aussi coincé du cul que Raito, parce que deux dans le même clan c’est beaucoup trop : juste assez pour établir un a priori merdique. D’un geste de la main, je le salue chaleureusement en arrivant à sa hauteur, bien qu’il ne s’agisse là que de ma gestion parfaite de mon propre langage corporel. Tant qu’il y croit, je serai contente. Un accident est bien vite arrivé de toute façon, non ?

« Salut ! Kyosuke, c’est bien ça ? »

Permettant à l’intonation de ma voix d’être calmement enjouée, je fais un tour autour de lui pour l’observer intégralement. C’est donc ça que deviennent les Genins qui ne finissent pas sous ma responsabilité – des sous-merdes ? Secouant délicatement la tête, je lui adresse un sourire serein.

« C’est… Une première fois que quelqu’un me contact pour me demander de lui enseigner quelque chose. En dehors de mon équipe au moins. Mais déjà, avant de commencer… Tu vas arrêter de me vouvoyer merde. Alors oui, il faut respecter ses supérieurs, mais je préfère établir des relations de confiance et amitié personnellement, et le vous ne fait que rajouter une distance inutile. Ce sera plus simple de s’entraîner sur des bases plus souples. »

J’arrive à peine à croire à quel point je peux raconter de la merde en boite aux gens et faire en sorte qu’ils n’y voient que du feu à force de mentir à tout le monde, mais je ne vais pas me plaindre de ce talent. Prenant fermement appui sur mes deux jambes en face de lui, j’arrête de sourire et craque deux phalanges.

« Bon, tu préfères survivre ou tuer ? »

Si la question est sèche, il n’en reste pas moins que sa réponse déterminera beaucoup de ce qui risque de suivre.

Je hausse un sourcil de façon ostentatoire lorsqu’il me répond ne pas savoir, mais finalement je m’avise de lui faire une remarque bien acerbe quand il enchaine sur une réponse. Merdique, certes, mais une réponse tout de même. Se protéger derrière son clan et son histoire plutôt que de parler de soi-même est une chose tellement simpliste et idiote qu’il me donne tout bonnement envie de lui charger dessus et de lui enfoncer ma lame au travers de la gorge – cela ne ferait qu’une victime de plus sur mes bras, et un con de moins pour le village. Enfin… Je lui adresse un petit sourire innocent lorsqu’il termine, me demandant s’il serait plus sage de se rapprocher de lui et de le gifler ou de lui faire réaliser la profonde stupidité de ce qu’il dit sans trop bouger. Alors que je fais craquer une phalange, je croise son regard – malgré la candeur de mon sourire, je sais que mes yeux sont d’une fermeté à toute épreuve et ne laissent rien transparaître sinon de la sévérité.

« Très bien. J’espère seulement que tu réalises que nous sommes en guerre actuellement, et ce n’est pas la négociation qui t’aidera à survivre si tu es pris en embuscade demain. Tout au plus, tu pourras négocier qu’on te coupe la tête plutôt qu’on t’ouvre le ventre, et encore… Ca dépend de qui sera en face. »

Si elles semblent particulièrement sèches, je sais que ces paroles sont justes. Trop de personnes à Kumo s’imaginent qu’il s’agit là d’un affrontement de polichinelle duquel tout le monde sortira avec de nouvelles amitiés et une relation particulièrement forte entre les deux nations. Je ne sais pas quelle drogue ils utilisent pour y croire, mais il y a un surplus de cadavre dans les morgues de Shigeru s’ils veulent ouvrir les yeux. C’est triste tout de même, nous sommes formés comme des guerriers. Une guerre où l’on peut tuer librement et sauvagement avec le plus de cruauté possible nos ennemis se présente à nous, et les gens quoi ? Ils veulent négocier putain. C’est maladif. Ca m’en donne presque la nausée même merde ! Moi qui pensais qu’ils deviendraient tous moins cons. Soupirant calmement, je détends les traits de mon visage sans cesser de le fixer.

