J’étais dans le bureau. Le dernier ménage intégral laissait peu à peu place à… l’habitude chaos. Un montage de distillation laissait tomber une substance blanchâtre et opaque dans un erlenmeyer. Je levais les yeux de sur un rapport, des tâches d’encre marquaient mon poignet où je m’appuyais. Le temps d’une réflexion, je regardais les gouttes tomber lentement et le vacillement de la flamme. La grosse bombonne qui alimentait le brûleur semblait résonner doucement dans le vide métallique quand on y prêtait attention. Je déposais la plume dans l’encrier, en attendant qu’elle sèche. Je croisais les mains en me penchant vers l’arrière sur le dossier. Dans un petit réfrigérateur, il y avait quelques éprouvettes et une bouteille claire. Rien d’important, en fait.

On m’avertit rapidement qu’un visiteur attendait. Normalement, les gens cognaient et je criais « oui » ou « non », mais pas cette fois. J’ouvris la porte lentement, glissant presque ma tête dans l’entrebâillure pour voir le visiteur, comme si je l’espionnais. Il devrait certainement me voir. Je me contentais de le regarder, hocher la tête, puis ouvrir la porte en glissant dans la salle. Je portais ma veste sans manche verte foncé, une chemise blanche et une cravate qui s’enfonçait dedans. Je lui fis signe d’entrer et de me suivre. Je me contentais de me diriger vers le bureau et de regarder dans sa direction, penchant la tête de côté pour mieux examiner la personne. Je me mis à sourire largement.

- « Tu tiens un espèce de bureau, non ? Tu sais que tes collègues trouvent étrange que tu ne fasse interner personne ? »

Je passais rapidement la langue sur mes lèvres. Je fis quelques pas pour me pencher et enlever la pile de papiers, d’ouvrages et de documents sur la chaise devant le bureau. Je les laissais retomber sur le bureau, en essayant de m’organiser pour que la pile ne glisse pas. Je lui fis signe de s’assoir avant de faire le tour du bureau et de m’assoir à mon tour. Les rideaux horizontaux laissaient passer la lumière en faisceau. L’atmosphère était humide à cause des liquides qui chauffaient. Je me laissais retomber sur ma chaise en bois, toutes simples.

- « Personnellement, j’ai déjà pensé arrêté venir te voir, mais je pense que mon état de dérangé est plutôt établie. »

En disant cela, je grattais mon front, quelques secondes, avant de relever la tête dans sa direction et de sourire en coin. L’expression était plus hilare qu’elle ne le devrait à cause des cicatrices qui couvraient mon visage. J’attendis, quelques secondes de plus, dans le silence, en attendant qu’il parle.