Voilà maintenant presque deux ans que je suis devenu un ninja du village caché de la feuille. Autant dire que comparé à mon âge, cela représentait une assez grande partie de ma petite vie. Mais bref, passons ce détail.

Quelques jours après mon arrivée à Konoha, je commençais à prendre mes marques, repérant certains lieux, importants ou non, et des potentiels jeux auxquels je pourrais jouer. Mais malheureusement, je n’avais pas d’ami. C’était triste, je passais mes journées tout seul. Pourtant, il y en avait des enfants de mon âge, mais je n’arrivais pas à me faire accepter. La seule personne qui était là pour moi, c’était mon doudou, mon éternel ami, qui ne me laissera jamais tomber. Il n’était pas comme ça lui, et avait juré de rester à mes côtés pour l’éternité. J’en avais fait de même. Jamais je ne faisais quelque chose sans lui, et restait principalement dans mes bras, à longueur de journée. Mon petit zombie avait, lui aussi, le droit de découvrir le village.

Ce jour-là, je m’ennuyais. J’avais pu me trouver un petit coin sympa, où je pouvais passer mes nuits. Il y avait mieux comme confort, mais cela me suffisait. Etant orphelin, je me suis toujours débrouillé par mes propres moyens, et ce n’était malheureusement pas prêt de changer de si tôt. Je peux vous le garantir. De là, je pouvais voir deux enfants qui jouaient au ballon ensemble, j’aurais bien voulu aller les rejoindre, mais je me faisais toujours rejeter, pour une raison que j’ignore. Il fallait que je me fasse remarquer, par n’importe quel moyen. Et le plus efficace était certainement de faire le pitre, comme je sais si bien le faire. Des petites farces à faire, qui ne sont pas toujours appréciées au passage. Mais ça passait mieux avec les enfants.

Je me déplaçais dans le village, jusqu’à que je le vis. Un arbre assez grand, que je pouvais escalader sans problème. Mais ce n’était pas la hauteur de celui-ci qui m’attirait. Non, c’était ce qu’il contenait. Dans cet arbre, qui était un pommier, il y avait un bon nombre de pommes bien rouges, qui avaient l’air très bonnes. En les voyant, mon sourire s’élargit. Je pris mon doudou entre mes dents, avant de commencer à grimper sur le pommier. J’avais tout d’un petit singe, et grimper aux arbres s’avérait très simple pour moi. Beaucoup trop simple. En seulement quelques secondes, je me retrouvais au sommet de celui-ci. Bien. Au travers des feuillages, je discernais assez bien ce qui se passait en bas. Parfait.

Le but du jeu était très simple. Il fallait que je coupe les tiges des pommes avec un shuriken, pour les faire tomber sur quelqu’un. Si je touchais une personne, je gagnais un point, et si je me ratais, c’est mon doudou qui en gagnait un. Haha, j’étais prêt à gagner, parce que je ne perds jamais ! Jamais, vous m’entendez ? Oh tiens, mais que voilà. Quelqu’un approcha de l’arbre, j’étais aux anges. Seulement, il ne passa en dessous d’aucune pomme. Le tricheur.

- Grr…

N’étant pas doté d’une grande patience, je commençais déjà à m’énerver. Déjà trois personnes étaient passées à côté de l’arbre, sans ne passer sous aucune pomme. Ils veulent me faire rager, mais je ne céderai pas, jamais. Et ma « patience » aller porter ses fruits. Ou plutôt ses pommes. Ouais, je suis un expert en jeux de mots vaseux, je le sais. Un homme approchait, et d’après la direction qu’il prenait, il allait passer pile poil en dessous de l’une de mes munitions. Seulement, il fallait que je rampe sur une branche plutôt étroite pour l’atteindre. Facile. C’est ce que je fis, avant d’arriver au dessus du fruit en question. Je chuchotai.

- Trois, deux, un… Bye bye.

Mon shuriken trancha alors la tige de la pomme, qui tombait maintenant droit sur l’inconnu. Cependant, je m’étais un peu trop penché pour faire ça, et j’étais totalement déséquilibré. Mon shuriken tomba lui aussi, mais pas sur l’inconnu heureusement. Et puis moi aussi. Sauf qu’en tombant, je réussis à m’agripper à la branche sur laquelle j’étais avec mes deux mains, et j’étais parvenu à réceptionner mon doudou avec mes pieds. Je n’avais pas l’air con comme ça…

- À L’AIDE JE VAIS TOMBER !

Raki s'ennuyait beaucoup ce jour-là. Ce n'était pas quelque chose d'évident de paraître invisible pour la majorité des gens. D'un côté, il pensait qu'il valait mieux ne pas être reconnu, plutôt qu'être reconnu pour une mauvaise raison. Beaucoup de gens se distinguaient par des caractéristiques trop inutiles à ses yeux. La beauté ne durait pas. L'intelligence se remplaçait. On ne remplacerait jamais quelqu'un qui ne servait à rien. Cela faisait donc de lui un irremplaçable idiot.

Enfin, le jeune homme n'était pas stupide. Il savait beaucoup de choses, et il était très curieux. Il n'avait juste pas envie de passer son temps à apprendre des choses inutiles. Bien entendu, la majorité des choses lui paraissaient inutile. Cela faisait longtemps maintenant qu'il habitait à Konoha, et s'était trouvé quelques petites marques personnelles. Des endroits bien à lui, où l'on venait rarement l'embêter. Ces endroits ne devaient pas être inconnus des autres personnes, pourtant Raki était pratiquement certains qu'ils n'avaient aucun intérêt aux yeux des autres. Ces lieux n'étaient spéciaux que parce qu'il les regardait avec sa vision si particulière.

Le Soleil brillait paisiblement, lui donnant l'envie d'une petite balade. Celle-là pourrait peut-être aboutir à une activité inutile néanmoins distrayante. Au point où il en était, chaque minute passée était une minute en moins à attendre le lendemain. D'un pas lent, traînant presque des pieds pour allonger le temps de cette petite balade, le ninja défila au milieu des rues, plus ou moins étroites.

Rien encore n'avait su suscité sa curiosité. Il regardait nonchalamment les alentours. Pas même un chien avec lequel jouer, ou même lui tirer les poils. Même si cette dernière idée était plutôt cruelle. Il préférait de loin envoyer un bâton au chien, et le voir courir et chercher. C'était bien plus amusant de cacher rapidement le jouet dans son dos. Ces animaux pouvaient vraiment être stupides, et cela les rendait terriblement attachant.

Ce fut justement au détour d'une petite ruelle qu'il vit une queue poilue disparaître. Se pouvait-il que ce fût là son salut ? Intrigué, le jeune homme se lança à la poursuite du chien, traversant à grande enjambée la ruelle pour trouver son futur compagnon de jeu.

La ruelle débouchait sur une place plutôt grande, et le chien se trouvait de l'autre côté. Un pommier donnait de magnifiques fruits au milieu, mais le jeune homme s'en moquait éperdument. Sa distraction était déjà toute trouvée. Pour jouer avec le chien, il lui fallait bien entendu un bâton. Ce fut tout naturellement qu'il se dirigea sous le pommier, afin de trouver une branche adéquate.

D'un pas mesuré, sans rien soupçonner, il passait son regard sur le sol, comme un radar, afin de trouver son bout de bois. Finalement, ce serait lui qui s'amuserait le plus avec et non le chien. Cela lui donnait l'étrange sentiment que les rôles étaient inversés. Toutefois, cela ne changeait pas grand chose : il devait absolument faire quelque chose avant de mourir d'ennui.

Avant même d'avoir trouvé de quoi s'amuser, quelque chose lui tomba sur la tête avec un bruit sourd. Sous le coup de la surprise, il 'était protégé la tête avec les mains, pensant que d'autres choses allaient tomber. Un peu recroquevillé, rien d'autre ne lui tomba dessus. A la place, il vit la pomme rouler. Ce n'était vraiment pa de chance de passer juste au moment où une stupide pomme décidait de tomber.

Se détendant un peu, il se pencha pour la ramasser, dans un craquement le fit sursauter. Juste à côté de lui, un shuriken venait de tomber. Par réflexe, il bondit de côté, alors qu'un gamin se retrouvait pendu à côté de lui.

« À L'AIDE, JE VAIS TOMBER ! »

Le cri du gamin l'irrita. Ce n'était pas possible, ce gamin n'avait pas osé lui jeter une pomme dessus ? De toute évidence, si. Dans cette grotesque position, son doudou entre les pieds, Raki trouvait cela bien mérité ! Après tout, son shuriken aurait pu le blesser. Bon, il n'en serait pas mort, mais tout de même, si on ne pouvait plus se balader tranquillement, il valait mieux rester enfermer !

Décidément, ce gamin méritait une petite leçon.

« Tu ne crois quand même pas que je vais t'aider ! »

Raki arracha le doudou des pieds du gamin. Aussitôt, il le lança dans une branche de l'autre côté de l'arbre, de sorte que le garnement ne le vît pas faire. Sans attendre très longtemps, Raki partit en courant plus ou moins vite, faisant semblant d'emporter le doudou avec lui. Le gamin aurait une chute un peu douloureuse et se lancerait probablement à sa poursuite sans se douter que son doudou ne viendrait pas avec eux. Et finalement, il passerait la soirée à refaire le chemin de a poursuite avec Raki pour retrouver le doudou, que le voleur aurait pu lancer n'importe où.

C'en était tellement démoniaque qu'il en rigolait tout seul. Enfin un truc intéressant et amusant à faire !

« Je te le rendrai pas ! »

Je commençais à avoir mal aux bras, c’était très insupportable comme situation. En plus, ça me paraissait très haut, si je lâchai j’allais mourir, c’était sûr. Il fallait que ce gentil monsieur ait la gentillesse de m’aider à descendre, sinon il aurait une mort sur la conscience. Il ne pouvait pas me laisser là, ce ne serait pas humain. Il était proche de moi, il allait me prendre dans ses bras et me faire redescendre, j’en étais sûr. Sauf que…

« Tu ne crois quand même pas que je vais t'aider ! »

Ce n’était pas son intention… ? Et tout à coup, il me prit mon doudou que mes pieds retenaient désespérément. Je tentais de donner des coups de pieds, mais il s’était déjà éloigné, alors que je lui aurais bien cassé un nez ou encore quelques dents. Il allait me le payer… En ce monde, rien n’était plus important que mon doudou, puisque j’étais persuadé qu’il contenait les âmes de mes défunts parents. C’en était une certitude, il ne me restait plus qu’à le prouver de manière scientifique, mais je m’y opposai catégoriquement. Mais ce n’est pas le sujet, mon doudou était en danger de mort si je n’allais pas le sauver au plus vite. Mais comment… ? Si je me lâchais, j’allais mourir écrasé comme une crêpe sur le sol.

- VOUS ALLEZ PAS VOUS EN TIRER COMME CA ! J’VAIS VOUS FAIRE LA PEAU !

Je m’agitai tout seul, accroché à ma branche. Je me débattais, mais sans savoir de quoi, ni pourquoi. Les nerfs qui lâchent. Et la branche sur laquelle j’étais n’avait pas spécialement aimé ça. Un craquement se fit entendre, je m’arrêtai net. Je voyais l’homme partir en courant, et mon œil améthyste se tourna ensuite vers l’origine du bruit. La branche venait de se fissurer, puis céda. Je fis une belle chute, tout en criant comme à mon habitude avant de m’écraser au sol.

- A… A… Aie… Snif… Je vais l’tuer… Tuer… Mort… Mort…

Après faire tomber des pommes, j’ai manqué de tomber dans les pommes… Haha. Bon décidément je ne suis pas drôle, et ce n’est vraiment pas le moment. Bien que péniblement, et en souffrant de cette belle chute, je me relevai, et je partis à sa poursuite, la branche d’arbre dans la main et en larmes. Je me voyais déjà en train de l’empaler avec tout en savourant ma victoire. Mais le plus important était de retrouver mon doudou que je venais de perdre. C’était la première fois que je me séparais de lui, alors autant dire que je n’allais vraiment pas bien. Si j’avais fait un peu plus attention, il serait toujours à mes côtés… Non, ce n’est pas vrai. C’est pas ma faute, ce n’est jamais ma faute ! C’est la sienne, et il allait payer cet affront ! C’est moi qui vous le dis.

À toute vitesse, je le pourchassai. Je l’avais en plus entendu dire qu’il ne me le rendrait pas, chose qui m’énerva d’autant plus. Il aurait pu me prendre une chaussure, un parchemin, de l’argent… Mais non, il a fallu qu’il prenne mon doudou. Il était toujours dans mon champ de vision, et je le suivais, donnant tout ce que j’avais pour le rattraper, bien que j’en souffrais terriblement. Dans ma tête, je réfléchissais à comment le faire arrêter. J’hésitais entre prendre en otage un autre enfant et menacer de le décapiter, lui envoyer des explosifs dessus, ou lui tendre un piège. Décapitation… J’aime bien, mais non. Il n’a pas de cœur ça marchera pas. Les explosifs en plein dans le village bof… Un piège. Mouais, je n’avais pas vraiment l’occasion de l’avoir là, et puis je ne connaissais pas encore assez le village, lui ne se fera pas avoir.

