Musique ♫:

Je le voyais s'effondrer une fois de plus sur l'horizon du désert. Le soleil, incandescent, qui exultait de toute sa splendeur, alors que son déclin se profilait sur le monde dans cette douce et somptueuse symphonie de chatoiements ardents. Le ciel se teintait d'ambre, d'orange et d'or. Je me tenais à l'extérieur du village, là, les bras croisés, adossée contre le Mur, à contempler ce merveilleux spectacle dont je n'étais jamais parvenue à me lasser en quinze ans de vie à Kaze. Pour cette occasion, je portais ma tenue du désert, à savoir une tunique ample marron ainsi qu'un pantalon noir. Mes cheveux étaient tressés en une longue queue qui me retombait jusqu'au bas du dos.

Quelques mètres à côté de me moi se trouvait la Black Parade qui était ma plus proche compagne lorsqu'il était question de parcourir le désert. C'était précisément ce que je m'apprêtai à faire, non pas dans le cadre d'une mission, mais pour un simple divertissement. Je comptais faire une démonstration à Kioshi, lui qui semblait si curieux de redécouvrir cette étendue de sable infinie. Sans doute n'aurait-il jamais imaginé que cela se ferait à la façon des Saibogu.

Cependant, plus que tout, j'avais compris qu'il avait grandement besoin de se changer les idées et d'une certaine façon, moi également. Nous détacher du village ainsi que de tous les problèmes s'y attrayant, ne serait-ce que pour quelques heures, serait de bonne augure. Cet idiot s'était amusé à faire référence à un rendez-vous. Je ne le voyais pas comme cela. Malheureusement, malgré-moi et ce à cause de lui, la notion n'arrêtai pas de me trotter dans la tête, comme une petite aiguille ne cessant de faire tic tac pour me rappeler qu'elle était là.

En attendant, l'heure, elle, continuait d'avancer. Il n'était toujours pas arrivé. Peut-être que ces obligations au Kakumeigun le retardai ou peut-être n'avait-il tout simplement pas envie de venir. Je restai un long instant à ruminer dans mon coin, jusqu'à ce que je puis enfin l’apercevoir. Si j'étais contente de le voir enfin arriver, je ne le laissai pas paraître un seul instant.

-Il semblerait que vous aimez à vous faire désirer mon cher. J'ai failli attendre...

Le ton de ma voix était hautain. Sortant de ma poche deux paires de lunette de soleil spécialement adaptées pour la conduite dans le désert, je lui en tendis une tout en déposant l'autre sur mon nez.

-Vous en aurez besoin pour la suite.

Ce faisant je lui décochai un sourire espiègle car, oui, j'avais prévu de m'amuser avec lui, quitte à le martyriser un peu. Le désert était peut-être son territoire, mais nous allions être sur ma moto. Ce qui signifiait que j'allais dicter les règles. Ce faisant j'enfilai mes mitaines et l'invitai à monter sur le véhicule.

-J'espère que là balade va vous plaire. Je vous promet qu'après cela, plus jamais vous ne verrez le désert de la même façon...

Cambrée sur ma moto, j'appuyai brusquement sur l'accélérateur, mettant les systèmes en marches tandis que le double moteur à galet cinétique alimenté par mon chakra fluctuait à vive allure. Cabrant légèrement au démarrage, nous partîmes à toute vitesse. Dans notre dos le village s'éloignait de plus en plus tandis que nous nous rapprochions davantage du soleil couchant. Le vent sifflait dans dos oreilles et caressait nos visages. Alors que nous sillonnions les dunes, engloutissant des centaines de mètres à chaque instant, le monde devenait notre terrain de jeu.

Notre périple se poursuivait à travers le désert. Tout en restant concentrée sur ma conduite, je n'avais de cesse de regarder vers Kioshi pour voir comment il se sentait. Ce dernier se comportait comme un véritable enfant, en train de s'amuse. Quelque part cela me réchauffait le cœur de le voir ainsi. Nous avions tous besoins de ce genre d'instants de répit. Fuyant vers le lointain, le crépuscule poursuivait son déclin sur le monde. Je continuais de pousser sur l'accélérateur. La sensation de vitesse devenait des plus grisantes. L'immense désert paraissait alors à la fois si étroite et si infinie. Le paysage était toujours le même, mais aussi si différent, en perpétuel changement. Les dunes naissaient et mouraient selon la volonté du vent. Et nous étions là, à défier cette étendue de sable, transformé or par les lueurs du crépuscules.

Le jeu se poursuivit et mon passager ce prêta au risque en relâchant totalement sa brise sur moi, pour se laisser porter par la vitesse. Cependant, une montée subite eut raison de son équilibre précaire. Il chuta irrémédiablement tandis que, dans un réflexe mal avisé, je tentai de me pencher en arrière pour le rattraper. La prise fut mauvaise et je me retrouvais également à passer par dessus mort. Nous effectuâmes plusieurs roulé boulé dans le sable avant d'être éjecté à plusieurs mètres l'un de l'autre. J'eus tous juste le temps d’apercevoir ma moto venir s'encastrer dans une dune. Sonnée, il me fallut quelques secondes pour me remettre de mes émotions. Un rire cristallin s'échappa de mes lèvres alors que je me laissai retomber dans le sable, amusée par la situation, tandis qu'un flot d'adrénaline parcourait encore mes veines.

-La prochaine fois restez accroché à moi.

