Michiki venait de franchir les portes de l’hôpital. Ce décor commençait à lui être familier depuis le temps. Il venait régulièrement ici pour recruter sa chair à canon dans la morgue de l’établissement. La jeune fille au teint fantomatique de l’entrée le connaissait et savait pourquoi il venait ici. C’est d’ailleurs pour ça qu’il avait le droit à un regard des plus noirs chaque fois qu’il franchissait cette porte. Il la regardait avec un immense sourire visant à la provoquer. Plus il l’élargissait et plus le regard de la jeune fille se montrait froid. Cette réaction l’amusait. Cette coincée avait le visage d’un des membres de son armée personnelle mais pourtant elle était toujours en vie. L’ironie le faisait rire à chaque fois et il la soupçonnait d’être consciente de ça. Mais les regards accusateurs étaient le quotidien de Michiki qui ne se laissait plus impressionner et toucher par ça. Il commençait à se diriger vers les escaliers et il commença à monter. Il s’attendait à une réaction de la réceptionniste. D’ailleurs, elle ne tarda pas à venir.

-Monsieur Shinda ! Vous devenez gâteux à votre âge ?! La morgue se trouve au sous-sol. Les personnes qui se trouvent à l’étage doivent être trop bavardes ou trop saines d’esprit pour quelqu’un comme vous.

Elle avait à peine exagéré sur la dernière désignation. Le Jônin interrompit son ascension et il se retourna vers son interlocutrice, un sourire hypocrite et radieux sur les lèvres. Il lui répondit d’une voix douce où se sentait toute la perfidie dont il était capable et qui effrayait tant cette jeune femme :

-Je vous remercie de vous inquiéter de moi chère beauté cadavérique. Mais aujourd’hui je m’intéresse aux vivants. Vous oserez me refuser l’accès aux lits de malades que je viens visiter pour leur faire oublier la monotonie de cet endroit ?

Il l’avait prise de haut et le teint passant du cachet d’aspirine à l’écarlate confirma qu’il avait réussi à la mettre hors d’elle. Elle ne lui refuserait pas l’accès sans motif valable et ils le savaient tous deux. Tout ce qu’elle pouvait faire était de le laisser faire ou même de le guider dans le bâtiment. Il se tâta à lui demander de le conduire où il voulait mais il s’était assez amusé pour aujourd’hui. Eventuellement à sa prochaine visite. Il grimpa les marches qu’il restait et il se retrouva dans un dédale de couloirs à l’allure inquiétante. Et c’est l’avis d’un nécromancien ! Enfin bref, il se promena quelques temps dans ces couloirs où la vie et la mort se côtoyaient tels des amants. Il passait la tête dans certaines chambres pour s’intéresser aux personnes qui s’y trouvaient. Il cherchait des gens en particulier mais il ne les trouvait pas pour le moment. Il continua ses recherches.

En menant sa petite enquête, il tomba sur une réserve où se trouvait du matériel de médecin. Parmi tout ce fatras, plusieurs blouses de rechange. Michiki en prit une en souriant et il l’enfila dans la réserve. Accoutré de cette façon, il passerait inaperçu et pourrait mener son investigation selon son bon désir. Mais lorsqu’il sortit du petit local, il tomba nez-à-nez avec quelqu’un qu’il connaissait et qu’il n’aurait pas préféré rencontrer. Shinichi, le Mizukage !