Puis une petite idée. Dans ma course, je frappai le sol avec ma grosse branche, qui se coupa en deux plus petits morceaux. Ah, c’est plus pratique maintenant. Prenant un morceau dans ma main droite, je lui balançais droit dessus. Il était plus loin devant moi, et je savais encore viser en ligne droite, malgré les larmes. Le morceau de bois allait donc droit vers lui, à toute vitesse, en tournant sur lui-même, alors que je gueulais.

- Tuer… J’VAIS TE TUER !

Généralement quand je tutoie quelqu’un de son âge, c’est très mauvais. Surtout quand je pète un câble comme ça.

Raki courait avec sa pomme, les bras recroquevillé sur sa poitrine pour faire semblant de tenir le fameux trophée qu'il venait d'abandonner. Cette supercherie, bien qu'infantile, semblait porter ses fruits. Enfin, il la considérait comme stupide, pourtant n'importe qui dans ces conditions auraient réagit de la même façon. Il s'était débrouillé pour que la dernière vision du doudou fut celle de sa main. S'en débarrasser était simplement la chose la plus efficace à faire. Il agissait comme un appât finalement.

Courir un peu ne lui ferait aucun mal. Cependant, dans tout ce magnifique plan, Raki avait négligé un tout petit détail. Ce détail était pourtant la raison pour laquelle il faisait tout ceci. Ce truc immonde qu'il avait tenu quelques instants auparavant semblait avoir un grande valeur sentimentale. Un gamin de cet âge ne traînerait pas cette chose avec elle constamment si ce n'était pas le cas. Toutefois, cela semblait bien plus précieux que ce que le jeune homme avait bien pu soupçonner.

Après un bruit sourd montrant que le gamin s'était écrasé par terre, des menaces de morts commencèrent à monter dans son dos. En fait, cela avait même commencer avant, avec un grand hurlement, comme un animal à l'agonie.

« VOUS ALLEZ PAS VOUS EN TIRER COMME CA ! J’VAIS VOUS FAIRE LA PEAU ! »

Ayant encore toute son énergie, ce moment mis un peu de scrupule sur le dos du jeune homme. Après tout, il aurait pu trouver moins antipathique comme approche. Il aurait pu l'aider à descendre, le sermonner, juste s'amuser à le faire sauter pour attraper son lapin. Dans cette dernière possibilité, il y avait pourtant le risque de finir dans un sale état. Ce gamin attachait une importance capitale à ce doudou. Un peu coupable, Raki songea à arrêter son petit jeu et s'excuser. Même si en y pensant, ce n'était pas sa faute à lui.

Au moment où il tournait la tête, il vit le gamin courir derrière lui, hors-de-lui. Ce n'était qu'un amas informe de rage. Rien d'enfantin ne paraissait plus dans ses traits. Qu'est-ce que cela signifiait pour lui ? Raki admettait qu'il soit en colère, mais cette extrémité était simplement incompréhensible. Il agissait comme si on lui avait dérobé son plus précieux trésor, et que se vie reposait dessus. Dans geste brusque, le gamin brisa sa branche sur le sol, en deux plus petits bouts. D'un geste vif et précis, il lança celui dans sa main droite dans sa direction.

« Tuer… J’VAIS TE TUER ! »

Son envie de meurtre paraissait évidente maintenant. Il était sérieux. Le seul problème dans tout ceci, c'est que la rue n'était pas complètement déserte. S'il voulait le tuer, ce n'était probablement pa la bonne solution. Mais pour blesser quelqu'un, c'était suffisant. D'un geste rapide, Raki se décala pour frapper le bâton et arrêter sa course. D'un côté, il réussit à le déstabiliser et la le faire tomber. Par contre, il s'égratigna l'avant-bras, son geste étant trop mal calculé. Sa maladresse lui jouait encore des tours.

Son idée de se retourner et d'arrêter cette petite plaisanterie ne serait pas aussi aisée qu'il ne l'avait pensé au premier abord. Ce gamin était un démon assoiffé de sang. Raki devait faire en sort qu'il se calme, et de préférence sans le frapper. Cette solution pouvait être tentante, mais le gamin venait de faire une belle chute. Rapidement, plusieurs solution se présentaient. La première était simplement de disparaître, l'avantage étant qu'il pouvait retourner prendre la peluche et le lui lancer en signe de paix. Par contre, disparaître signifiait le laisser seul quelques instants sans pouvoir contrôler ses mouvements. Pour l'instant, Raki le forçait à le suivre. S'il disparaissait, qui sait ce qu'un gamin hors de contrôle pouvait tenter de faire. Le ninja pouvait également tenter de le pousser à bout de force, seulement, cela voulait dire courir et éviter les bâtons et autres objets qui lui tomberaient sous la main un bon moment. Sa montée d'adrénaline le motiverait probablement longtemps. Pourtant, cela ne pouvait pas continuer. La seule solution simple qui restait était de le piéger. Dans son état, il ne devait certainement pas avoir tout ses moyens, et avec l'effet de surprise, Raki devait pouvoir bloquer ses mouvements. En le ficelant comme un saucisson, il pourrait le ramener à l'arbre paisiblement, et l'apaiser en lui redonnant son lapin.

Une seule question demeurait : comment pouvait-il tendre un piège alors qu'il n'avait que quelques secondes d'avances ? Cela jouerait forcément sur l'effet de surprise. Au détour d'une rue, Raki se tiendrait face à lui au lieu d'être plusieurs mètres en avance. Après, il fallait de quoi l'immobiliser. Son regard passa autour de lui, jusqu'à ce qu'il remarque les draps flottants dans le vent. Par cette belle journée, les linges séchaient paisiblement au Soleil. Une ombre passa dans son regard. Ce n'était pas très bien de prendre des choses sans demander, toutefois, c'était une urgence. Il ramènerait ce qu'il avait pris après.

Rapidement, il s'engouffra dans une petite ruelle quand il remarqua que des linges y séchaient. Il n'avait que quelques secondes pour en prendre un, se retourner, et se saisir de l'enfant. Lâchant sa pomme qui s'éclata sur le sol, il s'en saisit, et se retourna. C'était le moment décisif. Il devait réussir à attraper le gamin pour le ramener à l'arbre. Il lui ferait ses excuses plus tard. Et seulement si ce dernier s'excusait d'abord. Sinon, il le laisserait peut-être pendu un peu plus longtemps dans son arbre.

Spoiler:

Je venais de lancer mon bâton, dans l’espoir de lui faire mal avec. Tout en sachant que ce n’était qu’un début, et que j’étais capable de bien pire que ça. Oh que oui, je ne peux le laisser s’échapper avec mon doudou. Mon petit zombie était entre les mains d’un inconnu, et je détestais ça. Cela me mettait hors de moi, comme vous avec pu le voir. De mon œil améthyste, je regardais la réaction du vilain monsieur, qui avait réussi à dévier mon bâton sans qu’il se le prenne. Grr… Non, ça n’allait pas se passer comme ça, il fallait qu’il souffre autant que moi, physiquement et mentalement. Et pour ça, j’allais me donner à fond. En plus, je trouvais ça lâche, ou sadique, de partir en courant de la sorte, tout en sachant qu’après ma chute je m’étais blessé. Mes genoux et mon dos me faisaient souffrir, et j’avais un bon nombre d’égratignures. Ce n’était pas joli à voir, c’est moi qui vous le dis.

Le village ne me connaissait pas encore, et la population devait être surprise de cette scène. Si cela se repasse aujourd’hui, ils n’y feront même plus attention. Mais moi, ce qui m’importait, c’était de sauver mon petit zombie en peluche. J’avais vraiment peur de ce qu’ii pouvait lui faire. Dans ma tête, je m’imaginais un tas de choses monstrueusement monstrueuses. De toute manière, s’il n’avait ne serait-ce qu’une petite déchirure ou autre problème, je ferai véritablement un meurtre. Et je ne rigole pas avec ça, c’était mon seul véritable ami, la personne qui m’a suivi pendant ces neuf ans où j’étais livré à moi-même… Pas question de l’abandonner ici.

Je le coursai donc, bien que péniblement, au travers de la ville. Il fallait que je l’attrape au plus vite, avant que mes nerfs lâchent pour de bon. Il ne faut pas croire, mais je suis encore un petit peu conscient de ce que je fais, de ce qui m’entoure, bien qu’intérieurement, je bouillonnais. Je ne le perdis en aucun cas de vue, durant toute cette course poursuite. Et puis tout à coup, il tourna à gauche. Ca avait l’air d’être une ruelle. Il essayait de me semer en empruntant des ruelles et tout ça ? Je ne me laisserais pas avoir, s’il le faut je le retrouverai au flair, comme un chien, sauf que ce n’est pas un os que je vais flairer, mais bien les siens.

Tout comme lui, je pris à gauche pour entrer dans cette ruelle, sauf que je le vis, arrêté avec un drap blanc entre les mains. Quoi ? Il comptait m’attraper avec ça ? C’était trop tard pour que je fasse quelque chose. Le drap m’enveloppa, bien que je me débattais de toutes mes forces, mais rien à faire. Mon œil améthyste le fixa ensuite, d’un regard plein de rage.

- Hngh… Lâche-moi tout de suite tu m’entends !

Je donnais des coups dans les draps, mais rien à y faire, il m’avait eu. Je ne pouvais plus bouger. Les larmes me montèrent, et je ne pus me retenir de fondre en larmes. Ah bah oui, il fallait s’y attendre.

- Rendez-moi… Ren… Dez… Rendez-moi-le…

Je sentais qu’il me déplaçait, grâce au drap dans lequel j’étais prisonnier. Tout le long, j’ai chouiné, pour qu’il me rende mon doudou, et qu’il me libère. Je lâchai des cris, me lamentai, et répétai incessamment cette phrase « Rendez-moi-le ». On pouvait se demander qui était le zombie dans l’histoire, à répéter sans cesse la même chose.

Et puis, je sentis que l’on s’était arrêté pour de bon. Je ne voyais pas grand-chose, comme mon œil était plus que larmoyant, et je ne pouvais pas me le frotter comme seule ma tête dépassait du drap. À coup de clignement, je me levai ces méchantes larmes, pour y voir un peu plus clair. On était retourné à l’arbre en question. Je le vois déjà venir, il voulait se venger à l’endroit où tout a commencé, histoire de le faire bien quoi. Vous voyez le genre ?

- Monsieur… Rendez-moi mon doudou s’il vous plait. Vengez-vous sur moi comme vous voulez mais rendez-le-moi… Pitié…

J’en pouvais plus, la séparation était trop dure.

Un voile blanc tourbillonna, enveloppant le jeune poursuivant. En quelques instants, il s'était retrouvé enveloppé dans le drap, serré, avec juste la tête qui dépassait. Il fallait au moins le laisser respirer, même si Raki avait de plus en plus envie de l'étrangler. Le gamin s'était débattu comme un lion, encore plus férocement vu sa situation. En essayant de restreindre ses mouvements le jeune homme s'était pris plusieurs coups de coudes, genoux, poings et pieds. Avec patience, il s'était retenu de ne pas lui mettre un énorme coup de tête pour l’assommer.

Heureusement pour lui, personne n'avait de vue sur la ruelle pour l'instant. Cela n changerait rien aux regards consternés quand ils emmèneraient un gamin piégé dans un drap blanc sur son dos. Enfin, Raki n'avait pas trop le choix maintenant, sa malchance l'avait amené à un enfant vraiment turbulent.

Les coups reçus allaient lui faire des jolis marques de toutes les couleurs ! Violettes, jaunes, bleues, ce serait un arc-en-ciel douloureux d'hématomes.

« Hngh… Lâche-moi tout de suite tu m’entends ! »

Raki l'ignora, il n'était plus vraiment d'humeur après avoir reçu des coups et s'être égratigné l'avant-bras. Il sentait le picotement de l'air sur son bras, et cela l'irritait. Il n'avait pas prévu de passer sa journée de cette manière. Pour l'empêcher de se débattre, et de lui faire mal, Raki le serrait contre lui avec le drap, jusqu'à ce que ses forces se perdent à lutter sans élan. Alors que le gamin perdait peu à peu son énergie et que les coups perdaient de leurs puissances, il fondit en larmes. Décidément, ce gamin était un fauteur de trouble.

« Rendez-moi… Ren… Dez… Rendez-moi-le… »

Il n'arrivait même plus à parler correctement, ses phrases s'entrecoupaient de hoquets nerveux et de reniflements. Comment en étaient-ils arrivés là ? Juste pour une peluche, Raki trouvait cela vraiment exagéré. Enfin, dans tous les cas, cela ne changerait rien au fait qu'il ne devait pas le libérer avant d'avoir atteint l'arbre. Sinon, qui pourrait prédire la scène qu'il ferait encore sans son affreux doudou.

Le lançant sur son dos et en tenant le tout avec sa main droite, Raki craignit que le drap ne se déchira. Fort heureusement, il semblait être plutôt solide, et tînt bon. Marchant tranquillement jusqu'à l'arbre, le jeune homme décida d'ignorer les regards surpris des passants qui les dévisageaient comme deux singes dans un zoo. Le gamin ne cessait de couiner et de répéter la même phrase dans son dos, comme un zombi. On aurait dit qu'il avait perdu toute notion de la réalité. Raki ne comprenait pas vraiment pourquoi ce truc abominable avait autant d'importance, et à la limite, cela ne le concernait pas.