« Si c’est ce que tu veux, néanmoins, alors je t’apprendrais à survivre mieux avec le Taijutsu. Ce village n’a pas besoin de morts. »

Me mettant en position de combattre, j’inspire et concentre brièvement mon Chakra pour augmenter mes réflexes. C’est une anticipation basique mais vu la stupidité dont il fait preuve, je ne serais absolument pas étonnée qu’il ne maîtrise pas ce genre de technique. Ca lui donnera une bonne leçon, et quelque chose d’utile également. Sans compter qu’il faudra certainement que je l’attaque et le frappe pour qu’il apprenne cette technique comme il le faut donc… Que du bénéfice pour moi.

« Aller. Une démonstration vaut mieux que tous les cours théoriques. Essaye de me blesser. »

Je souris d’une façon à la limite de l’insolence en esquivant ses attaques, l’une après l’autre. Il n’y a presque aucun exploit et encore moins de concurrence à le faire, même s’il n’est pas le pire avec son épée. Une fois à droite, une fois à gauche – qu’importe. Je vois à travers ses mouvements et les évite en me fatiguant bien moins que lui, ne faisant que croitre mon sourire. A ce rythme-là, il va finir haletant et suppliant pitié avant que l’entraînement ne commence bien, et si je compte bien lui montrer qui est le plus fort de nous deux… Le but de cette mascarade de merdeux c’est quand même de le rendre utile au village. Putain, Shigeru serait fier de moi s’il savait ce que je suis en train de faire. D’un coup, il se replace et commence un enchaînement rapide de plusieurs petits coups successif dans un élan de visible dernier espoir et, si j’hésite un instant à me prendre ne serait-ce qu’un seul mouvement de lame pour lui remonter son égo… Je change bien vite d’avis. Je ne suis pas une charité à débile, et plus encore lorsqu’ils sont débutant. La taille de ce qu’ils pensent avoir entre les jambes ne m’intéresse pas. De quelques minuscules mouvements, j’évite la totalité de l’assaut et croise son regard alors qu’il se remet en garde. Au moins, il ne lâche rien – malgré l’incompréhension qui se lit clairement sur son visage. Quel con ma parole.

« Tu vas finir par te blesser tout seul si tu continues comme ça. »

Dégainant ma petite lame à toute vitesse, je le désarme d’un mouvement réfléchi pour ne pas le blesser plus que nécessaire, profitant de la distraction causée par mes paroles. Dire qu’il faudra que je lui explique tout… On ne leur apprend vraiment rien dans ce village : il serait peut-être temps que je mette un pied à l’académie pour les enculer tous.

« Je vais t’apprendre à faire pareil, d’accord ? Tu sembles particulièrement étonné pour quelqu’un qui pratique le Taijutsu : ne t’a-t-on jamais appris à concentrer ton Chakra pour augmenter tes réflexes et, pour une courte période au moins, rester plus concentré et réactif sur ton environnement ? Parce que bon, c’est exactement ce que j’ai fait. »

Reculant de deux pas, je m’assois par terre et lui montre d’un geste bref de la tête de faire pareil que moi. Je n’ai pas appris cette technique de cette façon – mais bien au prix de blessure et d’un entraînement particulièrement exténuant avec Otoke – cependant je pense qu’il a besoin d’une autre approche. Ne serait-ce que pour récupérer pendant un petit moment. Je croise les jambes en tailleur, me plaçant en position de méditation : c’est un peu ça, à vrai dire, cette technique. Seulement avec une adaptation de la vitesse en plein combat. Je n’ai pas spécialement envie d’attendre qu’il atteigne le Nirvana non plus merde.

