J'avais soigné Yusuke, j'avais rencontré le nukenin pour lui apporter les premiers soins. L'heure était à présent celle de faire mon rapport.
Alors que je fixais l'une des fenêtres en face du bureau de Kakeshuou mon regard s'assombrit considérablement. Au loin, le soleil était en train de disparaître derrière les montagnes et dans peu de temps le pays en entier serait plongé dans le noir. Je me réjouissais d'une certaine façon que nous ayons pu regagner le palais sauf, mais pas sain, car nous étions tous blessés d'une certaine façon. Autant dans notre fierté que dans notre moral ou notre physique. J'avais pu me changer après m'être occupé de Yusuke et je me présentais donc dans une tenue des plus convenables à présent. Il était temps pour moi d'affronter le vieux lion de glace.
Je poussais un long soupir, avant de me retourner et de traverser la largeur de couloir qui me séparer de la magnifique porte du bureau du gouverneur. Mes pas se répercutèrent en écho dans ce dernier et je frappais trois fois à la porte d'un geste machinal du poignet. Une nouvelle fois, le bruit se répercuta longuement. Cet endroit me donnait froid dans le dos rien que par l'air glacial qu'il produisait. J'entendis Kakeshuou me demander de rentrer, ce que je fis de façon distincte et poli, hésitant à me rapprocher du bureau sans y avoir été invité. Je restais donc timidement adossé à la porte, le visage fermé, le regard baissé vers le parquet en bois sans oser lever la tête.
J'entendais distinctement le bruit d'une plume qui glisse sur le papier pour y tracer des écrites rapides. J'hésitais encore. J'attendis une ... Voir deux minutes avant de prendre la parole :


"Je ... Je viens vous faire mon rapport Kakeshuou Sama ..."


Que dires de plus ? Rien pour l'instant. J'avais envie que cela se finisse vite, que mon sermon soit bref, que je puisse rapidement retourner m'occuper de mon petit ami. Je fronçais légèrement les sourcils en attendant que le gouverneur m'en demande plus sur ce qui s'était passé. Je savais qu'il avait déjà été rencontré le nukenin au cheveux cramoisies. Qu'est-ce que ce dernier avait-il bien pu lui raconter. Avait-il plaidé sa cause en me faisant retomber la faute dessus ? Kakeshuou l'avait-il cru si c'était le cas ? Je n'allais pas tarder à le découvrir.

Ha, vous voulez un défiscalisation de l’exportation de minerai venant des mines du mont Fubijitsu ?! Alors que cette taxe ne reste qu’à 10% de la production sur un minerai aussi précieux que le diamant, vous décidez au sein de la Chambre du commerce que les revenus et la fidélité à la production minière serait plus intéressante si l’on descendait à 3%, c’est cela ? En raison des salaires et des heures de travail réduites pour cause de dangerosité du milieu montagneux ? M’en vais vous en parler, de la taxe, moi ! Vous avez bénéficié du soutien de l’État pour votre installation sur place par le biais de prêts on ne peut plus avantageux ; vos salariés voient la dernière augmentation assurés par les revenus de l’État à hauteur de 4% et vous avez la chance de profiter du transport ferroviaire sans frais ! Mais vous avez raison, les profits ne sont pas assez importants, et vous avez tout intérêt à faire disparaître le maximum de taxes pour que les patrons puissent profiter pendant que l’État s’endette pour vos belles fesses ! Attendez une seconde, m’en vais vous rédiger une réponse qui va vous faire réfléchir aux douleurs provoquées par la sodomie métallique du sabre, mes gaillards ! Ça vous fera passer l’envie d’investir la politique et de décider des choses à la place du Gouverneur, bande d’ignares !
Grattant sur papier cette réponse d’un geste véloce, les traits faciaux de note quinquagénaire en disait long sur la façon dont il jugeait la situation. Comment se débrouillait les autorités auparavant ?! Jamais il n’avait vu autant de libertés accordées aux grandes pontes d’un territoire ! Un peu plus, et ils enverraient eux-mêmes les ordres de missions aux guerriers de l’Ombre ! Voyez où nous mène une politique désastreuse : à un laxisme latent, qui donne les pouvoirs à n’importe qui, tant que ce dernier dispose des moyens de persuasion nécessaires et utiles comme la violence, l’argument politique ou l’argent. Manque de chance, le nouveau Gouverneur bénéficie de ces trois appuis en quantités largement suffisantes pour organiser une extermination des plus grands fauteurs de trouble.

Une réponse, donc, sèche et sans amour pour la personne qui frappait à la porte. On ne peut pas dire que le Nouveau Gouverneur ait le temps de recevoir n’importe qui. En particulier à cette heure ! Il a travaillé toute la journée pour organiser des accords commerciaux, dispatcher les différentes équipes Ninjas en attente, sans oublier l’arrivée de ses élèves qui ne devraient désormais plus tarder avec – espérons-le – un chargement d’armes qui sera très utile. Ne levant les yeux que quelques secondes pour voir quelle silhouette pénétrer dans son antre, son regard ne se dégela pas en identifiant une proche parente. Un membre bien jeune du Clan, et qui pourtant excellait dans son art. La jeune Yuki était arrivée la veille, avec un compagnon chargée de l’accompagner. Il n’était pas là ; c’en était presque suspect. Mais les choses pouvaient être compliquées : après tout, elle avait rendez-vous avec un Nuke-Nin la veille ! Plus encore, elle était venue informée l’ancien de son arrivée et avait mentionnée cette rencontre, mais avait agi sans attendre l’autorisation du Patriarche. Telle résolution indépendante de tout ordre venant d’en haut pouvait être très mal perçu … . Raison d’ailleurs pour laquelle Kakeshuou Samui ne se donnait pas la peine de la regarder. Il avait un travail à finir.

La voix nasillarde et faible de la jeune demoiselle lui laissait comprendre deux choses : elle avait peur de lui ; ou alors les choses ne s’étaient pas aussi bien passés que prévus, et il fallait maintenant en accepter les conséquences. Devant tant de faiblesse de la part d’un membre de son Glorieux Clan, Kakeshuou ne répondit que par un soupir qui en dit long sur sa patience. Il avait assez de soucis avec le conglomérat minier ; s’il devait en plus de cela gérer les affaires familiales, ce gouvernorat prendrait de plus en plus des allures de nation-sitting … . Bref.

~ Assieds-toi, et ne me dérange pas … !

Encore un ton sec, sur lequel il enjoignait la frêle Yuki à prendre place devant lui. Ne reste donc pas plantée comme un arbre devant cette porte ! Pendant ce temps, notre vieux briscard se doit d’achever cette lettre, pour qu’elle parte le plus tôt possible. Le conglomérat minier … il devrait certainement envoyer une délégation de Kirigakure plus tard, si la situation ne temporisait pas. Non pas que cela lui plaisait, mais il avait un devoir à accomplir. Et pas assez de temps pour s’occuper de tout le monde. Les problèmes n’étaient pas moindres sur cette île d’à peine 50.000 habitants. Mais foi de Samui, il en viendrait à bout, vous pouvez me croire.
Martelant ses dernières lignes sur cette lettre, qu’il achevait sur un ton magistralement tout puissant, rappelant les interventions nombreuses de Kirigakure no Sato et les revendications ridiculeusement honteuses du conglomérat, Kakeshuou mettait un point d’honneur à décrire l’importance de relations cordiales plutôt qu’un usage de la violence qui ne servirait personne. Quel mensonge grossier !! Pour lui, il suffisait de passer gorge au fil de l’épée pour régler les problèmes ! Mais il serait alors en danger devant le Conseil Clanique sur la gestion de cette affaire … . Passons. Une signature, le sceau officiel, et l’affaire est entendue. Passons à la suite de la journée, en espérant qu’il s’agisse de la fin.

Posant son regard inquisiteur sur la fillette, il semblait plus sombre qu’à l’accoutumée. Certaines choses, depuis l’arrivée de la demoiselle, ne lui plaisait pas, fusse-t-elle du même grade que lui ! Ils étaient certes égaux sur le plan militaire, il demeurait cependant le Responsable de cette île et de cette gamine ! Outre le rang, l’âge n’était pas en reste ! Lorsque l’on est dans la cinquantaine face à une enfante qui n’a pas encore les quinze années de vie, on attend un peu plus de respect et d’attention. Voyons donc ce qu’elle a à raconter, pour aujourd’hui.

~ Alors. Cette rencontre s’est mal passée ? Où est le Nuke-Nin, et ton compagnon. Parle, je t’écoute !

Lorsqu'il m'en donna l'ordre, je n'attendais pas qu'il me fasse un nouveau reproche et m'avançait d'un pas rapide, mais néanmoins silencieux jusqu'à son bureau où je prenais place dans le fauteuil en face de ce dernier. Il ne me prêtait pas la moindre attention et d'une certaine façon, pour l'instant, cela me réconfortait au plus haut point. Je préférais attendre qu'il en finisse avec ses papiers avant de devoir lui annoncer les nouvelles que j'avais à lui donner. C'est donc en me tortillant les doigts de façon ostentatoire ou en réajustant mon kimono que je m'occupais attende qu'il me prête un peu d'attention.
Cinq longues minutes s'écoulèrent avant que j'entende un coup de tampon qui me fit comprendre qu'il en avait visiblement fini. Il me portait alors un regard des plus perçants que je ne soutenais pas, préférant baisser les yeux en signe de soumission et de respect, j'attendais ses paroles pour pouvoir m'exprimer.
Ces dernières furent rapides et radicales, il voulait savoir ce qui s'était passé. Je fis une légère grimace et pris une profonde inspiration avant de lui répondre :


"Nous avons appréhendé le nukenin en question ! Je l'ai ramené au palais il y a maintenant un peu plus de deux heures et j'ai demandé à vos gardes de le conduire dans les prisons du palais."


Ma voix s'éteignit et je laissais quelques secondes s'écouler avant de poursuivre d'une voix un peu plus aiguë qu'à l'accoutumer. Ce que j'allais dire le faisait terriblement mal, mais j'étais obligée d'en informer Kakeshuou :


"Katano Yusuke a été blessé dans le combat que nous avons mené. Je le savais vivant grâce au capacité sensorielle de mon invocation et je suis repartie à sa recherche après avoir ramené le nukenin ici. Je me suis occupée de sa santé avant de venir vous faire mon rapport. Ne disposant pas de medic-nin j'ai dû faire de mon possible avec mes faibles connaissances pour le soigner."


Qu'avais-je à dire de plus ? Rien vraisemblablement, il ne me restait plus qu'à attendre les éventuelles questions de mon supérieur. Où peut être même le sermon qu'il allait directement vouloir me faire après cette attaque. Je m'apprêtais donc à recevoir une énorme bombe en pleine figure. Fermant chacun de mes traits et extériorisant mon esprit du mieux que je pouvais. J'étais prête à accueillir la sentence.

Le regard sérieux, ses prunelles braquées vers la famille, les doigts croisés et les coudes sur la table. Dans cette posture, le Gouverneur de Yuki no Kuni avait davantage le profil d’un homme de loi, voire même d’un inquisiteur, que d’un membre de la famille ! Il était devant la coupable, et était prêt à faire tomber le couperet de la guillotine s’il l’estimait nécessaire et mérité ! Et avec Kakeshuou Samui, c’est toujours le cas, croyez-moi !

Le rapport n’était pourtant pas si mauvais, puisque le principal était là : l’homme mystérieux avait été intercepté. Peu importe les pertes, il était capital pour le village militaire s’inscrire son empreinte sur le territoire dont il avait la charge. En l’occurrence, intercepter un déserteur était preuve que Kirigakure no Sato savait dispenser les moyens nécessaires pour remplir son rôle. Autrement dit : la présence de Kiri permettait de maintenir l’ordre et le contrôle de ces terres glacées. Dans un premier temps, on peut donc affirmer que l’avis de notre Gouverneur était positif ! Il cachait même un petit sourire derrière ses mains. Jusque-là, on ne peut pas vraiment dire que la demoiselle l’avait impressionné par ses exploits. Voilà qui était plus rassurant ! Elle était certainement plus capable qu’elle ne le laissait paraître. L’homme était dans les geôles au sous-sol ? Le patron des lieux lui rendrait certainement une visite de courtoisie, pour voir de quel bois on parlait.

Mais la voix étouffée de Yuki Samui sur la fin de son récit montrait bien que cette arrestation n’avait pas été des plus faciles pour le binôme. Conservant sa position, Kakeshuou sentit son propre sourire s’effacer sous la nouvelle. Un blessé dans l’opération ? Celui qui était censé veiller sur elle ? Dans un sens, cela pouvait relever de la logique : s’il s’était interposé pour la protéger, sa blessure était justifiée. Hormis cela, l’idée que notre homme ait été si gravement touché qu’il ne pouvait accompagner la jeune kunoichi sous-entendait deux choses : soit l’adversaire qu’ils avaient capturé était d’un niveau remarquable ; soit lui-même était d’un niveau méprisable ! Quoi qu’il en soit, la réputation des Shinobis de Kirigakure no Sato en prenait un coup ! Les questions et reproches commençaient déjà à monter à l’esprit de notre bourreau. Et sa colère ne faisait que doubler sous cette impulsion. Garde le peu de patience que tu as, vieux frère ! Si tu t’énerves, il y a des chances que la ville de Gyamda, capitale de la province, garde des séquelles prolongées de ton gouvernorat. Et il n’est pas dans ton intérêt qu’il en soit ainsi.
Une fois le malfaiteur en prison, elle avait porté secours à son compagnon ? Pas assez de Medic-Nin dans les environs pour se charger de ça ? C’était donc la raison de son retard pour son rapport. Si elle avait quelque intérêt pour les siens, il était des plus logiques qu’elle ait volé au secours de Yusuke pour le soigner. Mais c’était encore une situation gênante : Yuki no Kuni n’avait pas vocation à recevoir des hommes de l’Ombre pour les mettre en piteux état et les renvoyer. Tout cela portait à réflexion : devait-il mieux encadrer cette gamine, ou lui enseigner les bonnes manières ?

A la fin du rapport, qui n’en était pas vraiment un en fin de compte, Kakeshuou Samui se lança en arrière et s’enfonça mollement dans son fauteuil. Toute cette situation complexe était difficile à analyser : l’ensemble était relativement bon, mais il était évident que certaines failles dans le système avaient amenés des conséquences assez lourdes et dures à supporter. Sur ce plan, il était nécessaire de faire la part des choses.
Se relevant subitement, comme si rien ne s’était passé ou plutôt comme s’il n’avait rien entendu, le Gouverneur de Yuki se déplaça vers un petit meuble à droite de son bureau. Il y prit un verre et deux bouteilles (dont une en plastique). Dans le premier un bon p’tit bourbon : il en aurait besoin pour se détendre en fin de journée. Notre homme n’était pas du genre à renoncer aux plaisirs de la vie, après tout ! Il remplit le second verre et s’avance vers le bureau du côté de la fillette.

~ Sur un plan général, tu as bien effectué ta mission. Tu as appréhendé le suspect, et tu l’as mis sous les verrous. Après cette chose : dans notre monde, il n’y a que la réussite qui compte. Peu importe les pertes et les échecs précédents ; ainsi que les moyens.

Kakeshuou déposa face à la gamine le second verre qu’il avait rempli. A l’odeur, c’était du jus de pomme ! Un verre pour soulager la demoiselle ? Qu’elle en profite ! Il est rare que notre homme fasse acte de gentillesse pour des prunes. Après tout, on offrait bien une dernière cigarette aux condamnés à mort … . Étant donné l’âge de cette enfant, on ne pouvait lui donner d’alcool fort ni de clopinette ! Le jus de fruit était donc un moyen idéal de détendre la jeune membre du Clan Samui, avant de passer à l’interrogatoire et à la mise en examen menant vers la peine capitale mouahahaha !!!
Lui-même ingurgita sa boisson sans ménagement, le liquide alcoolisé glissant dans son œsophage comme s’il s’agissait de petit lait du matin. « Ca, faut admettre, c’est plutôt une boisson d’homme ! ». Maintenant qu’il a pris ses munitions personnelles, notre affreux vieillard est prêt à riposter en toute puissance. Faisant le tour de son bureau, la figure autoritaire du Clan reprit place dans son fauteuil de roi, et posa de nouveau ses prunelles glacées sur sa congénère. Il était temps qu’elle tire leçon de ce qu’il s’était passé.

~ En revanche, certaines questions restent en suspens, et il me semble important d’y avoir une réponse ! Tout d’abord, dans quel état est ton … Yusuke ? Et quelles étaient les capacités de ton adversaire pour qu’il parvienne à mettre dans cet état deux Chûnins de Kiri ?

Retour à la position initiale. Les doigts croisés, le regard mauvais, en attente d’explications pour un résultat certes bon, mais pas assez satisfaisant. Hé oui, notre vieux grigou peut être un véritable tyran quand il s’y met !

~ Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi cet homme n’a pas été appréhendé dès votre premier rencontre. Car si rendez-vous il y a eu, c’est que tu l’as déjà croisé, n’est-ce pas ? Pourquoi ne l’as-tu pas fait à l’époque, et pourquoi ne pas avoir pris plus de renforts pour l’intercepter ??

Le gouverneur n'eut pas la réaction que j'attendais. Il m'écouta attentivement avant de me ... Féliciter. Pour le coup, je n'en revenais pas et j'ouvrais même la bouche de stupéfaction avant de m'empresser de la refermer et d'accepter la mine un peu surprise le verre de jus de pomme qu'il venait de me servir. Je trempais doucement mes lèvres dans ce dernier tout en restant sur mes gardes, car je pensais bien avoir cerné le personnage pour savoir qu'il n'était pas du tout de son genre de se confondre en compliment comme il venait de le faire auparavant.
Tiens, voilà déjà que le ton changeait alors qu'il me demandait des nouvelles de mon compagnon. Je remarquais avec un petit hochement de sourcil qu'il l'avait appelé "mon Yusuke"... Avait-il deviné l'étroit lien qui nous unissait tous les deux ? Cela était, à proprement parler, impossible, car en sa présence, nous avions fait très attention à ne pas nous montrer aussi proches que nous l'étions dans l'intimité. Je gardais un visage neutre tout en écoutant la fin de sa phrase avant de lui répondre


"Yusuke souffre de multiples fractures au niveau des côtes et d'une brulure assez profonde au niveau de l'avant-bras. Il guérira sans nul doute, mais comme je vous l'ai dit, l'absence de medic-nin rendra cette guérison plus longue que prévus !"


La question qu'il m'avait ensuite posée était un peu plus compliquée dans la réponse et je fermais les yeux afin de me repasser en mémoire les évènements qui s'étaient produits quelques heures plus tôt, analysant rapidement les actions du nukenin :


"Il a clairement un niveau inférieur aux nôtres ... Mais il utilise avec beaucoup de dextérités l'ouverture des portes du chakra ... Je ne sais pas combien il en a ouvert lors de notre affrontement, mais nous n'avons pas pu le neutraliser à cause de la surprise que cela a provoquée chez nous ..."


Nous avions été surpris, cela, on ne pouvait pas le cacher et au lieu d'affronter directement le jeune homme à deux, nous y étions allés à tour de rôle. L'a été notre plus grosse erreur, celle que je n'avais pas été capable de comprendre dés le départ. Mais il n'y avait pas que ça :


"Nous ne nous sommes pas non plus méfiés de l'endroit ou se trouvait le rendez-vous ... Et le nukenin avait pris soin de préparer le terrain. Quand il a vu qu'il ne pourrait pas s'en sortir, il a fait exploser Misaki Sen'tan' Yononaka et nous à fait tomber dans l'océan ..."


Qu'ajouter de plus ? Rien, la suite, il l'avait bien comprise par lui-même.
La suite de la discussion se transposa sur ma première rencontre avec le nukenin ou je me retrouvais obligé d'avouer un malheureux concours de circonstances qu'il me faisait bien du mal de dévoiler.


"J'ai rencontré cet homme lors d'une patrouille que l'on nous faisait effectuer peu après l'attaque de sanbi sur une île reculé du pays de la brume. J'étais seule à ce moment-là et lorsque cette homme débarqué de nulle part et à qui je demandais le départ express du pays à refuser et c'est montré en plus agressif, j'ai voulu l'appréhender. Et j'y suis parvenue. Le misuto était en route et je n'attendais que leurs aides pour finir le travail, mais le nukenin à profiter de ma naïveté pour s'échapper ... Il m'a néanmoins laissé un message ou il me donnait rendez-vous."


Je n'avais pas besoin d'expliquer plus amplement la situation pour le moment.

~ Dis-moi, Yuki … .

Notre homme venait de quitter sa posture et s’était positionné de profil. Il regardait dans le vide. Comme s’il espérait trouver des mots pour une situation pareille. Et ce n’était guère chose facile. Il avait déjà connaissance des rapports qui l’unissait à la demoiselle. Petite-fille de Chifumi, une très vieille connaissance, il avait insisté auprès de cette dernière pour emmener la gamine à l’étranger. Dans sa terre natale, ce serait l’idéal pour la faire grandir. Et il ne parlait pas de ses talents de Ninja. Malgré le peu de choses qu’il en avait vu, il se doutait bien que, pour être l’élève de cette vieille renarde, elle devait avoir atteint un niveau plus que respectable. Elle était déjà Chûnin, alors que plus de quarante printemps la séparait de son aîné. Non, ce n’était pas sur le plan technique qu’il y avait matière à faire. C’était bien sur le comportement et sur la connaissance du monde.
Avec une matrone aussi protectrice que la chouette ancestrale, cette gamine avait certainement fait des missions ; cela était une évidence. Mais que savait-elle de la vie qui l’entourait ? Du monde ? Ou même de son propre Clan ? Malgré la résolution d’un incident qui eut pu conduire le Clan Samui à l’extermination suite à la nouvelle nomination de Tenzö Kaguya, notre vieux briscard avait été informé de la plupart des évènements qui avaient tourné dans son Quartier. Et la jeune Yuki, apprenant l’isolement que lui imposait sa famille, avait fait suffisamment de grabuge pour se faire remarquer par les oreilles baladeuses de notre vieux singe. Elle ne savait certainement rien du passé du village, ce qui en faisait un électron encore plus instable. Pour toutes ces raisons, la faire venir ici était une nécessité. Non seulement serait-elle éloignée du cocon qui la rendait jusqu’à présent à la réalité du monde, mais elle pourrait également comprendre les tréfonds du monde ninja, et accepter sa condition. Ou la rejeter, si tel était son désir. En fin de compte, notre Kakeshuou Samui agirait tel un précepteur. Le plus dur qui soit d’être. Car lorsque l’on a la charge d’une enfante aussi écervelée, certaines méthodes sont nécessaires.

Dans la position actuelle, lui faire comprendre la gravité de la situation était d’une urgence cruciale. Se levant et portant son regard sur l’immense baie vitrée qui se trouvait dans son dos, notre Lion des Neiges admira un temps le paysage blanc qui s’étalait devant lui. Au-delà de la ville de Gyamda, la paix éternelle des montagnes (lorsque celles-ci n’étaient pas déformés par des combats insensés), le ciel toujours aussi pur. Un soupir : il sait très bien que la suite sera difficile. Mais qu’il doit faire son maximum pour contenir sa contenance et ne rien laisser transparaître.

~ … tu es une kunoichi accomplie, qui a déjà atteint le grade de Chûnin alors que tu n’es même pas sortie de la puberté. Nous avons déjà fait des missions ensemble, et je connais tes capacités – ou tout du moins, l’étendue qu’elles peuvent prendre. Tu as longtemps été tenu à l’écart des réalités, ce qui fait la personne que tu es … . Une jeune femme forte, certes ; mais déstabilisée …

Les oiseaux, le vent. Tout cela était bien beau : n’est-ce pas, Kakeshuou ? Desserre donc les dents, garde ton sang-froid et respire l’amour de la vie ! Laisse-toi dominer par un sentiment de plaisir et d’abandon, dans un pays fait de neige. Un pays qui n’attend que toi, et dont les éléments te sont favorables par nature. Laisse-toi guider par la banalité et la satisfaction d’une vie avancée, mais bien remplie … .
Non, mais vous vous foutez de moi ou quoi ?! Aucune chance que le paysage ou ce pays de merde puisse le contenir dans ses gongs. La faute qui avait été commise était grave. Et il était important que cette merdeuse grandisse ! Peu importe les conséquences ! Se retournant soudainement vers l’adolescent, ses propos devinrent agressifs, alors que ses poings s’abattaient à l’unisson sur le bureau, soulignant d’autant plus la colère qui l’habitait en cet instant. La colère ? La rage, plutôt ! Était-il touché de cette rage runique, pourtant détenue uniquement par les membres du Clan Suzurane ? N’allez pas sous-estimer la puissance dévastatrice d’un vieillard, même s’il vous semble incapable et faible ! Il fera tout ce qui est en son pouvoir pour vous faire comprendre votre place et vos responsabilités en tant que shinobis !

~ ALORS COMMENT PEUX-TU PENSER QUE TES ACTES SONT SANS CONSÉQUENCES !! Tu ne vois que le résultat ? le Nuke-Nin est capturé, soit !! Mais il t’a « invité » et tu as accepté cette invitation, sans en faire part à tes supérieurs dès que tu as eu l’information ! Tu m’en as informé seulement hier, et sans même attendre ma décision sur cela ! As-tu conscience que retenir des informations et mener tes équipiers dans un pareil traquenard peut signifier la cour martiale pour désobéissance et complot avec l’étranger !!

Les mots étaient rudes. Plus, même ! Ils étaient impérieux ! Une telle engueulade ne pouvait convenir que dans un cadre familial : l’autorité suprême reprochait à l’enfant d’avoir désobéi aux ordres. Malheureusement pour notre Yuki, ce même Gouverneur qui lui adressait torts et reproches était un double couperet : en plus de représenter son supérieur hiérarchique sur ce territoire, il était également un membre plus âgé de sa propre famille. Il disposait donc de toutes les autorisations naturelles pour agir de la sorte. Et c’était loin d’être fini … .

~ S’il venait à témoigner dans le procès de sa capture et pour ses crimes, il pourrait révéler les raisons de votre rencontre. Et tu pourrais être poursuivie pour trahison envers le village ! N’oublie pas que tu es une militaire ! Une femme au service des Ombres, et pas de ta curiosité personnelle !! Pour quelles raisons avais-tu besoin de te rendre à ce rendez-vous ! Et sans renforts ! Réponds !!

Je restais stoïque dans mon siège car je me doutais bien que Kakeshuou ne m'avait pas mise en condition juste pour le plaisir de me cajoler gentiment le dos. Mais une fois encore, le vieux hibou resta de marbre observant le paysage par la fenêtre tout en me sortant une phrase de ... Compliments ... Bon avec des reproches cachés quand même, mais beaucoup de compliments. Il y avait quelque chose qui clochait dans tout ça et je me doutais bien que quand la lame retomberait sur ma tête, ça serait pour me briser plus qu'autre chose. Je me tenais prête à la recevoir et lorsque l'homme de glace se retourna, la rage empreinte sur le visage, je baissais la tête et fermais les yeux écoutant alors uniquement ses hurlements à mon encontre.
Une bien belle déverrouillée si vous voulez mon avis et il me mettait mes erreurs en face du museau, mais il ne se doutait peut-être pas une seule seconde que j'avais déjà réfléchie aux conséquences de mes actes depuis longtemps. Je n'avais pas pris la décision d'aller voir ce nukenin sans savoir quelles répercussions cela aurait sur mon avenir si les choses tournaient mal ou autre.
Maintenant, c'était à mon tour d'être en colère, je me redressais sur ma chaise et je faisais face au doyen du palais sans afficher la moindre crainte dans le regard, un regard qui rappellerait sans aucun doute au vieux grigou celui qui connaissait bien, puisque c'était le même regard que Chifumi avait pour habitude de lancer lorsqu'elle était certaine d'une idée. Je dévisageais longuement l'homme en face de moi avant de lui répondre, un point d'ironie dans la voix :


"Vous me jugez trop par rapport à mon âge ! Je reconnais que j'ai certes agis avec beaucoup d'inconscience mais j'avais également calculé mon coup!"


Comment une enfant de treize ans pouvait-elle faire le poids face à un homme comme Kakeshuou ? Il me traiterait sans nul doute d'inconsciente, d'enfant gâtée pourrie, ce que j'étais, je savais le reconnaitre, mais j'avais également un grand sens des valeurs et j'avais beaucoup de réflexions :


"Qu'auraient fait les autorités selon vous ? Elles auraient débarqué en masse sur le lieu de rendez-vous comme c'était si souvent le cas à Mizu ? Vous savez comment agit notre armée et je ne suis pas d'accord avec ces agissements ! Ce qui intéressait cet homme, c'était moi et uniquement moi ! En me présentant seule ou presque, je savais qu'il se présenterait sans peur et que j'aurais plus de chance de le capturer !"


Mon regard se calma soudainement, retrouvant la candeur de l'enfant que j'étais :


"Vous pouvez me dire que j'ai mal agi, que j'ai pris des risques inutiles, que je me suis mis en porte à faux vis-à-vis du gouvernement, mais ce qui importe dans ce genre de cas, c'est avant toutes choses, le résultat ! Et le résultat, il est là, nous avons un déserteur en prison dans notre palais sous bonne garde, un criminel qui au vu des paroles que nous avons entendues n'hésitera pas à mettre à feu et à sang tout ce qu'il pourra ! J'ai déjà payé le prix de mon erreur un assez Grand Prix vu l'état de mon coéquipier, votre sermon m'a remis les idées en place ! Maintenant, si vous n'avez rien d'autre à ajouter, je vais me retirer ! Je suis fatiguée !"

~ Pauvre sotte … . Tu ne réalises vraiment rien de rien. Avec ton projet personnel et ta prétention sans borne, tu es incapable d’entendre raison … .

Ce n’était même plus de la colère dans les yeux du Gouverneur ; tout cela avait disparu, ou plutôt se trouvait loin derrière. Le mépris avait pris la place, et un certain dégoût se lisait clairement sur les traits forcés du quinquagénaire. Cette gamine n’était pas seulement inconsciente : c’était un danger ! Voilà ce qui arrive lorsque l’on est surprotégé et chouchouté toute sa vie d’enfant par une famille la coupant des réalités du monde. Ce qui en résultait ? Des actions sans en avoir reçu l’ordre, des contacts on ne peut plus soupçonneux avec un étranger, et tout cela pour quoi ? Que le résultat comptait ?! Cette phrase à elle seule aurait fait rire un public shinobi dans une pièce de théâtre comique. Parlons-en du résultat ! Un Nuke-nin capturé ? Très bien, j’applaudis ! – de manière sarcastique !! Et le coéquipier qui a été blessé, n’aurait-il pas préféré l’intervention de spécialistes de la traque pour ne pas se retrouver dans une pareille situation ?! Et lui, en tant qu’autorité suprême sur ce pays, n’avait-il pas son mot à dire sur la question ?!

En cet instant, Kakeshuou Samui n’aurait su dire ce qui lui sortait le plus par les yeux. Que cette gamine se justifie et estime avoir bien agi en fonction des résultats ? Ou qu’elle soit incapable de voir ses torts ? Si, dans le premier cas, on cherche à se justifier, c’est parce que l’on a conscience d’avoir fait une erreur et qu’il faut trouver un équilibre entre les torts et les bons côtés. Dans le second cas, c’était bien plus grave : la parole divine lui avait été insufflé et l’avait mené sur le droit chemin, peu importe les sacrifices et les problèmes qui avaient survenus. Et c’était ceux qui avaient une foi absolue en leur action « divine » qui finissaient les premiers au fonds de la fosse. Que ce soit de la main de l’ennemi, ou sous la corde de leurs alliés. Ceux qui ne doutent pas de leur bon droit finissent méprisés et rejetés. Le vieux Lion des Neiges en personne en faisait partie ! A la différence qu’il avait fait son devoir ; là où la logique lui aurait ordonné de sauver des compagnons, de se détourner d’une mission trop injuste, l’ordre et la discipline militaire l’avaient emporté, le poussant à mener toujours à bien sa mission. Elle, qui avait librement et sans consignes officielles, ne pouvait prétendre disposer d’excuses valables.

~ Tu ne réalises même pas dans quelle situation tu t’es mise. Nous avons maintenant un homme au sous-sol qui peut prétendre que votre rencontre était pour te détourner du village et que cela a juste mal tourné ! A partir de cela, un jury peut te juger coupable de trahison ! Et tu connais le sort des traitres du village ; il est le même que ceux qui désertent !

Le verre venait d’être frappé – pour ne pas dire fracasser – machinalement sur le comptoir, où notre homme se resservait un verre. Pour se calmer et reprendre le contrôle de la conversation, il lui faudrait du courage et une sacrée dose d’alcool. Il espérait que ce dernier argument avait bien fait emprise sur la fillette. Désormais, il aurait une lourde responsabilité sur lui en cette fin de journée : il devrait se rendre dans les geôles et négocier avec le captif. Malgré son manque total d’attache avec son propre Clan, le vétéran savait bien qu’il ne pouvait pas laisser un membre de son propre Clan mourir. Et pour cela, il fallait soudoyer les rares témoins présents lors de cette rencontre … ou les éliminer si nécessaire. Dans quelle galère notre homme se trouvait-il à cause de cette enfant incapable de comprendre le monde qui l’entoure.
Le liquide glisse et danse dans le ver. Il tournoie au rythme du poignet de son hôte, qui préfère se laisser un temps pour respirer. Puis le breuvage disparaît dans un gosier à la soif éternelle, avec sa dose de poison et d’enivrement létal. Puis le ver retombe lourdement sur ce même comptoir. Et reste là : son propriétaire le quitte, l’abandonne au vide de l’espace. Le Gouverneur ne peut se permettre de devenir ivre : il a une affaire importante à juger et à achever.

Retournant à son bureau, il s’affaissa dans son fauteuil et posa son regard mauvais sur sa victime. Une dernière attaque, peut-être, avant de donner son jugement sur cette affaire.

~ Tu me parles de résultat ? Je me demande si ton camarade partage le même avis … . Quant à notre armée, il y a des spécialistes pour la capture d’individus de cet acabit. En y allant seule, tu as décidé d’endosser un rôle qui n’était pas le tien, à mettre en danger la vie d’autrui et à négliger des personnes mieux qualifiées que toi. Tu es incapable de reconnaître tes erreurs, et c’est cela qui est impardonnable !! Tu n’es pas chef d’équipe ici ! Dans un combat, le chef d’équipe a la responsabilité de ses membres et peut se permettre de prendre des décisions lourdes de conséquences ! Tu n’étais pas à la tête de cette équipe, et tu n’avais donc pas cette autorité pour procéder comme tu l’entendais ! Ton immaturité et ton irresponsabilité ont conduit à une situation qui demandera beaucoup d’investissement et de temps pour retrouver un semblant d’équilibre !

Un bref moment de vide, histoire que les idées puissent pénétrer et germer dans le cervelet de cette gosse inconsciente. Temps que le quinquagénaire met à profit pour reprendre son calme et sa respiration. Sous l’effet de l’emportement, il s’était encore une fois redressé, les mains plaquées sur le bureau. Maintenant, il pouvait enfin s’asseoir et porter une décision finale à cette affaire. Les choses seraient complexes pour la suite des évènements : s’assurer des soins du Yusuke Katano, voir ce qui était en son pouvoir pour retourner l’élément « Nuke-Nin » à son avantage … . La journée était loin d’être finie.
Pourtant, cette rencontre familiale et hiérarchique devait prendre fin, et trouver un terme salvateur. S’il avait emmené Yuki au Pays de la Neige, c’était pour qu’elle devienne plus mature, plus équilibrée … plus femme ! Or, ce premier contact était des plus mauvais. Et pour chaque père, lorsque l’enfant commet une bêtise, il est de son devoir de le punir pour que ce dernier apprenne de son erreur et puisse continuer à aller de l’avant.

~ Tu dis que mon sermon t’a remis les idées en place, mais tu n’as fait que justifier tes décisions, et tu refuses de voir ton erreur. Tu n’as payé aucun prix … . Ton coéquipier l’a fait … . Tout comme le Village. Je ne peux pas te laisser errer, alors que tu brises un équilibre dirigé par un code martial et hiérarchique. D’autant plus si tu es incapable de comprendre tes fautes. Mon devoir est de protéger cet équilibre, et les membres du village ninja de Kiri ! Par conséquent, dès qu’il sera soigné, Yusuke Katano devra repartir pour Kiri, où tu ne pourras pas l’atteindre et le mettre davantage dans un bourbier que tu ne maîtrises pas … .

Se saisissant d’un nouveau rapport, qu’il parcourrait brièvement avant d’aller dans les geôles … .

~ Tu peux disposer. Vas donc te « reposer » … .

Une bonne remise en question comme on les aime. Je ne voyais vraiment pas comment la situation aurait pu tourner autrement et alors que j'attendais l'accord de mon supérieur pour pouvoir quitter les lieux et aller si possible me coucher, une nouvelle couche apparut sur le pain frais. Le vieux Samui prit alors tout son temps et tout son talent pour l'étaler tout en profondeur alors que pour une fois, je prêtais une oreille des plus attentives au sermon. Il avait raison sur toute la ligne et j'en étais consciente. Le fait qu'il le redise n'était pour moi qu'un rappel des faits, une accentuation sur ces derniers. Je baissais alors pour la première fois les yeux coupables lorsque l'état de Yusuke revint une nouvelle fois sur le plateau. C'était la seule chose qui me faisait me sentir coupable et j'avais l'impression que le vieux lion, l'avait bien compris. Mais, quelque chose me gênait dans tout cela. Il y prenait un malin plaisir, j'avais l'impression ? Essayait-il de me pousser dans mes derniers retranchements jusqu'à ce que je fonde en larmes ? C'était bien évidement le cas ! Allait-il y parvenir ? Je priais pour que ça ne soit pas le cas. Pourtant, sa dernière attaque, la pire, me fis craquer. Mes doigts se convulsèrent sur les accoudoirs du fauteuil où je me trouvais et alors qu'il me demandait de quitter la pièce, je secouais cette fois-ci négativement la tête en demandant :


"Vous ne pouvez pas renvoyez Yusuke à Kiri ! Pas dans l'état où il est ..."


Une larme perlait déjà au coin de mon œil et je l'effaçais rapidement d'un revers de la main tout en reniflant bruyamment. Il avait finalement gagné en évoquant la seule chose qui pouvait me faire plier. Finalement, je lui avouais ce qui s'était réellement passé :


"Cet homme dans votre sous-sol voulait effectivement me détourner du village ... C'était visiblement son but."


Je levais alors des yeux brillants de larmes vers mon supérieur :


"Il souhaitait que je l'aide afin de porter une attaque décisive à Kumokagure no sato ! J'ai refusé ... Yusuke pourra le confirmer ..."


Mes lèvres tremblaient alors que j'avouais la suite :


"Je suis désolée d'avoir fait cela mais je ne voulais pas le laisser s'échapper une seconde fois comme il l'avait déjà fait à Mizu no kuni à cause de mon erreur ... Cet homme est dangereux Kakeshuou Sama ! Il ne faut pas le laisser sortir ... Il pourrait s'en prendre à Kiri ..."


Ma voix devint presque un murmure sur cette dernière phrase. Alors que j'ajoutais timidement :


"Je n'ai jamais voulu faire quoi que ce soit contre notre village ... C'est pour ça que j'ai préférais demander à Yusuke de m'accompagner ..."

Enfin un signer de faiblesse sur le visage de cette prépubère ! Ce n’était pas trop tôt ! Si son tuteur temporaire avait été aussi cinglant, c’était bien pour lui faire comprendre l’énormité de ses erreurs. Erreurs que les Samui ne pourraient plus se permettre à l’avenir d’endosser. Trop de rumeurs courraient sur ce Clan qui avait osé tenir tête et s’était imposé sur la scène politique. Trop peu de ces mêmes rumeurs les mettaient en valeur. Faire le moins d’écarts possibles était aujourd’hui impératif. Car malgré la puissance et la grandeur de ce Clan, malgré l’influence politique dont il bénéficiait dans le Conseil Clanique et par ce poste de Gouverneur de l’île de Yuki no Kuni, rien ne garantissait que ce Clan soit à l’abri bien longtemps … .

Enfin cette morveuse se confondait en excuse ! Heureusement ! Après tout, ce n’était pas une tartine de Nutella que venait de lui donner son supérieur, mais bien une couche pleine de reproches. Et si les grades peuvent avoir leur poids sur le champ de bataille, il n’en est rien sur le plan de la gouvernance. Cette enfant devait le respect à son aînée, peu importe ce qui les séparait. La larme qui apparut sur ce visage blanc était presque de trop. Qu’est ce qui pouvait bien rendre notre jeune Yuki si inquiète ? La sanction à l’encontre d’une autre personne innocente ? Ou qu’il s’agisse de cette personne en particulier ? Suspicions, doutes … . S’il le faut, avec le pouvoir qu’il avait à sa disposition, il mettrait un Shinobi de Kiri sur cette enquête. Elle aurait un petit ami dans les parages, qui aurait profité de cette excursion à Yuki no Kuni pour s’inviter ? Pas question de transformer des lieux en lupanar ! Quelque chose laissait entendre qu’il y aurait bientôt des mesures supplémentaires à prendre ! Chifumi ne l’avait pas averti de l’arrivée de cet homme ! Il pourrait être un prétendant, ou un espion, qui sait !? Il est en piteux état ? Parfait, pour un interrogatoire. C’était le moment idéal pour lui porter la Question et comprendre tout ce qui se tramait ici … .

Mais non, notre homme n’était pas ainsi. En fait, si, complètement même ! mais il ne le ferait pas. Il avait bien d’autres chats à fouetter, même si ce chat-là serait fouetté un peu plus tard … . La leçon n’était pas fini, et il fallait bien qu’il en soit ainsi. Restant pensif, ses yeux glacés rivés sur la malheureuse qui se défendait avec les maigres arguments qu’elle avait sous la main, Kakeshuou Samui avait placé un poing fermé, comme pour tenir sa tête, et le coude posé contre le bureau, positionné de profil. Il avait beaucoup patienté pour avoir ces précieuses informations ; et avait même dû faire usage de pression. Qui s’avéraient moins inutiles que ce qu’il imaginait, d’ailleurs ! Elle avait beaucoup d’intérêt pour ce jeune homme : quelque chose à ne pas oublier à l’avenir. La gamine avait déjà fait des siennes, et il était hors de question que notre quinquagénaire se fasse marcher sur les pieds tant que reposait sur lui cette responsabilité.
La dernière nouvelle était des plus stupéfiantes ! Cet homme voulait la recruter ? Soit, cela, on pouvait s’y attendre. Un inconnu lambda n’aurait jamais fait un tel trajet pour cueillir des fraises dans le Pays de la Neige. Il voulait abattre le village de Kumogakure ?! Voilà qui était des plus surprenants ! Et le fait qu’il aille jusqu’à recruter des Ninjas venant d’ailleurs confirmait en tout cas que c’était un homme résolu, déterminé dans cette action ! Une rancœur particulière contre ce village ? Ce serait à voir pour la suite de l’histoire … . Il pouvait être dangereux pour Kiri ? Aucun doute ! Un homme pratiquant le recrutement au black et sans l’accord des autorités compétentes pour créer sa propre milice ne pouvait être doué d’aucune bonne intention ! Il était sujet à danger pour autrui comme pour lui-même et être le plus rapidement possible intercepté ! Une bonne chose finalement qu’il se trouve dans les geôles locales … .

Remettons les dernières pendules à l’heure. Les propos qui allaient suivre mettraient fin aux accusations et donneraient un jugement. Je te laisse du suspens, pas vrai, Yuki ? T’aimes pas, hein ? Bin m’en fiche ! C’est mon RP, mouahahaaa !!

~ J’eus aimé être informé de sa tentative de corruption le plus tôt possible ! C’est là quelque chose de très grave ! On ne peut laisser quelqu’un comme lui qui souillerait le nom du Clan et qui te ferait passer en cour martiale ! Je devrais donc statuer sur sa mise à mort ou non, afin d’étouffer cette affaire. Réalise donc que tes actes peuvent mener à la mort d’un homme, qui que cela puisse être.

Notre vieux personnage se redresse de son fauteuil et fait le tour de son bureau. Il s’assoit sur l’avant de son bureau pour être au plus proche de l’enfant. Cette proximité n’avait rien d’officiel. Il parlait cette fois-ci à un membre de sa famille, à un enfant dont il avait la charge et la garde. Peu importe le grade, encore une fois. Les anciens ont la responsabilité de la jeunesse ; et il tenait à le lui faire comprendre.

~ Malgré mon statut de Gouverneur, je reste un membre de ton Clan. De ta famille. Nous sommes parents et, malgré notre éloignement généalogique, je n’en reste pas moins un oncle pour toi. Comprends donc que lorsque je prends des décisions, je me dois de peser entre les intérêts du village et les tiens. Que le résultat te plaise ou non.

Se saisissant d’une liasse de papiers qu’il se devait de lire avant la fin de la journée, portant sur le poids de la pêche au thon dans l’économie locale et des intérêts de son exportation pour des profits à l’échelle provinciale – quelle barbe, je vous jure !! – Kakeshuou Samui se contenta d’une sentence légère, mais exemplaire. Sur laquelle il ne faudrait pas renâcler à l’avenir.

~ Je ne chasserai pas Yusuke Katano de ce territoire. D’autant que vous semblez bien vous entendre. Mais j’interdis formellement que tu t’impliques de nouveau dans une affaire aussi gravissime que celle-ci. Je t’interdis également de reprendre le moindre contact avec cet homme qui est désormais notre prisonnier … . Et j’aimerais également rencontrer plus longuement ce Yusuke … . Dis-le lui. Tu peux disposer, et aller te reposer, maintenant.

C’est parti pour un peu de lecture.
Il faut savoir faire preuve d’un peu de diplomatie et de délicatesse, surtout dans les affaires de famille. Mais n’oublions pas une chose : le vétéran de Kiri se bat avant tout pour son Clan et pour le village. Même si, parfois, certaines mesures paraissent plus difficiles à gober que d’autres. Maintenant, il avait une foultitude de choses à régler … . Ne restait plus qu’à tirer sur le fil qui lui rapporterait le plus de profits … .

Ainsi, il clotura l'entretien, non sans une dernière petite remontrance pour la route. On ne change définitivement pas un vilain petit canard et le vieillard évoqua alors la mise à mort du déserteur. Intérieurement, je ne pus m'empêcher de trembler en pensant que j'étais la cause de cela. Mais en y réfléchissant, la mort était peut-être mieux que des heures et des heures de souffrances en compagnie de la section interrogation du Misuto ? Oui, la mort était définitivement le mieux pour cet homme. Du moins, je parvenais petit à petit à m'en convaincre. Ainsi, il rejoindrait le dieu pour qui il accomplissait tous ses méfaits.
Mes doigts se refermèrent lourdement les uns sur les autres, la tête toujours baisser alors que je continuais d'écouter les sages paroles de mon oncle. Ce dernier avait pris soin de réduire la distance entre nous deux, se réinstallant, une fois n'est pas coutume, en face de moi sur le bureau. Je gardais les yeux fixés vers le sol en signe de soumission poli et j'attendais une fois de plus son verdict. Il ne souhaitait pas que je reprenne contact avec le prisonnier ? Soit, je le ferais alors, une fois que je l'aurais soigné, car c'est ce que je devais faire justement après cet entretien. J'allais désobéir encore une fois, la dernière à l'autorité de mon tuteur désigné en ce pays, mais je devais malgré tout respecté certaines de mes ambitions et celle-ci en faisait partie.
J'attendis la suite, il voulait voir Yusuke ... Soit, j'en informerai ce dernier. C'était peut-être une bonne idée en soit vue que Yusuke souhaitait également le rencontrer. J'approuvais alors d'un hochement de tête :


"Très bien Kakeshuou Sama ... Je lui dirais ... "


Puis, lorsqu'il me congédia, je me redressais timidement :


"Bonne soirée ..."


Un peu ironique, bien que profondément poli. La mienne n'était, en tout cas, pas encore finie. Je m'avançais alors vers la porte et franchissais cette dernière avant de me diriger vers ma chambre pour récupérer ma cape. Je devais voir le nukenin maintenant et une dernière fois surtout avant que Kakeshuou aille le rencontrer et lui annonce sa potentielle mise à mort. Devais-je alors lui parler de cela ? Je ne savais pas. Pour moi, l'objectif à présent était juste de le soulager des quelques douleurs qu'il avait.