S'arrêtant prêt de l'arbre, Raki ne desserra pas l'étreinte qui contraignait le garçon à attendre sans rien pouvoir faire. Par chance, le petit zombi ne se trouvait pas bien haut. Il descendit le sac de larmes de son dos, tout en le gardant serré. Il fallait évité que la bête ne s'échappe sans son morceaux de viande. Sur la pointe des pieds, le shinobi attrapa une oreille et descendit le doudou. Franchement, toute cette agitation gâchait se distraction et sa journée.

« Monsieur… Rendez-moi mon doudou s’il vous plait. Vengez-vous sur moi comme vous voulez mais rendez-le-moi… Pitié… »

Le zombi dans la main, Raki se tourna vers le gamin. Le drap blanc était taché. Et zut, il y avait même un peu de sang dessus. Ce gamin s'était écrasé comme une crotte sur le sol, incapable de se réceptionner correctement. Mécontent, le jeune homme le relança nonchalamment sur son dos. D'un geste tout aussi dépourvu d'intérêt, il lui balança le doudou sur la tête, tout en le gardant dans sa main gauche. Certes, il pouvait le tenir avec ses dents, mais n'ayant pas confiance en cela, il préférait continuer à le garder en main plutôt que de devoir le ramasser par terre.

« Tiens, le voilà ton doudou. »

Avec un soupir, il reprit son chemin à travers quelques petites rues. Cela n'était pas très fatiguant, le gamin ne pesait pas bien lourd. La seule chose gênante, était les petites douleurs ponctuelles, certes peu intenses, mais qui rendait ses mouvements un peu moins fluides. Il avait une étrange envie de disséquer ce gamin et de lui arracher les yeux pour s'en faire une soupe. Il se demandait bien quel goût pouvait avoir la chair humaine. Il parlait un peu tout seul à voix base, exprimant ses désirs culinaires pour faire peur au gamin. Une petite vengeance doucement méritée.

Enfin ils arrivèrent à destination. Raki fit tourner sa clé dans la serrure et entra à l'intérieur avec le gamin toujours coincé dans son dos. Après avoir fermé la porte, il se dirigea au milieu de la pièce. Il posa son fardeau par terre, et releva le gamin par dessous les aisselles. Son regard le parcourut de haut en bas, puis il le retourna pour le voir de dos. Il faisait tout cela en silence. Après avoir bien observé son dîner, il lança d'un ton neutre.

« Allez, hop, déshabille-toi, je vais te faire ta fête. »

Sans attendre que le gamin ait fait quoi que ce soit, Raki se dirigea vers une pièce adjacente, tout en retirant son haut. Il laissait le gamin seul dans la grande pièce, avec une table au centre, un lit près de la fenêtre. Le tout était plutôt bien rangé. Enfin pour être plus exact, ce n'était pas dérangé car il touchait rarement à quelque chose. Ce qu'il touchait le plus était le frigo et la poubelle et son lit.

Raki resta quelques temps dans la salle de bain, prenant son temps pour laisser le petit craindre le pire. Il pouvait même tenter de s'enfuir par la fenêtre, mais vu qu'ils étaient au premier étage et qu'il ne savait visiblement pas se rattraper, c'était peu probable. Tranquillement, il se désinfecta la petite coupure faite, et se mit de la pommade là où il avait reçu des coups. Il valait mieux prendre quelques mesures pour que cela soit moins affreux à voir quelques heures plus tard. Quand il aurait finit avec lui, il s'occuperait du gamin si celui-ci ne s'était pas suicidé en sautant par la fenêtre. Il lui devait au moins ça.

Il me posa à terre, près de l’arbre. Je n’en revenais pas, il m’avait dupé : mon doudou se trouvait dans l’arbre dans lequel j’étais au début. Il m’avait bien eu encore une fois… Je m’étais tellement emporté que j’avais négligé un bon nombre de détails… Enfin, maintenant, il allait me le rendre et ça allait enfin se finir. Du moins, c’est ce que je croyais. Il me jeta le zombie sur la tête, tout en gardant une main dessus. Le contact avec mon doudou m’apaisa, bien qu’il venait de me remettre sur son dos comme un vulgaire sac poubelle. J’ignorais ce qu’il avait en tête, et ça ne me rassurait pas pour autant. Je craignais le pire. Il n’avait pas pris à la lettre ma proposition de se venger sur moi et de me rendre mon doudou, hein ? J’ai dit ça sans réfléchir, étant dépourvu de moyens. Oh non… Je ne voulais pas mourir si jeune.

- Héé lâchez-moi maintenant !

En chemin, il marmonnait quelque chose. Il parlait de bouffe. Ca m’avait l’air appétissant, jusqu’à que je comprenne que j’étais l’ingrédient principal de sa recette. Il comptait me manger alors… ? En plus, dans cette situation je ne pouvais rien faire. Comment j’allais me débrouiller pour me sortir de là… ? Si j’avais su qu’à Konoha ils étaient si susceptibles que ça, je serai allé voir ailleurs… Comme le village de Kiri par exemple, on pouvait se baigner dans la mer et tout. Y a des jours comme ça, où je regrette amèrement ce choix. Je commençais à trembler, je n’étais vraiment pas rassuré. Mais mon doudou était avec moi, et agissait comme un canalisateur de colère. Tout allait bien se passer.

Il me fit ensuite entrer dans une maison. Me posant au sol, il me souleva ensuite de nouveau, comme une vulgaire chose, et me dévisagea de haut en bas. Il devait contempler le gibier qu’il venait d’attraper ce vilain monsieur. J’aurais pu lui donner un violent coup de pied ou autre, mais je ne le fis pas. Il a déjà été blessé lorsque j’étais en colère, et je ne voulais pas lui faire de mal, bien que j’étais en danger… Il ne le méritait pas, alors que moi je méritais une petite punition…

« Allez, hop, déshabille-toi, je vais te faire ta fête. »

Là par contre, c’est abusé. Je n’y crois pas, je suis tombé sur ce style de pervers qui aiment bien les enfants. Là, j’étais encore moins rassuré, et j’aurais finalement dû lui décrocher un bon coup de pied dans le menton, pendant que j’en avais l’occasion. Il m’avait reposé un sol, s’étant en allé dans la salle d’à côté. Bon, voyons le côté positif des choses… J’ai pu me libérer de ce drap, et récupérer mon très cher doudou. Je le regardais dans ses yeux recousus, il était vraiment mignon. Mais avec toute cette agitation, je me devais de le rassurer un peu, et de lui chanter une petite berceuse. D’une voix ni trop forte, ni trop faible, je le berçais.

Deta deta tsuki ga,
marui marui manmarui,
bon no you na tsuki ga

Kakureta kumo ni,
kuroi kuroi makkuroi,
sumi no you na kumo ni.

Mata deta tsuki ga,
marui marui manmarui,
bon no you na tsuki ga.

L’homme, de la salle d’à côté, avait dû m’entendre chanter pour mon zombie, mais ce n’était pas ce qui m’intéressait. Être séparé de moi, a dû être dur pour lui aussi, et je me devais de le rassurer. Quoi de mieux qu’une petite berceuse, en attendant que l’homme fasse ce qu’il avait à faire… Mon œil améthyste se posa sur mon inséparable ami.

- Qu’est-ce que je dois faire à ton avis…

En le regardant, l’idée me vient d’elle-même, comme s’il m’avait transmis ses pensées. Je n’étais pas qu’un gamin normal après tout… Je n’en ai pas l’air mais je suis un ninja, et il a négligé ce détail. Avec moi, il ne faut pas se fier aux apparences. Si je ne pouvais ni m’enfuir, et que je ne voulais pas le blesser, il ne me restait plus qu’à me défendre, en le faisant revenir sur ses positions. Je posais une main sur un parchemin attaché à ma ceinture, et j’attendais. Il allait bien revenir un jour ou l’autre… À un moment, je vis la poignée s’abaisser, et je déroulai mon parchemin, faisant ainsi appel à un vrai zombie. Je détestais utiliser mes techniques ninjas dans un contexte quotidien, mais malheureusement je n’avais pas le choix si je voulais me défendre.

- Ecoutez-moi monsieur… Je ne vous veux aucun mal, le coup de la pomme, c’était juste une blague, et moi aussi je me suis bien blessé en tombant de cet arbre… On a eu notre dose tous les deux. Je m’excuse, je ne voulais pas que cette histoire prenne une telle ampleur…

Les larmes me remontèrent, ma voix se noua un peu.

- Si… Si vous approchez, je ferai exploser ce corps sur vous. Je ne veux pas vous blesser encore plus, mais je ne compte pas me laisser faire…

Voilà à quoi j’en étais réduit… Le menacer. Je n’aimais pas du tout cette méthode, mais bon. En plus, ce corps en explosant, libérerait une substance toxique. Il avait tout intérêt à ne pas m’approcher. En même temps, je m’étais excusé, ça ne lui suffisait pas à flatter son orgueil… ?

- Faisons la paix, s’il vous plait monsieur !

Spoiler:

Raki ricanait intérieurement. Il trouvait ça très drôle de laisser croire des choses totalement décalées par rapport à ce qui allait se passer. Après tout, le malentendu ne venait pas de son côté, c'était l'interprétation des gens qui créait un quiproquo. D'accord, il forçait peut-être un tout petit peu la situation, mais après tout, pourquoi pas ? Il ne faisait de mal à personne, et ne comptait pas en faire. Il prévoyait même de soigner le gamin qui était tombé de l'arbre.

Pendant quelques temps, il tata sa peau, localisant tous les coups qu'il avait pris pour immobiliser le stupide gamin. Maintenant qu'elles lui faisaient mal, le jeune homme se demandait s'il n'aurait pas mieux fait de courir. Certes un gamin avec des envies de meurtre lui courrait toujours après, mais il n'aurait pas mal. Enfin, si un responsable devait être désigné, ce devait être lui.

Son éraflure au bras était hideuse. Cela ne ressemblait même pas à une blessure de guerre, et il n'aimait pas mettre des vêtements à manches. Merde, cette journée ne se passait vraiment pas comme prévu. Il aurait du se contenter de faire des dessins quelque part. Oui, cela aurait été plus raisonnable.

Pendant qu'il s'amusait ainsi à désespérer du nombre d'hématomes qu'il allait avoir, il entendit une berceuse. Visiblement le gamin ne comptait pas fuir par la fenêtre, donc il allait bien falloir le soigner. C'était une belle chanson, au moins il ne la détruisait pas.

Enfin, il fallait bien se faire un peu pardonner de l'avoir malmené. Raki se releva donc, prit de la pommade, du désinfectant, et une boîte de pansement. Il y avait du sang sur le drap, donc il devait s'être écorché.

Les ciseaux dans la bouche, les produit dans sa main gauche, et son haut sur l'épaule, Raki tourna la poignée pour ouvrir la porte.

« Écoutez-moi monsieur… Je ne vous veux aucun mal, le coup de la pomme, c’était juste une blague, et moi aussi je me suis bien blessé en tombant de cet arbre… On a eu notre dose tous les deux. Je m’excuse, je ne voulais pas que cette histoire prenne une telle ampleur… »

Cette situation était surprenante. Raki ne s'attendait pas à se faire attaquer. Dans un même temps, il trouvait ça logique. Lorsque l'on accule un animal, il finit toujours par montrer les crocs. Peut-être que la plaisanterie allait un peu loin. Invoquer un zombi pour l'attaquer, c'était un peu extrême comme réaction.

« Si… Si vous approchez, je ferai exploser ce corps sur vous. Je ne veux pas vous blesser encore plus, mais je ne compte pas me laisser faire… »

Le gamin était au bord des larmes, à sa voix, on oyait qu'il n'était pas du tout rassuré et déterminé. Raki était presque certain qu'il ne risquait rien et que le gamin n'aurait pas la volonté pour lancer sa technique à temps. Si combat il y avait, ce serait lui qui l'emporterait à cause de l'hésitation. Enfin, même si cela s'avérait exact, ce dont le jeune homme ne pouvait pas être certain, il valait mieux calmer le jeu plutôt que de continuer.

« Faisons la paix, s’il-vous-plaît monsieur ! »

Sincèrement, le jeune homme n'avait rien à faire des menaces du gamin. Non pas qu'il sous-estimait ses capacités au combat, mais plutôt qu'il s'en contrefichait éperdument : on ne lui dicterait pas sa conduite chez lui.

Une fois la porte ouverte, il la referma derrière lui, comme s'il se trouvait seul dans la pièce. Reprenant les ciseaux de sa bouche, il fixa le garçon d'un regard plus intense. Montrant clairement ce qu'il avait en main pour faire les premiers soins, il reformula ce qu'il avait dit avant de partir de la pièce.

« Déshabille-toi gamin. »

Comme si de rien était, il s'avança vers la table et posa les affaires dessus, contournant le gamin et son zombi. En temps normal, cela l'aurait peut-être intéressé un tout petit peu, mais pas là. Ce zombi et cette technique ne voulait rien dire pour lui. Il préférait se contenter de faire ce qu'il avait à faire maintenant. Si cela continuait comme ça, il devrait déshabiller le gamin pour le soigner. En aucun cas il ne le laisserait partir avec des blessures par sa faute, ce n'était pas très responsable.

Avant de faire quoi que ce soit d'autre, et sans accorder aucun intérêt au gamin, Raki prit le drap en se mordant la lèvre. Il devrait le laver. Et bien entendu, le sang ne partirait pas si facilement. Cette journée devait être maudite, on lui avait peut-être jeté un sort pour être tombé sur un gamin pareil.

« Je crois qu'on est parti sur de mauvaises bases. Je m'appelle Raki, et toi gamin ? »

Tous mes membres tremblèrent, me faisant souffrir aux endroits les plus touchés. Il me suffisait d’un seul mudra pour faire exploser le cadavre. Pour nous protéger, je n’hésiterai pas à appuyer sur la gâchette. Enfin je pense… À cette période-là, je ne débutais qu’à peine dans l’art des ninjas, et je n’étais pas encore très habitué à tout ça… Mon regard se posa sur l’inconnu qui me voulait du mal… Ou pas en fait. Je remarquai, un peu tard, qu’il avait des produits dans sa main, ainsi qu’une paire de ciseau. Il avait également levé son haut, laissant apparaître quelques blessures, plutôt récentes. J’ai honte… En voyant ce qu’il avait dans ses mains, et ses blessures traitées, je compris bien vite que son intention était de me soigner de mes blessures. Je m’étais encore un peu emporté, mais il faut me comprendre ! En chemin, il convoitait de me manger, puis dit qu’il va me faire ma fête… J’ai eu vraiment peur sur ce coup-là…

L’homme s’avança vers la table, en me demandant une nouvelle fois de me déshabiller. Mais ce coup-ci, je compris bien que son intention était de me soigner de mes blessures. La tension retomba d’un cran. Je me relevais, mon doudou entre mon torse et mon bras gauche. De ma main droite, je fis retourner le cadavre dans son parchemin. Il était le fruit de mon emportement. J’espérais tout de même qu’il n’allait pas m’attaquer une fois que je l’ai rappelé… Nan, je vais arrêter de penser comme ça. Je vais essayer de lui faire confiance, sinon on ne va jamais s’en sortir. Je prenais quelques risques.

- Désolé monsieur, je vais le faire…

Il avait l’air occupé avec le drap qui était tâché de sang, mon sang. Je détestais cette sensation de perdre du sang comme ça, ça me faisait mal au cœur… De mon côté, je m’exécutai, pour qu’il s’occupe de mes blessures. J’espérais qu’il s’y connaissait quand même, histoire qu’il n’empire pas mon cas. Mais je me devais de rester confiant, puisqu’il n’avait pas l’air de vouloir me laisser partir dans cet état, ce qui est compréhensible en soi.

Et puis, il prit la parole, affirmant qu’on était parti sur de mauvaises bases. Tu l’as dit, il y a mieux comme moyen de rencontrer une personne. Il se présenta ensuite, sous le nom de Raki. Enfin j’allais pouvoir placer un nom sur sa tête.

- Enchanté monsieur Raki, moi c’est Aku !

Je lui souriais, sûrement pour la première fois. J’étais prêt à ce qu’il s’occupe de mes blessures avec ces produits. Je m’étais assis sur la table, en les regardant. Y avait des sortes de pommades, et de ce qui s’appelle du désinfectant. Hmm… J’avais déjà entendu ce nom quelque part… Oh non !

- Ahh !! C’est le produit-qui-pique ! Vous n’allez pas me mettre ça quand même ?!

Même s’il comptait bel et bien l’utiliser, j’allais tenter de rester sage, et de ne pas faire de caprices… Ca allait être dur, mais il le fallait malheureusement pour guérir.

« Désolé monsieur, je vais le faire… »

Enfin ! Quelque chose semblait aller normalement, cela devenait agaçant de se faire menacer toutes les cinq minutes. Ce gamin n'avait vraiment aucun sens de l'humour et de la retenue. Il prenait tout au premier degré. Bon, cela amusait au moins Raki, même si cela lui faisait mal aussi.

Le gamin se laissa donc faire, n'ayant visiblement rien contre le fait d'être soigné. Assis sur la table, il attendait patiemment que Raki soit prêt à traiter ses blessures.

« Enchanté monsieur Raki, moi c’est Aku ! »

La courtoisie commençait à s'installer un peu plus naturellement. Après ces premières impressions particulières, ils avaient peut-être besoin de se laisser un peu plus aller pour commencer à se calmer. Visiblement, après un grand effort de volonté, le gamin, nommé Aku, acceptait de lui faire confiance. Certes, cela n'était pas une confiance totale et absolue, mais c'était au moins un début. Un petit pas pour chacun d'eux. Enfin pas exactement. C'était une avancée pour l'invocateur de zombi, mais pas pour Raki. Il n'avait rien fait depuis le début, aucune marque de confiance ou de méfiance. Il se moquait éperdument de ce gamin.

Après ces présentations, assis sur les tables, Aku observait son médecin par défaut. Il regardait les différents produits présents, et sembla se perdre quelques instants dans ses pensées. Peut-être avait-il vu quelque chose qui qui le perturbait ? Raki suivit son regard, et en déduisit que le désinfectant le perturbait. Quelques instants, il se demanda ce que cela pouvait bien avoir éveillé comme pensées dans sa petite tête.

« Ahh !! C’est le produit-qui-pique ! Vous n’allez pas me mettre ça quand même ?! »

Raki se prit une sucette et la mit dans sa bouche. Il s'amusa quelques instants à faire rouler la sucette dans sa bouche, juste pour faire du bruit avec ses dents. Ce produit piquait un peu mais assez peu. Il passa un peu de temps à réfléchir ainsi. Visiblement, si le gamin pouvait éviter le désinfectant, il le ferait. Soit, il ne l'utiliserait pas.

Pendant qu'il réfléchissait, Raki commença à nettoyer avec de l'eau le sang du garçon. Il fallait vraiment être idiot pour se faire aussi mal en tombant d'un arbre. Enfin, lui-même n'avait aucune leçon à donner sur la maladresse. A la moins occasion, il cassait quelque chose ou trébuchait.
à mettre de la pommade dans le dos du garçon. Délicatement pour ne pas lui faire mal. Cela devait être un peu douloureux malgré toutes les précautions prises.

Bon, il lui fallait tout de même désinfecter les plaies, en évitant d'utiliser du désinfectant. Il avait le choix. Étrangement, il avait envie d'utiliser de l'alcool à 90°. Après tout, ce n'était plus du désinfectant comme il l'avait vu.

Fier de sa propre bêtise, Raki décida d'aller chercher de quoi torturer le gamin capricieux. Il partit quelques instants chercher de l'alcool dans sa trousse de secours. Ça ne piquerait pas beaucoup... Du moins, il l'espérait.

Revenant auprès du gamin, il imbiba un coton d'alcool.

« Bon, vu que tu veux pas de désinfectant, je vais utiliser ça. Ça va pas faire pas faire mal. »

Ce n'était pas un mensonge, il s'était simplement trompé de bouteille. Il avait pris du sel à la place. Il fallait juste espérer que les hurlements du gamin ne rameuterait pas tout le quartier. Étant une bonne âme, Raki décida d'utiliser le sel sur un genou, le considérant moins douloureux que dans le dos.

« Il ne faut pas être si capricieux, ce n'était que du désinfectant. »

Tout en lui faisant sa petite leçon à l'oral, il posa sur le genou le coton avec les cristaux de sel. Qu'il le veuille ou non, il n'aurait jamais la chance de se boucher les oreilles à temps. Au moins, il pourrait finir le tout avec du désinfectant sans que le gamin n'ose broncher.

Je le voyais réfléchir. Ainsi, il songeait à ne pas me mettre du produit-qui-pique sur mes blessures. Ca me soulageait d’entendre ça, avec un peu de chance il allait trouver quelque chose d’autre, de bien moins douloureux. Je ne sais pas quoi, ne m’y connaissant pas tellement dans tout ça. Il faudrait que j’étudie un jour ou l’autre tout ça, étant nécromancien ça pouvait me servir pour la conception de poisons, ou autre substance intéressante. Mais pour l’instant, ce n’était pas ma priorité, il fallait que l’inconnu, qui s’était pris une sucette au passage. J’en voulais une, mais c’était peut-être un peu trop demandé après ce que je lui ai fait… Après la farce, la rage, la pitié et la crainte, voici la culpabilité. C’est fou comme je peux être expressif par moment. Tout ça pour dire, que je ne lui demanderai pas de me passer une sucette.

Tout d’abord, il commençait à me nettoyer le sang que j’avais sur moi avec de l’eau. J’eus quelques frissons, avoir de l’eau sur le corps alors qu’on est dénudé, ça peut donner froid. Je tremblais un peu, mais je me contenais, pour ne pas rendre la tâche plus difficile à monsieur Raki. Ensuite, il prit de la pommade, pour m’en mettre dans le dos. Malgré quelques grimaces, ça c’est à peu près bien passé. Jusqu’à là, il n’y avait pas eu de problème. Tant mieux, je ne me sentais pas de souffrir davantage. Mais maintenant, il allait devoir s’occuper de mes plaies… J’avalai ma salive. Mon œil améthyste le regardait, d’un regard innocent.

- Vous allez utiliser le produit-qui-pique alors ?

La tension montait un peu, mais je restais calme. J’avais mon doudou pour me protéger maintenant au pire des cas. Je ne craignais absolument plus rien. Puis il me montra ensuite une bouteille, m’expliquant qu’il allait mettre ça à la place du produit-qui-pique, que les ignorants nomment désinfectant. Puis il me dit que je ne devais pas faire de caprices, que ce n’était que du désinfectant. Il ne connait pas la terrible puissance de ce produit ? Il n’y avait pas plus terrible que ça, c’est moi qui vous le dit, j’en sais quelque chose. En tout cas, j’étais rassuré, car ça n’allait pas faire mal.

- Bah en fait, un jour on m’a mis du produit-qui-pique, et alo…

Je m’arrêtai tout à coup. Monsieur Raki venait de poser son coton avec le produit de la bouteille sur mon genou. Je m’étais entièrement tétanisé de douleur, alors que ça aurait du ne pas me faire de mal. Je voulais crier, mais j’essayais de me contenir. Mais c’était trop dur, je tremblais de plus en plus, et un murmure s’échappait de ma bouche, de plus en plus fort. Il ne devait peut-être pas comprendre ce qui m’arrivait… Ou plutôt si. Tant il a fait exprès de mettre un produit-qui-pique de rang SSS !

- Mais... Ca… PIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIQUEUH !!!

Je retirais mon genou de dessous le coton, et m’éloignais du bord de la table. J’avais encore plus mal qu’avant, et j’étais définitivement terrorisé des produits désinfectants. J’vais devenir désinfectophobe, c’est obligé. Je n’avais jamais connu pareille douleur, vous voyez le genre quoi.

Je me tenais le genou entre mes deux mains, la tête rabattu dessus pour le protéger.

- Vous… Vous avez mis quoi sur votre coton… Ca fait horriblement mal… Snif…

Et voilà, c’est reparti pour un tour de larmes à gogo. Mais je ne pense pas que c’était dans son intention de me faire ça, enfin j’espère… Car j’ai réagis comme ça, mais j’aurais très bien pu l’attaquer également. Je respirais calmement, pour me calmer. Doucement, je levai mes mains et ma tête de mon genou. Je n’en pouvais plus de ces douleurs qui s’aggravaient de minutes en minutes.

- Monsieur Raki, faites quelque chose pour me guérir… Je… Je ne me sens plus très bien tout à coup…

Il est possible que ce ne soit que la douleur qui me donnait cette impression. Ou alors, cet étrange produit qu’il m’avait appliqué avait mal réagi. Ou bien, le fait d’avoir couru, de m’être excité, d’être trimballé comme un vulgaire sac poubelle, et tout ça dans cet état m’avait littéralement épuisé. D’un mouvement lent, je me rapprochais de l’extrémité de la table, pour ne pas lui compliquer la tâche. De là, je vis le produit qu’il avait utilisé pour traiter mon genou. D’après ce qu’il y avait de marqué, ce serait du… Du sel. Du sel. Du sel… Je ne me sentais même plus de m’énerver, mes batteries étaient à plat. Je voyais ça comme le coup de grâce de cette journée. Jetant un regard à mon genou, je voyais effectivement quelque chose qui pourrait être du sel, et je ne pouvais même pas toucher pour lever ça, au risque de relancer encore plus la douleur. Ce coup de grâce, aussi bien moral que physique, me fit laisser tomber sur le dos, sur cette table. Même si j’avais mal au dos, je n’y prêtais même plus attention.

Bien que j’étais encore conscient, j’étais à bout de force.

« Bah en fait, un jour on m’a mis du produit-qui-pique, et alo… »

Aku s'était arrêté au milieu de sa phrase. Le sel sur sa jambe semblait avoir tétanisé le gamin, visiblement, il ne s'était pas attendu à la sensation qu'il éprouvait. Cela le prenait tellement au dépourvu, qu'il n'avait même pas eu le réflexe de hurler. Il se montrait comme simple spectateur d'une horrible scène. Ce n'était pas des soins qu'on lui prodiguait, c'était de la torture gratuite.

Pendant quelques instants, il devînt un peu plus écarlate à chaque seconde, laissait un faible bruit sortir de sa bouche. On avait l'impression que ce cri venait de loin, et qu'il commençait simplement à réaliser que ça n'allait pas s'arrêter. Il tremblait, de manière compulsive, et c'est en le voyant dans cet état que Raki réagit.