« Fermes tes yeux et contrôles ta respiration pour reprendre ton souffle, puis essaye de te concentrer sur ton corps. Ressent chaque muscle. Chaque mouvement involontaire. Chaque contraction. Deviens maître de ton corps. »

Respirant calmement dans ma position, je concentre mon regard sur le jeunot pour rester consciente de son avancée. Si ce n’est pas quelque chose de particulièrement flagrant, je suis suffisamment douée dans la lecture du langage du corps pour savoir si les mouvements spontanés du sien persistent encore. Tranquillement alors que je m’efforce de ne pas d’endormir devant la fadeur du spectacle, je vois son souffle se calmer et les battements de son cœur, saillants au niveau de ses jugulaires que je me ferai un tel plaisir de sectionner, ralentir. Bon, il aura au moins réussi la partie la moins compliquée. Progressivement, tandis que je le fixe toujours, je vois une partie de tous les mouvements qui parasitent notre quotidien – ces petits détails auxquels on ne prête aucune attention et qui me permettent de lire à travers les gens – disparaitre. Finalement, il n’est peut-être pas si con que ça ?

Alors qu’il me dit y être arrivé – sans blague, comme si j’avais pu lui demander de le faire sans avoir la possibilité de vérifier par moi-même qu’il y était – je me relève rapidement, débarrassant mes vêtements de la poussière ambiante du sol qui s’y est déposée. D’un pas lent, je le contourne pour bien l’analyser sous toutes les coutures – tout en écoutant ses stupides remarques. Il a plus d’un homme que Raito, même si le clair de ses cheveux et poils lié à son héritage est tout aussi ridicule. Tu m’étonnes qu’ils maitrisent la lumière : on le mettrait dans la nuit noire, rien que ce blond stupide serait suffisant à éclairer tous les connards. Je suis bien heureuse de ne pas être née dans ce genre de configuration. Je soupire calmement lorsqu’il me pose ses questions. Ces jeunes : il faut tout leur apporter sur un plateau d’argent non ?

« C’est pourtant évident non ? »

Je lui adresse un petit rire enfantin et gentillet, très loin de toute l’aigreur que j’exprime. Qu’ils sont cons… Continuant mon tour, j’arrive à sa lame que je ramasse et contemple un très bref instant. Je préfère mon Tantô.

« Il faut que tu utilises ton Chakra de façon précise pour arriver à ce niveau de concentration sans trop le montrer. Tout au plus, si tu connais ce genre de technique, tu verras l’ennemi ajuster légèrement sa posture de combat lorsqu’il se concentre. Mais bon – toutes les explications du monde ne valent pas la pratique pour ce genre de techniques. Debout ! »

Dès qu’il se lève, je l’attaque en utilisant son épée. Il ne manquerait plus que j’utilise la mienne et risque de la salir pour lui… De quelques mouvements précis, j’essaye de le trancher sans jamais dépasser la couverture de ses vêtements. Mon but n’est pas de le tuer non plus – combien même il ne m’en faudrait vraiment pas beaucoup pour que l’envie y soit. Surtout qu’il n’a strictement aucune chance si je décide d’être sérieuse. Ne perdant rien de ses mouvements, je continue de lui asséner petit coup sur petit coup. Il n’est pas nécessaire qu’il maîtrise la technique sur les grandes attaques car c’est dans le rythme que cette dernière trouve son importance – un rythme que je lui impose comme lors des plus grands concerts.

« Aller ! Concentre toi et évite ! »

Alors qu’il arrive enfin à esquiver convenablement l’un de mes assauts – à croire que c’était trop lui demandé putain – il se prend l’autre de plein fouet je lui déchire la manche gauche. J’espère que ce petit con est conscient que si ce n’est que je m’efforce à rester sage, il aurait pu perdre le poignet ou… Bien plus. Je lui adresse un petit sourire avant de rouler les yeux au ciel de façon ostentatoire de façon à lui signaler que ses progrès me convenaient mais restaient, dans l’absolu, insuffisant. C’est d’ailleurs étonnant, ne serait-ce que sur le moment : cette technique possède une durée qui permet d’esquiver plusieurs coups et de ne pas être surpris, donc cette erreur est difficile à accepter. A moins que ce ne soit pas l’anticipation en elle-même qui ai pêché mais autre chose. Ce qui voudrait dire que… Génial. Comme si ce n’était pas déjà assez chiant comme ça de pousser les petits jeunes à survivre, il faut en plus que je complète leurs bases jusqu’à ce niveau ! Putain, mais on leur apprend vraiment de la merde dans ce village.

