Ma rencontre avec Oniri ne s'était pas déroulée comme je l'avais espéré, elle m'avait juste regardé l'air déçu m'expliquant qu'elle n'aurait jamais du me faire confiance et que je n'aurais jamais du tout dévoiler à Ketsueki Yami. Malheureusement c'était chose faite et pendant ce mois passé avec la brune, j'avais appris à l'apprécier réellement, passer toutes ses journées et toutes ses nuits avec la même personne pendant un mois ça créait forcément des liens solides. Au final en terme de temps, je pense que j'avais plus passé de temps avec elle que je l'avais fais avec beaucoup de personnes.

Je retournais d'ailleurs la voir, afin de m'assurer qu'il ne lui manquait rien pendant mon absence, et aussi afin de lui dire qu'Oniri était au courant et qu'elle pourrait donc aller la voir. Mais ce fut le moment que choisis maître Aare pour m'envoyer un message. Ce message était explicite mais terrible à supporter lors de sa lecture. Il annonçait quelque chose que je redoutais arriver. Il me demandait d'ôter la vie à Ketsueki Yami, d'enterrer le cadavre et de rentrer au pays du vent où je me verrais attribuer une nouvelle fonction, même s'il ne précisait pas quoi.

Je m'arrêtais alors en plein milieu d'une rue et je m'asseyais sur un banc. Qu'allais-je faire ? Tuer cette femme avec qui je venais de passer un mois de ma vie ? Nous avions ri ensemble, nous avions sauver des camarades ensemble, je l'appréciais. Réellement. C'était la première fois de ma vie que maître Aare ne prenait absolument pas mes désirs en considération. Que devais-je faire ? Si je ne le faisais pas, ce qui m'attendrait serait une punition exemplaire et par punition je sais déjà ce que ça allait être. De la torture évidemment. Nous sommes le corps d'élite du Nidaime Kazekage nous n'avons pas le droit de faillir à notre tâche. Chaque élément manquant à son devoir sera puni. Une main de fer dans un gant de fer, voilà ce qu'était Araakoa Aare.

Je restais là, une heure attendant sans rien faire me torturant l'esprit pour savoir quelle décision prendre. M'imaginant la scène d'ôter la vie à une personne pour qui j'avais de l'affection. J'avais beau tourner la scène dans ma tête un nombre incalculable de fois. C'était inutile je ne me voyais pas la tuer. Et pourtant, les shinobis sont des armes, ils n'ont pas d'émotions, c'est ce que le Nidaime m'avait inculqué et je m'étais tenu à cela pendant ces quatre années à son service. Mais aujourd'hui n'avais-je pas le droit à une petite pensée égoïste ? Épargner une femme que je pouvais considérer comme une amie ? Que j'avais appris à aimer ? Plus je m'interrogeais et plus je me rendais compte que mon choix était fait. La torture alors, n'est-ce pas ? C'est le regard résigné que je sortais alors un papier spécial, un papier que m'avait confié Aare-sama à n'utiliser que pour des courriers très importants. Ce papier était marqué d'un sceau. Ce sceau consumerait la feuille quelques minutes après ouverture, laissant juste le temps de lire une fois les mots qui y étaient marqués. Je commençais donc l'écriture de ce pli. Il contenait ainsi les mots suivants.

''Chère Yami

C'est avec une tristesse infinie que je dois t'informer de mon départ. Je pense qu'il s'agit plus d'un Adieu que d'un au revoir, de toute manière tu n'auras certainement plus envie de me revoir lorsque tu liras ces lignes. J'ai reçu aujourd'hui l'ordre de la part de mon commanditaire de t'éliminer, je ne sais même pas ce qui motive cet acte, mais j'ai toujours obéis aux ordres de mon maître, je suis son serviteur et je dois m'exécuter. C'est ainsi que les choses sont faites. Pourtant je n'ai pas pu. J'ai eu beau essayer de me convaincre et me passer en boucle la scène de ta mort dans la tête. Je n'ai pas pu. Je suis sensé être une arme, un outil et je ne parviens pas à terminer ma mission, pas celle-ci. Je serais sévèrement puni pour cela mais étrangement même si la peine à venir me paraît lourde, elle me semble toujours plus légère qu'un monde où tu ne fouleras plus ce sol.

Il est maintenant temps que j'expie mon crime. Lorsque tu m'as demandé de t'enlever j'ai prévenu mon maître afin de lui en demander l'autorisation. Il en a alors profité pour faire chanter Kioshi-senpaî. Le Rokudaime Kazekage a déserté son poste dans le but de te retrouver. Je n'ai appris la vérité que la veille de l'écriture de ce courrier. Je ne peux te révéler le nom de mon commanditaire, la marque sur ma langue m'en empêche, mais je peux en revanche te dire qu'il a occupé la même fonction que Kioshi-senpaî. Tu devrais pouvoir faire la liaison par toi-même. Ce mois passé à apporter de la joie dans mon océan de solitude. Dans l'espoir que ce ne soit qu'un au revoir.

Ton ami, Isnajh. ''

Voilà, la chose était faite, je devais en écrire une pour Oniri-chan aussi, mais celle là j'aurais plus le temps, puisque elle, je ne l'avais pas trompé donc je n'aurais pas d'explication à donner. Je repartais donc en direction de là où j'avais laissé Yami, je préférais donner ce pli en main propre. Les minutes passèrent avant que je n'arrive à ma destination. Lorsque je fus en fin face à face avec la jeune femme, je lui tendais le pli tout en m'exprimant d'une voix légèrement tremblante.


« Tiens c'est pour toi, ouvre là dans un endroit où tu es sûre de pouvoir la lire entièrement sans être interrompue. »


Je me retournais alors, réprimant mes sentiments et faisant un pas vers la sortie.

J'étais toute seule depuis quelques heures. Je m'ennuyais pour tout dire, étant dans l'attente du retour de Isnajh de la mégalopole avec, je l'espérais, Oniri à ses côtés. J'avais l'impression de tourner en rond comme une lionne dans sa cage...

L'un de mes kuchiyose senseur était posté dans la cavité avec moi, les sens en éveils au cas où quelqu'un viendrait à notre rencontre pour me préparer à le ou les recevoir. Heureusement pour le moment tout semblait calme.

Je posais ma tête sur la paroi rocheuse tout en regardant en l'air, perdue dans mes pensées. Cela faisait tellement de temps que je ne l'avais pas vu maintenant... Je percevais sa présence à travers notre lien de sang et elle ne m'avait jamais semblé aussi près tout en restant si inaccessible cela n'en était que plus frustrant encore...

Après un long soupir en songeant rétrospectivement à tout ce qui c'était passé ce dernier mois je sortais de l'obscurité pour me laisser baigner par les rayons du soleil et observer les alentours avec une main en visière comme si je percevais une présence familière qui s'approchait. Je n'avais pas de lien de sang avec cette personne mais nous en partagions la même essence et j'avais passé suffisamment de temps en sa compagnie pour savoir lorsqu'il n'était pas loin.

Hotep, mon félidé, ne s'alarmait pas et ne quittait pas sa cachette parce qu'il savait pertinemment que cette présence là n'était pas une menace. Finalement je le voyais arriver. Il était seul et semblait départi de son habituelle bonne humeur. Que s'était-il donc passé ? Je m'apprêtais à le lui demander mais fut coupée dans mon élan alors qu'il me tendait une lettre tout en me demandant, dans une voix presque tremblante, de la lire dans un endroit où je ne serais pas interrompue. Et il détourna les talons.

Des milliers de questions traversaient mon esprit, notamment sur ce qu'il s'était passé avec Oniri mais je ravalais mon égoïsme pour agir instinctivement et attraper le pan de ses vêtements tout en posant mon regard sur la lettre encore pliée que je tenais dans ma main libre.

« Tu t'en vas c'est ça ? »

C'était plus une affirmation qu'une réelle question. Il me laissait cette lettre et ce serait alors le seul souvenir de lui avant qu'il ne disparaisse lui aussi.
Mon regard cherchait le sien, fixant sa tête alors que j'espérais qu'il la retourne en ayant le courage de l'affronter tandis que je resserrais davantage ma prise sur ses vêtements comme si je craignais qu'il ne s'en défasse.

« Pourquoi ? »

Demandais-je sur un ton concis mais emprunt d'émotion.
Avais-je fait quelque chose de mal ? C'était encore possible... Pourquoi fallait-il que tout le monde finisse par m'abandonner ? Cela amusait le destin de me laisser m'attacher à des personnes pour mieux me les retirer par la suite ?!

Je faisais un pas en avant et plaquais mon front contre son dos tout en fermant les yeux dans une supplique qui, je le savais au fond, ne pourrait être tenue.

« Ne pars pas. »

Pourquoi le dire alors ? Pour gagner du temps je suppose... De précieuses secondes et faire correctement un au revoir ou un adieu...
Je venais de passer plusieurs semaines exclusivement en sa compagnie, nous étions allés secourir des nôtres et avions appris à nous connaître et nous apprécier et maintenant ?! Tout devait être oublié ?! J'en avais ras le bol de cette vie et ces attachements ! Souffrir à cause de sentiments puérils qui n'avait de cesse de me renvoyer ma faiblesse en pleine face : celle là même que mon père m'avait toujours reproché ! Tout était plus simple lorsque je ne ressentais rien si ce n'était de l'aversion pour tous et moi pour seul intérêt ! Pourtant je n'étais pas prête à y renoncer car cela était à quel prix ? La solitude. Il était hors de question que je connaisse une nouvelle traversée du désert. Cette chose même qui vous rappelle que vous n'êtes rien. Vous n'êtes certes pas contraint d'agir par rapport à vos sentiments mais puisque personne ne vous porte intérêt vous n'exister pas. Je ne voulais pas de cette transparence et pourtant, chaque personne qui comptait pour moi et qui s'éloignait me rapprochait un peu plus de cette inextricable perfidie.

« Je ne veux pas de cette lettre. Restes et je n'aurais pas à la lire... »

C'était un bel euphémisme... Pourquoi tout finissait par se compliquer...

Il se terrait dans son mutisme me laissant seule locutrice de mon désarroi. Il allait partir et me laisser seule... J'allais me retrouver happer par cet océan de solitude jusqu'à m'y noyer comme autrefois...

Ma gorge était nouée alors que je restais accrochée à lui. Non. Il n'était pas question qu'il parte. Il ne m'abandonnerait pas lui aussi... Hormis La, il était le seul Ketsueki à éprouver de la sympathie à mon égard et cela était réciproque. Je ne pouvais pas en dire autant de la relation avec mon père bien que je lui vouais un profond respect... Il n'était pas possible que je laisse le destin me dicter une nouvelle fois que la confiance ne pouvait pas être de mise auprès des miens... Non...

Il se retourna finalement pour m'enlacer dans ses bras. Je ne pleurais pas mais je sentais le picotement de mes yeux qui me signifiait que je n'en étais pas loin. Quelle scène pitoyable. Mais qu'en avais-je à faire ?

Il disait savoir qu'il aurait dû repartir, que Oniri ne souhaitait plus le revoir après avoir appris qu'il m'avait conduit ici et j'étais désormais son seul point d'attache pour rester ici... Il ne voulait pas partir mais il semblait ne pas avoir le choix. Pourquoi ?

« Plus maître de tes décisions ? C'est celui qui t'a apposé ce sceau sur la langue qui te force à partir ?! »

Peut-être ne pouvait-il pas l'avouer à cause de cette fameuse restriction. Je fronçais les sourcils et l'observais avant d'ajouter :

« Alors on va le faire retirer ! On trouvera le moyen pour qu'il te laisse tranquille. Tu n'es pas un pion Isnajh ! Tu es l'un des apôtres de Jashin ! Tu as oublié ?! Tu vaux mieux que de ramper devant je ne sais quel maître dégénéré ! »

Et surtout...

« Tu es un Ketsueki ! Où est passée ta fierté ?! Tu n'as a être à la botte de personne ! Si tu veux vraiment avoir un guide alors choisi moi. Je suis la cheffe du clan après tout. Mais jamais je ne te contraindrais à faire quoi que ce soit dont tu n'as pas envie. »

Je n'avais besoin que d'éléments suivant mes idéaux et laissaient les autres tranquilles sans plus éprouver la moindre considération à leur égard mais je ne les forçais pas à œuvrer pour un objectif dont il n'avait que faire.

Ma lecture de cette lettre me ferait comprendre certaines choses et me ferait peut-être le détester. A ces mots je le regardais dans les yeux, interrogatrice. Qu'avait-il bien pu faire ?! Ou plutôt : qu'est-ce que son maître avait bien pu lui ordonner ?! Avais-je devant moi un traître ou bien un simple exécuteur d'ordre enchaîné à sa condition malgré lui ? Si c'était cela...

« On va trouver un moyen. On peut même aller le supprimer et tu n'auras plus jamais à lui devoir quoi que ce soit ! Je ne veux pas te détester ! C'est envers ton commanditaire que va ma haine ! »

Mes yeux écarlates luisaient d'intensité tant ma hargne se couplait avec ma détresse de le voir partir.

« Justement ! Tu vas pouvoir être le vrai toi : constamment, une fois que l'on aura retiré ce sceau ou mener six pieds sous terre ton bourreau. »

Il me demandait de le laisser profiter de cet instant de semi quiétude avant de le laisser sans aller mais je ne pouvais m'y résoudre. Toujours enlacés, le regard planté dans le sien je me questionnais.

« De quoi as-tu peur ? De lui ? De la solitude ? Si tu ne peux pas me le dire alors fait le moi comprendre. S'il s'agit de lui je peux t'aider à en finir et Oniri aussi nous aidera. S'il s'agit de la solitude eh bien regarde : tu n'es pas seul ! »

Je ne parvenais pas à croire ce que j'entendais. Qui était cet homme apeuré devant moi ? Où était le Isnajh insouciant et plein de fierté qui revendiquait le tribu que Jashin-sama lui avait confié ?! Je ne savais pas à qui je m'attaquais ? Qu'est-ce que cela pouvait faire ? Il reculait devant les obstacles maintenant ? Il n'en valait pas la peine ?

« Comment oses-tu avoir si peu de considération pour toi même ? »

Lui demandais-je en posant mes mains sur son buste, cherchant son regard du mien, flamboyant d'agacement.
Il était un Ketsueki ! Il n'avait pas le droit de s'apitoyer et de ramper sur le sol devant un pseudo supérieur alors que lui même était l'un des apôtres du Seigneur Noir !

« Je ne te comprends pas. »

Je cherchais une réponse à travers ses yeux mais en vain.

« Il t'oblige à te sentir si inférieur aussi ?! Tu es largement capable de lui tenir tête ! Regarde ! Tu viens de désobéir à l'un de ses ordres ! Cela prouve que tu le peux et maintenant quoi ? Tu voudrais retourner le voir pour recevoir une punition ?! Tu la juges méritée ? Pourquoi te laisses-tu faire sans réagir ?! »

C'était inconcevable. Il ne ressemblait en rien au Isnajh que j'avais côtoyé durant ce mois. Il était contraint d'être ainsi soumis ! Le véritable Isnajh luttait sans doute pour se défaire de l'emprise de son bourreau : il ne pouvait en être autrement !

Peur de vivre... Voilà ce qu'il me disait. Qu'est-ce que cela voulait dire au juste ? Il craignait de vivre par lui même sans quelqu'un pour le guider ? Je réfléchissais à la question alors qu'il déposait un baiser dans mon cou, absorbée par cette incompréhension qui me faisait occulter complètement ce geste des plus affectif.

« Peur de vivre ? Tu n'as pourtant pas toujours été enchaîné par celui que tu appelles maître n'est-ce pas ? La vie, aussi complexe soit elle, est un tribu qui ne doit pas effrayer. Jashin-sama nous a créer pour être ses apôtres. Nous ne sommes pas n'importe qui dans ce monde. Sa volonté est notre accomplissement. »

Voulait-il renier son créateur ? Lui qui était un fervent croyant depuis toujours cela m'étonnait fortement. Alors pourquoi ?
Il avait profité de mes paroles pour me soustraire à son étreinte avant de proféré une phrase qui faisait sens dans mon esprit et me rappelait la fois où il m'avait fait boire cette chose infecte : cela me semblait tellement loin...
Je restais coi devant ce qu'il venait de dire alors qu'il m'adressait un sourire emplit de tristesse avant de s'en aller...

Je ne le retenais pas. Pas cette fois. Il avait choisi de retrouver son bourreau qui le châtierait pour sa désobéissance plutôt que de trouver une solution en ma compagnie. Il partait. Il me laissait. Je me retrouvais toute seule sur des terres dont j'ignorais tout, loin de mon désert natal. Les bras ballants le long du corps, mon regard était rivé sur sa silhouette que je ne reverrais sans doute plus jamais. J'avais perdu un ami. J'avais perdu un frère.

Après quelques instants, mes yeux se posèrent sur la lettre qu'il m'avait adressé que je dépliais, craignant le pire... Qu'allais-je y lire ?