« Oups. »

Il y était peut-être allé un peu fort. Enfin, ce qui était fait ne pouvait être changé. La résistance à la douleur du gamin était à sa limite. Décidément, c'était une petite nature pour dire qu'il voulait devenir ninja. Que se passerait-il quand il perdrait un membre, ou se ferait transpercer ? S'il n'y avait pas de médecin à proximité, il n'aurait pas d'autres choix que de désinfecter et amputer lui-même. Ou alors mourir. Mais ce serait lent et douloureux, ce n'était pas vraiment conseillé.

« Mais... Ca… PIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIQUEUH !!! »

Son beuglement perça les tympans de Raki. Il avait pensé que se boucher les oreilles serait inutile, mais il regrettait un peu de ne pas l'avoir fait. La voix stridente du gamin, à cause de sa douleur, partait bien trop dans les aigus. Aucun humain n'aurait pu produire un son pareil de son plein gré.

Après tout ce temps d'absence de réaction significative, Aku retira brusquement son genou de la portée du mauvais samaritain. Il s'éloigna vivement, d'autant que sa douleur le lui permettait. Tenant son genou entre ses mains, il le serrait comme pour atténuer la douleur, se balançant légèrement d'avant en arrière. Cela ne servait vraiment à rien. Les cristaux de sel était là, et chaque petit courant d'air devait raviver la douleur. C'était vraiment une bonne méthode de torture. Raki pensait bien la garder dans un coin de son esprit, si un jour il en avait besoin.

« Vous… Vous avez mis quoi sur votre coton… Ca fait horriblement mal… Snif… »

Sa tête au-dessus de son genou, comme pour le protéger de la main de Raki, il commençait à sangloter. Les larmes prirent très rapidement beaucoup d'importance, et il pleurait en abondance. Ce n'était pas vraiment une bonne idée de pleurer sur son genou actuellement, mais bon. Le gamin sembla mettre toutes ses forces et sa volonté pour combattre la douleur. Lentement, il relâcha l'étreinte qu'il mettait sur son genou, il touchait le fond.

« Monsieur Raki, faites quelque chose pour me guérir… Je… Je ne me sens plus très bien tout à coup… »

Raki fut un peu surpris. Le gamin avait pâli rapidement. Il s'en rendait malade. Après avoir utilisé ses dernières forces pour revenir au bord de la table, il fixa la bouteille remplie de sel. Dans ses yeux, le jeune homme put dire que le gamin comprenait parfaitement ce qui se passait, mais n'avait même plus la force de protester, insulter, menacer, ou même attaquer. Il perdit toute volonté, et se laissa tomber sur la table.

Raki l'attrapa derrière la nuque pour ne pas qu'il se cognât trop violemment la tête. Cette fois, il avait un peu exagéré. Une petit excès de zèle qu'il devait corriger. Pourquoi rien n'allait comme prévu aujourd'hui ? Chaque fois qu'il essayait un petit truc tout anodin, cela se transformait en cataclysme. Enfin, Raki le prit dans ses bras pour l'emmener jusqu'à l'évier. Avec l'eau qui coulait abondamment, il s'assura de chasser tout le sel qu'il avait mis malheureusement volontairement. Le gamin lui crierait probablement dessus lorsqu'il en aurait la force.

Non pas que cela lui importait, mais après avoir été menacé de morts plusieurs fois, Raki se montrait légèrement méfiant. Après avoir rincé le fichu sel, il reposa le gamin sur la table. Au moins, il ne protesterait plus contre le désinfectant, qui ne piquait même pas. Enfin, pas trop, mais comparé au sel, ce serait des vacances à la plage. Remarque, ce n'était pas très conseillé d'aller se baigner dans la mer avec ces blessures mais bon, il faisait bien ce qu'il voulait. Le gamin n'aurait même pas le force de protester dans tous les cas.

Raki poursuivit donc tranquillement l'étape désinfection. Il redressa la gamin pour s'occuper de son dos, et lui mit des jolis pansements. Tout en faisant rouler une nouvelle fois sa sucette dans sa bouche, Raki fit un dernier tour d'inspection, pour vérifier qu'il n'avait pas oublier une petite blessure. Même si c'était le cas, le gamin n'en mourrait pas, il voulait simplement avoir la conscience tranquille puisqu'il maltraitait le gamin depuis qu'une pomme lui était tombée sur la tête. Certes, chacun avait un peu abusé de l'autre, mais finalement, c'était lui le plus âgé. Il était supposé être mature et réagir correctement. Ou au moins mieux qu'Aku.

Prenant son temps, Raki rhabilla plus ou moins correctement le gamin. Faire passer les bras de quelqu'un dans ses manches pouvaient paraître assez facile comme ça, mais si l'autre n'y mettait pas du sien, c'était un cauchemar. Après l'avoir rhabillé, Il le coucha dans le lit, au moins ce serait plus confortable. Maintenant, la tâche la plus dure l'attendait. Il devait nettoyer le drap, et faire disparaître les tâches de sang.

Avec un soupir, oubliant qu'il en avait déjà une en bouche, Raki prit une deuxième sucette, s'amusant encore à les faire tourner avec sa langue. Ce serait long et laborieux... et tout ça à cause de ce fichu gamin. Il l'avait bien cherché après tout. D'un regard, le jeune homme fixa la bouteille remplie de sel, songeant à tout le plaisir qu'il pourrait retirer de torturer le gamin. Après tout, laver ce drap serait également une torture.

Prenant le bocal dans sa main gauche, il eût un geste assez malheureux. Elle lui glissa des doigts, et la moitié lui tomba sur la bras et la jambe. Il cassa les deux sucettes d'un seul coup de mâchoire. Le sel était tombée sur éraflure superficielle que le gamin lui avait faite avec son stupide bâton. Il confirmait. Ça piquait... un tout petit peu. Ce devait être le retour du bâton.

Se dépêchant, Raki se rua jusqu'à l'évier pour retirer le sel, avant que la douleur ne s'intensifiât. Rien n'allait ce jour-là. Il n'avait plus qu'à laver son drap, en espérant que rien d'autre ne se passerait.

Spoiler:

Drôle de sensation. J’étais littéralement épuisé, en plus de souffrir. Déjà que je voyais les petits bobos comme d’immenses plaies, et bien là j’étais plus que servi. Toutes mes forces avaient quitté mon corps, qui se laissa tomber sur la table de Raki. Il n’y a pas à dire, cette journée et cette rencontre assez mouvementée avait été rude pour moi. Je ne débutais qu’à peine dans l’art des ninjas, et il va falloir que je me prenne un peu plus en main pour devenir plus puissant, plus résistant, et plus endurant. C’était primordial pour continuer. Après, je ne dois pas oublié que je n’étais qu’un enfant de neuf ans, et que je n’avais pas forcément les mêmes capacités physiques que ce monsieur par exemple.

Avant que mon corps endolori heure la table, mon médecin du jour m’attrapa par la nuque, pour éviter que je me blesse davantage. Je ne savais toujours pas si le coup du sel était fait exprès ou non, mais à vrai dire je n’étais pas réellement en mesure d’y penser. Il continua ensuite de s’occuper de mes blessures, tout en nettoyant le sel sur mon genou avec de l’eau. La fatigue était telle, que je ne réagissais presque plus, c’est limite si je tournais de l’œil. Il m’avait même appliqué du produit-qui-pique sur mes blessures, sans que je m’en rende compte. En plus, j’ai même eu le droit à des pansements. Ca fait trop aventurier moi je trouve les pansements. Il s’occupa ainsi de moi, sans plus aucune gaffe ou problème, et je commençais légèrement à reprendre des couleurs, bien que l’épuisement soit là.

Une fois désinfecté, rhabillé, et tout ça, il me prit dans ses bras pour me déposer dans un lit. Histoire que je me repose un peu. Malgré le fait que cette journée ait mal commencé, cela s’améliorait au fil du temps finalement. Enfin. D’une voix faible, je lui adressai la parole.

- Merci monsieur Raki…

Même si c’était lui un peu de sa faute si j’étais dans cet état, il avait quand même pris soin de moi par la suite. Du coup, je ne pouvais plus lui en vouloir. En plus, j’avais un lit. Chose rare pour un orphelin comme moi, ça faisait un bien fou d’avoir un bon lit confortable. Cependant, ça n’allait être que provisoire. M’enfin, c’était déjà ça. Commençant à fermer mon œil droit, j’étais en passe de m’endormir, pour me reposer et récupérer ma vitalité habituelle. Inutile de dire que je détestais être dans un état comme celui-ci

Même si je voulais dormir, je n’arrivais pas à trouver le sommeil. Pourtant, j’aurais bien aimé dormir un peu, ça ne me ferait vraiment pas de mal. Mais bon, impossible de trouver le sommeil. Si seulement mon doudou aurait pu, à son tour, me chanter une berceuse, mais bon ça ne risque pas d’arriver. Je regardais un peu le plafond, puis la personne qui m’avait accueilli dans sa maison. L’homme s’était lui aussi mis du sel sur ses blessures, involontairement. Aurais-je trouvé quelqu’un d’aussi adroit que moi ? Ca m’en avait tout l’air. Mais contrairement à moi, il n’avait pas crié. Comment fait-il… Est-il humain ? Je n’en ai aucune idée. Ou alors, il s’était tout simplement retenu comme je me reposais. En tout cas, cela ne changeait rien au fait que je ne comprenais pas comment il avait réussi à ne pas crier en faisant cette gaffe. D’ailleurs, j’y pense.

- Dîtes. Tout à l’heure, quand j’ai fait appel à un cadavre pour me protéger, vous n’en avez pas eu peur, non ? Comment ça se fait ? Vous aussi vous êtes un ninja ?

Je le vis s’apprêter à nettoyer le drap qui était gorgé de mon sang à certains endroits. Ce pincement au cœur persistait à chaque fois que mon regard se portait dessus, je ne supportais pas de voir mon sang, preuve que j’étais blessé. Mais bon, j’étais en partie responsable de ça…

- Et si vous avez besoin d’aide pour le drap, vous me le dites, de toute façon je n’arrive pas à dormir…

Je voulais faire des efforts, proposer mon aide, comme lui l’avait fait. Même si je n’étais pas très en forme, je me sentais redevable, et je ne savais pas comment je pouvais m’acquitter de ma dette.

Ce sang allait lui poser des problèmes. Ce n'était vraiment pas pratique, il aurait du choisir un drap rouge, cela serait passé inaperçu.

Allongé, le petit semblait ne pas réussir à s'endormir. Raki se sentait observé, et ça le rendait d'autant plus maladroit. Ses gestes se saccadaient un peu, mais pas encore trop. Pendant quelques instants, il songea à droguer le gosse pour « ne plus sentir son regard oppressant ». Heureusement, il réussit à contenir cet ardent désir.

Depuis qu'il était arrivé au village, ce qui remontait à bien longtemps à son échelle, il ne se sentait pas totalement bien, ni libre d'être lui-même. Il y avait toujours ces regards qui lui faisaient bien comprendre qu'il n'agissait pas normalement. D'un côté, il essayait de se moquer de l'avis des autres, et d'agir « bizarrement » seulement quand il se trouvait seul. Mais même ici, il ne se sentait pas à l'aise, c'était tellement mieux, seul dans la forêt, ou sur un toit, ou au milieu de la nuit. Oui, la nuit lui semblait parfaite, après tout, les gens étaient soit aux bars, soit chez eux, et pas à le fixer dans la rue.

« Dîtes. Tout à l’heure, quand j’ai fait appel à un cadavre pour me protéger, vous n’en avez pas eu peur, non ? Comment ça se fait ? Vous aussi vous êtes un ninja ? »

Raki releva les yeux, fixa d'un regard brillant le gamin. Il se rappelait de ce moment, en sortant de la salle de bain, il se faisait attaquer et insulter. Enfin, c'était une habitude aujourd'hui de se prendre des coups et des mots. Il fit rouler dans sa bouche tous les morceaux de sucettes brisés. Un vestige de sa surprise quand il s'était allègrement renversé du sel sur sa blessure.

« Tu crois que parce que je t'ai ignoré je n'en ai pas eu peur ? J'vais te dire un petit truc gamin, quand on se fait attaquer, on est jamais très rassuré. La seule raison pour laquelle je n'ai manifesté aucune peur, c'est parce que je n'ai absolument aucun intérêt pour la nécromancie. Je trouve ça plus dégoûtant qu'effrayant. »

Dans une bassine d'eau tiède, muni d'une brosse, le jeune homme commençait à frotter avec force les marques de sang et de terre.

« Je ne suis pas vraiment un ninja, ça ne me plaît pas. C'est barbare et guerrier. Je ne suis intéressé que par le côté magique. Tant que quelque chose ne me paraît pas intéressant, je ne me battrais jamais sérieusement. Après, pour en découvrir plus, je dois porter un peu la casquette de ninja. Donc techniquement, je dois quand même en être un. Je préfère voir ça comme de la magie. Pourquoi tu veux être ninja, toi ? »

Plongé dans ses pensées, Raki retira ses mains de la bassine, se les sécha, puis mit une nouvelle sucette dans sa bouche. S'il continuait à ce rythme, il allait finir par se déshydrater. Enfin, laver ce drap n'était décidément pas très amusant.

« Et si vous avez besoin d’aide pour le drap, vous me le dites, de toute façon je n’arrive pas à dormir… »

Son regard doré passa rapidement sur le gamin. C'était certain que laver ce truc ne paraissait pas amusant, mais il pouvait y remédier facilement.

« Non, merci mais je préfère garder la partie amusante pour moi. Si t'as envie de bouger tu peux toujours partir. »

Raki posa la clé de la porte sur la table, au cas où le gamin voulait partir. Abandonnant quelques secondes sa bassine, le jeune ninja se dirigea vers un placard. Il ouvrit don les portes d'une remise dans laquelle se trouvait plusieurs solutions aux couleurs étranges. Même lui en s'amusait pas à retenir tous les mélanges contenus à l'intérieur. Il y avait des choses qu'il n'avait même encore jamais essayé comme produit. Il les trouvait un peu partout, et certains étaient des résultats amusant d'expériences passées. Il ne s'en souvenait pas, ce devait être noté quelque part dans un carnet.

Son objectif était simple, trouver quelque chose qui fasse disparaître le sang, soit en couvrant la tache par une couleur blanche, soit en la faisait disparaître. Cela lui importait peu. Il prit plusieurs poudre qu'il déposa sur la table. Il remplit également plusieurs vers d'eau, et prit des petites coupelles. Son objectif premier était de tenter de faire disparaître le sang.

Se mordant le pouce, il fit couler quelques gouttes de sang dans chaque coupelle. Ce serait là que commencerait la partie la plus intéressante. Après avoir entamé sa quatrième sucette, et continuant à faire tourner les bâtonnets, il se mit à dissoudre quelques poudres qu'il ne connaissait pas encore. Avec un peu de chance, ça lui exploserait au nez. Ou non, rectification faite, autant ce serait intéressant d'apprendre à faire des explosifs, autant se cramer les cheveux serait une mauvaise idée.

En mélangeant certains produit, il fit quelques choses amusantes, un colorant violet, une sorte de petit volcan, et surtout, il se fit éternuer une dizaine de fois avec une solution verdâtre. Visiblement, il y était allergique, ou cela faisait éternuer tout le monde.

Et enfin, comme il fallait s'y attendre, quelque chose lui explosa au nez quand il s'en approcha pour voir.

Donc, il ne s’était pas senti à l’aise avec ma réaction… Impulsive. Ca me mettait encore plus mal cette situation, mais maintenant que c’était fait, inutile de s’apitoyer sur mon sort. Il jugeait la nécromancie comme dégoûtant, et non effrayant. Chacun son avis à ce sujet. Moi, j’avais appris à m’y faire, et c’était important pour moi de continuer dans cette voie-là. Oui, c’était très important. Il me dépondit ensuite à mon autre question, j’voulais savoir s’il était un ninja. Il ne se considérait pas comme un ninja, mais en était un quand même. De ce qu’il disait, seule la magie du monde ninja l’intéressait. En gros il voulait devenir un sorcier ? Comme Merlin ? Ouah, j’espère qu’il y arrivera un jour. Il voulait faire des découvertes en tout genre. Puis il me demanda pourquoi je voulais être un ninja.

Cette question, je ne me sentais pas spécialement d’aborder ce sujet aujourd’hui, déjà que je n’étais pas très en forme. Mon rêve était de devenir un grand nécromancien, afin de redonner vie à mes parents par quelconque moyen. À chaque fois que j’en parle, je pleure. Il en avait eu sa dose je pense, et moi également. Le mieux est de ne pas aborder le sujet, mais je pourrais lui en parler un jour ou l’autre. Mais… Plus tard.

- Moi je veux devenir un grand nécromancien ! C’est pour ça que je suis un ninja, je suis un passionné de cet art !

Voilà, pas besoin d’en dire plus… Je pourrais lui en parler un jour peut-être, mais là, je ne m’en sentais pas vraiment… Et puis il me répondit à ma proposition d’aide, tout en déposant des clés sur la table.

« Non, merci mais je préfère garder la partie amusante pour moi. Si t'as envie de bouger tu peux toujours partir. »

Mais… Il voulait me virer de chez lui ou quoi… Même s’il m’a soigné et tout, il était quand même assez froid avec moi. Mais je n’avais pas vraiment envie de partir, moi j’voulais juste l’aider…

- Non ça va, je ne veux pas partir.

Comment ça je tape l’incruste ? Non, j’voulais juste l’aider à faire quelque chose avant de partir. Je commençais à reprendre un peu de mon énergie, ces vilains bobos ne sont plus que de vilains souvenirs. Même si j’ai encore un peu mal, surtout au genou… Je me levai de mon lit, et je le vis sortir des produits de tout genre. D’après ce que je compris, il cherchait à faire partir le sang sur les draps. Mais c’était dangereux de faire ça, surtout quand on fait des tests comme ça, sans protection…

- Monsieur c’est dan… BOOOOM… gereux…

Une solution venait d’avoir une réaction qui avait provoqué une explosion, bien que petite. Cependant, ça aurait pu être pire. J’avais quand même quelques bases dans la chimie étant nécromancien, mais je ne m’y intéressais pas spécialement… Son visage était même devenu légèrement rouge à cause de l’explosion. Hihi, on dirait une pomme… Ah non ne parlons plus de pommes. S’il vous plait ! Bref. Mon doudou dans les bras, je me rapprochai de lui, pour voir s’il allait bien, ce serait con que cette réaction ait un impact sur lui, par le biais de la respiration ou autre.

- Vous allez bien ? Faut pas jouer avec tous ces produits ! Le mieux serait peut-être de racheter un nouveau drap, j’ai de l’argent si vous voulez, car c’est ma faute après tout…

J’abaissai un peu la tête, puis je la relevai en souriant en sa direction. Il m’avait soigné, et je ne voulais pas qu’il se mette en danger maintenant. Si les rôles étaient inversés, je ne sais pas si je serai en mesure de m’occuper de lui… Il vaut mieux prévenir que guérir après tout.

- Et rincez-vous la tête aussi…

Le gamin n'avait même pas eu le temps de finir de prononcer son avertissement, que déjà l'expérience sentait le roussi.

« gereux… »

Une explosion résonna dans toute la pièce. Certes, elle n'était pas sensationnelle, et même assez petite. Pas encore de quoi créer une bombe. Raki était resté figé quand il avait vu la réaction un peu trop vive. Il avait eu le temps de comprendre que c'était intéressant, mais n'avait pas soupçonné que cela allait lui sauter à la figure. Fort heureusement, ses yeux avaient eux-mêmes décidé de se fermer, un réflexe que le jeune homme vénérait. Si cela n'avait pas été le cas, il aurait probablement du porter un bandeau pendant quelques jours. Ce genre d'incident lui était déjà arrivé, donc il savait de quoi il parlait. Pourtant, cela ne l'empêchait pas de recommencer encore et encore. La vie lui aurait paru tellement plus ennuyante sans cette petite excitation de découvrir une nouvelle chose. Ou de la faire exploser.

Son visage avait été légèrement noirci. En réalité, il était totalement noir. La réaction n'avait pas eu de grande ampleur, cela venait du fait d'avoir approché son visage si près pour observer Les yeux clos, Raki se redressa, puis toussa par petit coups, comme s'il essayait de retenir sa toux. C'était... intéressant. Il fallait qu'il note ce qui avait réagi pour ne pas oublier. Peut-être pourrait-il s'en servir plus tard pour il se savait quelle étrange idée. En revanche, le jeun homme ne doutait pas d'y trouver une utilité.

En toussant une nouvelle fois, Raki passa deux doigts sur son œil droit, puis sur le gauche, pour retirer ce qui couvrait un peu son visage. Même comme ça, il se refusa à ouvrir ses yeux. Ce gamin l'irritait un peu. Un peu trop même. Les blessés devaient rester au lit, allongés, jusqu'à ce qu'ils soient guéris.

« Vous allez bien ? Faut pas jouer avec tous ces produits ! Le mieux serait peut-être de racheter un nouveau drap, j’ai de l’argent si vous voulez, car c’est ma faute après tout… »

Ce devait être l'aspect le plus irritant. Est-ce que parce qu'être ninja était dangereux, Raki lui interdisait de poursuivre dans cette voie ? Non, cela ne le concernait pas. Surtout que le gamin s'amusait avec de la nécromancie. Il ne semblait guère mieux placé que lui pour parler à jouer avec le feu et la vie.

Raki écrasa violemment les boules dans sa bouche, les réduisant à nouveau en morceaux. Il ne retira toujours pas les quatre bâtonnets avec lesquels il s'amusait en réfléchissant. Aku allait un peu trop loin pour continuer à reste impassible. Pendant quelques secondes, le jeune homme songea à essayer de le mordre en lui faisant croire qu'il était un vampire.

Faisant tourner dans sa bouche les dizaines de morceaux de sucettes, qui s'épuisaient lentement, il cherchait quelque chose d'assez fort pour faire fuir le gamin. D'un côté, il proposait de l'argent. Il ne pourrait donc pas lui donner quelque chose pour lui dire d'aller s'acheter une glace, ce ne serait pas crédible s'il tentait de repayer le drap.

Une autre solution consistait simplement à le mettre dehors à coup de pied... Cela semblait quand même un peu exagéré. De quoi il se mêlait après tout ? Ouvrant les yeux, Raki engouffra sa cinquième sucette avidement. Peut-être qu'ignorer simplement la présence irritante la ferait partir, lassée ?

Non, cela faisait bien longtemps que le jeune homme ne lui accordait pas le moindre intérêt. Enfin, dans sa tête. Dans les faits, cela semblait un peu plus controversés. Après tout, il l'avait soigné. Son regard tomba soudain sur sa solution verdâtre. Il l'avait poussée de l'autre côté de la table car elle le faisait affreusement éternuer. Intérieurement, il eût un petit rire. Et si... ? Non... Peut-être que... Juste en faisant semblant ? Cela semblait assez raisonnable. Renverser « sans faire exprès » cette chose sur le gamin. Avec un peu de chance, il se mettrait également à éternuer.

« Et rincez-vous la tête aussi… »

Raki hurla intérieurement. C'en était trop. Ce gamin méritait une bonne leçon ! S'il se mettait à éternuer, et éternuer et éternuer pendant des minutes et des minutes et des minutes... Il ne pourrait certainement plus parler ! Cette bouche serait scellée le temps que Raki s'amuse !

Au moment où il songeait mettre son plan en action, une autre idée lui vînt. Elle était plus subtile, plus machiavélique. Elle pouvait soit être totalement inutile, soit la plus redoutable des armes. Il hésita quelques instants, avant de se remémorer la dernière phrase du gamin : se rincer la tête. Bien évidemment. Oui maman, je vais le faire ! N on mais qui était le plus âgé dans cette pièce ! Oui, il n'avait qu'à faire les deux, au cas où l'un ne marchait pas, l'autre fonctionnerait probablement !

« Dis-moi gamin, pourquoi tu étais si énervé que j'ai pris ton zombi tout à l'heure ? C'était un peu... exagéré, non ? »

Selon sa réponse, Raki pouvait très bien avoir une nouvelle arme pour mettre la gamin dehors sans se sentir coupable. D'un côté, il l'était déjà. Enfin, pendant qu'il posait sa question, il s'était penché en avant, par-dessus ses expériences, pour prendre la solution verdâtre. Il était vraiment démoniaque, et n'hésiterait jamais si on l'empêchait de s'amuser.

Tout se passa alors très rapidement. Le jeune homme amena la solution vers lui, et s'apprêta à la faire malencontreusement tomber sur Aku. Ce plan était infaillible. Enfin, à un détail près. Le premier à éternuer, ce fut lui. Et la solution de ses mains lui échappa. Elle tomba sur la table, se brisa, et se répandit sur les deux ninjas. Raki n'eut même pas le temps de pousser un juron dans sa tête, que le juron franchissait ses lèvres.

« Merde ! »

S'il avait voulu le faire exprès, il n'aurait certainement pas mieux réussi.

Monsieur Raki était pensif. Je me demandais bien ce qui se passait dans sa tête. Malheureusement, je n’étais pas doté d’un pouvoir de lecture des pensées, bien que je reconnaisse que cela peut être très utile. De ce que l’on m’a dit, un clan du village possédait ce pouvoir : les Yamanaka. Il était peut-être possible de se faire apprendre ce pouvoir, bien que j’estime mes chances de réussite à… Zéro. Pas moins que ça. En même temps, il était difficile de faire moins que ça. À mon avis, il devait penser à tous ces produits, et ne songeait donc pas à acheter un nouveau drap. Il devrait m’écouter un peu quand même… Même si je ne suis qu’un gamin de neuf ans, capricieux, chouineur, qui fait des bêtises, lunatique, collant, impulsif et tout ça, j’avais quelques bases en chimie grâce à mes études pour devenir nécromancien. À un moment ou à un autre, s’il ne sait pas ce qu’il fait, cela va réellement provoquer une vraie explosion, ou une réaction libérant un gaz toxique, ou je ne sais quoi. Dans sa maison, je me sentais plus vraiment en sécurité.

Mon regard se portait sur tous ses liquides, dont j’ignorais l’identité pour chacun d ‘entre eux. Je me demandais même si monsieur Raki savait réellement ce qu’était ses produits. Enfin non, je n’ose même pas imaginer la réponse. L’homme me demanda ensuite quelque chose, au sujet de mon doudou. Il me demanda pourquoi je m’étais emporté de la sorte, lorsqu’il a pris mon doudou. Ha… Décidément. À chaque fois qu’il pose une question, cela me ramène à un sujet bien précis : mes défunts parents. Je ne répondis pas tout de suite, ne sachant pas quoi lui dire. Je n’allais pas lui cacher une seconde fois la vérité quand même, ce serait méchant de ma part, alors qu’il avait bien pris soin de moi. Mais en même temps, je n’aimais pas en parler. Que faire…

- Bah… En fait…

Pendant que je parlais, il éternua. À vos so… Oula ! Il avait lâché la fiole verte de ses mains, celle qui l’avait déjà fait éternué tout à l’heure, et là encore une fois. Il ne fallait pas qu’elle se casse !!! Ah bah trop tard, c’est ballot. La solution c’était répandue sur nous deux. Rapidement, mon nez commença à me picoter et…

- Atchoooum !

Je plaquai mes mains devant mon nez, pour évitez de respirer ça. Mais ça ne m’empêchait pas d’éternuer encore. Décidément, ce monsieur était vraiment maladroit. Ou alors, il le fait exprès. Quoique qu’il s’est lui aussi exposé au danger de l’éternuement avec ça… Même moi j’étais plus adroit que lui.

- Bon… Je… J ATCHOUM disais que… Bah en fait mes parents ne sont plus de ATCH… Ce monde. Et mon doudou abrite l’âme de mon père et de ma mère… J’en suis persuadé, et c’est pour cette raison qu’il… Qu’il est si précieux pour moi, en plus d’être mon… Mon seul ami… ATCHOUM.

J’avais réussi à en parler sans pleurer, mais j’étais assez triste. Il faut dire qu’avec les éternuements en plein milieu, ça changeait beaucoup la donne. J’étais plus occupé à éviter de respirer ça que de pleurer… Même si ça me démangeait, mais il fallait que j’arrête pour aujourd’hui. J’éternuai une nouvelle fois, mais ce coup-ci, je me cognai la tête à la table à cause du mouvement brusque de la tête.

- Aieuh…

Qu’est-ce qui ne tournait pas rond aujourd’hui, j’allais vraiment finir par mourir avant la fin de la journée… Il fallait que je m’éloigne de cette table, où tout le produit s’était renversé, bien que j’en aie aussi sur moi, mais en moins grande quantité cependant. C’est toujours ça de moins. Il y en avait surtout sur mes mains, ayant essayé de rattraper le produit avant qu’il ne tombe. Pour le reste du corps, il y en avait pas ou très peu. Quoique sur les manches de ma veste, il y en avait pas mal aussi… Journée maudite.

Je retirais ma veste, qui était maintenant bien tâchée. Bon, il ne l’avait pas fait exprès, je ne pouvais pas lui en vouloir pour ça. Mon doudou lui a été hors d’atteinte en tout cas, tant mieux, je l’ai bien mis à l’abri du danger. Éternuant encore une fois, je me dirigeais vers l’évier, pour m’y laver les mains. Cependant, j’avais beau frotter ça ne partait pas. Là, je commençais à avoir peur.

- Monsieur Raki ! Ca ne veut pas partir, on fait comment ?!

Panique à bord.

Cette immonde solution verdâtre qui-fait-éternuer se trouvait rependue sur un bon quart de table, et surtout sur eux. Raki en avait plein les jambes, et Aku plein les mains et les manches. Le jeune homme se retrouvait désormais pris dans une spirale d'éternuement sans fin. D'un côté, c'était le but initial. Il y avait juste eu une petite erreur de calcul... qui lui revenait très cher. La bourse avait ses hauts et ses bas !

Tout ce que Raki désirait, ce n'était qu'un peu de paix, de calme, qu'on le laisse faire ses petites expériences tranquillement ! Bien entendu, il pouvait par mégarde faire exploser la moitié de la ville, mais cela n'était qu'un détail ! Il ne serait même plus en vie pour se faire remonter les bretelles !

« Bah… En fait… »

Enfin le moment de vérité ! Aku était-il aussi sensible à cette substance que lui ? Retenant un éternuement, Raki le regarda les larmes aux yeux. Il les plissait tellement, inspirant par a coup que cela devenait presque impossible de distinguer la silhouette du gamin. Cette substance se solidifiait et s'apparentait à de la glu. Heureusement pour lui, Raki n'en avait pas sur les mains. Cela venait du fait qu'il tenait le récipient avant qu'il ne tombe. Enfin une chose qui jouait en sa faveur !

Et dire qu'avec cette quinte d'éternuement, il allait peut-être manquer la réponse à sa question : Quelle autre arme pourrait-il utiliser contre le gamin ? Quelle était donc la raison pour laquelle il tenait tant à cet hideux détritus. Si Raki avait eu un truc pareil, il l'aurait probablement jeté depuis très longtemps !

Parfait ! Le gamin éternua avec la discrétion d'un phacochère en rut. Autant dire que les murs tremblèrent. Et surtout, un sceau de bave -et peut-être même de morve- accompagna le tout. Cela était on ne peut plus charmant.

« Bon… Je… J ATCHOUM disais que… Bah en fait mes parents ne sont plus de ATCH… Ce monde. Et mon doudou abrite l’âme de mon père et de ma mère… J’en suis persuadé, et c’est pour cette raison qu’il… Qu’il est si précieux pour moi, en plus d’être mon… Mon seul ami… ATCHOUM. »

Quelques explications, entrecoupée par la terrible malédiction que Raki avait lancé sur eux. Si seulement sa maladresse se calmait un peu, ils pourraient sans doute se débrouiller pour trouver une alternative à cette situation. Cette dernière était singulière, même pour Raki. Il n'avait encore jamais eu l'occasion de faire d'autres victimes que lui lors de ses expériences. Entre deux éternuements, le jeune homme eût même l'occasion de songer à tester d'autres produits sur lui. Le moment lui sembla simplement mal choisi. D'autre choses plus urgentes se pressaient devant lui. Déjà, il fallait se débarrasser de ce liquide, et ensuite, nettoyer le drap.

Enfin, cela ne ressemblait plus à un liquide, cela s'était solidifié rapidement en une sorte de pâte consistance, qui semblait aussi dure que du bois. Quittant ses pensées, Raki revînt à la réalité, interprétant petit à petit la justification du gamin. De ce qu'il put comprendre, cela parlait de ses parents... morts ? Et d'esprits, comme des fantômes peut-être ? Il croyait sérieusement que son doudou contenait les âmes de ses parents ? Cela ressemblait vraiment à un conte d'enfant. Enfin, lorsque l'on cherche à se rassurer, tous les mensonges sont bons songea Raki.

Au moment où Raki prenait enfin sa décision quant à ce qu'il devait faire, un bruit sourd retentit dans la pièce.

« Aieuh… »

Ce cruchon de gamin ! Il s'était cogné contre la table en éternuant. On pouvait donc trouver à peu près aussi maladroit que lui. Et dire qu'il se trouvait suffisamment gaffeur !

Dans tous les cas, la solution la plus sage restait de s'éloigner, et Raki eût la même réflexion que le gamin, qui prit également ses distances. Malheureusement plus lui, il en avait sur les mains et les manches. Autant retirer ses manches restaient possibles, autant l'amputation ne devait pas être sa tasse de thé. Il avait une résistance à la douleur ridicule. Et dans le cas où il l'oublierait, Raki avait toujours du sel.

Pour son plus grand malheur, lui aussi en avait sur lui, par chance, ce n'était que son pantalon. Il se dépêcha donc de l'envoyer au loin avec ses chaussures. Il prendrait son temps plus tard pour s'en occuper. Aku jeta également son vêtement, désormais maudit par le sceau de l'éternuement ! Raki aurait bien voulu tenter un rire machiavélique, mais il éternua et faillit se mordre la langue. Il lui restait encore quelques petites effluves dans le nez.

Le gamin se dirigea vers l'évier pour se laver les mains, malheureusement, le tout s'étant déjà solidifié, cela devenait impossible à rincer. De plus, cela ne semblait guère enclin à se dissoudre à nouveau.

« Monsieur Raki ! Ça ne veut pas partir, on fait comment ?! »

Le petit semblait tétanisé. Sa voix avait fait une ascension très rapide dans les aigus. Il s'en mordrait les doigts d'avoir croisé son chemin, et d'avoir dérangé son expérience.

A moitié nu désormais, Raki se prit tranquillement une sucette, réfléchissant à une solution. Il était hors de question de se hâter une nouvelle fois. Et approcher les produits sur la table serait stupide. Non, il devait y avoir une solution simple pour débarrasser Aku de cette morve solidifiée. L'avantage de la situation, c'était que le gamin ne semblait pas pouvoir invoquer plus de zombis, incapable de produire des sceaux. Et ses éternuements en feraient une cible facile.

Confiant, Raki sortit donc un hachoir à viande bien acéré. Il n'y avait plus que l'amputation. Bien entendu, il plaisantait. Il voulait simplement se jeter sur Aku avec son hachoir, le planter à côté de lui, avant de chercher une autre solution. Cela ne serait même pas dangereux, il se maîtriserait cette fois. Ni éternuements, ni maladresse, juste un hachoir, et deux mains.

Il se jeta donc en avant. La solution lui était déjà apparue plus ou moins partiellement. Parmi les poudre qu'il avait utilisé, il y en avait une qu'il connaissait déjà un peu. Avec un peu de chance, il réussirait à créer une autre réaction qui permettrait de briser les gants... à moins que ça ne le solidifie encore plus. Enfin, ils auraient bien l'occasion de s'en apercevoir !

« Pas le choix, il va falloir t'amputer avant que ça ne s'aggrave ! »

Spoiler:

Fou… J’avais beau frotter très fort mes mains avec l’eau et tout, mais je n’arrivais pas à m’en défaire, ça s’était solidifié. Comment faire pour me sortir de ce pétrin… Honnêtement, je n’en savais rien. Je me tapai même pour essayer de briser cette solution maudite, qui me faisait éternuer. Encore, grâce à cette solidification, les effets néfastes de ce produit semblaient s’être atténués. Ou bien c’est juste mon organisme qui s’y était habitué. Tant mieux en tout cas, mais ce n’était pas encore ça. Je ne voulais pas finir avec des mains comme ça pour le restant de mes jours, c’était inadmissible. Non, jamais je ne m’y résoudrais. Y avait-il une solution… ?

« Pas le choix, il va falloir t'amputer avant que ça ne s'aggrave ! »

Pardon ? Ce n’est pas une solution ça ! Me retournant, interpellé par sa phrase, je le vis avec un hachoir en main, se précipiter vers moi. Haha, il blaguait, ce n’était pas possible autrement. Haha elle était bien bonne, j’ai failli y croire… Hmm… Euh, il était si proche… Par Toutatis, le ciel me tombe sur la tête !!!! D’instinct, je me laissais tomber au sol, les mains sur la tête comme pour me protéger. Mon œil se riva sur le hachoir, qui semblait plus que tranchant. Il s’était planté à l’endroit où j’étais avant de me protéger. Je n’y crois pas, il l’aurait vraiment fait, il m’aurait vraiment amputé si je n’avais pas bougé. J’étais plus terrorisé qu’en colère, cet homme était fou à lier. Ma seule envie était de partir, pour ne plus jamais revenir, pour ne plus jamais le revoir. Seulement, si je partais, comment j’allais me débarrasser de ça… ? La solution se trouvait chez lui, et je n’avais vraiment plus le choix.

- Nan mais vous êtes malade ? J’ai bien cru que j’allais y passer moi ! Je vais vous montrer comment on fait…

Me relevant, je me dirigeai vers la table, où se trouvaient toutes ses fioles aux couleurs différentes. La solution était là, bien qu’elle était dangereuse. Cependant, je n’avais pas d’autre choix que de tenter ça. Tout en observant chacun des produits, je gardais une partie de mon attention sur le psychopathe, histoire que je ne finisse pas avec un hachoir planté dans le bras. L’amputation… Il en avait des belles lui d’idées. Prenant ma veste avec moi, je la mettais sur la table, pour d’abord tester dessus que sur mes mains. Parce que bon, je préfère voir ma veste dissoute que mes doigts, j’imagine bien que ce n’est pas vraiment la même sensation.

Une fois que je me serai libéré de tout ça, je n’aurais plus qu’à partir une bonne fois pour toute, et trouver une autre personne à qui je pourrais faire une petite bêtise, tout en espérant que cela ne prenne pas une telle tournure. Si je ne m’étais pas déséquilibré en décrochant cette pomme, on n’en serait pas là. C’est fou comment le destin peut changer avec une seule action de travers. Mais en attendant, je devais trouver la formule miracle pour me sortir de ce pétrin. Ce jour-là était sûrement le dernier durant lequel j’ai porté cette veste. C’est triste, mais je savais où me procurer la même, on ne change pas les bonnes habitudes après tout.

J’avais retenu la solution qui avait explosée tout à l’heure, et je l’éloignai de moi. Bien qu’elle puisse peut-être m’en débarrasser, je préférais éviter que l’explosion soit d’autant plus spectaculaire que la précédente. Je testais un peu tout, une bleue, une jaune, une autre verte, une incolore. Rien. Enfin presque, la solution verdâtre qui était sur ma veste était devenue violette, et c’était ramolli. Tout en restant indestructible bien sûr, on dirait plus du caoutchouc que de la brique maintenant. Le truc qui sert à rien quoi. Ah quoi que… Je regardais un peu autour de moi, et je vis quelque chose qui allait peut-être me servir : une boîte d’allumettes. Me dirigeant vers elle, je pris la parole.