« Ca passe, même si cette dernière attaque n’aurait jamais dû toucher. Le problème actuellement n’est pas dans l’anticipation – j’ai analysé tes mouvements, c’est vraiment correct. Ce qu’il faut que tu saches, concernant ces techniques, c’est qu’il en existe de deux espèces. Que ce soit en Taijutsu ou en Sensorialité, il est possible de prévoir le mouvement de l’ennemi. C’est seulement l’application qui change. »

Je m’arrête un bref instant pour jauger sur son visage s’il comprend de quoi je lui parle, où s’il est totalement perdu. Le second ne m’étonnerait absolument pas, même s’il semble être « relativement » capable de suivre. Je hausse un sourcil.

« J’en ai pas mal discuté avec Otoke – un ami à moi. Ses anticipations de sensorialité lui permettent de pressentir facilement les attaques et de les esquiver de façon presque automatique. C’est… Utile. Mais différent de celle-ci qui n’est liée qu’à tes compétences au corps à corps. Il s’agit de deviner le mouvement de l’ennemi pour l’esquiver plus aisément au moment opportun grâce à des mouvements que tu as l’habitude de réaliser. C’est là que se trouve le problème. »

En l’espace de quelques mouvements, je réalise ma plus belle esquive dans le vent – avec sa concentration encore augmentée, il doit être aisément capable de détailler les mouvements de la petite danse qui m’a permis de ne pas mourir à quelques reprises déjà. Un mouvement juste et efficace, c’est exactement ça.

« C’est l’une de mes esquives. Je ne dis pas qu’il faut que tu la reproduises exactement, mais essaye d’arriver à quelque chose dans le genre. Ca t’aidera à survivre également, et ça comblera le manque que tu as sur ton anticipation. »

D’un coup, je croise mes bras et le toise du regard, attendant clairement qu’il effectue ne serait-ce que quelques tentatives de mouvement de son côté pour arriver à quelque chose. Après tout, plus encore que la précédente – une technique d’esquive doit s’apprendre sur le tas, mais il est tout de même nécessaire que le corps enregistre un peu le mouvement pour le réaliser plus aisément. Stéréotype. C’est extrêmement stéréotypé.

« Un fois que tu auras quelque chose potable, j’attaquerai. Pour de vrai cette fois-ci, donc essaye de ne pas trop te louper. »

Petit sourire idiot. S’il se loupe, ça m’ira très bien également : ce ne sera qu’un aléa de l’entraînement et on ne pourra pas vraiment me critiquer pour quelques os fracturés – tant qu’il survit, bien sûr.

Plissant délicatement les yeux devant les reflets totalement stupides et puériles de ce soleil merde dans sa chevelure blonde, j’observe attentivement ses mouvements pour voir s’il réalise quelque chose de potable. Je me suis abstenue de l’applaudir lorsqu’il a dit que mon esquive ressemblait à une petite danse – honnêtement, m’a-t-il prise pour la pire des connes en admettant que je l’ignorais ? Je ne peux même pas le défendre sur sa perspicacité, à moins d’être une chèvre aveugle et connue perdue au plein milieu d’un Genjutsu, il est évident que cette esquive est une danse putain. S’il pense m’impressionner avec ce genre de remarques, il peut se les enfoncer là où je pense avec toute la force du monde. Ce n’est que ridicule. Première. Deuxième. Huitième tentative. Cela ne fait que commencer à devenir potable, et je m’arrête sagement d’intervenir et lui expliquer qu’il doit adapter la technique à sa propre personnalité : ce n’est pas en cherchant à m’imiter en tout point qu’il arrivera à quelque chose de potable. Espérant le voir chercher à se débrouiller pendant quelques moments encore, je cache soigneusement ma légère surprise à le voir comprendre de lui-même ce qu’il doit réellement réaliser dans l’exercice. Il peut se décerner une médaille sur ce coup, ça doit être le moins con de tous les Genins que j’entraîne depuis un moment.

D’un geste délicat, je croise mes deux mains dans mon dos et penche légèrement la tête sur le côté, à l’image de la femme gentille et innocente – presque fillette sur les bords – que je cherche à me donner. Sourire chaleureux sur le visage, j’hoche calmement la tête quand il me dit tenir quelque chose. Il n’en est certainement pas loin, même si la finesse laisse encore quelque peu à désirer. Je soupire délicatement et attends qu’il termine de se mettre en position de combat, parfaitement consciente que l’anticipation ne fait plus aucun effet après ce laps de temps passé à penser à autre chose. Ce ne sera que son esquive contre mon attaque, le meilleur moyen de tester ce qu’il a obtenu. Dégourdissant mes membres, je fais craquer une de mes phalanges et le regarde droit dans les yeux avant de rire légèrement, jetant son katana a quelques mètres de moi.

« Ne t’inquiète pas. Celle-là ne risque pas de te priver de quoi que ce soit – à part ton honneur si tu échoues. »

Nous ne nous situons pas très loin l’un de l’autre, aussi je charge rapidement mon son au niveau de mon poing avant de me jeter délicatement en avant, cherchant à atteindre son ventre avec ma frappe. C’est à se demander quand est-ce que je viendrais à perfectionner toute la lâcheté de cette technique, ressemblant au coup le plus banal mais portant en elle tant de force… Je me rappelle encore aujourd’hui des effets de cette dernière sur mon corps, le son du traitre se répandant à travers mes organes internes et cherchant à me tordre en deux. Aujourd’hui, après les évènements secrets de cette fameuse nuit, je pense que cela ne me ferait ni chaud ni froid – combien même les dégâts resteraient. A voir ce qu’en pense le petit con.

Je me permets un petit sourire quand ma frappe le touche – ne serait-ce que de justesse – et j’observe soigneusement son corps tanguer, ses muscles se contracter. Le mouvement était correct mais il fallait y rajouter de la vitesse, de la souplesse également. Là, il est tout bonnement partie pour une partie de déplaisir. Il ne se sent pas très bien ? Sans blague, comme si j’étais incapable de prévoir les effets de ma propre technique. Vu l’endroit où je l’ai touché, j’espère qu’il… Ah ! Nous y sommes. Rien de tel que l’odeur des relents d’estomac en plein milieu d’entraînement. C’est une chose dont je n’arriverai jamais à me lasser, de voir les Genins du village vomir après avoir pris un coup auquel ils ne s’attendaient pas entièrement. Ca me donne presque envie d’arpenter les rues et frapper les gens au fur et à mesure pour qu’ils rendent tous le contenu de leur estomac. Un véritable plaisir que je n’affiche absolument pas, gardant un visage neutre et concentré – voire même je tends un petit peu vers une inquiétude feinte lorsqu’il revient vers moi, ayant calmé le ressenti de son corps.

« En effet non. C’est une frappe sonore qui ne fait que des dégâts internes. Très pratique pour tester les esquives. »

S’il s’attendait à ce que je lui en dise plus, il peut tout bonnement se mettre un doigt là où je pense. Alors qu’il recommence à essayer de réaliser le juste mouvement, je l’observe un instant, hésitante. Je pourrais lui dire ce qui a manqué. Ca me ferait gagner un temps précieux. Bien sûr, ça ne lui servirait absolument pas de leçon que je lui donne la réponse sur un plateau d’argent, mais à quoi bon m’inquiéter pour si peu ? Il aura bien des occasions d’apprendre dans la vie, et ma patience commence à atteindre des limites de bienveillance. Le prochain coup, je vais lui arracher la tête. Inspirant calmement, je croise les bras et le regard droit dans les yeux. Il suffirait d’une petite illusion et… Je souris délicatement.

