Spoiler:

Loin, isolé de tout, le genin était assis sur un rocher poli, de forme ovale, aux traits réguliers, puisqu'ils avaient été travaillés par l'homme pour lui donner un aspect esthétique. Ses lombaires étaient posées sur le rocher, tandis que ses abdominaux étaient contractés, pour lui permettre de se redresser et de lever la tête. Sa jambe droite était fléchie, son pied droit était posé sur le rocher, sa jambe gauche était tendue vers le sol, il appuya son bras droit sur son genou droit tout en fixant l'auberge devant lui d'un regard vide.

Il réfléchissait, se posait des questions comme toujours. Il se cherchait, se demandait qui était-il, à quoi était-il destiné. Etait-il un Samurai ou bien un Shinobi lambda ? Il faut savoir que le Genin avait reçu une éducation stricte où on lui avait inculqué le Bushido, à savoir, les valeurs des Samurai et également les bases du Kenjutsu. On lui a expliqué ce qu'était le Kenjutsu selon un Samurai, mais lorsqu'il était temps pour lui de choisir sa voie afin d'apprendre à combattre avec les techniques des Samurai, il refusa.

Il avait d'abord quitté son foyer familiale où il était dorloté en abandonnant ses parents pour devenir Samuraï. Ces derniers l'avaient accueillis à bras ouvert, il lui avait inculqué le Bushido. Les gens ont tendance à penser, à tord, que le Bushido est l'art du combat des Samurai, or non. Le Bushido, c'est simplement, un code des Samurai contenant tous les principes moraux, les vertus des Samurai. Ces derniers lui avaient enseignés les bases universelles du Kenjutsu en l'initiant au maniement du Katana de façon basique. Ils lui ont donné des conseils, répondus à ses questions. Or, lorsqu'on lui proposa de lui enseigner l'art du combat des Samurai, ce qui ferait de lui, un Samurai, il refusa puisqu'il voulait devenir un Shinobi.

Pleins de vertus, ils acceptèrent sa décision et la respectèrent, mais Shirudo se sentait mal d'avoir fait cela. Encore aujourd'hui, il ne savait pas s'il avait fait le bon choix, s'il était digne d'eux, ça le rongeait de l'intérieur. Il avait l'impression d'avoir renié les siens, d'avoir renié son passé, ceux qui l'avaient aidés, de les avoir abandonné, alors qu'ils lui avaient tout apporté. Il ne trouvait pas les réponses à ses questions, il ne savait pas ce qu'il souhaitait faire de sa vie, excepté devenir le Shinobi le plus rapide que le monde ait connu et apporter la paix, la justice et l'ordre partout dans ce monde. Comment ?

Il fallait aller de l'avant et il comptait sur sa bonne étoile et l'être suprême qui était à l'origine de tout pour le guider. Il savait que, plus tard dans sa vie, il allait être confronté à des péripéties, à des moments difficiles, à de nombreuses épreuves qui lui permettraient de trouver sa voie. Tout est écrit depuis sa naissance, cet être suprême connaissait le passé, le présent, le futur du jeune Genin et Shirudo espérait être prêt, au moment venu, pour affronter ces épreuves et le lot de stress qui les accompagnaient.

Il reprit ses esprits puis pénétra dans la taverne. Il souhaitait boire un peu avant de rentrer chez lui puisqu'il avait prévu un entraînement assez difficile pour le lendemain. Il n'eut à peine le temps de poser un pied dans l'édifice que le barman vint l'agresser en lui précisant que les armes étaient interdites et qu'il devait les lui donner sans quoi, la porte était ouverte.

"Pffff... Ça change quoi ? Si vous me prenez mes deux Katana, je peux toujours me servir de mon chakra... c'est n'importe quoi." - Dit-il avec agacement et déception.

Il tendit ses deux Katana vers le barman puis le regarda dans les yeux, l'air de dire : "si j'ai envie de tuer, je le ferais". Meurtrier ? Non, Shirudo n'était pas comme ça. Il voulait simplement lui montrer qu'il n'était pas docile et qu'il ne supportait pas les personnes qui se donnaient de l'autorité sans le mériter, car oui, il était un tantinet rebelle pour une personne qui avait reçu une éducation stricte digne d'un Samurai. Sans doute, puisque c'était une âme tourmentée, étant donné qu'il était perdu et ne savait plus qui il était.

Il prit place autour d'une table ovale, tout en demandant un saké. La tension était palpable, les deux hommes étaient sur les nerfs, mais chacun se contenait. Shirudo voulait son saké, tandis que le barman voulait son argent, jusque là tout le monde y trouvait son compte. Il posa son dos sur le dossier tout en se grattant le menton. De nouveau, il réfléchissait, lorsque soudain, une personne arriva pour s'asseoir à sa table. Il ne l'avait même pas remarqué, alors que pourtant, cette personne était arrivée après lui.

"Décidément... Partout où il y a de l'alcool, t'y es toi, hein." - Affirmait-il en rigolant.

Shinsuke était visiblement soulagé de voir le Shinobi dans cette taverne et ironie du sort, d'autres Samurais avaient rendez-vous ici. C'est d'ailleurs pour ces situations-là que Shirudo croyait en l'existence d'un être omniscient que les gens appelaient "hasard". Pour lui, le hasard n'existe pas, c'est simplement la présence, l'intervention de celui qui est à l'origine de tout. Les deux natifs du pays du fer allaient de nouveau parler géopolitique, cette fois, avec d'autres Samurai.

"Une république ? Non je ne sais pas ce que c'est, jamais entendu parler. Il est vrai que le pouvoir doit revenir au peuple, oui, mais que faire ? Je t'ai dit que nous devrions attendre afin de devenir Raikage pour pouvoir apporter un changement. Tu as un projet ?"

La campagne est débutée.

Une propagande que je mène dans une optique pure que peu de gens pourront comprendre. Au final, si les peuplades réalisent l’erreur de leur nation, la victoire sera mienne même si j’y perds la vie. J’en ai déjà discuté avec plusieurs personnes et je sais que la direction que j’entreprends est noble, son but est bon et le résultat sera nécessairement positif pour tout le Fer. S’ils me détestent maintenant, ils seront heureux dans l’avenir.

Certains appellent ça diffamation ou calomnie. Personnellement, je crois vraiment que c’est la vérité. La raison est simple, ce l’est! Les gens, ici, dans ce monde de froid et de givre, sont enfermés. Ils sont dans une prison et ils ne s’en rendent même pas compte. Les jours de Tetsu no Kuni sont comptés si la direction du pays ne change pas! Il faut faire évoluer cette contré ou bien quelqu’un d’autre le fera!