- Je vous emprunte ça, promis je ne déclencherai pas d’incendie.

Enfin, je vais essayer, mais je préfère garder ça pour moi. Allumant une allumette, sans réellement attendre l’accord du maître des lieux, je passais la flamme près de la substance caoutchouteuse présente sur ma veste. Miracle, ça commençait à fondre !! J’étais aux anges, mais cela dégageait une odeur nauséabonde, si ce n’est pire que ça. Je répétai tout cette série d’opérations sur mes mains. Quel soulagement, quand je vis que la solution disparaissait avec la chaleur de l’allumette… Mais l’odeur était de plus en plus insupportable. Pas grave, tant que ce n’était qu’une odeur… Oh c’est quoi ça ? Y avait un éléphant bleu dans la maison ! Il était trop joli ! Tiens, et depuis quand les murs étaient difformes et multicolores ? Je les touchais, et j’avais comme l’impression de passer au travers. Je suivais l’éléphant, qui grossissait au fur et à mesure, sans ne vraiment savoir où je me dirigeais. Je me mettais à courir dans tous les sens, à la poursuite de cette créature légendaire qui m’échappait de plus en plus, j’accélérai la course, mais il en faisait de même. Y avait plein de papillons de toutes les couleurs en plus dans cet endroit. J’étais peut-être au paradis qui c’est. Oui ça doit être ça, mais je ne le voyais absolument pas comme ça.

L’éléphant tourna la tête, et de sa trompe me fit signe de le suivre, avant de sauter au travers du mur multicolore. Il était littéralement passé au travers, je pouvais le faire aussi. Prenant de l’élan, je fis un grand saut dans le mur. Le mur venait de retrouver sa consistance réelle, et je ressentais une forte douleur sur tout le corps, avant de tomber sur le sol et de m’endormir. Littéralement K.O. Mais les mains libres, et n'ayant pas bien compris ce qui venait de se passer.

Le hachoir en main, Raki se jetait sur ce stupide gamin. L'envie de le découper en morceau ne manquait pas. Cela poserait cependant d'autres problèmes bien trop embêtant à son goût. Il faudrait se débarrasser de son corps. Ou maquiller tout en accident. Cela pouvait le faire. Enfin, jusqu'à présent, il n'avait jamais tué quelqu'un, et cela ne changerait pas, il y veillerait personnellement. Tuer un être vivant, ce n'était pas humain. Peut-être que les ninjas avaient ça dans le sang, mais pas lui. Peut-être restait-il au bas de l'échelle à cause de ses sentiments et de sa conscience.

Fendant l'air, l'arme s'abattit sur Aku. Le gamin ne semblait pas vouloir croire que l'amputation était la seule issue possible. En effet, ça ne l'était pas. Pourtant, cela aurait été bien plus drôle que de faire des expériences de chimie hasardeuses. La lame se planta assez profondément dans le bois, à l'emplacement exact où la main se trouvait précédemment. En effet, le gamin, peu rassuré, avait fui les lieux. Il se recroquevillait sur le sol, comme s'il espérait pouvoir survivre en niant le monde extérieur. Ce n'était pas de cette manière que l'on pouvait survivre. C'était vraiment un ninja ? Si faible de caractère, et physiquement aussi. Un simple imprévu suffisait à le mettre dans tous ses états.

Aku devait désormais le prendre pour un fou, sociopathe, psychopathe, schizophrène. Cela n'arrangeai certainement en rien la première impression que chacun avait eu de l'autre. Raki paraissait bon pour l'asile, tandis que de son côté, il pensait à mettre Aku aux ordures. Ce gamin n'était pas juste faible, il était bon à rien, et même pire, gênant.

« Nan mais vous êtes malade ? J’ai bien cru que j’allais y passer moi ! Je vais vous montrer comment on fait… »

Malade ? Oui, c'était bien le mot. Raki commençait à ne plus se sentir très bien. Tout les événements commençaient à lui donner la migraine. Sa patience avait tout de même des limites, et ce gamin était proche de les franchir. Surtout en le snobant de la sorte. Comment pouvait-il oser le prendre de haut ? S'il y avait bien une chose dont il n'avait pas besoin, c'était une leçon de chimie. Il connaissait déjà les réponses à ses questions. Il voulait simplement découvrir d'autres réponses, à des questions qui n'avaient pas encore été posées. Et ce gamin agissait comme si seul lui au monde pouvait remédier à la situation.

Franchement, cela n'avait pas le moindre intérêt. A nouveau, le jeune homme retira le plastique d'une sucette, avant de la mettre dans sa bouche. Ce gamin ne savait même pas ce qu'il manipulait, Raki non plus. C'était bien pour le déterminer qu'il faisait tout cela.

Le gamin se dirigea vers la table, et commença à trifouiller tout ce qui lui tombait sous la main. Pendant ce temps, Raki se coucha sur son lit avec un livre. Aku était déjà mort dans sa tête, son appartement était vide, et calme. Il n'y avait plus qu'à espérer que le pouvoir de l'esprit soit plus grand que la réalité, dans le cas contraire, Aku n'aurait vraiment plus de tête. Le réservoir de patience était vidé.

Les tintements de verre, et les raclements sur le bois n'atteignaient même plus ses oreilles. Raki dormait, ou se trouvait dans un état similaire. Cela n'avait plus d'importance, c'était reposant. L'air qui rentre, emplissant sa poitrine, avant de ressortir, et ce courant d'air jusqu'au fond de sa gorge. Il ne lisait pas vraiment son livre, ou plutôt, ce n'était qu'une phrase qui revenait sans cesse, parce qu'il n'arrivait pas encore à passer à la ligne suivante. Peu lui importait tant que cela concentrait son esprit sur quelque chose.

« Je vous emprunte ça, promis je ne déclencherai pas d’incendie. »

Là, c'en était trop. Le jeune homme faisait tous les efforts possibles pour oublier ce gamin, mais pas moyen. Sa voix éclata sa bulle, comme une aiguille. Il perdait sa concentration. Oh non, ce n'était vraiment pas bon. Le monde commençait à reprendre le dessus, et sa conscience refaisait surface. Il rageait. Le gamin n'avait visiblement pas appris la leçon qu'il lui enseignait depuis leur rencontre.

Fermant les yeux, il soupira, et fit tourner sa sucette une nouvelle fois les bâtonnets dans sa bouche. S'il continuait d'ignorer le gamin, il allait détruire son appartement, ou pire.

Ce qui devait arriver arriva. Le gamin tentait de mettre le feu à la substance, sans même songer qu'un gaz inflammable pouvait se trouver dans la pièce, ou que la substance puisse exploser. Quelle inconscience ! Décidément, ce gamin ne serait jamais un bon scientifique ! Raki pouvait se le permettre lui, car son but différait clairement. La découverte était sa priorité. Aku semblait simplement désireux de mourir. Et cela pouvait toujours s'arranger.

Se redressant, le jeune homme s'apprêtait à interrompre les expérimentations de son invités malgré lui, lorsque se dernier commença à se comporter bizarrement. La pâte qui ressemblait maintenant à du caoutchouc violet semblait dégager un puissant hallucinogène. Fort heureusement, Aku brûlait directement sous son nez la substance, et en maigre quantité. Si Raki restait éloigné, cela ne l’affecterait probablement pas. A moins que ce ne fut une des autres expériences qui tournait au vinaigre après avoir reposé un moment.

Décidément, rien n'allait depuis que ces deux-là s'étaient rencontrés. Après être parti dans un délire invisible, Aku se précipita dans un mur. Complètement sonné, il s'écroula au sol. Quelle idée de foncer droit dans un mur !

Enfin, c'en était assez, Raki ouvrit les fenêtres et la porte pour aérer, et veiller à ce que toute la suite se passe bien. Le jeu était terminé. Il sortit de quoi préparer une solution pour dissoudre le produit, celle à laquelle il avait pensé avant, et l'utilisa sur les vêtements. Au moins une bonne chose de faite. Ensuite, il jeta son pantalon et la chemise du gamin dans une bassine, il fallait les débarrasser de cette dernière solution, juste au cas où.

En quelques minutes, Raki venait de nettoyer la moitié du désastre chimique que son appartement venait de subir. La substance verdâtre disparaissait, même s'il devait encore frotter un peu pour s'en débarrasser. Les vêtements trempait afin de se débarrasser du tout les résidus, et le drap, ce foutu drap qui avait tout déclenché, étai toujours taché. Sincèrement, cela n'avait rien de problématique. Il mit une bonne dose de javel, et blanchit le tout.

Enfin, tout semblait reprendre un tour normal. Songeant à sa tenue quelques instants, Raki prit de quoi se rhabiller, à cause de ce gamin, ses vêtements étaient encore trempés. Et ceux du gamin également. Enfin, cela lui importait assez peu. Pour il ne savait quelle raison, il prit une de ses chemise qu'il mit au gamin inconscient. Franchement, c'était du baby-sitting, il devait être payé pour ça ! Mais d'un autre côté, vu que tout avait commencé par sa faute, et que les vêtements devaient séchés, il n'avait pas vraiment le choix. Il lui devait bien un vêtement de rechange le temps que tout sèche.

Ce fut donc ce qu'il fit, pendant son linge pour qu'il sèche, à l'exception du drap et de la chemise du gamin, qu'il essora, roula en boule, et prit sous le bras. Il aurait tout un côté mouillé, mais cela lui importait peu. Prenant le gamin sur son épaule, il quitta l'appartement, prenant bien soin de fermer les fenêtres et la porte avant. Il tenait le doudou dans sa main libre.

Maintenant, il rendrait le drap, propre, et se débarrasserait du gamin. Arrivant près de l'arbre où ils s'étaient rencontrés, Raki songea à le laisser là. Il passa son chemin, et déposa le drap emprunté avant de déposer le gamin. Il fallait lui trouver un meilleur endroit.

C'est alors que tout lui apparut clairement en voyant une poubelle. Décidément, il ne pouvait pas être gentil tout le temps, il fallait bien qu'il montre un peu à ce gamin qu'on ne faisait pas n'importe quoi sans en subir les conséquences.

Le jeune homme n'eût aucun scrupule à le mettre dans la poubelle. Cela l'amusa. Pourtant, il laissa tout de même une sucette, en signe de paix.

Spoiler:

Le temps s’écoulait, inexorablement. Les sens me revinrent, dont un tout particulièrement : l’odorat. Je ne sais pas qui c’est qui a pété, mais ça puait vraiment beaucoup. Je n’avais pas encore ouvert les yeux, mais je sentais cette odeur nauséabonde. Franchement, monsieur Raki aurait pu se retenir, c’est le pire pet que le monde ait connu. Ouvrant mon œil droit, je constatai que je n’étais plus au même endroit qu’avant que je sois tombé dans les pommes. Attendez… Que s’est-il passé. Je faisais des expériences, je me suis libéré les mains et… Et… Il y avait un éléphant, plein de couleurs… Rhhaaa je sais plus. Il s’était passé quelque chose, mais impossible de me rappeler quoi. Et après, le néant total.

Mais avant tout, si je n’étais plus chez lui, j’étais où là… ? Non. Il n’a quand même pas fait ça… ?

- MIAOU !

Si, il l'a fait. Y avait même un chat pas très attirant qui me tenait compagnie. Et puis, il y avait un tas d’ordure en dessous de moi, et même au dessus. Le psychopathe m’avait foutu dans une poubelle quoi. UNE POUBELLE ! Et des gens étaient passés par-dessus pour jeter leurs ordures. Incroyable, toute une éducation à refaire chez ses gens ! Je vais aller me plaindre, vous savez quoi ! Me soulevant difficilement, et ce malgré mes blessures, je sortis de la poubelle. Pouah, j’ai jamais autant pué que ça, il a abusé là quand même. Me tapant les vêtements pour lever toute cette crasse, je me rendis compte que je portais une chemise qui n’était pas à moi, et qui était bien trop grande pour moi. Dans l’une des poches, une sucette. Il avait quand même eu une petite pensée pour moi… C’est gentil de sa part.

Il avait passé le plus clair de son temps à manger de ses sucettes, on aurait dit une addiction. Le fait qu’il m’en donne une montrait qu’il m’aimait bien dans le fond. Non mieux, il m’adorait. Si ce n’était pas un psychopathe, je serai allé le voir tous les jours. Ils pouvaient remercier ses problèmes mentaux je pense. Oui, il y a de quoi. Bon, maintenant il fallait que je me débarrasse de cette odeur… Oh et puis zut, je suis crevé. J’ai passé une journée éprouvante, aussi bien physiquement que mentalement, et je n’avais même plus la force de m’occuper de l’odeur que je dégageais à cause de cette poubelle… Je crois que je vais manger ma sucette, et allait dormir pour me réveiller dans une ou deux semaines. Oui, c’est une bonne idée ça, j’approuve !

C’est ce que je fis donc, dégustant la confiserie, je me dirigeais vers mon coin habituel, rien qu’à moi. Un peu en hauteur par rapport au village. Il y avait là un grand arbre, aux racines qui sortaient. Avec un shuriken, je l’avais un peu creusé de façon à ce que ce soit un minimum confortable pour ma tête. Je m’allongeais donc, et m’endormit direct.

Impossible de dormir pendant deux semaines, mais une bonne journée complète me ferait le plus grand bien.

Spoiler: