« Debout là-d’dans. Et puis d’abord, y’a qu’les clochards qui dorment sur le bord de la route. »

Et disant cela j’assénai une petite claque sur la joue tendue qui se présentait à moi, dans l’espoir que ça réveillerait le gars. C’était que je ne savais pas trop comment m’y prendre moi pour le sortir de là, d’autant que j’avais fait un trop long voyage pour être encore en mesure de réfléchir à ce genre de question existentielle. La route de Suna à Kumo en avait été particulièrement riche par ailleurs, et il ne s'était pas agi seulement de se demander pourquoi il existait une discrimination parmi les Pokémons qui faisait que certains évoluaient trois fois tandis que d'autres non. Cela avait été des questions bien plus noires et profondes... Mais d'abord, il fallait expliquer le pourquoi du comment je me trouvais ici, sans quoi on ne pouvait saisir la subtilité de mes préoccupations. Ainsi, j'avais reçu il y avait de là deux jours - peut-être un peu moins ou un peu plus, quelle importance - pour ordre de prêter main forte à notre chère nation alliée dans le cadre d'une mission. Personnellement, je n'avais rien à redire sur le fond ; enfin quoi, c'était bien normal que de s'entraider, quand bien même le niveau de la mission ne serait guère élevé. Mais je vous avouerai que mon avis se modifia légèrement après avoir appris la véritable teneur de ladite mission... Des Drag Queen et des Scatophiles ? Mais qu'ils restent dans leur merde ces Kumojins ! Blague pas drôle à part, j'avais fait quoi pour mériter cette punition ? Tout ceci me semblait si peu sérieux, et pourtant des vies étaient en jeu visiblement... Enfin, il était clair que mon opinion jusque là positive sur nos alliés était pas mal compromise.

Tout au long de mon périple jusqu'aux portes de Kumo, j'y avais songé. Peut-être que de sortir d'une campagne m'avait fermé l'esprit aux choses absurdes - quoi que ce fut complètement faux, car on avait bien des personnes bizarres à Suna que j'appréciais... Je me demandais néanmoins ce qui pouvait à ce point foirer dans l'esprit d'un Homme pour qu'il dégénère ainsi. Je devais préciser tout de même que j'avais globalement été préparée du côté Drag Queen : les rumeurs, que je prenais assez au sérieux en bonne naïve, allaient bon train sur l'existance d'une communauté gay très présente à Kumo - en tête de liste, les utilisateurs du Shoton semblaient mener le mouvement, mais la consanguinité des Seki n'était pas en reste - alors que des hommes décident simplement de parodier les femmes ne m'étonnait que partiellement. C'était dans la continuité. Pour les autres... C'était juste contre nature, et ça me dérangeait. Pas de mal à cela, j'allais pas leur vomir dessus, j'étais juste pas dans le délire. Et si j'avais l'air de prendre les choses avec une étrange application, c'est que je craignais que cette mission ne devienne un bazar complet avant son aboutissement et que je me retrouve dans un état lamentable. Aux abords de Kaminari mes réflexions avaient toutefois trouvées leur conclusion dans un magnifique : « De toute, j'suis avec un autochtone. C'lui qui prendra tout. » Non, il n'existe pas de pitié dans mon monde.

J'étais arrivée sur le point de rendez-vous logiquement établi avec une grande sérénité, contre toute attente. La fatigue cérébrale et émotionnelle y étant pour quelque chose. Et voilà que l'on rejoignait l'instant présent où je tâchais de réveiller le gars. Il m'avait paru déjà le connaître, à mon premier regard dans sa direction, et cette impression perdurait maintenant que je l'observais de plus près. C'était bizarre, je trouvais. D'ailleurs tout était toujours très bizarre autour de moi. Je me penchai légèrement au-dessus de lui pour le détailler. Un sosie à Suna ? Peu probable, le Soleil empêchait généralement les blonds à la peau claire. Tout en essayant vainement de me rappeler où est-ce que j'avais déjà vu ce visage, je me relevai promptement dès qu'il fit mine d'ouvrir les yeux.

« Ah ! Salut. Je suis Kitako, de Suna. Serais-tu... Shinji ? »

Pure question rhétorique. Et au passage, je venais de trouver une explication à mon impression de déjà vu. Ce type avait la tête du Luxray Shiney qui figurait sur un poster géant dans ma chambre. Incroyable ce que pouvait faire la Nature.

Alala ... Une bonne sieste ! Il y a vraiment rien de mieux. C'était ce que Shinji se disait. En effet, le bougre était contre un arbre en train d'attendre le genin de Suna qui était son partenaire pour une mission plus qu'original. Le Dentô avait du mal a trouvé le sommeil sous ce magnifique ciel de printemps. En effet, il pensait à beaucoup trop de choses. Il était aussi dégouté d'avoir reçus cette mission. Non pas par l'aspect débectant de cette mission mais, plutôt par le fait qu'il se tape toujours des missions de merdes -c'est d'autant plus le cas ici- et qu'il n'a jamais l'occasion de faire des missions prestigieuses. En effet, le bougre n'a pas fait beaucoup de mission car, il a été vite dégouté des missions qu'on lui donnait. Pour sa première mission, le genin devait attraper un chien. Si c'est possible de faire plus pathétique que ça ... Appelais moi ! Sa deuxième mission consistait à défendre une maison pendant que son propriétaire était absent. Cela semblait être une bonne mission mais, une fois que le manipulateur de la lumière a rencontré le propriétaire, la mission est devenue très ... dur. En effet, cet homme est, comment dire ça sans être délicat ... GAY ! Oui c'est le mot. Alors, c'est compréhensible quand on voit un gars comme Shinji, qui est parfait en tout point, de vouloir lui sauter dessus mais, il y a quand même des limites. Enfin, il faut dire que c'était les seules missions qu'il avait fait tout seul et ça lui donnait pas envie de continuer. Par conséquent, il s'était dit qu'une mission à plusieurs ce serait sympa. Après tout, plus on est fous, plus on rit. Encore un proverbe à la con. En effet, dernière mission que le bougre avait fait à plusieurs, il avait failli se faire atomiser la gueule par son partenaire. Sympa les petites ballades à plusieurs. Du coup, l'éternel flambeau c'était dit que les missions, c'était pas pour lui. Seulement là, on lui a pas laissé le choix.On lui refile une mission plus que déroutante et en plus on le fout avec un inconnu. La journée va être très sympathique …

Enfin, après quelques minutes, Le Dentô trouva finalement le sommeil. Le soleil était assez doux ce qui était rare dans le territoire de Kaminari no Kuni. Le bougre fit un rêve plus qu'étrange qui mélangeait des bêtes inconnues avec des personnes plus qu'inquiétante. Des hommes déguiser en femme attaquaient sauvagement le maître de la lumière. Celui-ci ne pouvait rien faire car, des personnes plus que dégoutantes l'immobilisait. Il avait beau lutter de toutes ces forces, il ne pouvait rien faire. Quand soudain, une jeune femme arriva et mit deux trois coups de savates pour calmer l'ardeur de ces personnes aux pratiques étranges. La jeune femme libéra Shinji et le gifla ensuite. De plus, sans aucune explication, elle prit sa tête la plongea dans des excréments. L'éternel flambeau ne pouvait plus respirer et il avait aussi une petite envie de déballer son repas du midi. Il se réveilla finalement en étant complètement affolé. Cette mission l'avait réellement troublé. Le genin garda les yeux fermés pendant quelques instants pour ne pas être éblouit par la lumière du soleil. Il ouvra alors ses yeux doucement et vit une personne qui lui était inconnu.

N'étant pas très bien réveillait, le blondinet fit un bon en arrière. Cette personne ne lui disait absolument rien. De plus, cette personne portait le bandeau de Suna. L'homme aux cheveux d'or quitta sa position de défense. Il venait de comprendre que c'était le genin avec qui il devait faire la dite mission. Il n'arrivait pas à bien voir qui était cette personne étant donné qu'il avait encore un oeil fermé et l'autre à moitié ouvert. Se réveiller n'a jamais été facile. Après quelques secondes de blanc, l'inconnue prit la parole. La personne s'exclama et salua le Dentô. Cet inconnu s'appelait Kitako et il venait de Suna. Le genin ne calcula pas dans un premier temps mais, après quelques secondes, il se rendit compte que l'inconnue était en fait le genin que Suna avait envoyé à Kumo et qu'en plus, ba c'était une fille. Le réveille est vraiment dur. Elle demanda ensuite si la personne était bien Shinji. Le bougre prit alors la parole tout en s'étirant.


Cette question peut paraître bizarre mais, le Dentô ne voudrait pas se faire prendre par surprise. En effet, si la jeune femme a les mêmes pratiques que l'un des deux clans, elle pourrait facilement se retourner contre Shinji. La prudence est donc de mise. Puis bon, vu son apparence, le Dentô avait le droit d'avoir des doutes ...

Spoiler:

Ok, il ne finirait pas la mission lui. Du moins, pas comme il l’aurait commencé. J’étais venue, je l’avais abordé gentiment, en mode zen-j’suis-une-pote-de-Suna-wesh, et voilà qu’à peine il ouvrait la bouche il m’irritait. Comme quoi on pouvait ressembler à l'une des choses les plus cools de ce monde (parce que l'air de rien Luxray il était classe) et n'avoir absolument rien de cool en vrai. J’avais une tête de PQ pour qu’il ose penser une seule seconde que je puisse avoir les mêmes délires que ces gens ? Eh, mais il allait se prendre mon poing dans la figure une deuxième fois hein… Mais en bonne enfant, parce que je savais prendre les choses du bon côté, je souris vaguement. Un sourire qui laissait penser que j’acceptais avec sollicitude ses remarques, pour ne pas entacher cette magnifique coopération qui n’en était qu’à ses balbutiements. Je me prenais par ailleurs quelques longues secondes avant de lui répondre. Ce n’était pas pour choisir mes mots : ils étaient déjà là, sur le bout de mes lèvres, prêts à gicler avec la même rudesse qu’à mon habitude. Mais j’essayais de déceler dans son attitude une marque qui m’aurait aidé à comprendre s’il était réellement sérieux dans ses propos. Un doute m'avait saisie, l'espace d'un court instant, et j'avais pensé que peut-être cela avait été une boutade, un essai raté de plaisanterie. Je faisais souvent ça moi aussi, après tout. Sauf qu'il me paraissait tout à fait sûr de lui et sincère. Alors je posai une main sur ma hanche et toujours accompagnée d'un magnifique sourire qui rendrait jaloux le soleil, je déclarai d'une voix forte.

« Non, non, je te rassure, y'a qu'à Kumo que les gens ne sont pas normaux comme ça. »

Et disant cela, je m'esclaffai gaiement. Aller, c'était de bonne guerre, il ne pouvait m'en vouloir après avoir ne serait-ce qu'envisagé la possibilité que je sois de leurs bords. Je me souvenais néanmoins que l'on me reprochait souvent cette façon, sans subtilité, de dire les choses et comme pour renverser complètement la situation à mon avantage je décidai de passer outre ces reproches quitte à l'exagérer. Je me lançais donc dans un petit jeu qui m'amusait toujours beaucoup.

« Enfin... Pour tout te dire, si on m'a demandée de venir sur cette mission, c'est parce que je connais un peu un des deux milieux. Je crois qu'il est nécessaire que tu le sache, puisque tu te pose des questions, mais je suis en réalité un trans. Je me suis faite opérer et tout. » Et j'ajoutais avec un clin d'oeil lourd de sous-entendus vilains : « Je te montrerai mes cicatrices, si tu veux. »

My God, faites que jamais ma pauvre mère n'apprenne de quelle sorte je venais de bafouer le sexe qu'elle avait eu la bonté de m'accorder. Je crois qu'elle en perdrait la raison, si l'une de ses filles attentait à son genre. Pour en revenir à notre conversation, j'avais tout dégainé avec la même attitude que jusqu'alors pour que le doute soit le plus présent possible. C'était gros ce que je racontais, mais d'un autre côté je l'affirmais avec une telle décontractation... Ah, ah. Qu'est-ce qu'il allait répondre cette fois ? Peut-être qu'il s'enfuirait soudainement, ou qu'il garderait juste un peu plus ses distances ? J'en rigolais d'avance. En même temps, sa question débile avait mérité cette brillante réponse.
Bon, par contre, nous perdions un temps considérable avec ces histoires. D'habitude je n'étais pas si préoccupée par l'heure ou l'optimisation du temps, étant plutôt partisane de la flemmardise notamment, mais cette mission me semblait plutôt conséquente et j'avais encore une longue route après pour retourner chez moi... Je ne comptais pas rester ici éternellement - ah, ça, surtout pas même ! Alors claquant des mains j'imprimai un mouvement dynamique dans l'air comme pour motiver notre petit groupe de deux.

« Bon, je me fous complètement de tes orientations et autres fantasmes, personnellement. Donc je propose qu'on y aille, et que tu ouvre la marche vu que je connais pas les lieux. »

J'hésitai à lancer une ultime remarque piquante du genre "Je surveille tes arrières, t'inquiètes pas.", mais je songeai que ça ferait perdre toute son impulsion à ma petite proposition alors je ne dis rien. Ce serait pour une prochaine fois. Enfin on prenait la route, en direction de ce fameux village, théâtre de bien des choses étranges. Et malgré la légèreté qui avait été présente jusqu'à présent, je tâchais de me rappeler qu'il s'agissait avant tout d'une guerre de clan. Un conflit à régler. D'ailleurs, faudrait peut-être que je dise un jour à ce petit Shinji qu'il ne compte pas sur moi pour me battre, même si sa vie en dépendait - surtout s'il s'agissait de sa vie, en fait.

Spoiler:

Le Dentô était en train de regarder la jeune femme avec un air un peu mesquin. En effet, s'il y avait sorti cette phrase, c'était à la fois pour se renseigner un peu sur le caractère de sa partenaire et aussi parce que ... Ba parce que c'est un peu vrai. En effet, on ne voit pas tous les jours des spécimens comme ça. La femme avait des cheveux verts. Sérieusement dans quel monde on est ? Merde, elle a choisi d'avoir les cheveux verts ! On ne nait pas comme ça ! C'est pas possible. Quand on voit cette fille, on peut que se dire quelle un problème et comme de par hasard, on m'envoie une fille louche dans une mission louche ... Coïncidence ? Je ne pense pas. En tout cas, s'il y a eu opération, c'est pas du travail bâclé. Il y a vraiment tout pour faire croire que c'est une femme. Non franchement les médecins font ça bien maintenant. Puis bon, faut comprendre Shinji. Le gars se réveille d'un cauchemar et il voit un monstre sauvage devant lui. C'est normal que le gars panique. Il faut quand même reconnaître que le blondinet avait un peu exagéré. Mais bon, au moins comme cela il en aura le coeur net. Cependant, il y avait un truc - plutôt deux- qui faisait quand même penser que c'était plus une femme qu'un homme. Enfin, les travelos et leurs délires ...

La jeune femme prit alors la parole. Elle affirma qu'il y avait qu'à Kumo que les gens n'étaient pas normaux. Un léger sourire apparut sur le visage de Shinji. Elle avait prit ses propos à la rigolade. Tant mieux. Il savait alors qu'il n'allait pas s'ennuyer. Car oui, bien s'amuser en mission est important. Il savait alors dort et déjà qu'avec cette chose, le trajet ne serait pas ennuyeux. Le blondinet se répéta les paroles de Kitako dans sa tête. Pour le coup, elle marquait un point. Il faut que les dégénérés se trouvent à Kumo ... Ba oui sinon c'est pas marrant. Du coup, le genin en prend pour son grade. En même temps, quand on regarde les gens qui se trouvent à Kumo, on se dit que la Sunajin n'a vraiment pas tord. Enfin, c'est la vie. L'homme aux cheveux d'or prit alors la parole avec un sourire plutôt discret.


En finissant sa phrase, le Dentô ne put s'empêcher d'afficher un sourire. Une petite provocation mêlée à de l'arrogance, il savait que Kitako ne resterait pas de marbre. Après tout, ce ne sont que des petits pics lancés innocemment. Enfin, si la jeune femme a bien prit le fait que Shinji lui demande si c'était un homme, elle doit surement bien prendre cela aussi. Un bref silence se déroula quand la Sunajin décida de reprendre la parole. Elle expliqua que si elle avait été choisi dans cette mission, c'est parce qu'elle connait l'un des deux milieux. En effet, elle continua son explication en disant qu'elle était un trans et qu'elle s'était fait opérer. L'éternel flambeau resta de marbre pendant un instant, puis, il s'imagina des trucs dans sa tête. Il essayait de s'imaginer cette chose avant son opération. Il y arriva aisément puisqu'il n'y a pas une si grande différence excepté le ... Bref, le Dentô arrêta de faire des blagues tout seul et écouta la fin de la tirade de Kitako. Elle ajouta, avec un clin d'oeil, que s'il voulait, elle lui montrerait ses cicatrices. Le blondinet rigola intérieurement mais n'afficha rien sur son visage. Bizarrement, il appréciait cet échange de quelques ''banalités''. C'était assez ... dépaysant. Le genin de ne perdit pas de temps et répondit.


Avec un air un peu pervers, Shinji conclut sa tirade. Il espérait que la jeune femme réagirait pour que Shin' puisse rigoler un bon coup. D'habitude, il n'était jamais comme ça. Il a toujours été quelqu'un de sérieux qui vivait selon d'étroits principes. Il faut croire que depuis qu'il est à Kumo, le genin a bien changé. Le Dentô se frotta les yeux et se demanda quand est-ce que les deux shinobis allaient partir. C'est vrai que la sieste de l'éternel flambeau avait un peu retardé les choses mais bon du coup, cette conversation plus qu'original les retardé encore plus. D'ailleurs, la jeune femme s'exclama qu'il fallait partir et que le Dentô devait ouvrir la marche car, il connaissait mieux les lieux. Bien sûr, avant de dire tout ça, la Sunajin ajouta qu'elle s'en foutait des orientations et des fantasmes du Kumojin. Le blondinet prit aussitôt la parole.


Sur cette dernière tirade, Shinji fit un signe à Kitako et les deux lurons commencèrent leur voyage. Il savait qu'il y en avait pour quelques heures. Cependant, il n'avait pas beaucoup de renseignement sur la Sunajin. Il savait qu'elle était fraichement promue mais, après ... Il lui fallait savoir si elle serait utile en combat où bien si elle serait un gros boulet. Pour le coup, le manipulateur de la lumière avait sa petite idée. Après quelques minutes de marches, le Dentô prit la parole.

Il avait haute estime de lui, c’était clair. Pas une once de compassion pour ses camarades Kumojins, et il n’hésitait pas à les enfoncer même. Je m’étais attendue à le voir manifester son désaccord, mais en fait il admettait parfaitement qu’ils soient bizarres. C’était pas drôooooole ! Et il était censé sauver l’image de Kumo dans tout ça ? J’avais juste envie de lui taper affectueusement la tête en rigolant et de lui dire d’aller jouer avec ses soldats plus loin. Le « tap tap » power, voyez. L’égocentrisme, le narcissisme, et autres formes de mise en valeur abusive de soi étaient toujours accueillies de la sorte chez moi. Parce que c’était comme voir un gamin d’la ville pleurer auprès de sa mère. Enfin, si mon gosse me faisait ça un jour, il pourrait toujours pleurer qu’il n’obtiendrait rien. Mais je m’égare, là. Je lui rendais donc son sourire, acceptant avec un brin d’amusement cette provocation. Il serait déçu s’il avait espéré tester ma réaction : je ne lui en donnais aucune. Il devrait se nourrir de ce sourire uniquement. Il n’était pas drôle, je l’étais pas non plus. Donnant-donnant, 50/50, kif-kif. J’dois être cruelle des fois. Mais je raconte un peu n’importe quoi là, j’crois.

Je pris plaisir à l’entendre sur mes supposées cicatrices. Il était entré dans le jeu sans crainte, à ma plus grande satisfaction. Je n’avais personnellement aucun complexe, quel que soit le sujet. J’avais appris à ne pas avoir honte, jamais, et surtout à rire de tout. Il fallait faire preuve d’une grande autodérision lorsque, comme moi, on venait d’un lieu misérable et méconnu : pour camoufler ce malheur et cette situation d’être inférieur. Pour que les gens croient qu’on ne souffre pas, qu’il n’y ait pas de pitié dans leurs yeux. La perversion de ses propos était surement l’élément définitif à l’établissement de notre relation. Voilà, nous n’étions plus tout à fait des étrangers, et cette discussion avait pris une tournure qui nous donnait un air comme complice. Je m’approchai un peu de lui, comme pour renforcer cette complicité, et je lâchai en ultime bafouille.

« Tes rêves deviennent réalité. T’auras même le droit de les chercher. Tu ne seras pas déçu, mon chou, c’est promis. »

J’humidifiai ma lèvre d’un passage de langue. Ses rêves… Oui, vu sa petite bouille, ce gars-là n’avait jamais concrétisé. Ah, c’était peut-être bas ce que je faisais là, surtout que sa pauvre imagination d’homme allait bien le travailler maintenant – bah quoi, c’est normal quand on voit un corps de rêve comme le mien. J’étais cruelle ? Ya ya ya ! En fait, j’allais peut-être même le traumatiser complètement d’ici la fin de cette mission… C’était plutôt réjouissant, dans les faits. C’était un peu comme dans les Meuporg – pour les incultes : par ici – il y avait la mission principale, et les quêtes secondaires. Et généralement, comme la quête principale est carrément chiante, on s’intéresse un peu plus aux secondaires qui font gagner, sinon une tune non négligeable, un max de skill. Quête secondaire N.1 : Se faire passer pour un trans'. Quête secondaire N.2 : Mettre ce p'tit grand en transe ! Et comme je ne recule devant rien, j'accepte et je m'amuse. Déjà, il commençait à avoir le même humour douteux, vu qu'il sortit précisément LA blague que je m'étais interdite sur ses arrières. Cela me donnait néanmoins une idée vraiment géniale pour le traumatiser, mais qui me répulsait presque autant que les Scatophiles. Je la mettais donc de côté : il ne faut pas déconner avec les quêtes, elles méritent pas qu'on mette sa vie, ou pire son honneur, en jeu.

Sur ses joyeuses pensées, on avait pris la route. Je ne disais plus un mot, accablée de songes un peu plus sérieux qui ne gagnaient rien à être partagés. Shinji aussi devait s'être assagi soudainement, car il m'interrogea très vite sur mes super aptitudes de roxxor... Du genre inconnu ? Excuse le môsieur qui est Dentô ! Nan mais il se la ramenait pas mal là. Et avec un soupçon de vexation, je lui lançai un sourire pincé. De deux choses l'une : qu'il n'espère pas m'ajouter à son pokédex, je ne divulgais pas aussi facilement mes capacités. Le genre inconnu allait le rester, tiens ! Je sentais un peu comme ma fierté piquée à vif. Même si ses propos étaient probablement légitimes, et que je n'avais malheureusement pas grand-chose à offrir pour le contredire. Je me prenais quelques secondes cependant, pour chasser l'indignation subite.

« Chez moi c'est la cambrousse, on connaît pas les Dentô, vous servez à quoi ? » C'était un peu raté pour le ton vexé ; je soupirai avant de poursuivre plus sereinement. « Je suis marionettiste. Mais... Jiyû s'est cassé... »

Ma voix se brisa à cette évocation. Ce n'était pas tout à fait juste, car une marionnette ne pouvait se fendre comme du simple bois, à mon avis, mais c'était tout comme. Inutile. Un marionnettiste sans sa poupée n'était rien. Une brève lueur de tristesse passa dans mes yeux, et je l'éteignis immédiatement. Les gens n'avaient pas besoin de savoir quoi que ce soit. Alors je repris la même attitude désinvolte que jusqu'à présent pour continuer sur ma lancée. Il fallait décidément donner un coup de fouet à cette mission - la principale, hein. Et tout en accélérant légèrement pour faire une pression implicite sur Shinji, je poursuivis.

« Mais comme dit, j'suis au top pour parlementer avec les Drag, donc je n'serais pas une boulette, hé hé. On est comme ça à Suna, même sans stuff on vous roxxe. Bon, maintenant tu marches au p'tit trot sinon je sors le fouet. »

Et éviter un fouet, c'plus hard que de longer un mur pour surveiller ses arrières. Ça j'connais, en plus. Non j'suis pas maso - on ne peut pas être parfait non plus - mais à la ferme on fouettait les bêtes (et les idiots aussi, m'enfin). J'étais généralement du côté du sadique. C'était une expérience assez déplaisante, en vrai, que de sentir la lanière frapper la chair et vibrer jusqu'à vous faire sentir cette aura de puissance malsaine au plus profond de votre être. Appel à tous les sadiques : vous êtes des malades mentaux, vous me faites peur. Je lâchai un petit ricannement satisfait, et ne dis plus rien. Le cerveau avait ceci de fascinant qu'il pouvait passer de façon tout à fait logique mais surprenante d'un sujet à un autre. Aussi j'avais alors à l'esprit, une seconde après mes histoires de fouet, quelques interrogations qu'il fallait que je soumette à l'autre Kumojin. Je laissais néanmoins filer le temps m'attardant, pourvu que j'en aie encore les moyens, sur le paysage que nous traversions. Puis jugeant que j'avais fait le tour des choses et des réalités, je m'autorisais à briser le silence.

« Il nous faut un plan d'action. La séparation est inévitable, je crois... Peut-être pourrions-nous nous insérer dans leur clan, pour mieux cerner ce qui les oppose ? Ou je sais pas, tu as un plan plus... »

Plus shinobi, quoi. Merde, on était des forces armées après tout. M'enfin, j'aimais bien ma solution. Car qui disait insertion, signifiait une complète immersion dans les us et coutumes... Owi, man !