« J’ai plus qu’à tout refaire, génial. »

Le sarcasme passé, Kujara inspira une grande bouffée d’air et se remit au travail. Être maladroit, c’est pas un comble pour un Ninja ? Heureusement que ça lui arrive là, alors qu’il nettoie le sol de la boutique, plutôt que dehors, en mission, là où sa vie est mise en jeu. Un geste inattentif l’avait fait percuter le sceau d’eau sale qui du coup avait reculé d’un mètre avant de se renverser puis de rouler à travers la petite pièce servant de façade à la forge de son grand-père. Il y donnait un coup de balai tous les jours s’il le pouvait, parce que son grand-père n’avait guère le temps pour ces choses là. Il s’agissait d’un homme simple, aimant le travail bien fait et le doux repos d’un bon repas en famille. Surement pour ça que sa grand-mère l’avait choisi lui, elle qui était sans cesse plongé dans les intrigues et les combats.

Bon, assez déblatérer sur le sujet, on s’y remet ! Kujara reprit donc le balais à frange en main, ramena un second sceau d’eau savonneuse et se remit au travail, sans qu’aucun client ne vienne le déranger à une heure si « tardive » dans la vie des civils du village. Lorsque des Ninjas venaient, c’était en journée, pas au crépuscule. Et encore moins à la nuit tombée, lorsque Kujara termina son nettoyage par exemple. Faisant craquer ses cervicales, s’étirant, il retourna dans la maison, jouxtant la forge et la boutique, et croisa sa tante dans la cuisine, en train de préparer le dîner.

« Ce sera prêt à l’heure. » Annonça-t-elle machinalement à son neveu, connaissant son implacable appétit à l’heure où le repas devait être servi.

Bien que l’écart d’âge entre eux ne soit pas si important (il avait dix-sept ans et sa tante vingt-cinq), ils n’étaient jamais sortis de cette relation de neuve à tante depuis leur plus jeune âge.

« Hataki-sama est rentrée ? »
« Pas encore. »
« Dans ce cas, je sors faire un tour. »
« Rentres à l’heure. »

Il ne répondit pas car cela était inutile : il n’était jamais rentré en retard chez lui. Sauf peut-être une ou deux fois, en des circonstances exceptionnelles. En la quittant, Kujara lorgna sur la nuque de sa tante : le bout d’une cicatrice couverte de fils y pointait le bout de son nez. Il quitta la maison, réfléchissant une nouvelle fois et avec toujours autant d’appréhension, à la dureté du métier de Ninja. Leur vie n’y tenait vraiment qu’à un fil, encore plus ici, à Sunagakure no Sato. Un village Ninja aussi jeune s’attirait bien vite des ennemis, c’était inévitable. Toujours est-il qu’ils étaient en plutôt bons termes avec Konoha à la suite du tournoi qui s’était déroulé là-bas. Comme bien d’autres jeunes gens en fin de formation, l’évènement s’était déroulé sans eux qui avaient profité de l’absence des grands du village pour passer leur examen. Examen qui l’avait fait entre autre, Genin.

Les mains dans les poches d’un grand kimono taillé façon moderne, couleur sable et blanc, Kujara commença sa petite ballade de fin de journée, pour détendre ses muscles et son esprit en vue de prendre une bonne nuit de repos bien méritée.

Il n’est pas rare de croiser des gens à cette heure là. Certains rentrent chez eux, d’autres sortent justement boire un verre ou diner. D’autres encore aiment à se promener pour profiter de la fraîcheur du soir, avant que la nuit ne devienne glaciale. Ses pas conduisirent Kujara sur les remparts de Suna. De là on voyait le désert et les alentours. S’asseyant, il reposa ses pieds légèrement endoloris par la marche. Quelqu’un, ou bout de plusieurs minutes, s’arrêta apparemment derrière lui, sans intentions hostiles en tout cas…

Kujara se pencha en arrière et lança en regard inversé à l’homme qui venait de s’assoir derrière lui, sur une marche supérieure. Leurs yeux se croisèrent, puis le jeune homme reprit sa position initiale, inspirant profondément avant de lui répondre, car après tout il n’était pas obligé d’engager la conversation avec inconnu. Mais cela aurait été malvenu.

« Moi c’est Kujara. »

Balayant le désert de ses yeux bleus, il n’y découvrit rien d’anormal et se contenta de faire rouler ses épaules pour s’étirer et se détendre. Il était trop stressé comme garçon, cela risquait de lui jouer des tours plus tard… ou de lui sauver la vie.

« Il fait frais mais pas trop, et la vue est magnifique… »

Répondant par là à la question de son interlocuteur, un nouveau silence s’installa entre eux. Ni l’un ni l’autre ne semblaient être expressément venus pour discuter mais plutôt pour admirer le spectacle du jour s’éteignant. Après, le fait que l’on parle à un jeune homme assis seul sur les remparts, c’était toujours se montrer plus sociable que ce dernier.

« Toi aussi tu as l’air d’apprécier ce lieu. C’est bien… » Lâcha-t-il à mi-voix. « Au moins tu sais prendre le temps d’admirer les belles choses. »

Sous-entendu que certains ne le faisaient pas, évidement. Mais l’expression de cette opinion à voix-haute, face à un inconnu qu’il ne connaissait ni d’Eve ni d’Adam aurait été malavisé. On était jamais bien sûr de savoir à qui on avait à faire et puis c’était manière de discuter un peu quoi. Ne jouons pas les asociaux, ne jouons pas les asociaux !

Il me regarda de l'envers, Kujara, voilà donc son nom, l'homme semblait apprécié cet endroit, tout comme moi. Je me posais des tas de questions, forcément vu que s'était un inconnue pour moi, mais ce n'était pas des questions à posé comme ça. Oui je me demandais si il avait une famille, s'il avait perdu des amis durant la précédente guerre... Moi je n'avais plus grand chose mais il faut dire que je l'avais voulu. Grr il ne faut pas je repense à ça. Kujara semblait pensif lui aussi...

On aurait pu débattre sur le fais qu'il fasse frais ou non mais quel utilité aurait eu un tel débat ? Je savais pas quoi dire... Il faut dire que je n'avais pas l'habitude de mener un dialogue... C'était assez rare... Bref il fallait que je trouve quelque chose à dire afin de pas passer ridicule devant Kujara. Mais ce dernier repris la parole, j'étais un peu sauvé... Enfin il était évident que j'allais devoir plus parler si je voulais en savoir plus sur lui... Mais la phrase qu'il prononçant me fit un léger choc... Le fait que j’apprécie cette endroit...


¤C'est vrai. Mais disons que je n'ai pas grand chose d'autre à apprécier vois-tu...¤

Cela m'avais échappé, c'était pas bien vu de ma part d'étaler mon point de vue comme ça à une personne dont je connais juste le nom. Bref le mal était fait, ou pas ! Bref peut être cela engagerait une conversation intéressante après out , je le ui avait tendu une perche mais il fallait que je me réaffirme un peu... Je n'avais pas encore donner mon opinion sur le fait que je sache prendre du temps pour apprécier les belles choses...


¤Et comme je n'ai pas grand chose à faire, je viens ici... Je songe au passé...¤

J'étais reparti vers le passé il fallait que j'arrête ça mais c'était plus facile à dire qu'à faire...

« Le passé ? » Répéta-t-il à mi-voix.

Il y a des choses à apprendre dans le passé. Il y a des choses à ne pas oublier dans le passé. Il y a des choses à comprendre dans le passé. Et il y a des mystères qui jamais ne seront révélés dans le passé. C’était en tout cas le point de vu de Kujara sur la question mais contrairement à son interlocuteur, il ne le révélait pas aussi facilement. Ce n’était pas son genre de philosopher avec des inconnus dès le premier soir voyons ! Mais dans le fond, pourquoi pas ? Il n’y avait pas mort d’homme à parler un peu avec son voisin. Ils étaient tous les deux des Sunajin et vraisemblablement des Ninjas. Autrement dit, des collègues de travail dans la vie et dans la mort. Bon, c’était un peu extrême comme vision des choses mais dans l’idée, c’était cela !

« Du passé découle notre présent à tous. » Reprit-il après une minute de silence. « C’est lui qui a posé les bases de notre univers immédiat. Mais… »

Mais quoi ? Lui-même reconnaissait la toute puissance du passé dans le destin des Hommes. Qui pouvait s’en détacher ? Mais la réponse à cette question, il la connaissait déjà. Et il n’était pas la personne à laquelle il pensait. Le jeune homme n’avait d’ailleurs jamais rencontré quiconque ressemblant à ce qu’il avait en tête en cet instant.

« Mais… Celui qui sait cela, sait également comment vivre sa vie sans se reposer sur le passé, et en cherchant à aller au-delà du présent, vers l’avenir. »

Kujara s’étira en faisant craquer ses cervicales et tourna son regard vers Zenpetsu. Ce qu’il allait dire, à un inconnu de surcroit, était sans doute incompréhensible mais le jeune homme n’aimait guère commencer un discours sans le terminer. Surement -sans doute- à cause de sa grand-mère qui elle-même ne supportait pas qu’on la coupe dans l’élan de ses paroles. On prend les tics de ses parents, c’est normal. Libre est celui-ci qui peut vivre sans se soucier du passé, libre de ses entraves. Mais quelqu’un comme ça existe-t-il ? Non, c’est impossible.

« Ni toi ni moi n’en sommes capables. » Puis il détourna le regard et replongea dans la contemplation du désert infini…