Je m'étais adressé à lui d'un ton enfantin, un rien moqueur. Mais je demeurai toujours là, allongée dans le sable, les bras écarté à contempler les ciels qui se teintaient sous la puissance des lueurs chatoyantes du soleil couchant. Une fois remise de mes émotions, pour une fois positives, je me relevai lentement, époussetant mes affaires ainsi que mes cheveux pour dégager les granulés qui s'y étaient immiscées. Je venais de perdre mes lunettes de soleil et il me fallut plisser des yeux en plaçant ma main en visière pour pouvoir distinguer Kioshi non loin de moi. Après avoir effectuée quelque pas dans sa direction, je me plaçai devoir lui, adoptant une provocatrice, les mains posées sur les hanches.

-Vous ne semblez plus si fiers dans cette posture. J'espère que vous n'aurez pas peur de remonter dessus. Auquel cas je vous promet de vous laisser rentrer tout seul à pied.

Il ne s'agissait que d'une brimade parmi tant d'autres le pauvre devait commencer à s'y habituer. De toute façon il n'aurait d'autre choix s'il souhaitait continuer à me côtoyer et puis, je ne lui demandai pas vraiment son avis sur la question.

-Nous pourrions faire une pause ici pour le moment et reprendre la route plus tard, qu'en dites-vous ?

En effet l'ombre que nous offrait la dune de sable derrière-nous se proposait tel un parfait refuge. Après m'être penchée vers lui, je lui tendais alors une main bienveillante pour l'aider à se relever. Instinctivement, je me préparai d'avance à ce qu'il la saisisse dans l'unique but de me faire tomber.

-N'y pensez même pas mon cher...

Il se mit à rire. Heureuse, je compris que je venais de gagner mon pari. Au moins l'espace d'un instant j'étais parvenue à lui faire oublier tous ses problèmes. Loin du village, au cœur du désert, plus rien n'avait vraiment d'importances. Nous étions seuls au milieu du monde qu'était cette immense étendue de sable, sans avoir à rendre de compte à qui que ce soit. Nous étions libre. Au choix ,nous pouvions reprendre notre route, explorer d'autres contrées inconnues de Kaze, nous battre, nous chamailler ou encore simplement passer du temps discuter à l'ombre d'une dune de sable. Ces perspectives me réjouissaient. Ainsi compris-je à quel point ces moments de répit pouvaient être précieux. Moi même j'en avais tant besoin et la compagnie de Kioshi se révélait plus que bienvenue.

Lorsqu'il attrapa ma main je me tenais prête au cas où il chercherait à me tirer à lui. Seulement au lieu de cela, il vint déposer un doigt sur mes lèvres. Je fronçai les sourcils, l'espace d'une seconde, à la fois surprise et décontenancée. Il eut alors tout à loisir de profiter de cette confusion pour me faire tomber dans le sable qui amorti ma chute comme un épais duvet moelleux. Je n'eus guère le temps de comprendre ce qui m'arrivait que le Yamada vint s'asseoir à califourchon sur moi avant d'immobilier mes poignets sur le sol. Dans cette posture il était penché sur moi et nos visages ne se trouvaient qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. La situation, osée à l'extrême réussi à me faire rougir, même si je ne me sentais pas particulièrement mal à l'aise.

Il n'hésita pas en surenchérir en me demandant si j'avais confiance en lui. Le dernier homme à m'avoir dit cela alors que nous étions dans une telle posture ne l'avait pas regretté un seul instant. Cependant, c'était une autre histoire. Sauf qu'en l’occurrence, à ce moment même, il était question de Kioshi qui, bête par nature, n'avait sans doute rien remarqué. Son audace comme son innocence en était parfois déroutante. Curieuse de ce qu'il s'apprêtait à faire, je me contentai acquiescer légèrement. Finalement je commençai à me sentir un peu gênée.

-Je veux bien concéder à vous faire confiance. Du moins pour cette fois, mais avant cela j'aimerai savoir une chose. Ne jugez vous pas cette posture des plus inconvenante ? Ou dois-je me retrouver entièrement nue pour que vous commenciez à vous sentir mal à l'aise ?

J'arquai un sourcil couplé à un sourire provocateur. Nul doute que l'on pouvait me traiter d'allumeuse et à juste titre qui plus cela étant. Seulement je n'y prêterai guère attention. Je voulais avant tout qu'il comprenne ce qu'il venait de faire, qu'on ne s'amusait pas à maîtriser ainsi impunément une femme. En soit, il pouvait s'estimer chanceux. Si cela n'avait pas été moi, mais une autre, sans doute aurait-il reçu une belle gifle. Hors, je le comprenais. Je savais qu'aucune idée saugrenue ne traversait son esprit et ne m'en offusquai nullement. Au contraire je faisais en sorte de prendre tout ceci avec légèreté et amusement, tout du moins j'essayai...

Encore une fois je ne pus cacher mon étonnement lorsqu'il fit apparaître cinq clones pour m'ensevelir dans le sable. Je me laissai faire, attendant de voir quelle tournure allait prendre les événements. En effet, je pus à mon tour découvrir une nouvelle façon d'aborder le désert, qui réciproquement à la mienne, était aussi lié à son propre clan. Tantôt chaleureux, tantôt frissonnante, de multiples sensations m'envahirent le corps, perpétuellement changeantes, je ne savais jamais ce qui m'attendait. Quand la chaleur tendait à m'apaiser et m'endormir, le froid, lui me revigorait et me réveillait aussitôt. Toutes ces nouvelles sensations étaient des plus déroutantes, mais j'appris à me laisser guider par celles-ci.

-Cela fait également un point de plus en votre faveur. Et maintenant quelle est la suite du programme ?

Je tournais la tête dans sa direction arborant de grand yeux mesquin avant de me redresser brusquement pour m'amuser à envoyer une poignée de sable sur Kioshi. Je bondis brusquement en
arrière afin de prendre un peu de distance presque à contre cœur à l'idée de quitter ce cocon de sable. Sans plus attendre, je continuai de projeter du sable sur le Yamada ainsi que sur ses clones tout en riant avec candeur. A six contre un le rapport de force fut rapidement calculé et je me retrouvai en peu de temps à nouveau croulante sous une montagne de sable fin. Je laissai émerger ma tête, tandis un petit tas s'était formé sur le haut de mon crâne. Je secouai vigoureusement la tête de gauche à droite pour m'en débarrasser.

-D'accord je me rends, mais ce n'est pas très équitable. Puisque c'est comme ça, je vais faire une pause.

Dans mon langage cela signifiait aller boire. Je me dirigeai en sautillant vers ma moto encore encastrer dans la dune. Dans ma main se retrouva la bouteille de rhum amenée par Kioshi. Un seau d'eau ce n'était pas facile à transporter, tandis qu'une bouteille l'était davantage. Et puis, c'était d'autant plus drôle. La simple perspective d'imaginer le Yamada ivre se révélait plutôt amusante. Ce faisant, je lançai la bouteille dans sa direction. Si nous devions boire plus que de raison, je voulais qu'il soit le premier à tomber par terre.

-Voici un autre jeu. Cette fois-ci vous ne pourrez pas user de vos clones pour tricher.

Musique ♫:

-Sachez que je préfère encore conduire totalement ivre plutôt que de vous laisser toucher au guidon. Vous n'êtes déjà pas très doué comme passager, je n'ose imaginer ce que ce serai en tant que conducteur.

Et je lui arrachai la bouteille des mains sans lui laisser le temps de finir. Il avait tout de même déjà ingurgité, et ce en un instant, une quantité impressionnante d'alcool, au point au j'avais eu peur pour lui qu'il ne s'effondre dans un coma éthylique. Cet idiot n'était vraiment pas prudent. Depuis notre sorti du village, je n'avais de cesse de devoir le surveiller. Parfois, c'était à se demander comment il était parvenu à devenir chef du Kakumeigun avec un comportement aussi insouciant.

Je pensais alors qu'il se montrait si bêta en ce moment même, peut-être simplement parce qu'il souhaitait justement oublier ce grade dont il était affublé. Ne plus être un des hauts dignitaires du villages, mais simplement Yamada Kioshi, un ancien nomade du désert qui n'aspirait qu'à retrouver ses origines. Quelque part cette idée me plu. Et à mon tour, avec une certaine allégresse, je bus directement au goulot de la bouteille en faisant cependant preuve de davantage de retenue. La brûlure du rhum m'incendia la gorge et je poussai un soupir lent lorsque j'eus finis de boire. Je restai un moment stoïque, fixant un point dans le vide, à aviser des effets de l'alcool sur ma personne, constatant un léger décalage entre ce que j'étais en mesure de voir et les mouvements de mon corps.

Désormais j'affichai une mine légèrement plus latente, mais je m'en moquai. Je surveillai alors la réaction de Kioshi qui ne semblait pas encore éprouvé par la boisson. J'avais du mal à concevoir qu'il puisse encore tenir debout après tout ce qu'il venait d'ingurgiter.

-Vous êtes sûr que cela va aller ?

Je m'efforçai de parler le plus clairement possible de sorte à ne pas bégayer, mais je savais que dans la situation actuelle je n'étais pas la mieux placée pour poser cette question. Une idée traversa alors mon esprit partiellement alcoolisé. Une fois encore, j'avais envie de m'amuser avec lui. Ce faisant, j'avançai d'une démarche assurée. A quelque pas de lui, je lui adressai un sourire complice couplé à un regard tout aussi significatif. Mes bras s'enroulèrent autour de sa nuque. Ce sourire ne me quittait toujours pas.

-Toujours ce genre de position n'est-ce pas ? Voudriez-vous le savoir par vous-même ?

Le ton de ma voix était suave. J'ignorai si cela était du une fois de plus à mon léger état d'ivresse, mais je trouvais le Yamada de plus en plus attirant. Alors je penchai légèrement la tête de côté, le regardant dans les yeux en plissant des paupières.

-Yamada Kioshi, vous-êtes à moi...

Je me penchai davantage vers lui, rapprocha inexorablement mes lèvres des siennes. Finalement, je tournai la tête au dernier instant pour déposer un baiser sur sa joue avant d'éclater d'un petit rire cristallin puis je me mordis la lèvre inférieur, espiègle et provocatrice que j'étais. Dans cette situation, il ne me fallut pas grand chose pour glisser une jambe derrière la sienne et le plaquer au sol avec autant de finesse que s'il avait été simple sac rempli de patate. Sans lui laisser le moindre répit, je me plaçai derrière lui pour poser mes mains sur ses épaules. D'un geste vif je le plaquai au sol. Ainsi légèrement penchée sur lui, nos têtes étaient à l'envers l'une par rapport à l'autre. Cette fois je l'avisai de côté comme un animal venant d'en découvrir un d'une espèce différente.

-Faites-donc un peu plus attention. J'ai failli vous tomber dessus. Vous vous rendez-compte ? Cela aurait put entraîner une situation sacrément gênante.

Ironisais-je amusée. J’attrapais alors la bouteille d'alcool dans sa main avant de m'enfuir, candide, vers l'horizon. Au loin le crépuscule achevait son déclin. Ce déluge d'ors et d'ambres commençait à se tasser pour lentement laisser place à la douce étreinte noir de la nuit. Les ombres qui se jetaient sur les dunes s'étiraient de plus en plus au fil du temps passé. L'atmosphère venait irrémédiablement à se refroidir et ce malgré la puissance ardente du soleil qui s'écrasait sur le monde. Et moi je continuai de courir, bête, joueuse et insouciante que j'étais. Après être finalement arrivée à bout de souffle, je me laissai crouler dans le sable doux, profitant de ces derniers instants de chaleur avant que la journée ne s’achève. Un long instant s'écoula. Je me demandai si Kioshi allait me rejoindre. Il valait mieux pour lui. Je le connaissais et je savais qu'il serait capable de rester planter là où je l'avais laissé simplement pour m'obliger à le rejoindre, voir pire s'il ne manigançait pas quelque chose d'autre. Mais moi, j'étais têtu et je ne comptais pas non plus bouger. Après avoir enlevé et posé mes mitaines sur le sable, je débouchai le goulot de la bouteille pour en boire quelque gorgées supplémentaire. Je pris ensuite la peine de m'installer un peu plus confortablement contre cette motte de sable.

Adossée contre une bute de sable, je contemplai gaiement le soleil couchant. Tout du moins j'essayai. Je ne voyais pas grand chose car, voulant faire ma maline pour tenter de rivaliser avec le Yamada, j'avais bu un peu trop rapidement et sans doute même un peu trop tout court. Alors je restai là, allonger, à l'attendre, encore. Décidément cet homme aimait à se faire désirer, sauf qu'il n'avait pas la moindre idée que moi aussi également. Le temps devenait long, aussi pris-je la peine de me redresser dans la direction de ma venue. La bouteille toujours en main. Le vent soufflait légèrement sur mon visage.

Je renvoyai ma longue tresse dans mon dos, d'un geste fugace avant de placer ma main en visière, plissant des yeux, pour tenter de discerner cette étrange chose au loin qui fusait dans ma direction. En réalité, elle n'était pas si loin que cela, et la chose en question n'était d'autre qu'un Rhinocéros. J'adressai un regard halluciné puis reportai mon attention sur la flasque dans ma main, tentant d'y lire les petites lignes au dos. Peut-être y avait-il des effets secondaires. Pourtant, il ne s'agissait que de rhum et non de jus de cactus concentré. Un instant, je manquai de peu de penser qu'il avait put essayer de me droguer, cependant, plus le rhinocéros se rapprochait et plus j'avais la certitude que ce dernier existait réellement.

Il s'écoula un long instant, une certaine latence avant que je ne commence à réfléchir pour mieux agir. L'alcool engourdissait grandement mes capacités cognitives. Ainsi l’apparent danger immédiat de la situation me paraissait infiniment lointain alors qu'il n'était sans doute plus qu'à une dizaine de mètre de moi. Perché dessus, un Kioshi beau comme un dieu saltimbanque se dandinait maladroitement dessus pour tenter de conserver son équilibre. J'attrapai le pistolet accroché à mon holster pour le pointer en direction de ma cible qui fut difficile à déterminer. Durant l'espace de deux secondes le canon se trouvait braqué sur le Yamada, mais un élan de conscience me fit changer de cible au dernier moment. Après avoir pressé sur la gâchette la balle partie dans un bruit de tonnerre monumental. Je n'étais pas habituée au calibre de cette nouvelle arme, d'autant plus que mon ébriété n'aidait en rien.

Manquant de peu de tomber en arrière je parvins à me rattraper sur mes jambes non sans chanceler. De son côté, je projectile avait fait son œuvre. Il fallait dire, j'avais beau être sévèrement atteinte par l'alcool, jamais je n'aurais été en mesure de manquer un énorme rhinocéros à seulement trois mètres de moi. Ce dernier fut littéralement pulvérisé par l'attaque quant à Kioshi, il avait tout simplement disparu. Je fronçais des sourcils un instant levant la tête au ciel pour finalement l’apercevoir. Le choc l'avait éjecté de son piédestal quadrupède pour l'envoyer valser dans les airs. Celui-ci chutait dans ma direction, sur mon corps, la maintenant tout de suite, il arrivait.. En fait non ! J'effectuai un simple pas chassé de côté à la dernière seconde pour l'éviter. Le pauvre s'étala comme une galette sur le sable chaud. Je tournai la tête, restant ainsi à l'aviser. Longue pause, le temps qu'il me fallut pour réagir.

-Wouhouuuuuuuuuuu.

Criais-je victorieuses en levant les poings serrés vers le ciel. Je ne savais pas trop ce que j'étais en train de célébrer. Peut-être mon tire parfait, peut-être le Kioshi étendu là sur le sable, peut-être cette superbe fin de journée qui avait le mérite d'être encore plus super. Je ne m'étais pas autant amusée depuis longtemps. Alors, pour continuer dans le jeu, j'adressai un doigt inquisiteur en direction de cette petite tête blonde aplatît de tout son long sur le sable.

-Voilà ! Je viens de gagner. A présent tu seras mon esclave pour toute une journée. J'espère que tu aimes les déguisements de soubrette ! Tu seras si mignonne !

En réalité, je ne me rappelai plus vraiment des circonstances de ce pari. Toujours fut-il que moi j'étais encore debout et lui par-terre. En soit, la situation était parfaitement convenue pour m'attribuer une victoire parfaite. Il n'avait rien à redire. D'ailleurs, il ne disait toujours rien. Je haussai donc un sourcil intriguée.

-Kioshi ?

Toujours pas de réaction. Je l'appelai à nouveau.

-Kioshi, Kioshi !!

Visiblement l'appeler deux fois de suite ne suffisait pas non plus à le faire réagir. Je pensais alors qu'il me fallait appâter son attention avec quelques choses de différents.

-Ouff il fait chaud ici. Je crois que je vais me déshabiller....

Je fis mine de retirer mes vêtements avant de m'arrêter au dernier moment, l'épiant toujours du coin de l’œil, espérant obtenir une quelconque réaction de sa part. Déçue, je croisai les bras, arborant une moue boudeuse.

-Tu es vraiment nul parfois !

Arrivé à sa hauteur, je commençai à tâter son épaule du bout de mon flingue, puis m'amusait à faire de même avec sa tête de sorte à l'agacer le plus possible.

-Kioshi, Kioshi, Kioshi, Kioshi, Kioshi......

Répétais-je à toute allure. Perdant de plus en plus patience avec lui j'en vins à verser le fond de la bouteille de rhum sur sa tignasse blonde.

-Allez debout petit prince, il est temps pour toi de quitter ta planète !

Voici que le bougre s'amusait à jouer au malin. Il n'hésita pas à m'attraper la cheville par surprise pour m'envoyer à terre. Durant ce temps là il se redressa triomphant en pointant le canon de mon arme sur... lui-même ? Cet idiot n'était définitivement pas fait pour la technologie. Je l'avais entendu tenter de faire mumuse avec ma moto. Cela non, il n'était pas très discret. Et voici à présent qu'il voulait se suicider avec mon pistolet. Je l'entendis me parler de chaînes et de statues ce qui me fit singulièrement peur. Venant de sa part je savais que je pouvais m'attendre au meilleur, mais surtout au pire. L'idée ne me plaisait pas vraiment, mais j'avouai encore moins apprécier le fait qu'il se suicide avec « mon » arme. Aussi m'empressais-je de me ruer sur cette dernière enfin de l'empêcher de faire n'importe quoi. Nous commençâmes à nous débattre vigoureusement l'un contre l'autre, empoignant chacun une partie de la crosse ou du canon. L'un tirait fortement de son côté tandis que l'autre du sien.

-Arrête lâche ça !! Fais pas ton enfant ! Rend le moi. Tu sais pas faire avec les gros calibres ! Ça peut être dangereux !

En effet cela pouvait être vraiment dangereux. Surtout en ce genre de circonstances. Pourtant, ironiquement, ce fut moi qui appuyai malencontreusement sur la gâchette tandis que j'essayai de plaquer le blondinet au sol pour tenter de lui arracher l'arme des mains. Le cliquetis caractéristique retenti et je compris que cela risquai de poser problème. Heureusement pour nous, à cet instant le canon de l'arme était pointé sur une dune vers le lointain et le coup parti dans le vide. Nous sursautâmes à l'instant, avant de recommencer à nous chamailler avec effarouchement. Le soleil venait de terminer son déclin. La nuit arrivait. J'ouvris grand la bouche dans l'optique de refermer mes dents sur la main de Kioshi, histoire de lui faire comprendre qui était vraiment la patronne. Cependant je m'arrêtai dans mon geste. Nous nous figeâmes tous les deux en entendant ce brusque hurlement qui vint déchirer la nuit...

-HAAAAAAAAAAAAAA PUTAIN MON CUL ÇA FAIT MAL !!

Le cri provenait de l'autre côté de la dune où nous avions fait feu. Le Yamada et moi nous lançâmes des regards interloqués puis entendu. Le sentiment d'avoir fait une énorme bourde se profilait à l'horizon. Ensemble nous décidâmes de nous rendre sur les lieux en pas de chat tout de même. Usant des ombres comme refuges, nous tentâmes de grimper la dune avec l'agilité de félidé, mais ne nous parvînmes qu'à grimper comme les deux individus ivre que nous étions. Parvenu avec peine au sommet nous pûmes apercevoir en contre-bas un attroupement de marchands ou de pillards agglutinés autour d'un de leur compatriote qui se roulait sur le sable en tenant fermement son postérieur entre ses mains.

-Hey vous là qu'est-ce que vous faites ici ?

Démasqué, nous n’eûmes d'autres choix que nous redresser. Ce faisant, je m'efforçai d'arborer mon plus beau faciès d'ange innocent.

-C'est vous qui avez fait ça ?

L'homme en question pointa son doigt velu en direction du pistolet dans ma main. Je restai un long instant interdite à fixer mon arme avant d'aller brusquement le cacher dans mon dos. Suite à quoi je pointai de mon autre main un doigt accusateur en direction de Kioshi. Ce n'était pas que je ne l'appréciai pas, au contraire. Mais si dans cette histoire il pouvait être le fautif à ma place cela ne me dérangeait pas. En guise de réponse nous eûmes droit à une véritable levée de sabres pointés dans notre direction. Ces marchands de tapis avaient l'air fermement décidé à nous étriper. Je lançai un regard décomposé à Kioshi, déglutissant de peur. L'idée me traversa l'esprit de le pousser contre nos assaillant pour me permettre de fuir. Cependant, je jugeai que cela n'aurait pas été très gentil de ma part. Aussi, dans un geste purement instinctif, je brandissais mon arme pour tirer dans le sable juste à côté de cette équipe d'armoires à glace par commode du tout. Les regards convergèrent vers le point de l'impact, mais moi je n'en avais rien à faire. J'étais déjà loin, courant à toute jambe en zigzaguant. Je pensais prendre la direction du lieu ou se trouvait ma moto, mais je ne compris que tardivement que j'avais pris la direction totalement opposée. Tombant à bout de souffle, je lançai plusieurs regard autour de moi en espérant apercevoir Kioshi.

Les brigands revinrent à la charge et moi qui étais à bout de souffle, je commençai vraiment à fatiguer. La nuit était tombée sur le désert. Malgré le ciel étoilé et la lune resplendissante il ne m'était possible que de voir qu'à quelques mètres devant moi. Alors je recommençai à courir parce que j'étais trop ivre pour combattre, mais pas assez pour oser tirer aveuglément sur ces hommes. Tandis que je poursuivais ma course, je pus entendre une voix familière s'élever au loin. Je pus distinguer brièvement une immense colonne de terre ainsi qu'une silhouette humaine posée dessus. Des sables mouvants ? Par précautions j'effectuai un immense détour ce qui parut suffire pour éviter le danger. Ainsi me mis-je à agiter vigoureusement les bras en l'air tout en continuant de courir.

-Merci Kioshi !!

Oui, je pouvais le remercier. Cela aurait été d'autant plus gentil de sa part s'il m'avait également prévenu pour la suite. Car il n'y avait pas de sable mouvant sans eau et en l’occurrence je me dirigeai à même un petit étang lové à même un amas rocheux. N'importe qui dans un état normal aurait été en mesure de l’apercevoir, cependant je n'avais plus vraiment toute ma tête. Et j'eus l'impression que le sol se dérobait sous mes pieds. Simplement et bêtement, je tombai tête la première dans l'eau. Un magnifique « splatch » raisonna dans la nuit. Et moi, je bus une longue tasse d'eau croupie avant de réussir à immerger ma tête vers la surface. Je recrachai un long filet par la bouche avant d'aller nager jusqu'au bord. J'eus bien du mal à rejoindre la sortie en raison de mes forces engourdies par l'alcool. La première choses que je voulus savoir étant ou en était les brigands qui me coursaient. Nul trace d'eux dans les environs. Les avais-je semé ? Les sables mouvants les avaient-ils dissuadé de me poursuivre ? Je ne savais pas trop, mais je m'en moquai bien tant que j'avais la paix. Néanmoins j'espérai que le royal fessier de la pauvre victime part balle se remette de cette mésaventure.

Essoufflée, je me laissai tomber sur la roche bordant « l'étang » me retrouvant ainsi à genou. J'étais trempée jusqu'au os et entrepris immédiatement d'essorer ma longue tresse qui commençaient à peser dans mon dos. Définitivement, il fallait vraiment que j'envisage de me couper les tifs sans quoi je risquai un jour de partir en arrière sous le poids de ma propre chevelure. Durant quelques minutes il ne se passa pas grand chose, puis je reconnu Kioshi qui arrivait vers moi.

-Tu aurais tout de même pus me prévenir également pour cela ! Lui reprochais-je en m'efforçant d'arborer une moue boudeuse, même si j'étais trop éméchée pour me sentir outrée de quoique ce soit.

Je me redressai et secouai la tête pour chasser les nombreuses gouttes qui ruisselaient sur mon visage. Je fus parcourue d'une frisson. Les nuits dans le désert étaient particulièrement glacé et ce qu'importait la saison. Ce faisant, je me plaçai à en face de Kioshi, impérial, les bras croisées.

-Bon puisque tu es là, rend-toi utile ! Tu es un Yamada tu pourrais au moins m'aider à me sécher. Mais attention ! Je levais un index inquisiteur à son encontre. Si tu me touches, je t'envoie tête la première dans les sables mouvants. Et ne compte pas sur moi pour venir te chercher. 

Il me fallut quelques longues seconde de latence pour finalement réaliser que j'étais en train de traiter mon supérieur hiérarchique comme s'il était le dernier de mes serviteurs. En temps normal j'aurais eux honte, mais au vu de l'état actuel de la situation, j'en avais singulièrement rien à faire. Le décor oscillait tant autour de moi et que je me demandai même si j'allais me souvenir de quoique ce soit le lendemain.

Il voulait faire son malin. J'étais prête à l'envoyer tête la première dans l'étang, lui et son index inquisiteur qu'il venait poser sur mon front. Cependant, je lui laissai un instant le bénéfice du doute. Et je me retrouvai séché. Encore un peu et j'aurais presque été prête à le remercier. Cependant ce fut sans compter sur sa prochaine action qui consista tout simplement à me pousser d'une simple pression pour me faire retomber à l'eau. Cette fois-ci j’eus le réflexe de fermer la bouche pour ne pas boire la tasse. L'eau me parut toujours aussi glacée. Et je remontai subitement à la surface, lançant un regard mauvais à l'encontre du Yamada qui osait se jouer de moi.

-Toi ! Si je t'attrape !

Sans perdre de temps je me ruai vers le bord pour tenter de l'avoir mais, prévenant qu'il était, il n'hésita pas à s'enfuir comme un lâche. Ainsi je lui courrais après durant cinq bonnes de minutes tout autour de l'étang, manquant à plusieurs reprise de trébucher sous mes semelles humides. Alors je finis pas tomber à genou, totalement à bout de souffle. Lui aussi semblait épuisé, mais me souriait, avant de... disparaître dans un nuage de fumée. Un clone? Il n'avait tout de même pas osé. Je me retournai et vit le véritable Kioshi sortir de derrière un rocher, fringuant et en pleine forme. Son double avait courut à sa place et moi je m'étais fatiguée pour rien. Je ne distinguai pas grand chose malgré l'astre nocturne qui illuminait la nuit, mais j'étais presque persuadée qu'il se moquait de moi.

-Bon d'accord, tu as gagné... Déclarais-je le souffle court.

Cette idée ne me plaisait pas. Évidemment je ne faisais que lui mentir et lorsqu'il baissa sa vigilance je lui sautai littéralement dessus pour tenter de le maîtriser. Avec mes maigres bras ce ne fut pas mince à faire, et la situation se tourna plutôt vers l'inverse. Je ne me laissai cependant pas faire et nous roulâmes à plusieurs reprises jusqu'à tomber tous les deux dans l'eau. Moi je m'en moquai, mais je ne n'étais plus à cela près ce qui n'était pas son cas. Il ne me restait plus qu'à espérer qu'il s'agisse d'un véritable vrai Kioshi et non d'un énième clone.

-En fait non j'ai menti ! Mais on arrête tout ! On va dire que pour cette fois c'est égalité !

Au moins pouvais-je toujours lui retirer cette pseudo victoire. Trempée jusqu'aux os, j'allais jusqu'au bord et trouvais tout juste le courage de remonter sans oser allez plus loin. Toutes ces chamailleries m'avaient épuisées et je me laissai littéralement tomber sur le dos, sur le roche humide. Les bras écartés, le regard perdu vers les cieux, je me perdis un instant dans leur contemplation. Je commençai à me sentir mieux. Les effets de l'alcool s'amenuisaient lentement et quelque part j'en étais satisfaite car cela signifiait que j'allais garder des souvenirs de cette soirée.

-Alors dis-moi ! J'ai réussi à te faire oublier tes problèmes? Hein? Dis !!

Je soupirai longuement, réalisant par moi-même que je disais n'importe quoi. Ou plutôt que le rhum avait tendance à me donner la locution facile ce qui se caractérisait par une mauvaise tendance à dire tout ce que je pensais. Ainsi venais-je bêtement de révéler le véritable but de cette sortie dans le désert, mais je m'en moquai. Cela ne changeait pas grand chose au fond. Après quelques secondes passée allongée a reprendre mon souffle je me redressai pour m'asseoir en tailleur face à lui. Mes vêtements me collaient à la peau mes cheveux également et ma tresse ne tenait plus à grand chose. De son point de vu, je ne devais plus ressembler à grand chose.

-Bon tu peux de nouveau me sécher. Mais cette fois-ci pas d'entourloupe. J'ai déjà assez pris de bain pour la soirée.

Cette simple idée suffit à me faire frissonner. Heureusement j'avais la chance d'être en accompagnée d'un radiateur sur patte.

Selon lui il n'y avait pas de problème. Je n'aurais pas souhaité en attendre davantage, car pour moi cela voulait dire qu'il n'y pensait plus. Tout du moins je l'espérai simplement. Et j'arborai un mince sourire dans l'ombre que même lui ne pouvait voir.

-Tu demandes encore à ce que je me déshabille ? Je vais finir par croire que tu es un pervers...

Dis-je en fronçant les sourcils, même si cela n'était pas visible. Je commençai à me demander ce qui clochait chez lui. Aussi pus-je facilement mettre cela sur le compte de l'alcool ce qui, en soit, justifiait parfaitement son comportement, et peut-être aussi le mien. Une idée étrange me traversa l'esprit. Toujours assise, je l'avisais de haut en bas, l'index posée sur la lèvre, pensive. Suite à quoi je secouai la tête pour chasser ses pensées impurs, me rappelant qu'il était tout de même censé être le compagnon de ma Kazekage et Sensei de surcroît.

En fait, même si la boisson commençait à passer, elle avait toujours autant tendance à me délurer. Je pestai intérieurement à mon encontre, pour me laisser avoir par l'ivresse et ses aléas. Alors, comme s'il aurait put avoir la peste, je me redressai pour ne pas le laisser me toucher. Tant pis s'il me fallait restée trempée, au moins si je gardai mes distances j'étais sûre qu'il n'allait rien se passer, même par accident.

-Bon ce n'est pas comme si ce genre de chose pouvait arriver par accident...

Je ne me rendis pas immédiatement compte que je venais de parler à voix haute. Lorsque Kioshi m'adressa un regard interloqué je ne pus que louer les ombres pour cacher mon teint qui virait probablement au rouge. J'agitai alors vigoureusement les mains en signe d'assentiment.

-Non non rien ! Tu as vus le ciel ? Il est vraiment beauuuuu !

En réalité il s'agissait du même ciel depuis toujours et chaque nuit dans le désert. Oui il était beau, mais en l’occurrence, je cherchai simplement à occuper son attention ailleurs que sur moi. J'espérai qu'au vu de son état cela ne serait pas trop difficile. En dehors du fais de vouloir me déshabiller, il me demandait de lui fabriquer une moto ce qui, en soit, rendait sa première proposition presque plus enviable.

-Et désolée, mais jamais je ne te fabriquerai de moto. Je n'ai pas le temps pour. Cela m'a prit plusieurs centaines d'heures de travail pour fabriquer la mienne. J'y ai presque passé deux ans de ma vie dessus. C'est mon bébé. Je l'ai faite moi-même au boulon près. Alors il est hors de question que je te t'en fabrique une.

Pour la simple et bonne raison que je n'allais pas consacrer deux autres années de plus enfermée dans le Kenkyuujo a fabriquer quelque chose qui ne m'appartiendrait jamais. Surtout que seul les membres mon clan pouvait faire usage de cette technologie car elle requérait une maîtrise des sceau et du chakra particulière que l'on ne pouvait avoir qu'à force d'entraînements.

-Mais je veux bien t'apprendre deux ou trois trucs. Au moins que tu saches à quoi servent des lunettes de soleil. Répliquais-je, taquine.

Je ne pus retenir un petit sursaut de surprise lorsqu'il fit apparaître un nouveau rhinocéros de terre sous mes yeux. La dernière fois que j'en avais vu un, ce dernier avait tout simplement essayé de me rentrer dedans. Lorsque le Yamada m'invita à monter, j'eus un instant d'hésitation, avisant sa main tendu vers-moi. Je me grattai un instant la tête, quelque peu mal à l'aise avant de lui offrir la mienne afin qu'il m'aide à m'asseoir derrière lui. Suite à quoi nous empruntâmes la direction inverse pour retourner à Suna. La fatigue commençant à réclamer son du sur ma personne. Aussi me penchais-je légèrement en avant pour poser mon front contre son dos.

-Pourquoi est-ce que tu cherches toujours aider tout le monde ? Pourquoi tu ne penses pas à toi ? Si tu veux vraiment prendre soin des autres alors essai de savoir ce qu'il pense. Alors tu comprendras qu'eux aussi souhaitent te voir sourire...

Moi, je souriais. Là, au milieu de la nuit après cette fin de journée que, étrangement, je n'étais pas prête d'oublier.

Le sommeil et la fatigue commençaient à me gagner. La présence chaleureuse de Kioshi ne faisait rien pour inverser la tendance. Je me sentais reposer, si paisible. Sans les remous incessants du rhinocéros de terre, j'aurais sans doute rejoints les bras de Morphée sur l'instant. J'attendais également sa réponse a mes questions. Ces dernières ne tardèrent pas à venir. Il me demanda alors si cela était mal. Évidemment que cela l'était, surtout pour lui. Il y avait de nombreuses choses que cet idiot ne comprenait pas. Peut-être un jour, que lorsque la situation s'y prêterai, je prendrais soin de lui remettre les pendules à l'heure. Il le méritait bien... Puis il continua en prétendant que le sourire devait être donnée par les autres et non par soi-même. Ce à quoi je ne pus moi-même m'empêcher d'étirer les lèvres, amusée.

-C'est pour ça que je suis là...

Et comme pour confirmer mes paroles je resserrai mon étreinte autour de sa taille.

J'avais tant souffert par le passé. Perdue dans les méandres de l'oubli, alors que mes souvenirs me faisaient défaut, il avait été là pour m'aider et me soutenir. Il n'avait jamais rien demandé en retour et de mon côté rien justifiait qu'il daigne me prêter un tant soit peu d'attention. Pourtant cela ne l'avait pas empêché de s'investir dans une solution pour me guérir. Sotte et perdue que j'étais, je l'avais repoussé sans sommation, mais aujourd'hui cela ne l'empêchait pas d'être toujours là. Il ne le réalisai pas, mais cela comptait énormément à mes yeux. Toute ma vie j'avais espérer rencontrer quelqu'un qui puisse réellement veiller sur moi. Je pensais enfin l'avoir trouvé.

Le fin du trajet retour se passa dans le plus grand des silences. La nuit était notre seule compagne. De nouveau à pied, nous traversâmes la Voie Illusionnée telles des ombres. La tête basse je luttais contre le sommeil, tentant désespéramment de quérir le peu de force qui me restait pour continuer d'avancer. L'alcool retombait et avec lui un irrépressible état de somnolence venait engourdir le fil de mes pensés. Je n'arrivais plus vraiment à réfléchir. Aussi je me contentai de faire un pas devant l'autre bêtement. Les cheveux en batailles, je renvoyais de temps à autres, et de façon totalement machinal, quelques mèches rebelles en arrières. Je n'eus d'autre choix que de m'en remettre en Kioshi pour me guider jusqu'à chez-moi, incapable de compter le nombre de fois où mes soirées s'étaient terminée ainsi. Parvenus devant le portail en fer forgé de ma demeure je m'arrêtai devant le Yamada, un instant.

-Bon... et bien... merci pour cette soirée. J'espère que tu t'es amusé autant que moi...

Les mains dans le dos, quelque peu gênée, je fis un pas en direction de l'entrée avant de me raviser. Je me tournai alors brusquement vers Kioshi pour aller déposer un baiser sur sa joue.

-Prend soin de toi...

Sans trouver le courage de lui adresser le moindre regard, je disparu cette fois-ci derrière le portail, laissant l'obscurité me bercer tandis que je rentrais chez moi.