« Tes mouvements sont bons, et ils l’étaient avant également. Tu dois seulement y mettre plus de vitesse. »

Souriant calmement de l’élan de motivation qu’il affiche – il s’imagine quoi, que je le frappe pour le motiver ? C’est parfait putain. Je vais avoir un idiot personnel qui me vénère, de la même trempe qu’Ikumo à l’époque. Je me sens un peu coupable de l’admettre, mais ce genre de réaction est une bonne réaction selon moi. Ne pas abandonner face aux adversités. Ne pas se décourager. Il a de la trempe. Les autres Genins du village pourraient en partie s’inspirer de lui. Ils gagneraient en efficacité à continuer d’essayer, comme moi à l’époque, plutôt que geindre.

« Très bien, je pense que tu y es presque. Dis-moi quand tu te sentiras d’attaque que je tente à nouveau de te frapper. Et esquive, cette fois-ci. »

Alors que je charge le son dans mon point en prévision de l’attaque, je lui adresse un petit sourire. Il mérite presque une récompense pour sa bonne volonté – une récompense que je peux lui donner.

« Quelle est ton affinité élémentaire au passage ? »

Le Raiton hein ? Exactement comme Otoke. Dire qu’ils sont si différents l’un de l’autre alors que pourtant… Il pourrait être l’enfant né de l’amour interdit entre Raito et Otoke, tant ces deux-là passent leur temps ensemble – même si c’est une toute autre histoire. Toujours est-il que, quand je cherche à le frapper, il esquive pour de bon cette fois. Ce n’est pas si compliqué, finalement, d’être une bonne enseignante. Un bon coup, un bon vomissement et c’est reparti à double tour. Son mouvement est bon – digne du miens au moins – et lui permet soigneusement de ne pas se prendre le coup sonore suivant. Dire que j’aurais pu faire la garce et le frapper avec une attaque qui ne rate pas – mais ça ne l’aurait que fait comprendre que l’esquive est loin d’être parfaite et qu’il est nécessaire de faire d’autres choses dans la vie. Qu’importe, j’ai la certitude au moins qu’il va retenir la leçon avec les dégâts que son petit organisme de fragilité a subi. Si je n’étais pas une garce à ce point, j’en aurais presque la larme à l’œil.

« C’est sûr que c’est plus plaisant que de subir l’attaque… »

Je lui adresse un petit sourire, tout faux comme les précédents mais paraissant, une fois de plus, bien réel. Soupirant délicatement, je l’écoute s’exciter dans tous les sens sur la Foudre, la survie, les négociations et le fait d’être impitoyable avec l’ennemi. Décidément, il est moins con que la majorité des gens dans ce village – même si, pour être honnête, je doute qu’il soit réellement capable de tuer de sang froid ou d’être réellement sans pitié. Il faut une certaine approche de la vie pour cela. Un vécu qui ne peut s’inventer à l’Académie ou au sein du village. C’est probablement un moment de faiblesse et de pitié qui lui coutera la vie un jour s’il n’arrive pas à s’endurcir, mais cela me concerne-t-il vraiment ? Après tout… Je soupire délicatement. Il semble influençable. Hermétique. Etroit d’esprit même. Il n’a pas remarqué le moindre de mes mensonges avec son entrain, et quelque chose me dit que je pourrais lui retourner le cerveau pour en faire un fidèle petit chien chien qui n’a même pas besoin de laisse. L’idée n’est peut-être pas si mauvaise que ça après tout. Je lui adresse un sourire presque maternel, refoulant rapidement la totalité des souvenirs douloureux qui remontent avec ce mensonge.

« Il est bien facile de dire qu’on sera impitoyable dans le vent, mais as-tu les capacités qu’il faut pour l’être réellement ? »

Malgré le sourire, ma voix est bien froide et distante, comme pour prouver que moi, de mon côté, je sais l’être et ce sans la moindre hésitation. Sans cesser de le regarder, je fais craquer une de mes phalanges.

« Voilà ce que je te propose. Rentre chez toi et repose-toi. On se rejoint ici à nouveau demain, et je ne t’apprendrais pas à survivre mais à frapper. Tu en auras besoin également. Ca me laissera la soirée pour voir comment tu pourrais éventuellement adapter certaines de mes techniques à ton affinité. »

Sans la moindre hésitation, il hoche la tête.

HRP: