Une mission ? Le village était dans un état critique, mais tout ce que ces gens trouvaient à faire, c’était de confier des missions … Le marionnettiste s’en voulait, il avait pour la seconde fois dans sa vie ce désagréable goût amer dans la bouche, celui de la défaite. Il ne comprenait lui-même pas comment ce village avait réussit en si peu de temps à prendre une place si importante dans son cœur. Quelle ironie, alors qu’il s’était secrètement promis que le rêve de son frère ne devienne jamais le sien, voilà qu’il s’inquiétait pour le futur du village … Mais il y aurait d’autres temps pour la réflexion, place à l’action !

Allongé sur le toit partiellement détruit d’une batisse, le jeune homme manipulait un parchemin entre ses mains. C’était l’intitulé de la mission. Une histoire de vol en série qui l’aurait sûrement passionné dans un autre contexte. Ce type profitait du chaos dans le village pour effectuer ses crimes. Comble de l’ironie, il avait réussit à échapper à une équipe plus qualifiée… Alors pourquoi envoyer deux Genin pour faire le boulot ? Oui, parce que cette fois, Hayato ne serait pas seul, il avait été assigné avec un autre shinobi, un certain Sanzo… Enfin bref, le village grouillait d’animation, un peu comme il y a trois mois, lors de sa construction, tout le monde faisait de son mieux pour réparer les dégâts, il était également question de ne pas montrer sa faiblesse aux autres villages cachés, du coup, tout le personnel disponible partait aux quatre coins du pays. Au fur et à mesure que le temps passait l’adolescent prenait peu à peu conscience de cette réalité. Il s’était emporté et avait perdu de vue son objectif principal.

Levé aux aurores pour ne pas manquer les premiers rayons, il était arrivé au lieu de rendez-vous avec près d’une heure d’avance. Lorsque l’heure arriva, il bondit de son toit perché pour aller se placer au milieu de la rue. Soudain, surgissant depuis le coin de la rue, un type qui semblait avoir reconnu le marionnettiste, semblait s’approcher avec intérêt. S’il y avait bien une chose que la vie dans le désert enseignait, c’était que dans ce monde, il ne fallait jamais se fier aux apparences. Ne jamais partir sur des idées préconçues… Après trois mois dans le village, il avait commencé à se familiariser avec le système de grade, mais n’en tenait jamais rigueur… Ainsi, découvrir que son partenaire Genin était plus âgé que lui ne le choqua même pas.

- Moi c’est Hayato.

Une bonne chose de faite. Ils feraient plus ample connaissance au cours de la mission. Après avoir relu ce parchemin qu’il connaissait pourtant presque par cœur, le jeune homme brandit le rapport rédigé par la première équipe. Apparemment, même si la plupart des vols étaient assez disparate, on pouvait facilement délimiter une zone d’action. Il ne restait plus qu’à se mettre en route.

- Avant qu’on ne commence la mission, tu ne voudrais pas qu’on s’arrête au bout de la rue ? Je prends juste un bol de Soba et on y va…

En effet, le malheureux n’avait rien avalé de consistant depuis le début de la journée. Les Soba étaient avec les Ramen les nouilles les plus consommées à Suna. Un régale pour les papilles et une recette simple et rapide, voilà ce qui assurait le succès de ce plat au village caché du sable. Le groupe se mit donc en mouvement et ne tarda pas à atteindre la file pour les Soba. Ça ne prit qu’une poignée de secondes avant qu’Hayato ne jubile, bol pleins de nouille à la main. Et c’est ce moment d’intense plaisir que choisit cette pauvre dame pour hurler au vol…

Kawaguchi Sanzo... Il avait accepté le caprice du marionnettiste sans broncher. Tant mieux, au moins ils partiraient sur de bonnes bases. Ainsi, alors que cette malheureuse victime exposait sa plainte, Hayato, bol à la main, se contentait d’acquiescer de la tête, pour montrer que même la bouche pleine, il écoutait. Une fois le récit terminé, Sanzo se dressa rapidement pour l’épauler. L’identité de l’auteur de ce vol était évidente, c’était la cible ! Et il devait sûrement être encore dans les parages, puisque le fait était récent. Un homme munit d’un sac à main ne devait pas passer inaperçu. Mais il fallait faire vite !

- Pourriez-vous nous indiquer à quoi ressemble votre sac ? Dit-il en aspirant discrètement sa dernière nouille

- Oh, et bien c’est un grand sac, il y a beaucoup de place à l’intérieur. Malgré ses couleurs vives, il passe par tout et s’accorde avec toutes les saisons. Je l’aime tellement !Répondit-elle les yeux pétillants

Des couleurs vives, un grand sac... On avait déjà vu plus précis comme description. Mais les deux shinobi devraient faire avec, car en repensant à son merveilleux sac, la pauvre victime fondit en larmes, réalisant qu’elle ne le reverrait peut-être plus jamais. De toute façon, il fallait se mettre en route dès maintenant et coincer ce type avant qu’il ne récidive. Hayato sentait l’excitation monter, il était dans la peau d’un détective tentant de débusquer le criminel parmi la foule. Chose qu’il n’avait jamais expérimenté auparavant. Pensif, il passa ses deux mains derrière la tête et fit les cent pas pendant que Sanzo continua de calmer la victime. Ce dernier se tourna finalement vers le marionnettiste, déterminé à stopper le malfrat.

- Tu as raison Sanzo ! Le voleur ne doit pas être loin, en se postant sur les toits on devrait être en mesure de le coincer !

Sans perdre d’avantage de temps, le duo se posta sur les toits, de manière à pouvoir observer l’ensemble du quartier. Il était peut-être trop audacieux de penser qu’ils pourraient attraper le voleur rien qu’avec une faible description, mais au moins ils étaient aux premières loges pour une possible nouvelle tentative…

Cela faisait plusieurs minutes que le duo était ainsi posté sur les toits, à guetter les rues à la recherche d’un potentiel voleur. Regarder les passants marcher vers leur maison, rien de plus ennuyant. Heureusement, l’ennui ne fut que de courte de durée. En effet, Sanzo venait de repérer un sac qui collait parfaitement à la description faite par la victime. Seul souci, la personne qui le tenait était une femme. On pouvait toutefois penser que le voleur était un initié au ninjutsu et qu’il s’était métamorphosé, mais quelque chose n’allait pas dans cette hypothèse. Oui, il y avait une incohérence… La mission en elle-même n’était pas logique. Deux Genins, envoyés pour traquer un voleur à l’apparence d’un vieillard, qui aurait même réussit à berner des gradés… Hayato se grattait le menton, pensif, en visualisant dans sa tête les différents indices dont il disposait, pendant que Sanzo interceptait la cible.

A leur grand étonnement, cette jeune fille regarda les deux shinobis intriguée, demandant ce qu’il se passait. Elle rétorquait que ce sac lui appartenait depuis toujours et que c’était un cadeau d’anniversaire. Sa franchise désarçonna le groupe qui ne savait pas quoi faire. Devait-on la croire ? Son regard était plein de sincérité, il y avait même un peu de colère en elle. Sa voix posée, ne tremblait pas. Tout cela ne voulait rien dire, car le voleur pouvait très bien jouer la comédie, mais à un tel niveau, cela paraissait peu probable. Alors quoi, qui était-ce ? Hayato se mit en retrait pour y réfléchir plus sérieusement.

*Une mission de rang C, le suspect est un vieillard, d’autres ninjas ne l’ont pas trouvé, un vol commis il y a peu, le témoin a perdu son sac, sac identique retrouvée sur un passant, … Mais oui, c’est ça ! *

Un éclair illumine soudain l’esprit du jeune homme. D’après les informations qu’ils avaient reçues, le voleur avait l’apparence d’un vieillard. Or s’il en était vraiment un, il n’aurait jamais pu échapper aux précédents ninjas chargé de la mission, à moins d’avoir également reçu une formation. Il était donc fortement probable que ce vieillard soit rôdé au ninjutsu. Dans cette hypothèse, on pourrait alors très bien imaginer que le voleur se soit fait passé pour un vieillard grâce à une simple métamorphose. Le duo était donc parti sur la piste d’un vieillard qui n’avait probablement jamais existé. Ensuite, deuxième point qui dérangeait : cette prétendue « victime » qu’ils avaient interrogé plus tôt. Elle affirmait s’être fait voler son sac alors qu’elle marchait dans la rue. Mais depuis le début, quelque chose clochait dans cette explication sans qu’Hayato ne puisse mettre le doigt dessus. Et à l’instant, la réponse venait de lui apparaître, comme une révélation. Même si tu es distrait, il n’est pas possible de te prendre un sac pourtant accroché à ton bras sans que tu ne le remarques… Cette dame aurait donc menti, mais pourquoi ? Pourquoi avoir fait semblant de crier, pour ensuite faire un témoignage,etc… ? La réponse était l’évidence-même : se faire passer pour la victime, de quelle meilleure couverture un voleur pouvait-il bénéficier ?

- Vite ! Retournons près du resto, là où on a interrogé cette femme ! Je crois qu’on s’est fait berner par le voleur !

Et la chance était de la partie aujourd’hui ! Eprise d’une soudaine envie de casser la croute, cette jeune femme qui s’était prétendue victime ressortait justement du resto où Hayato avait mangé quelque minutes plus tôt, munie d’un plat à emporter. Elle n’avait pas l’air triste pour quelqu’un qui venait de se faire voler. D’ailleurs, comment avait-elle pu s’acheter cela si ses affaires – et son porte-monnaie entre autres – se trouvaient dans son sac ? Trop d’incohérence qui confortaient Hayato dans son intuition. Il était temps de mettre un terme à toute cette histoire.

- Alors, on s’offre une petite pause ? Je vois que la perte de votre sac ne vous affecte pas plus que ça…

- Oh, vous savez ce qu’on dit, un de perdu, dix de retrouvés ! Et puis ce n’est qu’une perte matérielle, des sacs j’en ai plusieurs chez moi.

- Dans ce cas, pourquoi avoir fait toute cette scène tout à l’heure ? Vous avez pleuré tout de même…

- Je suis, assez émotive… Répondit-elle sur la defensive

- Allons, cessons cette mascarade, je sais que le voleur n’est nulle autre que vous ! Annonça alors Hayato en la pointant du doigt d'un air théâtrale.

Démasquée, la jeune femme tenta de s’enfuir en courant. Elle bouscula ainsi plusieurs personnes et voulait se fondre dans la foule pour se transformer à nouveau. Malheureusement pour elle, Hayato ne l’avait pas quitté une seconde des yeux et subitement, un enfant s’approcha d’elle et l’enserra d’une force insoupçonnée pour l’empêcher de bouger. Le visage de cette enfant se craquela alors pour révéler celui d’une poupée de bois, aux cheveux rouges. Il s’agissait d’une marionnette qu’Hayato avait métamorphosée et qu’il contrôlait à distance. En tout cas, la cible était à présent neutralisée…