Malgré le fait que Shinichi soit au courant des compétences particulières de Michiki, il ne semble pas plus surpris que ça de le voir avec une blouse de médecin. Il finit finalement par faire la remarque. Il n’est pas si bête tout compte fait. Mais alors que le nécromancien allait formuler une réponse, ou plutôt un prétexte étant donné les raisons qui l’amènent ici, le Kage enchaîne directement avec une déclaration gênante. Il veut suivre Michiki pendant qu’il va soigner les malades pour qu’il lui fasse son bilan de santé juste après. Le Jônin ne comprend pas entièrement ce que veut dire son interlocuteur mais il est sûr d’une chose c’est que ça le fait chier. Il aurait mieux fait d’être seul pour ne pas se retrouver embêter pendant son travail. En plus, tomber sur quelqu’un qu’il connaît est d’autant plus gênant. Il farfouille dans son esprit tordu une manière de se débarrasser de Shinichi. Mais rien n’y fait il ne trouve rien de satisfaisant et le gars a l’air décidé à le suivre partout. Après un soupir d’exaspération, Michiki formule quand même quelques mots en se dirigeant vers une salle :

-Bon d’accord suis-moi.

Une motivation incroyable transparaît dans ces mots. Il tient à le semer alors il accélère le pas. Seulement le Mizukage ne se fait pas distancer pour autant. En plus, s’il continue à avoir un comportement pareil, il risque d’être immédiatement suspect et d’attiser encore plus la curiosité de Shinichi. Il réfléchit à une manière de procéder pour agir en paix sans avoir besoin de répondre de ses actes devant une autorité supérieure. Tandis qu’ils marchent dans les couloirs et fouillent les salles à la recherche de ce qui amène le nécromancien ici, ce dernier se triture les méninges un bon nombre de fois avant de penser à un bon plan. Il arrive près d’une chambre où une fiche de suivi est accrochée à la porte. Michiki la prend, la consulte rapidement et trouve enfin ce qu’il cherche. C’est là-dedans qu’il trouvera son bonheur.

Il s’apprête à rentrer, tout fier d’avoir trouvé, et en oublie presque Shinichi. Il arrête donc son geste pour se tourner vers lui. Il ne se précipite pas afin de trouver les mots adéquats. Enfin satisfait par une formulation, il lui dit :

-C’est un examen de routine tout bête du style « Vous allez bien ? » - « Oui » - « Alors à demain » ! Inutile donc de m’accompagner à l’intérieur. Il serait préférable de m’attendre ici et éventuellement je termine cette visite et je me charge de ce fameux bilan, non ?

Sans attendre de réponse, car il juge son argumentation parfaite, Michiki entre. Alors qu’il s’attendait à entendre le bruit de la porte qui se referme, il perçoit juste un bruit de pas. Et merde il l’a suivi. Quelle tête de mule putain ! Il ne peut donc pas se concentrer sur sa tâche. Mais maintenant qu’il est entré il doit bien dire quelque chose sinon cela serait louche. Il va donc au chevet du patient qui se trouve là. Il arrive aux machines qui sont à côtés de lui et observe certains moniteurs avec un air professionnel. Il serait incapable de dire à quoi sert tel ou tel écran mais il tient à être crédible. Il revient au bout du lit pour examiner la feuille qui se trouve accrochée là. Ça aussi il n’en a jamais compris l’intérêt ou la fonction. Un graphique est dessiné là-dessus mais ce qu’il représente reste un mystère. Il repose la feuille dans le petit compartiment prévu pour ça. Il pose ensuite ses deux mains sur la barre du lit. Il entame une conversation des plus banales pour demander au patient s’il ne manque de rien etc. La conversation dure deux minutes maxi. Deux minutes pendant lesquelles Michiki est observées par Shinichi un peu en retrait. Le patient lui-même a l’air étonné de cet échange courtois, s’attendant certainement à des questions plus médicales. Mais Michiki tient juste à se débarrasser du gêneur au plus vite.

Mais alors qu’ils allaient prendre congé, le malade fait une demande étrange à propos d’un lavement qu’on lui aurait prescrit la veille et qui n’a toujours pas été effectué. Le gars tend même un doigt tremblant vers l’appareil nécessaire à cette…immondice. Le nécromancien observe cette invention de Satan. Il déglutit difficilement. Là étonnamment, le Kage sur ses talons quitte la chambre mais laisse la porte entrouverte pour guetter son retour. Impossible de se défiler. Pour la première fois de sa vie, le Jônin de la Brume a une folle envie de pleurer.

***

Il revient au bout de quinze minutes, le teint livide. Il ne regarde même pas Shinichi. Il doute même d’être capable de pouvoir regarder de nouveau quelqu’un dans les yeux après ce qu’i vient de vivre. Il fait mine que tout va bien mais il est détruit intérieurement. Puis il finit par trouver une porte de sortie à…euh NON ! Très mauvais exemple d’expression après cette expérience ! Il trouve…une échappatoire à ces pensées qui le hanteront jusqu’à sa mort. Là en l’occurrence il ne souhaitera jamais l’immortalité. Mais bref ! Il repense à la raison de sa venue ici qui l’a tant motivé et animé. Mais il n’oublie pas son pot de colle. Il décide de tenter une dernière tentative. Si après ça Shinichi ne déguerpit pas, il ferait ce qu’il doit faire et le chef du village aurait certainement son mot à dire. De toute façon après l’épreuve qu’il vient de passer, il ne craint plus grand-chose. Il se retourne donc vers son Kage, ses couleurs revenant petit à petit, et lui dit :

-Bon ! Et si on faisait ce bilan de santé maintenant ? Au moins ce sera fait et tu ne serais pas obligé de t’ennuyer en me suivant dans chaque chambre pour des choses aussi ennuyeuses. Hein qu’en dis-tu ?

La dernière question est limite poser avec un ton d’imploration du style : BARRE TOI JE T’EN SUPPLIE ! Non de toute façon c’est sa dernière tentative. Il lui redemande une dernière fois et si ça marche, il pourra se mettre son éthique où il pense. NON ! MAUVAISE VISION !!

Si le nécromancien n’avait pas subi une épreuve aussi éprouvante quelques minutes avant il aurait pensé un gros : « ET MERDE ! ». Mais là il était dégoûté à vie de ce mot ou de tout ce qui s’y rapprochait. Ce qui lui fit doublement détesté les mots du Mizukage lorsqu’il répondit à la question du nécromancien. Non seulement ce bougre ne le lâcherait pas, mais en plus il revenait en mettre une couche suite à ce qu’avais dû faire le Jônin. Ce malheureux avait bien trop donné de sa personne pour donner le change. Maintenant c’était terminé. Il ne tenait pas à vivre ça une deuxième fois. Donc il ferait ce qu’il était venu faire ici et si son supérieur y voyait quelque chose à dire, il s’en foutait. Plus rien ne lui importait après qu’il ait dû s’infiltrer dans le…enfin qu’il ait été obligé de…ENFIN BREF ! Il formula néanmoins une réponse très recherchée à son interlocuteur afin de marquer le coup :

-Avançons. D’autres patients nous attendent.

Ça c’était de la réponse ! Ils repartirent donc en quête d’un nouveau client. Shinichi entonna un petit chant pour taquiner une énième fois ce qu’avait subi Michiki. C’était bien le niveau de puissance de cet homme qui retenait le nécromancien d’en faire un pantin fidèle. S’il était susceptible un tant soit peu de le battre et de le tuer, il le ferait. Mais il savait que ce n’était pas le cas. Peut-être un de ces jours il ferait regretter ces mots à ce petit enfoiré qui le narguait. Il n’était pas un mauvais bougre. Mais là, après un tel supplice, Michiki avait zéro patience. Il aurait suffi d’un gamin qui le bouscule pour qu’il envoie sa tête valdingué dans le couloir. Il aurait même pu s’en servir d’un ballon de foot après ! Et faire ne séance de tir au but avec Shinichi ! L’idée le fit rigoler et lui fit oublier ses soucis. Comme quoi il fallait un peu de pensées positives pour apaiser la moindre colère ou la plus petite tension. L’esprit faisait tout dans ces cas-là.

Les deux Kirijins arrivèrent dans une nouvelle chambre. En observant la fiche du patient à l’entrée, Michiki sut qu’il y avait ce qu’il cherchait là-dedans. Son bonheur était à portée de main. Il en avait bavé mais il y était enfin. Il entra dans la pièce comme un champion après une réussite sportive. Triomphant et victorieux, il avait un pas calme et souple. Il s’approcha du lit où était étendu un homme au crâne dégarni. Des pommettes hautes, il était là à cause d’une chienne de maladie qui en avait emporté plus d’un. La chimio avait fait tomber ses longs cheveux blonds soyeux. Michiki savait ça grâce à la photo de la fiche à l’entrée. Malgré le fait qu’il soit heureux de trouver enfin ce qu’il cherchait, il ne put s’empêcher de garder un air sérieux, limite solennel. Il fit encore une fois mine d’examiner le petit graphique qui se trouvait au bout du lit. Il n’y comprenait toujours rien. Il le reposa puis observa l’homme derrière ses lunettes mauves. Il laissa un temps de silence avant de se lancer. C’était une situation délicate. Puis il finit par se lancer.

Mais à ce moment-là, la porte s’ouvrit pour laisser entrer un autre docteur ! Oups ! Là le Jônin était dans la…NON ! PAS CE MOT !!! En tout cas, le nouveau venu s’arrêta net lorsqu’il vit Michiki en blouse accompagné du chef du village. Le silence devient d’autant plus lourd. Et Shinichi qui ne sortait pas un mot bien placé pour une fois ! Puis le gars s’approcha du Kirijin en le regardant attentivement. Ce type allait tout de suite voir que Michiki ne faisait pas partie des médecins. Il serait démasqué et on lui interdirait l’accès à l’hôpital pour ça. Ce qui le priverait de son grossiste en cadavres. Non ça par contre il ne pourrait pas s’en passer. Il fallait trouver une explication logique et vite ! Avant que le vrai médecin ne parle et ne découvre le poteau rose.

-Je ne vous ai jamais vu ici vous !

Trop tard. Qu’allait faire Michiki ? Dire la vérité n’était pas une option. Pas du tout même. Mais il fallait trouver un argument convaincant. Son esprit fulminait en s’évertuant à trouver une réponse bien placée. Mais rien ne venait. Rien ne lui venait et le regard du médecin se faisait encore plus lourd avant qu’il ne se remette à parler. Mais…avec un sourire ?!

-Ah oui ça y est j’y suis ! Vous êtes ce nouveau chirurgien qui nous vient de Kawa, non ? Enchanté ! Mais vous avez dû vous tromper on ne vous attendait pas là. Suivez-moi s’il vous plaît.

Cette pile électrique ne lui avait laissé aucune chance. Aucune fenêtre pour répondre. Et en moins de temps qu’il n’en fallait pour dire « putain de journée à la con », Michiki se retrouvait bringuebalé dans une salle d’opération. L’endroit était une pièce d’on la seule ouverture sur l’extérieur était une vitre donnant sur une autre pièce où pouvait se poser des médecins et des visiteurs pour observer l’opération en cours. Quelques infirmières s’y trouvaient et Shinichi avait suivi le mouvement pour regarder tout ça. Alors lui il avait toujours un truc à dire hein ! Mais là, nada ! Pas le moindre élément pour sortir le nécromancien de son pétrin. Le mot évoquant un mauvais souvenir toujours frais, Michiki tâcha de comprendre ce qu’il foutait là. Sans comprendre, on lui enfila une blouse verte, un masque, un bonnet grotesque et des gants. On lui plaça le corps d’un jeune homme endormi placé sous un drap. Plusieurs personnes l’entouraient et scandaient des termes dont il ne saisissait pas le moindre sens. Alors qu’il comptait s’éclipser discrètement, un interne lui saisit le bras et le remit tout à côté du corps en lui expliquant la situation, en termes simples cette fois :

-Bonjour docteur. Cet homme nous est arrivé en début de matinée. On l’a récupéré dans cet état suite à une embuscade tendu par des brigands. C’est un shinobi. Le village tient à ce qu’on lui sauve la vie absolument. Pas la peine de perdre un soldat sur le billard. Il a un éclat de kunaï coincé dans…

Et à partir de là, le nécromancien ne fut pas capable de reprononcer un seul des mots qui venait de lui être dit. Le gars s’était exprimé simplement pendant tout ce temps, pourquoi ne pas continuer bordel ?! Il ne chercha pas plus loin. Sans qu’il fasse quoique ce soit, on commença à charcuter le ventre du gars allongé là en y faisant passer toute sorte d’outils assez bizarres. Michiki nota qu’il devrait s’en procurer. Ces engins semblaient plus efficaces et plus meurtriers qu’un petit scalpel ou un kunaï ! Il était spectateur de tout ça. Il en profita. Il observait tout d’un air impérieux en hochant de la tête aux mots des gens qui l’entouraient. Jusqu’à ce qu’on lui tende une curieuse pince bigarrée, qu’ils se taisent tous et le regardent. Là il était mal à l’aise. Il saisit le drôle d’engin et resta avec pendant un moment. Il n’osait même pas regardé derrière la vitre. Il imaginait très bien le Mizukage en train de se rouler par terre à pleurer de rire. L’enfoiré !

Comme ils s’étaient tous affairés à faire un trou dans le bide ce pauvre homme, il en conclut qu’il devait foutre cette pince là-dedans. Mais pour faire quoi ? Certainement retirer un truc mais quoi ? Il aurait l’air malin s’il lui retirait un organe vital ou un truc important. La supercherie serait découverte et adieu son projet. Il suivit donc son instinct. Il tritura des trucs tous mous et visqueux. Il en avait connu des trucs dégueu mais ça c’était pas de la gnognotte ! Il était gêné en plus avec tous ces regards sur lui, analysant chaque geste. Il commençait à paniquer lorsqu’on lui demanda s’il sentait l’éclat de métal. « Oui bien sûr mais là j’avais envie de refaire la déco connard ! ». Il aurait tant aimé lui dire ça mais bon. Au moins le gars l’avait mis sur la piste. Il le remercia silencieusement en pensée. Mais comme il galérait avec ce truc pas utile, il le sortit du ventre et le posa sur un plateau en argent. Quand ce fut fait, il remonta son gant droit bien à fond et il l’enfonça dans la plaie. Le bruit de succion et le souffle de surprise qui saisit l’assemblée laissa ensuite un silence planer.

Michiki fouillait comme quelqu’un fouillant une poche pour trouver ses clés. Sauf qu’il ne trouvait pas de petite monnaie ou de mouchoirs abandonnés là-dedans. Puis, par un coup du destin, il sentit quelque chose de plus dur que le reste. Il le pinça, ramena sa main à l’extérieur pour lâcher un petit objet métallique dans une gamelle qu’on lui avait tendu. Il pût enfin quitter ce cauchemar sous les bravos et les applaudissements. Il ne s’attarda pas plus longtemps vu qu’on lui laissait enfin l’occasion de sortir. Il retrouva donc Shinichi dans le couloir. Il attendait naturellement une petite phrase.

Cette visite devenait éreintante ! Il allait péter un câble dans peu de temps. Pourvu qu’il trouve enfin ce qu’il cherchait sans qu’on l’interrompe ! Il le souhaite et le désirait de tout con cœur alors qu’ils prenaient la direction d’une nouvelle chambre.

Si Michiki avait eu une bonne étoile un jour, alors cette dernière devait être très très loin maintenant. Elle avait dû l’abandonner comme une merde. Euh…non ce souvenir était encore trop frais on va oublier. Frais…OH NON !!! Après avoir réprimé un haut-le-cœur suite à ces pensées, le nécromancien continua d’avancer dans le couloir, suivi de près par son pot de colle. Il fallait absolument qu’il s’en débarrasse. Si ça se trouve c’est lui en fait qui lui attirait la poisse. Mais oui c’était ça ! Evidemment ! Il était là depuis le début ! Va de retro machine de Satan ! Je te banni de ce monde oiseau de mauvais augure ! Retourne auprès de ton maître vil félon !!! Bref. Tout ça pour dire que c’était un peu gros comme coïncidence. Shinichi arrive et Michiki se retrouve avec une montagne de problèmes à gérer. Alors qu’ils sortaient du bloc opératoire, le nécromancien se disait qu’il allait enfin pouvoir s’affairer à sa tâche.

Et non ! Il fut rapidement interpellé par une jeune femme en blouse comme lui. Elle venait de lui réclamer de venir immédiatement pour s’occuper d’un…accouchement ! Oh non. Exactement ce qu’avait dit Shinichi pour se foutre de la gueule du nécromancien accablé de malheurs. Il se fait entraîner dans une salle où les cris de la femme enceinte couvrent tout le reste. Mais comment veulent-elles qu’il fasse quoique ce soit ? Il est pas entraîné à ça. On le place contre son gré sur le tabouret face à ce que nous appellerons : l’Antre. Des mineurs nous lisent voyons. Le voilà face au spectacle le plus atroce qui soit et des ordres fusent dans tous les sens. On lui demande de faire vite, d’agir pour le bien du nouveau-né qui s’apprête à arriver. Equipé d’une paire de gants qu’on lui a enfilés à son entrée dans la pièce, Michiki a un doute quant à la démarche à adopter. Là il a bien envie d’avouer la supercherie. Il doute avoir les nerfs assez solides pour supporter une épreuve de plus. Mais en pensant aux conséquences s’il était découvert, il se découvre une énergie et une volonté nouvelle.

Le voilà donc plein de courage face à l’Antre et prêt à affronter tout ce qui pourrait en sortir. Enfin il préfèrerait certainement une armée de démons par rapport à ce qui est prévu. Lui qui n’aime pas particulièrement les gosses, il est mal tombé. La tension est palpable chez n’importe quelle personne ici et le pauvre Michiki ignore quoi faire. Autant faire un feu à l’entrée de cette Antre et la bestiole en sortira. Ça marche pour chasser les lapins alors pourquoi pas là ? Ou bien avec un pied-de-biche. Personne n’a essayé ici ? Il n’ose pas poser la question. Il se dit que ça a déjà dû être essayé avant qu’il arrive sinon on ne ferait pas appel à un médecin. Même si ce dernier n’en est pas réellement un il en renvoi l’image en tout cas. Mais il ne sait pas du tout quoi faire. Il essaye de se remémorer les rumeurs qu’il a entendu sur cet étrange rituel. Il approche ses mains de l’Antre. Il y va délicatement d’ailleurs parce qu’il est limite dégoûté par cette…chose.

L’Antre commence à bouger. Quelque chose de rond en sort. C’est parfaitement immonde. La chose bouge et semble être vivante. Quelle horreur…Michiki se retient de rendre son petit déjeuner alors que ses mains rentrent en contact avec ce truc. Puis, en l’espace de quelques minutes, le calvaire est fini. Les cris de la femme et ceux des sages-femmes cessent pour laisse libre court à ceux d’un bouffechiedort (ce mot est la réunion des trois uniques choses dont est capable un enfant : bouffer, chier et dormir). Michiki le tient à bout de bras alors que tout le monde s’extasie sur ce sous-être. Le père vient couper le cordon qui relie cette chose à l’Antre. Le calvaire est fini. Michiki c’est que c’est la fin. Il peut donc se permettre de se détendre et de se concentrer sur son jeu d’acteur. Une sage-femme lui demande d’apporter l’enfant pour le nettoyer. La bête est couverte de sang et il est vrai qu’une douche ne pourrait que lui faire du bien. Il se retourne pour amener le truc à celle qui le demande.

Au moment où il se tourne, il se retrouve à déraper sur une flaque d’il ne sait trop quoi. Il se rattrape de justesse au bord du lit. Avec ses deux mains bien sûr. Michiki se fait chasser à coup de jurons et limite de coups de la part du père. Il finit dans le couloir à fuir cette salle. Shinichi certainement sur ses talons. Après quelques couloirs, il est enfin sauf. Le Mizukage est toujours là naturellement. Le nécromancien retire les gants qu’il laisse là et essuie ses lunettes. Quelle journée ! Prochaine fois qu’il rencontre un obstacle par contre ça va mal finir. Encore plus que là où le môme lui a « glissé des mains ». Quelle idée d’être tout glissant aussi ! Peut pas se laver oh ! Bon en tout cas, sans Shinichi dans son dos il pourrait faire ce qu’il veut. Parce que jusque-là il a dû jouer le jeu à cause de lui. Il retente donc sa chance :

-Bon. Toujours pas tenté par le fait de faire ce bilan de santé maintenant ?

Il a prononcé la phrase avec détachement comme s’il s’en foutait totalement. Même si par pensées c’est plus :

« PUTAIN BARRE TOI ! PUTAIN BARRE TOI ! PUTAIN BARRE TOI ! BAAAAAAAAARRE TOIIIIIII !!!! »

Il le ferait chier jusqu’au bout. Shinichi ne lâchait pas le morceau ! Il continuait de suivre Michiki et refusait de le quitter. Il lui avait amené une bouteille de jus de citrouille. Le nécromancien déteste la citrouille. Il avait un choix à faire. Accepter la bouteille et remercier pour ne pas la boire au final ou refuser. Sachant que dans cette dernière option, Dieu seul sait ce qui pourrait advenir du Jônin s’il osait agir ainsi. Dans le meilleur des cas, Shinichi se vexait et il partait. Une idée alléchante. Dans le pire des cas, il s’assurait que le nécromancien ait la vie dure. Et il avait l’intuition que le Mizukage était très fort dans le domaine. Après un rapide débat avec lui-même, Michiki tendit la main pour saisir la bouteille. Il s’en débarrasserait plus tard incognito. Pour l’heure, ils reprenaient leur route dans le dédale de couloirs.

Il avait beaucoup de mal à en arriver à son but premier. Comment allait-il faire pour y parvenir ? Avec Shinichi sur les talons, ça risquait d’être très compliqué. Il avait besoin d’être seul pour ce qu’il voulait faire. Depuis le temps qu’ils se promenaient là, il avait une idée de l’endroit où il trouverait son bonheur. Quelle frustration de ne pouvoir accéder à l’objet de sa quête alors qu’il se trouve si près. Un bonheur à portée de main qu’on ne peut cueillir. Si ce n’est pas malheureux ! Pauvre Michiki. Enfant incompris de la société. Il manquait plus qu’une coquille d’œuf sur la tête et il aurait tout l’attirail du parfait Caliméro. Il traînait dans les couloirs, suivi de son éternel pot de colle, à essayer d’échafauder un plan pour s’en débarrasser.

Après mûre réflexion, il s’était dit que, malgré toute la colère, la haine et la frustration qui l’habitaient, tant qu’il serait avec Shinichi, il ne pourrait faire ce dont il avait envie. Le Kage représenterait un obstacle dans son plan. S’ils restaient ensemble, impossible donc de procéder librement. Il aurait fallu trouver un moyen de le faire partir mais le bougre s’accrochait encore et encore. La fatigue commençait à gagner le nécromancien. Après tout ce qu’il avait subi, il n’avait qu’une envie, se détendre un peu. La seule pause qu’on lui avait proposée était cette bouteille de jus de citrouille qu’il trimballait partout sans pouvoir la boire puisqu’il détestait ça. Il aurait donné n’importe quoi pour un petit moment de détente histoire d’oublier tout ça. Les Kirijins continuaient leur marche jusqu’à ce qu’ils arrivent dans la partie de l’hôpital réservée aux soins des personnes âgées. Il y avait là plusieurs salles avec des vieux dedans. Mais genre très très vieux hein !

Michiki passait une tête de temps à autre pour les observer. Remarque, il pourrait venir faire ses courses ici quand il avait besoin de cadavres frais. Il y avait vraiment de quoi faire ici. tout prédisposait à un usage par un nécromancien expert à la recherche de nouveaux membres pour son armée personnelle. Mais peut-être pour une autre fois. Cette partie de l’hôpital était vraiment silencieuse. Pas une voix, pas un bruit, pas un chat. En même temps, que viendrait foutre un chat dans un hosto ! Tout ça pour dire que les deux hommes se retrouvaient dans ce temple du silence où une vieille odeur d’avant-mort planait. Même pour Michiki, c’était pas très agréable. Rien de plus normal. L’avant-mort ne signifiait pas mort donc c’était frustrant de sentir l’odeur de quelque chose qui ne pouvait être à soi pour le moment. Comme un gâteau au chocolat en train de cuire. Vous sentez l’odeur alléchante mais vous ne pouvez pas le prendre puisque ce n’est pas encore prêt. Bah là ça faisait le même effet à Michiki.

Enfin bref, leur interminable marche continuait alors que le nécromancien avait grand besoin d’une pause. Ils tournèrent à l’angle d’un couloir pour arriver dans un endroit où étaient entreposés plusieurs fauteuils roulants mis à la disposition des personnes âgées. Michiki passa devant en y jetant un bref regard puis il se stoppa net dans sa course. Il fit quelque pas en arrière pour revenir près des fauteuils. Ça y est, il l’avait trouvé sa pause. Et il ne doutait pas un seul instant que Shinichi allait approuver son idée et qu’il participerait. Le nécromancien regarda attentivement les fauteuils, puis Shinichi puis à nouveau les fauteuils d’un air insistant pour que le Lutin comprenne. Ce qui finit par arriver. Les deux hommes avaient compris que l’autre avait compris. Et c’était assez mauvais signe dans l’éventualité où cette idée ne rentrait pas dans le cadre des bonnes mœurs.

***

Quelques secondes plus tard, les couloirs si silencieux furent emplis d’éclats de voix et du bruit des crissements de pneu. Dans un des salles où étaient casés les petits vieux, certains eurent la force de sortir pour identifier l’origine de tout ce bazar. Et quelle ne fut pas leur surprise de tomber sur le spectacle le plus…étrange qu’ils leur aient été donné de voir. Michiki et Shinichi se tenaient côté à côté dans le couloir, chacun sur un fauteuil en roulant à toute vitesse dans les couloirs. Les petits vieux durent se pousser car l’affrontement était de taille. Les Kirijins s’étaient lancés dans une course effrénée où tous les coups sont permis. A l’approche d’un virage, Michiki, qui avait réussi à se hisser en tête, se retourna pour déverser le contenu de la bouteille de jus de citrouille qu’il avait gardé. Le sol était donc rendu glissant à cause du liquide. Le spectacle était d’autant plus ridicule qu’il avait fait cela en hurlant :

-PEAU DE BANAAAANE !

Il avait accéléré la cadence de son bolide pour maintenir son avance. Ils n’avaient pas fixés de ligne d’arrivée. Il fallait peut-être le faire. Enfin pour l’instant ils se contentaient de rouler à toute vitesse pour le simple plaisir de s’amuser un peu et de profiter de cette pause bien méritée. Si le nécromancien pouvait foutre une dérouillée à celui qui le gênait tant en plus, ce serait jouissif !