J’avais déjà visité la grande partie des villages du Fer et discuter, çà et là, de mes idées révolutionnaires. Je tente de faire passer l’idée lentement, de bouche à oreille. Je veux qu’ils acceptent, qu’ils comprennent par eux même, qu’ils veulent le changement. Je veux qu’ils en discutent ensemble, alors que je ne suis pas là, qu’ils en parlent entre habitants officiels.

La première partie de mon plan maintenant effectué, je me rends à Kaminari subtilement. Selon les termes signés entre le Zen’Ryou et Kumo, j’y ai droit de passage. Évidemment, ne faisant partie du groupe qu’en tant que supporteur, je n’ai pas tous les mêmes droits, mais je ne pense pas que Zennosuke ou un autre haut-gradé de la Foudre ait pris la décision de mettre à terre notre entente pour si peu.

Laissant mon vieux cheval Boke à un étable tout près d’une auberge de voyageurs, je prends quelques minutes pour appeler Chokushi et le caresser en observant, du coin de l’œil, la clientèle silencieuse de l’établissement. Tout en flattant la nuque de mon hibou du désert, je prends un malin plaisir à dévisager les uns après les autres toutes les personnes dans l’enceinte du bâtiment et à analyser leurs manies et leurs manières.

Je laisse s’envoler mon animal de compagnie, enlève une plume qui est restée collé sur mon veston et pénètre dans la salle principale dudit établissement. Sitôt mon premier pas passé le seuil que le propriétaire s’acclame.

« Mais, vous vous êtes passé le mot, aujourd’hui! Pas d’arme dans mon auberge! » S’écrit-il.

Souriant, j’enlève directement ma ceinture et y retire les trois fourreaux sans un seul mot. Je lui laisse les lames, réinstalle délicatement l’accessoire et, en conservant ma bonne humeur, hoche doucement de la tête.

« Je vous conseille alors de mettre une pancarte ou un écriteaux stipulant qu’elles sont interdites ce qui est plutôt étrange pour un bâtiment laissant entrer les voyageurs qui généralement sont des combattants au cœur de ces montagnes. »

Mon sourire s’agrandit un peu.

« Mais, soit, ceci étant fait, j’aimerais prendre un café s’il-vous-plaît. »

Je dépose quelques sous sur le comptoir et remercie l’hôte. Me retournant, je remarque que deux jeunes hommes sortent de la moyenne. Étant les seuls personnes discutant ouvertement, je m’octroie le droit d’écouter leur conversation. Après quelques minutes, dans ma nonchalance habituelle, je décide donc de m’approcher. À quelques pas, en replaçant avec attention le bouton de la manche de mon habit, je produits un subtil claquement de langue en guise d'introduction.

« Messieurs, que ce passe-t-il ici? Vous discutez politique? De quel pays? »

J’arc légèrement mon dos, avançant ma tête au-dessus de leur table, laissant tomber mes cheveux aux côtés de ma tête. Le brun de mes yeux tourne doucement au jaune une fois la lumière de la bougie plus près de mes iris. Je conserve la même expression chaleureuse en observant l’un et l’autre membre de cette réunion.

« Dites? Puis-je participer? »

HRP a écrit:

N'ayant pas d'informations de temps, j'ai donc décidé que le tout se passe après ma propagande en solo dans Tetsu no Kuni qui, elle-même, se déroule quelques semaines après les événements du Shukai (assassinat des Daimyô). Si jamais c'est problématique, faites-moi signe!

"Bon, pour commencer... ton projet est bien trop utopiste. Il ne verra jamais le jour, tu espères qu'il ait un effet boomerang et c'est sûr qu'il aura cet effet et ils le savent très bien. Seulement, tu n'as pas affaire à n'importe qui, tu as affaire à des personnes qui dominent le monde entier et il leur suffit d'un sommet pour ordonner ta mort. Ils ont un pouvoir de vie ou de mort sur toi et tu seras l'ennemi juré du monde, ce sera l'une des rares occasions où le monde sera uni pour combattre ce qu'il considère comme étant leur ennemi. Ton projet ne verra jamais le jour, pour la simple raison qu'il sera tué dans l'oeuf parce qu'ils craindraient que tes idéaux se propagent, c'est ce que tu veux, d'ailleurs. Tu ne t'en tireras pas comme ça, tu cours droit à ta perte ainsi. A moins d'atteindre le sommet du monde, tu ne pourras rien changer, ils sont plus malins que toi, ils savent ce que tu veux, sauf si t'agis de manière détournée. Fais tes projets secrètement, la réussite se chargera du bruit. Ton projet ne verra le jour que si tu atteints le sommet du monde, autrement, tu n'auras jamais ce que tu veux ainsi."

"Tu as beaucoup de courage et d'inconscience pour parler de ça ici. Tu ne sais pas qui nous entoure, on devrait parler de ça en privé quelque part où il n'y a personne. Tu prends des risques inconsidérés, penses à te changer toi-même avant de vouloir changer le monde, c'est juste un conseil d'ami."

J’observe pendant un long moment les deux jeunes gens qui sont à cette table. Ils semblent se connaître et s’apprécier ce qui me tire une légère variation dans mon sourire, une attention positive. Sans le moindre bruit perturbant, je prends place à la table en retirant en douceur la chaise de sous la table. Une fois assis, je ramène ma cheville droite sur mon genou gauche.

Alors que celui à ma gauche explique à celui à ma droite les raisons de la défaite probable de son projet dit utopiste, ma consommation arrive. Je remercie du bout des lèvres le serveur, en espérant ne pas couper l’élan du Kumojin, si j’en crois son bandeau.

*Il se fait remettre en place comme je l’ai été si souvent et comme je le suis encore.*

Cette pensée me dire un rictus désapprobateur. Sans en parler encore, je dépose mon breuvage chaud et y dépose un sucre et un peu de lait. Je replace le ruban dans mes cheveux et réalise que le plus jeune a complété sa tirade. J’attends une seconde, pour voir si l’autre lui envoie une réponse et, avant que le sujet ne s’estompe, je prends la parole.

« Vous savez? »

Je commence ma phrase juste après avoir repris ma tasse.

« Avoir des buts, c’est réellement une bonne chose! C’est important d’avoir le courage, l’ambition et la détermination d’avancer dans la direction qu’on a choisi et, aussi, l’humilité de savoir quand nous sommes dans le tort. »

Je prends doucement une gorgée, tenant la tasse d’une main et la coupole sur laquelle elle est déposée de l’autre.

« On a souvent dit de moi que j’étais quelqu’un de trop optimiste, de pas suffisamment réaliste. Je dois l’admettre, je ne sais pas de quoi vous parlez, ici, mais si vous êtes certain qu’il s’agisse de la bonne voie, je vous conseille de la suivre. Inversement… »

Je ponctue encore la conversation d’une gorgée.

« Inversement, nous sommes aussi dans une monde de responsabilités! Nos nations sont en constantes expansions et réellement militarisé. Il faut savoir où, quand et comment pousser ses idées si l’on veut conserver sa tête. »

Mon regard s’intensifie. Je dévisage les deux jeunes Shinobis membre de l’une des plus grandes forces militaires mondiale : Kumo. Pour ma part, la liberté est importante et la paix l’est tout autant. Cependant, les ninjas, ces soldats, se doivent d’écouter leurs maîtres sous risques d’être recherchés et mis à mort.

Résumé:

Shirudo expliqua le fond de sa pensée, il ne cachait pas sa désapprobation. Ses mots étaient durs, simplement parce qu'il tenait à son ami et il ne voulait pas le perdre aussi bêtement. Ce dernier courrait droit à sa perte avec ce projet dénué de sens, mais s'il s'obstinait, alors le genin ne s'y opposerait pas. L'inconnu prit la parole pour une raison inconnue. Que faisait-il là d'ailleurs ? Pourquoi est-il venu discuter avec deux vulgaires genin de kumo ? Il ne semblait pas avoir d'insigne ce qui signifiait qu'il était un Nukenin, il n'était donc pas de confiance. Cette rencontre était le fruit du hasard, mais elle pouvait être utile et intéressante pour le kumojin et pour ses projets futurs.

L'inconnu qui n'avait pas décliné son identité affirma qu'avoir un but c'est bien, mais assumer ses torts, c'est mieux. Peut-être qu'il était d'accord avec ce que disait le genin et insinuait que le Samurai était en tort. Ses propos étaient emplis d'une certaine sagesse, sans doute, avait-il beaucoup de vécus. Il semblait parler de ça comme s'il l'avait déjà vécu, comme s'il en avait déjà fait l'expérience. C'était en effet l'expérience qui parlait, puisqu'il continua à donner des conseils avisés aux deux adolescents.

Shinsuke était résolu et convaincu qu'il possédait la solution, qu'il pouvait instaurer une république et apporter la justice et la paix dans le monde de cette façon. Shirudo avait une stratégie bien différente qui collait à sa personnalité, il pensait qu'il fallait faire cela de façon détournée. Il pensait que ses agissements et ses objectifs devaient être cachés, dissimulés et que sa manœuvre devrait être "détournée", car il s'agissait là d'un objectif particulièrement compliqué. Il s'agit de changer le monde, le développement d'un tel plan devrait prendre plusieurs années, or c'est comme si le Samurai faisait ça sur un coup de tête. Assurément, son objectif n’aboutira pas, mais il fallait qu'il s'en rende compte lui-même, il fallait qu'il tombe pour comprendre son erreur, c'est là, le chemin de la vie ; c'est comme ça que l'on grandit.

Le samurai s'adressa ensuite à l'inconnu et il est vrai, qu'aux yeux de Shirudo, le grand homme semblait provenir du pays du fer lui aussi. A travers son discours, on pouvait clairement voir des traces de son éducation, on lui a sûrement inculqué le Bushido, de plus il était venu armé d'un katana. Shinsuke demanda alors s'il connaissait la ville portuaire du nom de Yumiya. La question ne lui était pas adressée, mais le genin prit tout de même le temps d'y répondre.

"Moi... J'en ai déjà entendu parler, mais ce n'est pas une ville portuaire puisqu'elle se situe en plein milieu du pays et elle n'est bordée par aucune mer."

La question était étrange, si étrange que Shirudo voulait savoir ce qu'il voulait dire, or il se trouve qu'elle ne lui était pas adressée, elle trouverait peut-être tout son sens pour celui qui en était le destinataire. Le genin se tut et attendit avec impatience sa réponse, mais il se rendit compte qu'il ne connaissait toujours pas l'identité du troisième homme.

"Au fait... vous n'avez toujours pas décliné votre identité. La moindre des choses serait de vous présenter."

*De quoi parle cet homme?*

Malgré la surprise, je savoure sans un son le breuvage chaud et légèrement amer tout en analysant les paroles de l’un et de l’autre des Kumojins à cette tablée. L’un, très terre-à-terre, tente de dissuader l’autre, idéaliste, de poursuivre ses objectifs simplement parce que, selon lui, ils sont inatteignables. Deux questions s’empilent. Souriant, je prends néanmoins le temps de déposer ma tasse avant de poursuivre la discussion.

« C’est vrai, jeune homme, vous avez raison. Je me nomme Zento, mais la plupart des gens m’appellent Taku. »

Je replace une nouvelle fois mon bouton de manche et attrape un cure-dent qui se trouve caché dans un pli. Je le fais tournoyer deux ou trois fois avant de l’amener à ma bouche.

« Je suis effectivement originaire du Fer, mais je n’y vis plus depuis un bon moment. J’ai une habitation à Ame no Kuni et une autre à Mizu no Kuni. Néanmoins, je suis de retour, maintenant, et je compte bien visiter toute la nation pour voir ce qu’elle est devenue. »

Je fais glisser le cure-dent de droite à gauche. J’avance un peu sur mon banc et j’appuie mes avant-bras sur la table.

« Pour ce qui est de Yumiya… »

Je toussote et souris. Mon sourire est narquois et taquin, mais je ne veux pas vraiment de mal avec cette petite pointe. J’attrape mon café et en prends une petite gorgée avant de le déposer dans la minuscule assiette qui n’existe que pour éviter quelques gouttes à nettoyer.

« D’aussi loin que je me souvienne, la carte de Tetsu no Kuni n’indique que deux ports : celui de Kijousuifou au Nord et l’autre appartenant à Tsuyoisuifou se trouvant près de la Capitale. »

Je souffle anormalement longtemps sur mon café non pas pour le refroidir, mais plutôt pour permettre à mes deux interlocuteurs de fortune de bien assimiler mes propos.

« Je dois l’avouer, ça fait un moment que je n’y ai pas visité les plaines et montagnes givrées de la contrée. De mes souvenirs, Yumiya se situait à l’ombre des montagnes. A-t-elle eu une expansion si phénoménale que la densité de sa population s’est rendu jusqu’aux étendus d’eau? »

J’avale une dernière gorgée avant de déposer ma coupole vide et de sortir le bout de bois de ma bouche pour le faire pivoter entre mes doigts et mes jointures, le faisant valser au gré du hasard. J’écoute attentivement ce que les Shinobis s’apprêtent à dire, particulièrement celui aux idées révolutionnaires.

Spoiler:

Il suffisait juste de demander, l'homme inconnu se présenta enfin. Il disait s'appeler Zento et il nous autorisait à l'appeler Taku. L'un n'étant pas le diminutif de l'autre, je me demandais s'il y avait un lien entre son nom et son surnom et si ce dernier avait une signification. Pensant que je le saurais tôt ou tard, je n'eus pas demandé. Peut-être qu'il ne voulait pas nous définir la signification de son surnom. L'homme était un bretteur du pays du fer, cela pouvait nous mener à la conclusion qu'il était samurai, même si cela ne voulait rien dire. Je suis la preuve vivante que tout natif du pays du fer n'est pas forcément un Samurai.

Il affirmait ne plus y vivre puisqu'il possédait une habitation au pays de la pluie et une autre au pays de l'eau. Il devait avoir beaucoup de moyens pour pouvoir financer ses deux demeures ; également, il semblait voyager, vagabonder à travers le monde puisque ses deux logements ne se trouvaient pas du tout au même endroit. Étrange qu'il se soit implanté au pays de la pluie qui était pourtant annexé par le pays du feu. Il a dû avoir besoin de l'autorisation de l'Hokage pour s'y installer, mais dans ce cas, sa présence au pays de la foudre était discutable. Que faisait-il au pays de la foudre ? Etait-ce un espion à la solde du village caché de la feuille prétextant venir du pays du fer pour avoir des informations auprès de deux pauvres petits genin du pays de la foudre ?

J'étais plus que jamais sur mes gardes suite à cela, je ne savais pas qui il était, ni ce qu'il comptait faire. Il me paraissait très calme et beaucoup trop sociable. Il est vrai que les espions ont l'habitude d'écouter les conservations en se faisant le plus discret possible, mais lui, il est venu de lui-même pour discuter à nos côtés. Pourquoi ? Etait-ce une manière détournée pour nous pousser à croire qu'il n'est pas un espion ? Néanmoins, il avait affirmé avoir un logement au pays de la pluie, ce qui aurait pu griller sa couverture. Non, je ne crois pas qu'il soit un espion, mais je ne baissais pas ma garde pour autant.

Il est vrai que je ne faisais que supposer, je n'avais aucune preuve, rien d'autre que de simples doutes. C'est à partir de ce moment-là que j'eus décidé de me concentrer sur ce qu'il disait et j'entamais une analyse de ses propos, de ses questions de sorte à pouvoir deviner sa stratégie et sa technique d'approche. De cette façon, je pourrais savoir s'il s'agissait bel et bien d'un espion. En attendant, je préférais conserver cela en moi pour faire ma propre enquête et je fis le nécessaire pour que cela ne se sache pas.

Taku savait lui aussi où se trouvait cette fameuse ville de Yumiya puisqu'il affirmait tout comme moi, que Yumiya n'était pas un port. Shinsuke vint me taper l'épaule, je le regardai alors puis ce dernier esquissa un sourire en m'affirmant que je connaissais très bien le pays et que cela ne le surprenait pas. Il poursuivit ensuite en disait que tout cela n'était qu'un test. Un test ? Voulait-il se rattraper ou était-ce vrai ?

Ensuite, le Genin nous affirma qu'il enquêtait sur une affaire puis il se mit à chuchoter à voix basse comme s'il voulait cacher ça à l'oreille des autres individus alors que jusque là, il allait jusqu'à annoncer ses projets suicidaires aux oreilles du monde. Que le monde sache ses projets de changer radicalement l'ordre actuel en prévoyant de retirer le pouvoir à ceux qui l'ont, cela ne le dérangeait pas ; mais que le monde sache qu'il enquêtait sur un assassinat, là par contre, ça lui posait problèmes. Il disait enquêter sur l'assassinat d'une famille aristocrate. Je me mis à froncer les sourcils, puisque la raison m'en échapper ; décidément, le genin fonctionnait à l'envers.

"Et... Pourquoi enquêtes-tu sur cette affaire ? Ça ne te regarde pas... et puis comment le sais-tu ?"

Il posa étrangement sa main sur sa cuisse puis changea de sujet en affirmant qu'il voulait revenir aux âges d'or du pays du fer, en instaurant une république et pour cela, il aurait besoin de personnes pour l'aider. Il souhaitait que le peuple se dirige lui-même et sollicita nos avis, mais je n'y répondis pas. Ce changement brusque de sujet me paraissait étrange. Pourquoi jongle-t-il d'un sujet à l'autre en laissant des zones d'ombre ? J'étais de nature méfiante puisque j'étais pourvu d'une bonne intuition. C'est pour cette raison que je fus suspicieux. A présent, je surveillais les dires de mes deux interlocuteurs et j'eus décidé de leur poser de nombreuses questions pour clarifier certaines choses.

"Au fait, comment vous êtes-vous installés au pays de la pluie ? Il a été annexé par le pays du feu."

La situation était très étrange, j'avais affaire à deux personnes atypiques et j'avais de nombreuses interrogations. J'étais impatient de savoir ce qui allait être dit et fait.

« Meiji? »

Je prends quelques minutes pour réfléchir.

« Les Meiji de Yumiya, donc? Non, je ne peux pas dire que je connaisse. »

Je laisse l’autre Kumojin interroger le premier. Cette conversation est bien étrange. Le premier, celui qui enquête sur un meurtre commis par un Samuraï, semble pris entre deux sujets, deux buts. Quelque chose me dérange, dans cette histoire. Je ferme les yeux, un instant.

*Comment sait-il qu’il s’agisse d’un Samuraï? Comment peut-il savoir qu’un meurtre soit commis pas un Samuraï et non un autre tueur? Il y a réellement quelque chose de louche sous tout ça.*

Je souffle une nouvelle fois sur mon café en rouvrant les paupières juste à temps pour entendre les propos de l’homme sur ce qu’il appelle sa République. Il explique qu’il ne désire pas diriger une nation, qu’une République pour et par le peuple est quelque chose de fragile. Je déguste une nouvelle gorgée du liquide chaud et réconfortant avant de répondre.

« Je ne suis pas certain, monsieur. »

Je dépose ma tasse.

« C’est simple, je ne crois pas que ce saut soit une bonne chose. Donner trop de pouvoir à un peuple qui est enfermé dans la tradition depuis très longtemps dirigera certainement à un chaos dont le pays n’arrivera pas à se relever. Je ne crois pas que ce soit la bonne solution. »

Je hoche de la tête et allait rajouter mon point de vue sur le sujet quand l’autre Shinobi s’enquiert de ma demeure dans la Nation de la Pluie. Je lui souris pendant une seconde et décide donc de lui répondre à son tour.

« Oh, ma maison ou mon Dojo? »

Je marque une pause en conservant le contact visuel avec lui et en prenant en vitesse une autre gorgée.

« Le village de Gio m’a offert une maison vide alors que je l’ai sauvé d’une destruction certaine. Avec l’aide des membres de l’endroit et la permission d’Onpu via une lettre, j’ai construit mon Dojo. Je dois évidemment payer des taxes à Konoha selon le nombre d’élèves que j’ai, mais c’est bien peu à payer pour apprendre aux civils à se défendre contre les bandits et les bêtes! »

Je hoche de la tête, attend une seconde pour voir s’il a quelque chose à rajouter et retourne à la discussion que j’avais avec le jeune Kumojin à ma droite.

« Donc, oui, je ne crois pas que le peuple soit prêt à ça. Il vaut mieux, selon moi, injecter lentement de la nouveauté à une nation, étape par étape, que de risquer le tout pour le tout. Je vous rappelle qu’il y a des Ninjas partout. Au moindre signe de faiblesse d’une nation, elle pourrait se faire dévorer par une autre, mais je ne désire pas vous empêcher de faire quoi que ce soit. »

Sachant pertinemment ma place au sein du Pays du Fer et quels sont mes objectifs, mon sourire change légèrement. Je termine ensuite ma tasse et fait un signe au serveur, attendant de fortes réactions provenant des deux parts.

J'étais sur mes gardes observant les moindres faits et gestes de mes interlocuteurs. Taku prit la parole et répondit tout d'abord à la question que lui avait posé le genin de Kumo. Il était calme, posé et réfléchissait beaucoup afin de donner la meilleure réponse possible. Il n'était pas spontané et semblait faire attention à ce qu'il disait comme s'il ne voulait pas dire certaines choses, comme s'il cachait quelque chose ou peut-être qu'il était comme ça de nature.

Mes yeux se posèrent sur le kumojin, j'essayai de savoir ce qu'il pensait à travers son regard, ses yeux, ses gestes et ses propos. En l'état actuel des choses, le plus important, c'était de savoir qui est réellement Zento. Je n'eus aucune réelle information qui pouvait appuyer ce que je pensais, peut-être avais-je tort ? Il répondit alors à ma question. Sa réponse était évasive, vaste et son explication était, on ne peut plus, étrange.

Il aurait reçu une maison gratuitement en échange de services et il a ensuite construit son dojo pour y avoir des élèves. Il affirmait payer des taxes au village caché de la feuille, mais je n'en savais pas plus. C'était une excuse très originale, trop originale pour que celle-ci soit un mensonge, c'est pourquoi je n'eus rien répondu.

Je ne savais toujours pas s'il était rentré en contact avec les dirigeants de Konoha pour s'installer sur les terres inondées du pays de la pluie ou même s'il avait un accord ou une alliance quelconque avec l'Hokage de Konoha. Je ne pus obtenir davantage d'informations puisqu'il changea de sujet en continuant son argumentation sur le projet de Shinsuke. Mouais... je n'étais pas vraiment convaincu, mais je m'en contentai.

A vrai dire, le projet de Shinsuke ne m'intéressait plus, mes préoccupations étaient différentes. Il y avait trop de zones d'ombre dans cette conservation, trop de choses qui me turlupinaient et je ne saisissais pas tout ce qu'il se passait.

De son côté, comme à son habitude, le kumojin enchaînait les verres de saké tandis que je n'avais pas touché au mien. Lors de ma séquence d'observation, je me contente d'observer ce qui se disait, je n'étais plus l'acteur principal de cette conversation et cela ne me dérangeait pas. Il ne s'agissait plus d'une discussion entre kumojin, mais entre samurai. Cette discussion partait un peu dans tous les sens puisque trois sujets différents étaient abordés ; cette diversification des sujets générait des tensions et des quiproquos et on ne savait plus qui répondait à qui et surtout sur quoi.

La réponse du genin ne tarda pas puisqu'il s'adressa tout d'abord à moi en affirmant que je doutais de sa foi. De quelle foi ? Il est vrai que mes questions que je lui avais adressées ne cachaient pas mes doutes. J'aurai dû m'y prendre autrement, mais je ne saisissais pas ses propos. Il est vrai que mes questions que je lui avais adressées ne cachaient pas mes doutes.

Shinsuke affirma qu'il me pensait moins vigilent, je ne l'ai pas mal pris, mais j'eus compris que ce dernier voulait me dire qu'à présent, il ferait attention à ce qu'il allait dire. Vigilant ? N'est-ce pas des aveux pour me conforter dans ce que je pensais. Il était suffisamment intelligent pour savoir ce que je pensais de lui, et je pense qu'il le sait et qu'il l'a compris lorsque je lui ai posé mes questions.

"De quelle foi parles-tu Shinsuke ?"

Il se mit ensuite à donner une explication farfelue. Baliverne ! C'était un tissu de mensonges. Il affirmait avoir entendu parler de l'affaire due aux commérages et il disait en faire une affaire personnelle puisqu'il était originaire de cette ville et il avait peur pour sa famille. Il justifiait ses renseignements par le fait qu'il venait de cette ville, cela n'avait pas sens pour moi. Mais alors comment le sait-il ? Le meurtrier avait tué une famille aristocrate, pourquoi tuerait-il la sienne ?

"Pourquoi crois-tu qu'il s'en prendrait à ta famille ? Il a décimé une famille aristocrate et toi, tu sembles venir d'en bas tout comme moi, je ne pense pas qu'il s'en prendra à ta famille."

Le genin changea de nouveau de sujet pour poursuivre l'exposition de son projet. Il interrogea alors ses deux acolytes sur leur bushido. Ma réponse ne tarda pas, je lâchai un léger soupir pour me détendre et je pris enfin une gorgée de mon saké.

"Je conçois mon bushido comme une ligne de conduite qui me permet d'avoir la paix intérieur. Le bushido, c'est l'ensemble des valeurs, des vertus que l'on m'a inculqué, il contient les bases afin de créer la paix."

Je caresse l’arrière de ma tête, surpris et surtout déconcerté par les propos du jeune homme à ma gauche. Il est vrai que je n’ai pas été invité à cette conversation et, surtout, que je n’en connais pas l’introduction ni même l’objectif, mais, au final, celui qui est nommé Shinsuke. J’écoute sans broncher, sans dire un mot, souriant, attendant ma nouvelle consommation, mais, au fond de moi, une petite rage née.

*Si un homme est nommé par le peuple, il fera des erreurs, c’est certain. Il sera manipulé par les masses. Il sera certainement utilisé. Il y a peu de chances pour que l’homme soit réellement bon. Les gens ont besoin de direction, mais pas de cette manière. Généralement, le peuple n’est pas assez développé pour ce type de décision. Ce n’est même pas une chance sur deux, c’est une chance sur mille! Le peuple ne peut pas se gouverner lui-même!*

Je replace doucement mes boutons de manche sans en toucher un seul mot au Samuraï de plus en plus sous l’influence de l’alcool. Il me fait penser à moi-même avant que Nozomi m’interdise de me saouler de nouveau. L’action d’Eden n’était pas sans résultat non plus, mais j’ai vécu tant de choses depuis.

Mon regard revient sur lui uniquement lorsqu’il nous interroge sur notre Bushido. Je comprends, après quelques secondes d’analyse, qu’il désire en apprendre sur notre voie, sur notre mission ou nos objectifs. Du moins, c’est ce que je crois comprendre par sa requête. Je laisse l’autre homme, le prénommé Shirudo, répondre avant de moi-même prendre la parole.

« Le Bushido… »

Je laisse passer un petit soupire.

« Je ne suis pas réellement contre, mais je ne suis pas pour. Les préceptes sont biens! Qui peut réellement être contre l’honneur, la politesse, le courage et tous ces jolis mots! »

Je marque une pause, attrapant mon cure-dent et je sortant de ma bouche.

« Mais, dans le concret, c’est simplement un code qui est obligatoire et qui fait en sorte que les gens cessent de penser! Les Samuraï sont supérieurs hiérarchiquement aux autres, les Maîtres leurs sont supérieurs. Il faut connaître sa place et comprendre l’ordre des choses. Je n’aime pas réellement ça. »

Je souffle.

« Non, je suis contre l’idée d’obliger les gens à être d’une certaine manière sous peine de punition en espérant qu’ils comprennent pourquoi c’est ainsi qu’ils doivent être. C’est bien, le contrôle, l’ordre, mais c’est mieux une nation qui décide par elle-même d’être ainsi parce qu’elle est bien éduquée, bien dirigée et qu’elle a le temps de se pencher sur des problèmes internes au lieu d’être effrayée de l’extérieur de de toujours devoir se battre. »

Mon sourire revient.

« Mais, c’est mon avis. Les gens de Tetsu no Kuni le connaisse. Lorsque je suis dans le Pays, je respecte leurs lois. Ça ne m’empêche pas de toujours en discuter avec mes supérieurs et d’en parler aux gens à l’occasion. »

« Paroles! »

Mon café arrive. Je paye l’homme discrètement et retourne à la discussion.

« Bref, je ne crois pas en le Bushido, mais je ne crois pas non plus en votre projet de République. Je crois que les gens ne sont pas prêts à un changement aussi radical. Néanmoins, je vous encourage à mettre sur papier votre plan, à y penser longuement, à trouver les failles. Ce n’est pas que c’est idéaliste, comme idée, c’est surtout que ce n’est pas abouti comme réflexion. »

Je prends une gorgée tout en douceur. J’ajoute un cube de sucre.

« Alors, en ce qui concerne cet autre sujet. J’aimerais savoir trois choses… »

Mon regard devient vif, celui d’un homme qui analyse souvent et qui chasse les criminels. Mon interlocuteur doit sentir cette pression, cette présence, cette nouvelle hostilité.

« Un, les noms des gens qui ont commérer, comme vous dites, sur le meurtre et leurs locations. Deux, comment est-ce possible de savoir qu’il s’agisse d’un Samuraï? Était-il en armure? Possédait-il un sabre? Avait-il ses symboles de clan sur lui? Et, trois… »

Je souris, malicieusement.

« Pourquoi apportez-vous le sujet? »

D’une main, je déguste encore mon café. Mon autre est sur ma cuisse, le coude fermement ancré dans mon bassin et les doigts contre la table.

Résumé:

Je fus agréablement surpris par les dires de Taku. Il semblait nettement opposé au Bushido, mais pas pour de vaines raisons. Son argumentation et ses propos n'étaient pas dénués de sens, mais je ne partageais que partiellement son avis. Il est vrai que le bushido a jadis permis de garder le contrôle sur une partie de la population en leur obligeant à respecter un code défini et en leur obligeant à vivre une vie qu'ils ne pouvaient pas choisir, mais ça n'est plus tout à fait le cas. J'en suis l'exemple vivant : on peut très bien être éduqué au Bushido et suivre la vie que l'on souhaite, faire ses propres choix et penser par soi-même.

Ma personnalité résulte de nombreuses influences. J'ai reçu les valeurs du Bushido et j'ai également été éduqué par le village caché des nuages ainsi que par les valeurs du monde et de l'ordre actuel, mais cela ne s'arrêtait pas là, les nombreux livres que j'ai lu, les essais, les traités, les romans philosophiques ; je suis le fruit et la combinaison de toutes ces sources. Elles ont toutes eu une influence sur ma philosophie, sur ma façon de penser, ma façon d'être. Certains empruntent un seul chemin dans toute leur vie, tandis que moi, j'ai emprunté de nombreux chemins différents. Je ne connaissais pas l'éducation de Zento, donc je ne pouvais comprendre pourquoi il pensait cela.

"La pire menace pour un dirigeant tyrannique, c'est bien l'instruction. C'est l'arme la plus fatale pour déjouer un système, un ordre déjà mis en place, même s'il est bien ancré dans la société. Il est vrai que le Bushido de base étouffe et endort le peuple, mais il lui permet au moins de ne pas faire n'importe quoi. C'est là, une solution comme une autre pour parvenir à conserver l'ordre et la paix. Ce doit être dans cette optique que le Bushido a été créé."

Je m'arrêtai alors puis attrapai mon verre afin de prendre une gorge de saké.

"Je ne sais pas si le peuple saura se gouverner lui-même, mais je pense qu'un jour, il y arrivera. Je pense néanmoins qu'il doit y avoir un dirigeant, mais que ce dernier doit avoir un chef qui les représente et qui est insensible à la puissance des différents lobbies et mouvances diverses."

