Souriant calmement, tu attends au milieu de la nuit foudroyante que ton invitée du soir se présente à toi. Opportuniste maladif que tu es, tu sais très bien où te mèneras cette discussion et les conditions de sa réalisation. Ne rien laisser au hasard est un ancien adage auquel tu te tiens religieusement après tout. Ton message, des plus simples, ne laisse en rien présager des intentions que tu as, mais tu sais que l’honneur de la jeune femme que tu recherches est au-dessus de ceci. C’est quelque chose de bien plus intense et profond que l’intégralité de ce qui a toujours été pour toi. Tu as appris avec le temps à devenir un être humain, quitter le côté belliqueux et irascible de ton clan – elle, en tant que membre du Fer, a été certainement élevée dans des principes plus que strictes que tu ne t’oses imaginer. C’est bien pour cela qu’elle t’intéresse, après tout : son héritage.

Sagement, tu patientes comme à ton habitude avant l’arrivée de ton hôte. Si le lieu a peu à offrir, il a le privilège de donner la discrétion dont, une fois n’est pas coutume, tu as besoin. Tu te connais, à la fin des fins, et tu sais que si ton orgueil vient à pêcher et tes informations à faillir, tu risques de devoir établir une approche quelque peu plus agressive – non pas que cela t’enchante particulièrement, car tu restes un diplomate. Chaque jour. Chaque heure. Chaque minute. Chaque seconde. Tu te répètes que tu es un diplomate. Tu l’es pour Elle. Tu es content dans ce rôle. Tu le sais. Tu l’assumes. Pourtant, ces pulsions sauvages de ton enfance refont surface peu à peu, au fur et à mesure que le temps t’éloigne de son souvenir. Quand adviendra le jour où, d’un coup de tête, tu raseras de la surface de la terre un village médiocre ? Tu espères bien ne jamais en arriver là, tout en cherchant dans toute ton ambiguïté le moindre prétexte qui pourrait le justifier aux yeux de ta morale.

Lorsqu’elle arrive, tu ne peux qu’apprécier la sévérité et le concis dont elle fait preuve, t’évitant tas de lasses manipulations et stratagèmes pour faire le tour de la question. Si elle désire parler face à face, autant faire de même. Scrutant son corps, tu croises son sabre et souri délicatement, conscient qu’il doit beaucoup représenter pour elle. Chacun son fardeau, chacun son héritage – les gueules beuglantes présentes sur tes mains, masquées par ces gants blancs qu’elles détestent tant, n’en sont que la meilleure des preuves.

« Qui je suis ? Aurais-je oublié de signer le petit mot que je vous ai laissé ? Voilà qui est très indélicat de ma part. Bakushô Daï, Chûnin du département Politique et Economie. »

Tu baisses légèrement la tête en marque d’excuse, te sermonnant intérieurement de te relire à une reprise de plus pour éviter ce genre d’accident – après tout, c’est une marque d’impolitesse presque maladive et tu es le premier à ne jamais répondre à n’importe quel mot non signé. Relevant la tête, tu croises le regard de la Samouraï, cherchant à la jauger le plus vite possible sur ses capacités et intentions. Va-t-elle accepter les tableaux que tu lui dessines ?

« Si j’ai demandé à vous voir, c’est pour parler du Pays du Fer. Comprenez qu’en tant que membre d’un département de Politique, il est de mon absolue priorité d’être au courant de la situation dans un pays allié et… Je vais être honnête avec vous. Je suis de ces hommes politiques qui aimeraient construire leur carrière sur des relations amicales saines et profitables aux deux côtés. De tous les Samouraïs présent actuellement, vous êtes de loin celle qui m’a le plus inspiré confiance, et du coup : nous voilà. »

A la fin de ta tirade, tu exposes la paume de tes mains vers ton interlocutrice, lui prouvant que tu n’es que bonnes intentions. Il n’y a pas de mensonge ni d’irrespect dans ce que tu dis, et tu espères quelque part que le poisson morde à l’hameçon – il serait dommage de devoir être… Plus radical.

Tu réponds avec un sourire chargé de sous-entendu à celui qu’elle t’adresse, te disant que tu as certainement fait le bon choix – elle n’est pas stupide, et c’est toujours un avantage majeur dans ce cadre précis. Si tu ne fais que t’entourer d’idiots, tu finiras submergé et vendu. Continuant à l’observer attentivement, même si tu ne sais pas toi-même ce que tu recherches : de la menace peut-être ; tu écoutes sa réponse concernant le Pays du Fer à la recherche de la moindre opportunité qui puisse être alléchante pour ta personne. Après tout, c’est pour cette raison que tu es là, et tu ne comptes pas reculer par paresse – c’est un mot que tu gardes loin de ton vocabulaire. Les deux nations sont en bons termes, tu en es pleinement conscient. La question qui réside, néanmoins, est jusqu’à quand ? Une relation basée sur l’entente et des services mutuels et condamnée à s’achever précocement à un moment ou à un autre, dès lors que quelqu’un aura mieux à offrir, ce qui…

Tu lui adresses un chaste sourire lorsqu’elle parle du Daimyo du Fer, un homme qu’il te faudra rencontrer à un moment ou un autre, et tu t’empêches de l’applaudir dans tout ton orgueil quand elle te demande quelles sont tes réelles intentions. Elle n’est vraiment pas née de la dernière pluie et ose prendre les devants en attaquant directement dans la conversation, exactement comme toi. Sont-ce les prémices d’une collaboration fructueuse ? Tu espères bien que oui. Arrêtant tout sourire et affichant neutralité et détermination sur ton visage, tu croises son regard avant de répondre.

« J’aimerai contribuer à renforcer l’Alliance entre nos deux pays. Les rendre inséparables pour leur prospérité mutuelle. Il est évident que Tetsu no Kuni est un allié précieux pour Kumo, mais je persiste à considérer que nous ne lui accordons que trop peu d’attention de notre côté. Il s’agit d’un pays frontalier avec l’Empire et le pays du Feu, les deux pays qui émergent de plus en plus en tant que surpuissances du Yuukan. »

Tu te permets un petit soupir pour permettre à tes mots de peser dans la conscience de ton entourage, sachant très bien où tu veux en venir. Si tu ne te trompes pas sur le compte de la jeune femme, elle doit avoir également compris – ce n’est que par politesse que tu termines ton idée.

« Si nos relations venaient à se dégrader avec l’une ou l’autre, Tetsu risque d’être la première cible, et le temps qu’on arrive jusqu’à ce pays avec nos troupes… Il ne restera plus rien à sauver. »

Adressant un sourire quelque peu sot, tu retires l’un de tes gants et tend ta main à ton argile sans aucun geste brusque, signalant clairement avec ton langage du corps que tu n’es aucunement dans la menace – c’est au final un petit oisillon d’argile qui ressort de ton art, et en l’espace d’un mudra tu lui permets de s’envoler librement devant le regard de la Samouraï.


« Avez-vous déjà croiser ce genre d’oiseau à Kumo ? Vous n’y avez peut-être pas prêté attention. J’entends par leur biais. Je vois par leur biais. Ils me permettent d’en savoir plus que nécessaire – c’est d’eux que je sais que vous êtes l’interlocutrice parfaite pour moi. Je n’ai pas la connaissance du Pays de Fer et toutes mes idées resteront de vagues notions si je ne trouve pas d’alliés. »

Tu as le mérite d’être clair, responsable et afficher l’un de tes atouts principaux que nombreux dans ce village ignorent – c’est une réponse juste à l’approche frontale de la combattante en face de toi, et tu espères sincèrement que ta réponse la satisfasse. Elle seule pourrait te suffire si tu joues soigneusement tes idées et projets, et tant que tu peux éviter des morts inutiles en gagnant en prestige… Tu es près à beaucoup de concession.

Tu t’étonnes légèrement de voir ton interlocutrice se crisper, mais tu ne sais que trop bien que tu es venu non préparé. La précipitation n’est pas une chose qui te sert, petit être imbu de lui-même qui ne cherche que la gloire. Tu prépares tes entretiens, te renseignant au possible sur tes invités avant de commencer n’importe quelle discussion pour la simple et bonne raison que tu détestes ne pas savoir dans quelle direction tu te diriges – et ce, qu’importe si tu parles à un chien, un Genin ou un Jônin. Continuant pour autant tes propos, tu vois les angles s’arrondir et tu t’empêches de soupirer de soulagement – n’est-ce pas là une triste vérité ? Tu joues beaucoup sur chacun de tes dialogues, entre tes mensonges, tes manipulations, tes folies et tes projets. UN équilibre injuste qu’il ne convient qu’à toi de trouver, l’autre partie de la médaille qu’était ta femme n’ayant laissé qu’une tombe au cimetière du village.

Cherchant à interpréter les propos de la jeune femme en face de toi au fur et à mesure qu’elle te répond, tu t’abstiens de montrer autre chose que de la compréhension et de la neutralité. Elle est bien différente de Senritsu Hak, ta nouvelle acolyte – bien plus calme, plus réfléchie, plus aboutie. Si l’une est une potentielle furie qui risque d’exploser tout autant que des petites créatures, l’autre semble être son contraire en bien des endroits. N’est-ce pas là un art particulier, pour un veuf comme toi, que de t’entourer de si différentes personnes capables ? Tu souris légèrement à cette pensée.

« Aucune paix ne dure éternellement, mais il s’agit là d’un débat pour une autre journée. Quant à ces idées que vous avancées… Je pense que nous pourrions très bien nous entendre. Aucune limite n’est justifiée, et qu’importe ce qu’il advient de faire pour réussir à faire rayonner Tetsu et Kaminari dans le monde. La mise en place d’un axe terrestre entre nos deux pays est une priorité, et comprenez bien que nous ne pouvons nous résoudre à passer par des zones instables ou neutres… »

Si tu ne le formules pas clairement ta pensée, tu sous-entends largement assez pour que la jeune femme comprenne exactement ce que tu penses. Quelque part, tu admires même le courage qu’elle a de comprendre et déblatérer ses projets de la sorte sans mentir particulièrement – si elle demeure entre tes griffes, elle sera une alliée précieuse. Ses paroles sont tellement proches des tiennes que tu te rends aisément compte qu’elle doit te ressembler plus qu’elle ne l’affiche : est-elle de celles qui cherchent le pouvoir, tout comme toi ? Si tu ne peux trop t’avancer sur ce terrain, tu acceptes de le croire et arrives rapidement à t’en persuader sans aucune preuve. Qu’as-tu déjà dit sur la précipitation ? L’extase de voir de nouvelles politiques se façonner efface ces pensées bien trop vite.

« Des projets sont déjà, calmement, en train d’être mis en place. Comprenez par exemple qu’une certaine Kinzoku Oni, cheftaine d’un mouvement civil de Shimo no Kuni, doit dans les jours à venir se présenter à notre Régence afin de parler de l’instabilité du Givre. »

Cette information, que tu détiens de la Senritsu, est un poids énorme et un prix particulière alléchant. N’est-il pas prématuré de faire un tel cadeau à une nouvelle coopérante ? Tu ne t’en soucies guère : c’est un gage de ta bonne volonté envers elle, et la preuve que vos convictions sont ancrées dans la même mer. Le léger sourire que tu adresses est lourd de sous-entendu quant à ce que tu espères de cette visite, même si tu n’as aucunement la garantie d’y être présent. Tes oiseaux te porteront l’information bien assez vite quoi qu’il advienne.

« Concernant les deux autres… Je pense que le plus gros du chemin est à faire. Ne serait-ce pas là une occasion formidable pour que nous prouvions notre dévotion ? Si tout se retrouve unifier dans le même territoire… Qui sait quelles opportunités nouvelles pourrions-nous découvrir ? Quel projet actuellement idyllique serait-il possible de mettre en place ? »

Tu restes de marbre, t’empêchant de rire de trop à l’intérieur de ton propre esprit, lorsque tu entends la jeune femme répondre. Tu aimes cette hargne et ce désir de faire passer les siens avant le reste qu’elle a – sinon la différence de pays, tu possèdes bien le même après tout. Est-il gênant de soumettre des pays à Tetsu, allié à Kumo ? Tu pourrais partager les craintes que cette dernière avance quant à l’équilibre de puissance entre vos nations, mais à quoi bon ? Kumo est capable d’écraser le Fer s’il le faut et c’est dans cette mentalité qu’est établie la relation entre vous. Il faut être idiot pour l’ignorer, et tu ne te qualifieras jamais comme ça. Qu’un pont fasse rejoindre Tetsu et Kaminari, bloquant par la même l’accès à la met de Ta et Yu, afin de développer un axe maritime de commerce et militaire privilégier en ralliant ces pays à ta cause : c’est une technique tellement audacieuse et vulgaire de soumission géographique que tu penses presque qu’elle pourrait être efficace. Calmement, tu hoches la tête lorsqu’elle termine ses infinies tirades et lui adresse un maigre sourire.

« Je pense que nous avons un axe plus que respectable pour commencer, chacun de notre côté. Tenons nous au courant de l’avancement de nos projets respectifs, sans perdre de vue notre objectif. »

Qu’elle le veuille ou non, le moindre de ses actes agit dans ton intérêt. Tu as appris, à la force de tes idées, à exploiter la moindre merde qui se jette à tes pieds – d’autant plus l’intérêt des manigances d’une femme qui sait clairement où elle veut en venir. C’est presque d’un ridicule déconcertant et pourtant, tu ne peux qu’apprécier. La petite armée que tu te rêvais avoir se constitue petit à petit, et tu es prêt à n’importe quel moment de la laisser agir librement pour en récolter le fruit du travail… Ou bien l’éliminer si un élément venait à devenir trop dérangeant. Cessant ton formalisme maladif, tu croises une dernière fois le regard de la jeune femme.

« Je sens que nous sommes aux prémices d’une longue et fructueuse collaboration, vous savez ? Puissions-nous être accompagnés des bons nuages. »

Inspirant calmement, tu lui adresses de polies salutations avant de partir, délicatement – il n’y a plus rien à se dire de ce côté-là, et moins vous en savez sur l’exactitude de l’autre, mieux cela vaut pour chacun d’entre vous deux. Après tout… Tu es plus à l’abri d’une trahison si tu gardes tes secrets, et tu gagnes plus d’intérêt à trahir à ne pas connaître d’office ceux des autres. Souriant légèrement en coin alors que tu es dos à elle, tu fermes les yeux un bref moment dans la nuit noire.

*Hak, Hak, Hak… J’espère que tu as apprécié le petit spectacle ! Une nouvelle participante de qualité semble se joindre à la ta partie.*


*Attends de voir ce qu’elle a dans le ventre avant de vouloir la baiser. Tu ne voudrais pas d’un enfant malade.*

Tu frissonnes presque à la cruauté de la réponse de ta comparse, mais tu ne t’en soucies guère plus que ça. Le peu que vous vous fréquentez t’as enseigné à ne pas se fier à ses remarques – c’est pour elle une réaction plus que normale. Tout au plus, tu aurais été bien plus inquiet qu’elle se réjouisse de trop. C’est signe de mauvaise augure.

HRP: