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Réflexion faîte, le chakra restait un domaine assez mystérieux et déstabilisant. En effet, comment expliquer nettement la capacité d'humains à modifier temporairement les conditions météorologiques d'une zone ? Comment rester de marbre quand on savait que c'était une "énergie" qui en était la cause ? Des sujets de réflexion qu'on ne pouvait pas s'empêcher d'avoir en voyant la technique raiton de son coéquipier et l'état dans lequel se trouvait le chef des bandits.

"Vous pouvez encore le sauver si vous le souhaitez ..." répéta-t-elle mentalement. On pouvait sauver si on le désirait, en somme la vie de cet homme était aux mains de toute une patrie. Etait-il assez aimé pour qu'on fasse venir un médecin ? Avait-il été assez bon pour qu'on pleure sur son corps s'il mourrait ? Kibo allait-il vraiment laisser mourir ? Avait-elle tout simplement le droit de se poser de telles questions, alors qu'ils avaient été attaqués et qu'ils auraient pu être tués ?

Silencieuse, elle suivit Kibo dans l'inspection du village. Elle se contentait d'hocher la tête lorsque le jeune homme lui fit part de ses observations, ajoutant un ou deux commentaires sans grande importance sur la structure ou sur l'organisation. Lorsqu'ils quittèrent le repère, lorsqu'elle fut à l'air libre, elle inspira un grand coup, ferma un court instant les yeux pour les rouvrir, soudainement plus sereine.

Elle sortit le parchemin où les destinations étaient inscrites pour voir ce qu'il restait à faire. En somme, pas grand chose.

***

Kazemori, petit village près d'une frontière, ne fut pas bien difficile à atteindre. La plus grande difficulté avait été la même que lors de la traversée Odaichi-temple d'Ichibi : l'eau. Il n'y avait pas de grands lacs ou d'oasis géantes. Ce n'était que de très petits points d'eau, à peine visible. Autant dire, lorsqu'ils arrivèrent dans le village, Tsukiko arborait des traits fatigués et avait droit à quantité de sable sur chaque plie de sa cape.

- Kibo, sincèrement, comment être sûr que notre rapport est juste ? Je veux dire, un village peut cacher mille secrets et mille situations. On va se contenter que d'écrire ce qu'on voit ? demanda-t-elle naïvement. Je veux dire, suite à des conflits, je me rappelle que pas mal de trafics et de marchés se mettaient en place et fallait vraiment chercher pour y entrer.

Des marchés qui vendaient des produits vitaux à des prix malades, des marchés qui allaient jusqu'à vendre les pauvres orphelins ou orphelines ... Elle en avait vu avant et après la construction des différents villages. Tous ces souvenirs revenaient au fur et à mesure des déambulations, au fur et à mesure qu'elle voyait certains visages et expressions.

- Surtout près des frontières. Enfin ... on continue sur Mamushi no Sato ou restons-nous une nuit ici? A savoir qu'il n'y aura pas de lacs ou de points d'eau selon la carte entre, il faut nous armer de gourde d'eau.

Son avis personnel ? Rester peut-être une nuit ou deux, le temps de vérifier qu'il n'y avait pas d'activités douteuses. A moins que cela ne fasse l'objet d'une mission plus spécifique, et bien plus longue.

- Je ne sais pas vraiment si nous sommes passés à côté de quelque chose. C'est juste que je sais que suite aux conflits, à la pauvreté, beaucoup de marchés noirs et de trafics voient le jour, et davantage avec le pays voisin car souvent ils ont ce que le pays n'a pas. Je doute qu'on puisse débusquer comme ça ... Mon grand père disait de ne jamais se fier à la couverture d'un livre pour savoir s'il est bien ou pas. Il adorait lire ... Je détestais ça.

Elle eut un petit sourire nostalgique à ce souvenir. Elle avait longtemps détesté lire et même aujourd'hui, elle n'était pas une grande lectrice. Si elle lisait, ce n'était que des titres bien particuliers, souvent ceux que le vieillard affectionnait. Enfin, affectionner était un grand mot. Ce n'était que les titres qu'il avait pu se procurer entre deux conflits et deux destructions.

- Je doute juste que tout le monde accepte la pauvreté ou que certaines filles acceptent d'être hôtesse ou plus juste comme ... ça, termina-t-elle un tantinet gênée. Mais ... je doute que cela rentre dans le cadre de notre mission pour le moment, on doit surtout voir les besoins les plus importants et la situation en général comme ... les humeurs.

Tsukiko était toujours aussi peu sûre d'elle et aussi peu sûre de ses opinions. Elle avançait toujours un avis avec la certitude d'avoir faux quelque part. C'était ce qu'on appelait le manque de confiance.

- Nous dormirons dans ce village et si tu as soif, il fallait me le dire plus tôt, as-tu oublié que je suis d'affinité Suiton et que je peux générer de l'eau à tout moment ? ajouta Kibo.

Elle le regarda quelques minutes et baissa la tête, honteuse. Elle avait encore oublié ce détail crucial. Effectivement il était d'élément suiton comme elle mais que contrairement à la manieuse du sable, il savait manier l'eau.

- C'est vrai. J'oublie toujours qu'on peut "créer" l'eau avec le suiton ... Pas grave, économises tout cela pour ... au cas où. Je suis habituée aux longues journées dans le désert et à gérer l'eau. Je n'ai pas eu si soif.

Par contre elle avait été épuisée. L'épisode des bandits l'avait un tantinet chamboulé tant sur l'aspect humain que sur l'aspect soldat. Elle se sentait bien trop faible moralement comme physiquement. Autant dire, la proposition de l'auberge lui fit plaisir. Elle avait sacrément besoin de se reposer, que ce soit sur un lit douillet ou sur un lit de sable. L'un comme l'autre lui semblerait le sésame d'or.

Quant à la journée ou la soirée, disons qu'elle ne tenait pas vraiment en place. Elle était peut-être fatiguée mais son cerveau n'était pas en paix. Elle ne cessait de réfléchir à son passé, à son présent, à ses techniques, aux bandits, à ce voyage, à sa famille, à son coéquipier ... cela faisait trop d'informations et bien trop de réflexions.

Incapable de rester plus longtemps sur place, elle quitta sa chambre pour se rendre dans le village et faire un petit tour. Il n'y avait pas grand monde dans les rues, comme dans d'autres villages visités. Décidément, au pays du vent, une fois la nuit tombée, les soirées paisibles apportées soit la paix à l'âme ou au contraire le désespoir. Ce soir, elles semblaient déprimer Tsukiko.

Elle finit par passer devant ce qui semblait être un bar. Elle passa son chemin, baissant la tête, de retour à son passé et plus particulièrement à la période entre la mort de sa grand mère et son départ à Suna, période dont elle n'était pas fière du tout. Pour seule réponse à toutes ces images, elle donna un coup à une pierre et puis à une autre et ainsi de suite, avançant sans vraiment regarder devant elle.

Et puis elle eu envie d'aller voir Kibo. Sa bonne humeur était contagieuse et elle en avait besoin. Cependant à peine avait-elle relevé les yeux qu'elle se rendit compte qu'il se faisait un brin trop tard pour toquer à une porte pour demander compagnie. Et surtout qu'elle n'était plus si seule.

Deux jeunes passèrent à ses côtés discutant du coût de leur loyer et de leur travail de nuit. Cette discussion réveilla en elle un désir étrange, un désir d'avoir sa maison, un lieu chaleureux, un lieu qu'elle pourrait modeler comme elle souhaitait, un lieu où elle pouvait rentrer quand elle souhaitait !

- Une maison ...

Une maison où personne ne l'attendrait mais cela ne changerait guère de maintenant. C'est toujours le coeur lourd qu'elle avança, s'exilant aux abords du village, s'allongeant sur du sable et contemplant le ciel étoilé.

Quant aux marchés noirs, elle doutait fortement en tomber sur une ce soir-même, surtout en ayant ce bandeau ninja. Elle se décida à fermer les yeux, et à se détendre. Les minutes passaient, puis les heures et elle s'en fichait. Elle appréciait le doux contact du sable.

Avec plaisir, elle jouait avec le sable avec le bout de ses doigts. Pour un peu, elle commencerait à faire quelques petites sculptures. Cependant elle se retint. Si elle commençait, elle risquait d'y passer la nuit et elle avait encore une longue route à faire. Ainsi donc elle se contentait de sentir les grains de sable ou encore examiner ce mystérieux ciel étoilé. Un calme qui fut rapidement perturbé par un nouvel arrivant, Kibo.

- Tu devrais vraiment te reposer Kibo, et ne pas me suivre partout, lui répondit-elle. Je suis habituée à traîner dehors des heures et des heures avant de me coucher, conclut-elle en s'étirant sur le sable.

La présence de Kibo était en soi un premier baume au cœur. Elle ne savait pas pourquoi mais il lui inspirait sérénité et joie, comme si il y avait toujours une solution à n'importe quelle situation. Cependant, si ce sentiment lui faisait du bien, il lui faisait peur aussi. Elle avait ressenti ce sentiment avec sa mère, elle était morte. De même avec son grand père et sa grand mère. Quant à son père ou son frère, ou Kibo, ils risquaient au quotidien leur vie. Vie de ninja ... était-elle vraiment faite à tout cela ?

- Lorsqu'il y avait des conflits, on recrutait tout "combattant" potentiel, de n'importes quels âges. Ma mère ne voulait pas que je sois inclus dedans alors elle me tenait loin de tous les conflits, et faisait tout pour que je ne maîtrise aucun art ninja. A part fuir, elle ne m'apprenait rien d'autre. Elle disait que je devais avoir une belle vie, une belle maison et une belle famille, dit-elle en affichant un sourire moqueur. Je ne te dis pas la tête qu'elle a fait le jour où j'ai maîtrisé un peu de sable devant ses yeux ... je ne l'ai jamais vu aussi effrayé. Elle m'a interdit d'utiliser le sable, elle me tenait loin du sable... bref.

Tenir une Kawaguchi loin du sable, en voilà une idée diriez-vous mais les mères pensaient avant tout à protéger leur rejeton quitte à créer ce petit vide intérieur.

- Je veux dire ... j'ai toujours grandi dans la perspective que je ne serais pas celle qui foncerait droit dans un nid de bandits et j'ai encore du mal à l'idée de me dire qu'un jour, je devrais décider du sort d'un homme ou d'une femme. Vie ou mort, orphelin ou pas... C'est dur d'être sans parent, c'est tout.

Kibo était aussi orphelin. Il pourrait comprendre.

- Je me demande juste ... si j'ai fait le bon choix, quitter Konoha pour Suna. Si tout cela vaut vraiment la peine pour se faire accepter par un clan ...

Une soirée "banale" pour Tsukiko, une autre soirée de questionnement.

- Quand nous aurons fini cette mission, je devrais retourner à Suna auprès de mon clan. Je ne sais pas pourquoi, mais cela ne me fait pas plaisir. Je préférerai passer ma vie dans le désert ! conclut-elle en rigolant un tantinet, cachant cette boule qui se formait dans son ventre à l'évocation du clan.

Et puis il sera temps de dormir, et d'aller faire les deux dernières destinations avant le grand retour à Suna.

Un soupir. Voilà tout ce qu'elle offrit comme réponse. Mentir serait bien inutile ce soir. Il avait déjà proposé quelque chose de similaire lors de leur première rencontre mais elle avait refusé, ne le connaissant pas vraiment et n'ayant pas ce désir de quitter le foyer "familial". Maintenant, les choses étaient différentes. Il était un coéquipier qu'elle appréciait et surtout, elle voulait quitter la demeure des Kawaguchi.

Son silence fit donc office d'acceptation. Cependant elle se promettait que ça allait être temporaire. Elle voulait un chez soi, quitte à finir seule à nouveau mais au moins une solitude plus douce que la vie collective amère et épuisante du clan.

- Merci. Ce sera temporaire, je trouverai rapidement un endroit où loger, finit-elle par dire.

Elle le suivit aussitôt après pour cette soirée de repos. Le reste du voyage se passait sans grands incidents et Kibo continuait à noter ou à écouter les plaintes et demandes des villageois ou des nomades. Tsukiko préférait faire un tour des différentes structures, se renseigner sur la provenance de la nourriture, la quantité, la fréquence et ce genre de petites choses. Petit à petit, une petite "critique" germa dans son esprit. Elle ne tarda pas à la partager avec Kibo, lorsqu'ils étaient seuls, loin des oreilles indiscrètes.

- Suna est pauvre et faible.

Voilà une affirmation un tantinet dur peut-être bien. Elle enchaîna rapidement sur la raison d'une telle phrase introductive.

- Je veux dire, j'ai habité un certain temps à Konoha et précisément, je sais que malgré les conflits, il y avait toujours des abris et de la nourriture en raison du temps et de la végétation. Dans le cas de Suna, avec si peu de végétation et d'eau, on est dépendant des autres. En cas de conflits, on est vulnérable et c'est à l'usure qu'on nous aura non ? Qu'offre Suna de si précieux aux autres ? Je veux dire ... peut-être qu'il serait temps de se renforcer autrement qu'avec d'excellents ninjas.

Tsukiko détestait les conflits et elle réfléchissait sans cesse à des ruses pour les fuir, les éviter. Etait-ce une attitude "sage" ou une attitude "lâche" ? Voilà une question.

- Nous avons beaucoup de sables, le clan des Saibogus, un fabuleux laboratoire et des ninjas aux compétences diverses ... pourquoi ne pas les combiner et les utiliser ? Renforcer les habitations et les défenses du village avec le sunaton des Kawaguchi ou encore le savoir des Saibogu, de même pour nos armes. Irriguer bien mieux les villages ? S'il y a des oasis aux eaux limpides malgré le peu de soleil, c'est qu'il y a une source quelque part ... trouver des sources d'eau ou ... en créer ? Tu dis maîtriser l'eau, et est apte à en créer ... pourquoi ne pas en créer dans le désert pour le rendre plus facile d'accès et moins dangereux ? Rendre le pays plus ... uni ? Peut-être qu'on pourrait créer un peu plus de végétation si on arrive à développer des points d'eaux. Je ne dis pas qu'on sera un mini Kiri, mais au moins plus ...vivable. Enfin ... beaucoup de choses ont dû être entrepris pas les Kages précédents ou actuels ... je suppose. C'est juste que ... cela doit prendre du temps peut-être bien.

Rendre le pays moins dépendant, et peut-être même rendre les autres dépendants de Suna.

- Ou au moins développer d'excellentes inventions avec les Saibogu pour effrayer le voisin.

Inspirer un tantinet la crainte pour que les autres prennent leur précaution avant d'oser faire que ce soit.

- Est-ce stupide ? demanda-t-elle, incertaine. Je sais c'est assez ... bordélique dit comme ça mais il y a beaucoup de choses à faire j'ai l'impression.

Tsukiko était persuadée que Kibo allait trouver matière à critiquer. Depuis quelques années qu'elle était là, elle était habituée à ce que son entourage trouve quelque chose à redire tantôt sur ses idées, tantôt sur ses goûts, tantôt sur sa maîtrise du sunaton. Il y avait forcément, et toujours, un truc qui clochait et qui détruisait toute son argumentation - et sa confiance en soi en parallèle-. Elle baissait déjà la tête pour fixer le bout de ses pieds, dans l'attente de l'avis du coéquipier.

Un avis qui eut le don de la surprendre. Il était totalement de l'avis de Tsukiko et, surtout, il exprimait cet accord avec un enthousiasme étonnant.

- Tu es d'accord ? se permit-elle de demander, encore étonnée de la réponse. Rencontrer et en parler avec la Kazekage ... Je ... ne penses-tu pas que montrer ... une maquette ou un dessin seraient meilleurs. Je veux dire, c'est que des idées brouillonnes là?

Peut-être que Tsukiko gardait ce manque de confiance mais quelque chose avait déjà commencé à changer au fond d'elle. Cette confiance que son coéquipier lui accordait, cet enthousiasme qu'elle n'avait plus vraiment connu et ces mots encourageants dont elle avait droit eurent plusieurs effets. Sa timidité et sa mélancolie d'être inutile semblaient se battre un tantinet en retraite. Si ses idées intéressaient vraiment quelqu'un, cela voudrait dire qu'elle sera utile au village et à la population.

Cela voudrait dire qu'elle aurait son rôle. Enfin.

C'est le sourire aux lèvres qu'elle rentra à Suna. Cependant il disparut bien vite quand elle dû faire face à son père et lui expliquer qu'elle allait quitter la demeure familiale. Elle s'était attendue à tant de réaction mais pas à cette dernière : l'autorisation de partir sans aucune objection. Il lui donnait le droit de quitter ce lieu sans objecter, sans insister pour qu'elle reste.

Avait-elle été une gêne ? Ou alors voulait-il seulement que sa fille grandisse dans un environnement plus sain ? Pour le père, c'était le second cas clairement. Il n'était pas aveugle à la jalousie de sa femme et il n'en pouvait plus d'être écartelé entre elle et sa fille née d'une autre union. Cependant, Tsukiko l'interpréta clairement autrement, considérant sa présence - ou sa naissance tout simplement - comme une gêne. Aussitôt, elle se rappela de tous ses efforts pour supporter sa belle-mère, ses longues attentes pour avoir à quelques mots doux de son père ou encore ses longues nuits d'entraînement. Tout cela n'avait donc aucune importance ? Tout cela ne méritait-il pas un peu de reconnaissance, une petite insistance de rester, ne serait-ce que pour la forme ? Voilà comment elle pensait. C'est donc le cœur brisé, les larmes ravalées qu'elle se rendit chez Kibo pour y habiter momentanément.

Momentanément car cette sensation d'être une gêne où qu'elle aille ne la quittait pas et surtout parce que Kibo avait sa propre vie, et elle ne voulait pas s'imposer bien trop longtemps. Les recherches pour un nouvel appartement allait donc débuter mais avec une difficulté notoire : elle n'allait payer qu'avec ses propres sous, et non ceux donnés par son clan. L'origine de ses sous personnels ? Une part de ses petites missions - cette mission rang B allait être une grande aide - et l'autre part d'une autre activité - activité à trouver également. Elle allait retrouver ses vieilles habitudes de débrouillarde de l'époque où elle habitait encore à Konoha, un tantinet orpheline et seule.

Dorénavant, L'époque où elle mendiait reconnaissance et amour était terminée. Plus jamais elle ne sera dépendante d'eux tant financièrement qu'humainement. Plus jamais elle ne sera une gêne que ce soit pour eux ou pour ses amis.