Shinsuke prit la parole et tenta de faire la lumière sur mes interrogations et celles de Zento par la même occasion. Son explication n'avait de nouveau pas de sens, il se contredisait. Il y a quelques minutes de cela, il affirmait enquêter sur une affaire et voilà que maintenant, il disait savoir exactement qui avait fait cela. Il avait également fait le lien avec l'assassinat d'une de ses amies et l'extermination de cette famille aristocrate, mais... Comment avait-il eu toutes ces informations ?

"Qu'est-ce qui te pousse à penser que l'homme qui a tué la famille Meiji est le même qui a tué ton amie ? Comment peux-tu faire le lien entre ces deux affaires ? Tu sais qui est le coupable alors dis-le aux autorités ou bien dis-le nous au moins."

Shinsuke proposa alors de conclure un marché. Il s'agissait d'une alliance, d'un pacte de soutien mutuel dans nos projets respectifs. J'étais donc contraint de refuser.

"Je ne compte pas obéir aveuglément à qui que ce soit, nous ne pensons pas de la même façon, nous ne sommes pas d'accord sur tout, donc je ne peux pas former une alliance sur cela. En revanche, je peux vous venir en aide, si jamais, un jour ou l'autre, nous serons sur la même longue d'onde. En attendant... Nos avis divergent. Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve et je déteste ne pas tenir une promesse, donc je préfère ne pas m'aventurer dans ce genre de chose. Cela ne veut pas dire que vous ne pouvez pas compter sur moi, en cas de soucis."

Les coins de ma bouche se distancent un peu plus; mon sourire devient plus malicieux. Mon regard chatoyé par la lumière passe doucement du brun vers le jaune puis le doré. Je porte le café à mes lèvres pour ce que je crois être la dernière fois puisque les explications ne me conviennent pas.

*Bon… Il n’a pas répondu. Il a amené le sujet de nulle part et semble vouloir prouver quelque chose. Cet enfant a des problèmes, je le sens, et je préfère ne pas le laisser partir.*

Par politesse, je laisse les deux Kumojins terminer leurs discours avant d’entreprendre ce qui, pour moi, chasseur de criminel et élève du Régent des plaines froides de la nation du Fer, est complètement logique. Ma main réapparaît et, grâce à l’autre, je replace de nouveau mon bouton de manche.

« Vous voyez, il y a deux problèmes. »

Je laisse tomber doucement ma main.

« Le premier est votre fuite. Vous n’avez pas répondu à mes questions. Je ne suis pas de nature suspicieuse, mais, présentement, je le suis. Même si vous y répondiez maintenant, je serais porté à croire à un mensonge ou une manipulation. Je suis particulièrement curieux de voir ce que les officiels de la nation du Fer diront de votre histoire qui, il faut l’avouer, est plutôt trouée. »

Mon sourire s’agrandit.

« Le deuxième problème est l’approche que vous comptez avoir. Sachez que je suis Kira Zento, haut membre du Clan Kira présentement en charge de Tetsu no Kuni sous le Régent Musashi mon maître et mentor. »

Je secoue délicatement la tête sans jamais perdre de vue celui qui se nomme Shinsuke.

« Je suis probablement la personne avec les idéaux les plus révolutionnaires de la contré, présentement, et, donc, ce n’est pas la raison de ce qui suit. Vous idées sont intéressantes, mais vos propos sont déconcertants. Donc, vous avez deux choix, maintenant. »

Je replace le cure-dent dans ma bouche, toujours souriant, défiant. Je lève l’index devant Shirudo, espérant qu’il ne se mêle pas à cette affaire.

« Soit vous venez avec moi de votre plein gré jusqu’à Bukeyashiki pour être interrogé ou soit je vous arrête et vous y amène de force. »

La conversation prenait une tournure intéressante puisque Taku se mit alors à s'exprimer avec fermeté. Une fermeté effrayante, puisque je parvenais aisément à m'imaginer être à la place de Nitobe Shinsuke. Je ne m'attendais pas à ce que Taku puisse être si direct et si brutal, je fus très surpris de sa démarche qui était nécessaire pour connaître la vérité. Je ne savais pas si c'était du bluff ou bien s'il était réellement déterminé, toujours est-il que ce fut très impressionnant et surtout inattendu. L'intensité, les péripéties et les changements soudains dans une discussion déstabilisaient souvent les interlocuteurs. Il est difficile de contre-attaquer lorsqu'on ne s'y attend pas, à vrai dire, je fus surpris.

Taku n'avait plus aucune confiance dans le genin, lui aussi éprouvait des doutes. Il lui a clairement fait comprendre que peu importe ce qu'il dirait, cela n'avait plus aucune importance puisqu'il avait perdu toute crédibilité. Je n'arrivais tout de même pas à comprendre pourquoi le kumojin s'était-il lui-même jeté dans la gueule du loup. Cela faisait quelque temps déjà depuis le début de cette conservation, je ne comprenais plus Shinsuke. Je n'arrivais pas à faire table rase de l'image que j'avais de lui lorsque je l'avais rencontré pour la première fois un soir autour d'une coupe de saké. En fait, je ne savais pas s'il avait toujours été comme ça ou s'il a subitement changé après notre rencontre. Je ne savais pas si j'avais fait une erreur de jugement lorsque tu nous nous étions rencontrés. J'en venais même à douter de mes capacités, car, sans le nukenin, je n'aurais peut-être pas découvert ce que nous avions découvert ; je n'en savais rien.

Le Samurai affirma être l'élève de Kira Musashi, celui qui dirigeait d'une main de fer, le pays du fer. Cet illustre samurai que je n'avais jamais vu et que je souhaitais voir pour lui parler, puisque je savais qu'un jour ou l'autre, je devrais le rencontrer et que cette rencontre m'apporterait beaucoup ; c'était écrit. Je fus surpris, étonné, mais surtout très heureux de ce que je venais d'entendre et je ne le cachais pas. Enfin, le nukenin affirma que le kumojin devait le suivre et qu'il n'en avait en réalité pas le choix.

Dans un très long discours riche en émotion, Shinsuke en sanglot, nous conta son récit. Au vu de ce que je venais d'entendre, j'étais confus, gêné et également triste, puisque j'éprouvais de l'empathie. Je ne savais pas quoi répondre, car au fur et à mesure qu'il étalait son récit, cela m'attristait. Il est vrai qu'il avait souffert, mais ça n'excuse pas ses agissements, ses meurtres et ses mensonges. Je ne savais pas quoi répondre, à vrai dire, je ne savais pas si c'était un moyen déployé de plus pour nous attendrir et obliger Taku à se rétracter. Si c'était le cas, Shinsuke n'était pas seulement décevant, mais lâche aussi. Quoi qu'il en soit, en l'espace de quelques secondes, mon estime et ma confiance en lui subirent une chute vertigineuse. C'est donc larmes aux yeux qu'il nous implora d'être clément.

"A quoi tu joues ? Nous sommes des Shinobi de Kumo, tu n'as pas le droit de pleurer, d'implorer quelqu'un, tu dois rester fier et réfléchi. Tu as cédé à tes émotions en commettant ces crimes et tu as tenté de nous mentir, alors que tu n'as aucun droit de vie ou de mort sur une famille entière, pire encore, sur une famille aristocrate d'un pays allié. Ton crime est grave, c'est comme si tu t'en es pris à une famille aristocrate du pays de la foudre. Je ne sais pas si cet assassinat fait partie de ton projet d'émancipation du pays du fer, mais ce qui est sûr, c'est que nous n'avons pas besoin d'un meurtrier pour améliorer nos conditions. Tant que tu ne sais pas contrôler tes émotions, tant que tu agiras au-dessus de lui et que tu pleureras par lâcheté puisque tu ne veux pas assumer tes actes, tu seras indigne de porter le flambeau des Samurai, ni même de diriger, voire d'orienter le pays du fer correctement. Je pense même qu'en l'état actuel des choses, tu es indigne de porter ton insigne de Kumo, de te battre pour Kumo et d'agir au nom de Kumo. Tu me déçois sincèrement Shinsuke... Je n'ai jamais connu pareille déception jusqu'à aujourd'hui. Ce qui me déçoit, ce n'est pas le fait que tu as tué une famille de civil, il est vrai que c'est lâche, mais ça passe encore. Non... Ni même le fait que tu nous ais menti... Ce qui me déçoit, en fait... C'est le fait que tu éclates en sanglots et que tu sollicites notre pitié et implores notre clémence, c'est une belle preuve de faiblesse et de manque de dignité qui plus est, tu te prosternes devant un nukenin. C'est bien simple, tu fais le contraire que ce que stipule notre code d'honneur en tant que Kumojin. Tu dois demeurer insensible et ne pas agir sur le compte de l'émotion et des sentiments. Tu n'as aucun contrôle sur eux, la preuve : tu éclates en sanglots quand tu es dépassé par la situation, l'autre fois, c'est une famille qui a subi ta rage meurtrière." - Disais-je avec calme, fermeté et déception en regardant Shinsuke.

"Quant à vous, vous n'avez aucune autorité sur Shinsuke. Il s'agit d'abord d'un Shinobi de kumo qui doit d'abord être jugé par le Raikage en personne avant d'être conduit devant la justice du pays du fer. Par conséquent, si vous vous opposez à cette règle, nous considérerons cela comme un enlèvement. Si vous êtes bel et bien l'élève et l'héritier de Kira Musashi, je suppose que vous savez très bien ce qui vous reste à faire. Tâchons d'en informer le Raikage qui saura quoi faire. Soyez-en sûr, le pays du fer en sera informé et il payera pour ses actes en tant que Samurai." - Disais-je en regardant Kira Zento.

"Il serait peut-être temps d'assumer ce que tu as fait. Tu dois payer pour tes crimes. Tu dis être un défendeur du peuple et de ses droits, mais tu veux avoir un droit d'amnistie et passer outre la justice ? Tu veux défendre le peuple, mais tu assassines une famille de civils ? Je ne te comprends plus, Shinsuke. En gage de bonne foi, tu devrais accepter ta sentence, assumer tes actes pour rebondir et mener à bien ton projet lorsque tu auras grandi, mûri et changé. Il n'y a aucune concession, aucune amnistie, il n'y a là que de la justice. Pour le bien de ton noble projet, pour la justice et pour l'ordre de ce monde, je te conduis auprès du Raikage." - Concluais-je avec fermeté en me levant, les yeux rivés sur Shinsuke.

Je me lève lentement de mon banc, reprenant mon cure-dent et le rangeant dans la pochette de mon veston pourpre. Je dépose mes mains sur le bord de la table alors que Shinsuke s’exprime. Son récit est larmoyant, mais je reste de marbre, avec le même sourire cachant mes véritables émotions. Il demande une chance de changer et de prouver qui il est vraiment.

Shirudo, par la suite, prend la parole. Je l’écoute patiemment. La déception est lisible sur son visage. Néanmoins, je ne quitte pas le criminel des yeux, prêt à sauter sur lui au moindre mouvement qui me semble suspect. Une fois sa tirade terminée, le jeune Kumojin m’indique que je n’ai pas autorité sur Shinsuke. Mon sourire grandit légèrement.

*Je n’ai jamais eu besoin de raison ou de droit pour capturer et arrêter un criminel et mon grade et ma position au sein de Tetsu no Kuni ne changeront absolument jamais ça.*

Toutefois, toujours de marbre, le regard fixé sur Shinsuke, passant par-dessus les fous rires qui veulent éclater, je le laisse finir ses explications sans broncher. Doucement, ma main se déplace jusqu’à mon menton. J’analyse la situation plutôt intriguante.

*D’un côté, je pourrai emmener l’homme de force. Connaissant Zennosuke, il n’oserait pas un problème diplomatique avec le Fer pour ce criminel et acceptera assurément son enfermement puisqu’il a avoué tuer des bourgeois de notre nation. De l’autre, la vivacité d’esprit de ce Shirudo m’intéresse. Aussi, ce Shinsuke a des idées qui méritent d’être développées malgré sa difficulté de gérer ses émotions. J’aimerais faire pour lui ce que le vieux Musashi a fait pour moi.*

Je soupire, mais conserve mon sourire.

« Bon. »

Je toussote.

« Ce n’est pas une question d’autorité, jeune Kumojin, mais plutôt de respect. Voici mon offre et, que vous l’acceptiez ou non, c’est celle qui sera en vigueur. »

Ma main se rend sur ma nuque et caresse doucement ma peau.

« Shinsuke, vous avez une semaine pour remettre vos choses en ordre sans quoi je partirai moi-même à votre recherche. Je ne vous laisserez qu’une chance de réparer votre affront pour la nation du Fer, une seule. »

Je hoche de la tête et me retourne vers Shirudo.

« Voyez ce que vous voulez faire avec sieur Zennosuke et le jugement de ce Shinobi, ça m’importe peu puisque le crime est hors des frontières de ses responsabilités. Voyez avec votre état. Je connais personnellement votre Raikage et il me fournira Shinsuke s’il l’emprisonne, j’en suis certain. »

Je déplace ma chaise, attrape ma coupe et je fais un pas en direction du comptoir.

« Une semaine, Shinsuke. »