Silencieuse...

L'engrenage régissant le monde commencé à s'accélérer, les premiers rayons du soleil se faisaient apercevoir, tandis que tu tentais de te soustraire à leurs présences... Tu détestais la lumière, tout ce qu'elle représentait, cette chaleur hypocrite qui tendait à te faire sentir vivante...

Foutaise... Tu n'étais bien que dans l'ombre, qu'à l'abri des regards indiscrets. Tu aimais te prélasser sur la frontière de la réalité, entre l'existence et l'oubli. Tu n'avais aucune raison réelle de venir ici, toi qui fuyais comme la peste la compagnie des gens, toi qui serais capable de leur cracher à la gueule uniquement car ils ont osé te donner un peu d'attention.

Heureusement pour toi, tu avais cette particularité, cette élégance dans ta démarche qui te permettait de ne pas détourner les regards vers toi. Tu pouvais observer sans être vue, vivre sans prendre les risques associés à ce genre d'aventure... Le monde serait plus calme sans personne, sans aucun bruit pour venir te juger, pour venir se répercuter dans tes oreilles d'une manière des plus horribles.

Dans tout les cas, ce petit monde s'agitait de bon cœur, les premières étales, les plus matinales offraient la vision de leurs produits aux passants. Bien que tu ne ressentais pas grand chose, tu avais cette attirance pour les choses atypiques. Tu aimais te plaire dans l'art, bien que celui-ci te paraissait étranger dans tout ses aspects. Tu étais incapable de le comprendre, qu'il se retranscrive sur une tasse en porcelaine comme sur une toile en tissue, et pourtant, tu trouvais l'art réconfortant, apaisant.

Lorsque tu regardais une œuvre d'art, tu n'avais pas besoin de communiquer avec d'elle, d'échanger un quelconque contact. Elle s'offrait à toi sans aucune contrepartie déplaisante.

Mais, il n'y avait pas que ça parmi les stands des commerçants s'étant établit dans les ruelles parfois étroites de la citadelle. Il y avait des spécialités locales comme des produits d'autres pays. Tu n'étais pas experte en politique, ni même en commerce. En réalité, tu étais bien dépassée sur plusieurs aspects. Ainsi, tu n'arrivais pas à saisir comment un village en plein temps de guerre il n'y avait pas si longtemps que ça, pouvait se permettre un tel niveau d'activité.

Le monde avait tendance à aller trop vite pour toi, lorsque tu arrivais à l'assimiler, il changeait de nouveau en se complexifiant davantage...

Perdue l'espace d'un instant dans tes pensées, tu ne fis pas attention à ce gosse qui te percuta la jambe. Toi qui étais tellement inexistante dans le voile de la réalité ne s'était pas fait voir par un gamin qui n'avait même la prétention de dépasser la dizaine d'année. Il n'osa même pas s'excuser, un peu terrifié à la vue de ton masque atypique tu portais en toutes occasions.

Tu n'avais pour projet de te faire aimer des autres, de te faire apprécier en réalité... Tu ne considérais même pas une seule seconde le fait d'enlever ce masque pour te faire accepter par autrui... Qu'ils aillent crever en enfer...

T'adossant à un mur, tu restais bien penaude face à ce monde dont tu ne possédais aucune clé... Il semblait arriver à vivre, sans se soucier des dangers permanents qui rodaient autour d'eux. Bercés dans un voile d'illusion, provoqué par les parois en apparence robuste de la citadelle.

Pourtant, le simple fait que tu puisses, déambuler avec eux, dans ces rues privilégiées par le commerce, montrait qu'ils avaient toutes les raisons de s'inquiéter. Aucune homme censé n'oserait s'approcher de toi trop longtemps...

Mitigée...

En réalité, tu aurais aimé étirer cet instant le plus possible. Faire de ces minutes une éternité dont tu aurais savouré la tranquillité jusqu'au bout. Les citoyens passaient devant toi, sans te prêter attention, ils se dévoilaient à toi, s'offraient à toi par leurs présences. Inexpressive, cela ne rendait pourtant pas insensible aux expressions d'autrui. Tu aimais inspecter leurs démarches, écouter l'accent particulier qu'ils avaient.

A défaut d'être un être humain normalement formé, tu tendais à disséquer de tes yeux perçants l'homme pour en comprendre ce mécanisme fait de chair. Tu étais une éponge, engrangeant tout les éléments du monde extérieur. Néanmoins tu avais cette différence que même pressée, même déformée au possible, tu n'offrais rien en retour. Dans toute ton impolitesse, tu n'avais de toute façon que faire d'une étiquette sociale à respecter qui n'était pas la tienne.

Malgré tout cela, malgré ce moment reposant, le fait était tel que tu n'étais pas là véritablement pour observer ce peuple se dandiner dans un calme restreint. Tu étais là pour travailler... Un travail rabaissant, à devoir servir des la plupart du temps des ivrognes à la descente infinie.

Car, même si tu paraissais n'être qu'un pantin fait de bois, une statue d'argile, tu possédais des besoins physiologique. Des besoins que tu ne pouvais pas seulement remplir en te cachant à la face du monde. Ton travail en tant que soldat de la Citadelle n'étant pas suffisamment rémunéré, il fallait te trouver autre chose durant ton temps libre. Quelque chose capable de pallier à ce manque financier.

Bien entendu, tu étais l'employer idéal pour un avide de profit. Efficace, tu ne soumettais aucune contrainte à ton employeur, car c'était à travers l'obéissance que tu savais t'exprimer. Tu étais le parfait pigeon, et même dans ta rémunération, celle-ci se retrouvait bien en dessous de ce que tu aurais pu toucher en réalité.

Mais tu t'en foutais, c'était suffisant pour vivre, alors c'était suffisant tout court. Néanmoins, une fois les accords signés, le contrat établit, il avait tout intérêt à respecter ses termes. Sans quoi, tu savais aussi très bien remettre les choses à leurs places. Toi qui tendais à tout ranger dans ta vie chaotique, savait parfaitement rebondir sur ce genre d'imprévu.

Jamais en proie à la demie-mesure, ton obéissance était à la fois une denrée prisée mais aussi terriblement crainte.

Pénétrant dans l'établissement, personne ne se retourna vers toi, comme à ton habitude, tu ne t'étais faite remarquer d'aucune des poivrots qui s'étaient établit dans la petite auberge à l'allure modeste. C'était ton premier jour ici, ton premier jour de ton nouveau travail, et malgré ça, aucun stress, aucun pressentiment. Tu n'avais pas tant peur que ça de l'inconnu, bien au contraire, tu n'avais peur que d'une chose et celle-ci t'étais bien connue...

Le soleil ne battait pas encore à son zénith, tandis que ta journée commençait enfin. Tu ne craignais pas de devoir enlever ton masque, c'était l'unique condition que tu avais imposé avant de te faire embaucher. Condition que l'on n'avait pas refusé, lorsque l'on regardait toutes les contreparties plus que suffisantes que tu subissais. A la rigueur, tu irais effrayer les clients les moins averties, mais une fois l'ivresse ayant agit sur leurs neurones, ils n'allaient plus avoir assez de raisonnement pour faire attention à cette chose atypique que tu portais sur ton visage.

Te dirigeant vers le comptoir, tu faisais face à la femme du gérant, qui contrairement à celui-ci, possédait un véritable cœur.

Perdue...

En réalité, tu ne connaissais rien du métier. Tu n'étais pas terrifiée par le fait de rien ne savoir, mais cela n'empêchait de montrer clairement ton inexpérience dans la matière. Alors que tu toussotais pour te faire remarquer de la tenancière, tu te posais une multitude de question sur comment remplir ton rôle le plus efficacement possible.

Il te fallait néanmoins tousser encore plus fort, jusqu'à presque te décrocher les poumons pour qu'enfin, elle puisse poser un regard sur toi... Tu étais discrète, tu le savais... Il était très facile de dévier le regard de ta présence des plus simplistes... Mais il y avait quand même des limites à tolérer dans certains cas. Et lorsque ta propre absence commençait à jouer contre toi, cela avait le don de t'agacer.

Bien que tout était relatif. Lorsque tu étais agacer, seul un fin connaisseur pouvait oser prétendre voir ce léger tressaillement de sourcil. Unique marque d'une émotion ressentie au plus profond de ta tête. Une fois que ce petit interlude gênant se termina enfin, la femme marquée par les affres de l'âge avança vers toi.

- Oh bonjour. Désolée, je ne t'avais pas remarquer, il y a beaucoup de monde et beaucoup de client tu sais. Enfin bref, tu es la nouvelle c'est ça ? Mon mari m'a parlé de toi, ne t'inquiète pas, tes tâches seront basiques. Je sais aussi que tu as été autorisée à garder ton masque mais... Si tu pouvais en prendre un moins... Comment dire... Atypique. Voilà, atypique, la prochaine fois.

Atypique ? Elle osait critiquer ce qui était le plus cher à tes yeux. Bien qu'il n'était pas l'unique article dans ta collection de masque, tu te sentais insulter personnellement. Mais tu haussais les épaules au fond de toi. Elle ne t'avait pas forcé à l'enlever, alors il n'y avait aucune raison de s'énerver, aucune raison de réagir ou de lui donner tord. Tu ne voulais qu'une chose et sur l'instant, tu la possédais toujours entre tes mains.

Hochant la tête pour simple réponse, tu ne voulais toujours pas faire trembler tes cordes vocales. Tu détestais devoir parler, entendre le son de ta voix qui te paraissait des plus désagréables. Ton père t'avait tantôt toujours ordonné de te taire, que le bruit strident qui sortait de ta bouche ressemblait bien trop à celui de ta génitrice.

Mauvais souvenirs, que tu acceptais pourtant, non sans mal. Incapable de t'extirper d'eux par ta propre volonté qui n'était de toute manière trop faible, ce fut la tenancière qui te sauva de tes propres démons du passé. De sa voix mature, ayant perdue depuis bien longtemps toute sa maladie, elle s'adressa de nouveau à toi.

- Tu ferais bien de te diriger dans la pièce à coté. Afin de te changer et de porter la tenue de service. Puis, je demanderais à Mako de t'expliquer un peu quoi faire avant toutes choses. Prend ton temps pour aujourd'hui, familiarise toi à la taverne, mais d'ici demain je te veux capable comme n'importe quel autre travailleur ici. D'accord ?

Encore une fois, un simple mouvement de la tête pour certifier la compréhension de ses mots et ton acceptation vis à vis de son discours. Marchant vers ce qui pouvait être comparé à une geôle, tu te retrouvais dans une pièce sans ouverture vers le monde extérieur. Simplement quelques affaires jonchant le sol, appartenant très certainement aux autres employés qui faisaient tourné la petite battisse. Tu étais étonnée qu'il faille autant de mains compétentes pour faire tourner ce genre d'affaire.

Mais bon... Tu n'y connaissais rien, toi... Bonne qu'à faire les tâches les plus déplorables.

Patiente...

Tu t'étais changée, te trouvant alors dans un accoutrement inconfortable, mais uni aux couleurs de l'établissement. Apparemment, la modeste taverne semblait davantage se soucier de son image que du bien être de ses employer. Qu'importe... Tu avais pactisé pour cela, et tu n'allais pas remettre en cause les clauses du contrat verbale qui s'était établit entre vous.

Puis, aussi surprenant que cela puisse paraître, tu arrivais à comprendre ce choix. Ce monde était jeune, tout nouveau, dans une ère d'apparence paisible. Si on n'avait clairement diminué la fréquence des batailles sanguinaires, celles qui s'organisaient dans l'ombre ne s'étaient pas stoppées pour autant. Une véritable boucherie financière s'était établit, et chacun cherchait à se démarquer comme il pouvait du reste.

Tirer son épingle d'un jeu bien vicieux.

Ce n'était pas ta guerre en réalité, alors tu ne t'en souciais pas beaucoup. En cet instant, tu n'étais qu'une serveuse, que l'on avait embauché pour ses formes généreuses sous bien des aspects, laissant les rêves des clients longer ses courbes. Tu en avais conscience, mais tu ne sentais pas plus que cela dégradée. Tu n'avais de toute manière aucun amour propre pour ta personne.

Tandis que tu attendais la présence de cette fameuse personne, censée t'inculquer les rites du métier, celle-ci fit son irruption d'une manière des plus... brusques. Elle était l'opposée de toi, radieuse, excitée, turbulente. Elle n'avait pas tardé à remplir la pièce de sa présence à peine le premier pas posé.

- C'est toi Yu ? On m'a pas dit grand chose sur toi. Mais sache que je suis la plus ancienne que tu peux croiser ici, hormis la gérante. D'ailleurs, tu lui as parlé non ? Raconte ! Moi elle a toujours tendance à m'éviter, je sais pas pourquoi. Enfin c'est pas si grave, la dernière fois je lui ai raconté ce qu'il s'était passé avec mon copain. Elle te l'a raconté ? Non ? Alors laisse moi t'expliquer !

Trop de débit de parole, trop de bruit qui sortait de sa boite à merde qui lui servait de bouche. Si tu ne possédais pas un sang froid aussi prononcé, tu le lui aurais cloué avec un plaisir sadique. Tu ne la connaissais que depuis quelques secondes, et elle venait de totalement déchirer ta tranquillité d'esprit. Toi qui avait su te plonger dans un état de sérénité après tes petits instants d'observations du village.

Ferme là... C'est ce que tu aurais aimé lui dire. Mais contrairement à elle, si elle monopolisait le temps de parole, toi tu refusais de n'en saisir qu'un infime morceau. Heureusement que tu étais là, pour rééquilibrer la balance de l'univers. Sans quoi, elle aurait certainement déchiré le voile de la réalité rien qu'en racontant sa vie.

Alors, tu te contentas de tousser, la fixant de ton regard froid, inexpressif. De quoi la calmer dans son élan despotique.

- Ah ... Désolée ! J'ai tendance à m'emporter très facilement. D'ailleurs, ça me rappelle que mon amie Izumi me l'avait déjà dit la dernière fois. Enfin, elle avait eu des problèmes avec sa famille alors je sais pas vraiment si ça compte mais...

Cette fois-ci, tu menaçais de taper du poing sur le mur pour la ramener à la raison. Encore une fois, et ton kunai aurait tôt fait de lui trancher les cordes vocales. Plus de son, plus rien... Juste une tranquillité retrouvée.

Mais bon... Il fallait rester civiliser. Tu te doutais bien que cela n'allait pas être appréciée de tous si tu venais à mettre fin à ses jours... Quoi que... En réalité, elle n'allait certainement pas manquer à beaucoup de monde.

Exténuée...

Ses paroles étaient certainement capable d'absorber ton énergie vitale, sans aucun doute, pour peu que tu en possédais une once. Néanmoins, tu avais réussi à la faire taire, l'espace d'un instant, histoire de lui faire remarquer qu'elle était bien trop bruyante, bien trop lourde à supporter...

Pauvre petite... Tu ne la plaignait clairement pas, bien au contraire. Tu aurais voulu l'égorger en réalité, dans un calme les plus plats, sans aucune animosité apparente. Mais tu savais te retenir, rester dans l'inaction lorsque tu n'avais pas l'ordre d'agir.

- Excuse moi... Encore... Mais je suis certaine que tu m'en voudras ! Bon le boulot ! Alors c'est simple, tu débarrasses la table quand les clients sont partis puis tu les nettoies. Tu trouveras tout le nécessaire dans la pièce juste à coté. Bien entendu, tu es chargée de nettoyer les latrines pour toute la semaine. Tu viens d'arriver alors c'est la règle. Tu devras le faire après le service. D'ailleurs celui-ci va commencer dans une petite heure, il va falloir installer quelques tables. Ne fais pas attention aux habitués, ils boivent à chaque heure de la journée et ne partent que la nuit tombée, avec un peu de chance.

En réalité, tu venais d'arquer un sourcil. Mais celui-ci ne pouvait pas être vue par ton interlocutrice grâce à ton précieux masque. Encore une fois, tu fis un mouvement verticale de la tête pour affirmer que tu la suivais toujours. Elle parlait toujours autant mais au moins, c'était pour une bonne raison.

Nettoyer les latrines ? Cela ne te dérangeait pas. C'était moins détestable que devoir plonger tes mains dans les tripes d'un malheureux. Ce que tu pouvais affirmer en conaissance de cause.

Pour le moment, tu te contentais de reproduire avec exactitude les gestes de cette nana bien trop bruyante à ton gout. Elle ne la fermait jamais, et quand elle se mettait enfin à ne plus parler, alors elle gesticulait de partout, comme si elle avait un besoin constant d'affirmer sa présence.

Est-ce que le destin l'avait mit sur ta route pour que tu te retrouves face à ta véritable Némésis ? Étrange... En tout cas, même la gérante semblait exaspérée, sans parler du cuisinier qui se tairait au fond de sa cuisine afin d'éviter de croiser Mako. Franchement... Le pire dans tout cela, c'était qu'elle ne semblait se rendre compte de rien, bercé dans une illusion idyllique de naïveté dégoutante.

De manière générale, tu n'étais pas trop non plus maladroite face à tes nouvelles attributions. Tu étais un shinobi, compétent par ailleurs. Tu étais douées dans plusieurs domaines, notamment dans celui d'assassiner tes cibles sans te faire repérer. Cela demandait adresse, sang froid et adaptabilité. Des qualités que tu possédais sans l'ombre d'un doute. Tu ne pouvais pas arriver à ton stade sans une once de compétence derrière.

- Yu, passe un coup de balai au sol et ensuite tu viendras dresser les tables avec moi. Dépêche toi.

Tu semblais avoir compris que la bleusaille n'était pas traitée de la meilleur des manières ceci dit. Comme si le fait de rabaisser ses employer accordaient une productivité supérieure. Sans doute... Au moins, tu n'étais pas personne à t'offusquer pour ce genre de chose, obéissante comme tu étais, tu avais tôt fait de balayer le sol de manière effrénée.

Toujours ton masque affublé sur ton visage, il n'y avait pas grand chose qui pouvait t'atteindre dans ces conditions. Toi, le vilain corbeau du village.