L'histoire de la Citadelle d'Iwa commence avec l'arrivée en masse du clan Jisetsu dans les contrées du nord il y a des siècles et des siècles de cela. Après avoir parcouru le monde en communautés éparses à la recherche de tous les savoirs les plus précieux, les membres du clan choisirent de devenir en grande partie sédentaires et se massèrent au cœur de l'Atlas central, où il utilisèrent leur richesse et les facultés singulières de leurs Kinnegan pour bâtir une large et haute Citadelle, celle-là même qui trône encore fièrement aujourd'hui lovée dans les montagnes.

Pendant des siècles réservée à la recherche et à l'archivage du savoir, et peuplée quasi exclusivement de Jisetsu, la Citadelle connut nombre d'attaques à son encontre, de la part de groupes plus ou moins organisés mais qui convoitaient toujours la même chose : le fruit de siècles de travaux. Jamais cela n'a pu être prouvé, mais il s'est longtemps dit que plusieurs de ces attaques furent fomentées en partie par le clan Samui. Toujours est-il qu'aucune tentative ne parvint à son terme, et il fallut attendre l'avènement de l'Empire de Samui Kakeshuou, depuis le Pays des Cascades à l'est, pour que finalement la Citadelle se trouve pour la première fois occupée.

Remaniée, élargie, sécurisée, transformée en un véritable bastion militaire à la solde des impériaux, la Citadelle demeura un centre névralgique de la recherche sous l'égide du Kamui. Et lorsque plusieurs décennies plus tard le temps fut venu pour Tsuchi de se rebeller, le fief historique des Jisetsu devint un objectif stratégique capital qui centralisa bon nombre de ressources humaines et matérielles pour être repris. En toute logique, lorsque le Pays de la Terre dut former officiellement sa propre armée, son quartier général fut établi dans cette même Citadelle, au grand damne des Jisetsu qui se voyaient encore obligés de partager un bastion devenu de toute façon bien trop grand et labyrinthique pour leur clan seul.

An 0 : Samui Ryûga
Le noble capitaine des armées Samui, depuis son accès au titre de Shodaime Tsuchikage, a concentré ses efforts sur la traque et l'élimination des restes de l'Empire, au sein du pays et aux frontières. Conspué par les masses civiles, il s'est ainsi assuré une part minimum de leur bon sentiment.

Il existe presque autant de mentalités au sein du clan Bakushô que celui-ci ne compte de membres : tantôt exubérants, tantôt renfermés, chacun d'eux sait toutefois qu'il est le détenteur d'un pouvoir de destruction à nul autre pareil, capable de réduire en poussière en un instant ce qui aura pu demander des décennies de construction grâce à l'argile explosive malaxée par leurs bouches caractéristiques. On retrouve des caractères totalement divergents jusque dans les populations Bakushô les plus âgées, certains groupes prônant l'expression inconditionnelle de leur art destructeur tandis que d'autres encouragent la mesure et la tempérance, percevant leur pouvoir comme un don dangereux à manier avec précaution.

Les premiers hommes et femmes à développer le talent de l'explosion naquirent et prospérèrent au cœur du Pays de la Terre, dans les grandes chaînes de montagnes. C'est là, historiquement, que s'installèrent les premières communautés Bakushô, dans un environnement naturellement hostile qu'il domptèrent grâce à leurs compétences particulières. Nul obstacle de roche et de pierre ne pouvait en effet empêcher des Bakushô de s'installer où que ce soit dans ces reliefs dangereux, et rares étaient les autres tribus à vouloir chercher à provoquer ces hommes et ces femmes au tempérament parfois sulfureux, dont on requérait parfois les services, rémunérés, pour certains gros oeuvres. De bien des façons, les Bakushô se firent au fil du temps une communauté incontournable à Tsuchi, et bien heureux était le reste du pays de pouvoir compter sur l'équilibre, fragile, qui régnait dans le clan. Ce dernier ne tenta en effet jamais d'étendre son influence plus que de raison, en dépit d'exigences parfois scandaleuses formulées par les plus exubérants.

Les Bakushô demeurèrent une bombe à retardement jusqu'au jour où l'influence d'un certain Samui, lui aussi originaire du Pays de la Terre, ne commença à s'étendre à partir de Taki. Le souverain ambitieux et méthodique ne tarda pas à poser sa marque sur Tsuchi et y fédéra de force tous les clans et tribus qui résidaient encore hors des métropoles, ce qui ne fut pas pour plaire aux Bakushô qui se rebellèrent sauvagement. Certains, plus rares, choisirent une opposition plus passive et tentèrent de se soustraire à l'emprise impériale en se réfugiant plus profondément dans les montagnes, mais cela n'empêcha pas le clan de connaître en ces temps troublés les pertes les plus élevées de son histoire.

Le temps sous le joug du Kamui et de l'Empire passa, et régulièrement il était question de terroristes maniant des explosifs qui tentaient de s'en prendre aux sièges de pouvoir installés par le souverain Samui. Des révoltes souvent étouffées dans l'oeuf, mais qui contribuèrent à garder un souffle de résistance en vie à Tsuchi. Un souffle qui allait s'avérer crucial, quelques décennies plus tard, lorsque des foyers plus vivaces encore de résistance jaillirent de par le monde pour combattre l'Empire. Les Bakushô furent parmi les premiers à se joindre à la lutte, et ne furent pas les derniers à en pâtir des années durant. Une ferveur au combat qui ne leur valut pas pour autant une quelconque place de choix dans la hiérarchie militaire qui s'établit ensuite, ce qui pouvait s'avérer un terreau décisif pour la frustration et la colère d'un peuple pour le moins explosif et toujours indispensable à l'économie du pays.

Les Jinmenju, issus de la fission de l'arbre originel en une multitude d'individus au fil du temps, sont des personnes au goût très prononcé pour le secret, dont le plus grand a longtemps demeuré leur existence et leur nature mêmes. Capable d'héberger en eux plusieurs hommes et femmes de leur clan, les Jinmenju peuvent s'avérer plus ou moins stables psychiquement, dépendant du caractère de leurs hôtes, de leur nombre, ainsi que de leur prédisposition à mener continuellement des conversations intérieurs avec eux. La majorité demeure toutefois tout à fait capable de vivre normalement en société, ce qui représente leur plus grand atout, avec leur faculté à communier à longue distance, même si de façon superficielle, avec tous leurs semblables. Ce lien qui unit les Jinmenju n'est pas pour autant synonyme d'un sentiment familial uniforme : paradoxalement, les membres du clan apprécient même particulièrement cultiver leur individualité.

Hormis le point de liaison fondamental qui relie les Jinmenju entre eux, les membres du clan n'ont jamais partagé aucune ville ou village et n'ont, en apparence, jamais mis leurs forces en commun pour atteindre le moindre objectif.

En apparence, seulement. Car dans l'ombre, là où les Jinmenju brillent, ces derniers n'ont en réalité cessé d'ingérer dans les affaires de Tsuchi, et par conséquent du monde. Dotés d'un sens de la famille et de la filiation très particuliers, tous les membres originels du clan sont liés entre eux par un tissu invisible, qui facilite de façon subtile leur organisation à grande échelle. Après avoir oeuvré et prospéré à divers niveaux de la société dans un anonymat presque total, les Jinmenju durent cependant faire face à la lumière lorsque l'inquisition impériale, méthodique et implacable, mit au jour leur nature et leurs capacités. Une traque officieuse et brutale suivit dès lors tous les membres en activité du clan Jinmenju, et il se murmure que certains capturés auraient pu servir à d'odieuses expérimentations secrètes.

Sans surprise, lorsque vint le temps de la révolte organisée, les Jinmenju emboîtèrent le pas, quoi que de façon bien plus discrète et avec bien plus de précautions, aux autres groupes rebelles, afin de contribuer aux efforts contre l'Empire et le Kamui qui les avaient persécutés. Après la victoire acquise contre leur ennemi commun, les membres du clan seraient volontiers retournés à leur anonymat, mais cela était évidemment devenu impossible : traînés de force à la table, les Jinmenju durent se dévoiler encore un peu plus pour ne pas demeurer des intrigants dangereux aux yeux du nouveau pouvoir en place à Tsuchi.

Atouts militaires et politiques indéniables, capables de prouesses propres à eux seuls, les Jinmenju durent se plier aux compromis pour survivre dans le nouveau monde, mais qui sait ce que les membres du clans les mieux placés pouvaient avoir à présent en tête ?

Depuis que les premiers Jisetsu ont pu éveiller leurs pupilles dorées en des temps immémoriaux remontant aux premières batailles contre les Créatures de chakra, ceux-ci n'ont eu de cesse de rechercher la connaissance sous toutes ses formes. Êtres curieux de tout et obsédés par le savoir, ils se distinguent souvent pas un détachement assez prononcé, produit de leur intellect développé et de leur faculté innée à mêler le passé, le présent et le futur dans chacune de leurs actions. Un trait de caractère qui se retrouve aussi bien chez les chercheurs et historiens les plus sages du clan qu'au sein de la caste guerrière de celui-ci, qui n'hésite pas à utiliser les facultés uniques de leurs pupilles pour protéger par tous les moyens les travaux de leurs paires.

Autrefois un peuple de nomades, les Jisetsu finirent il y a des siècles de cela par s'établir au cœur des montagnes au sud de Tsuchi, non sans s'être auparavant attiré quelques inimitiés dans plusieurs pays comme auprès des machinistes Saibogu prospérant dans les vastes étendues désertiques du sud-ouest. Là, ils firent bâtir les fondations de ce qui allait devenir au fil des décennies une large Citadelle, centre du savoir et de la recherche où ils s'évertuèrent à compiler et façonner la connaissance universelle en la gardant jalousement en sécurité. Plusieurs fois, et pour diverses raisons au fil des années, cette Citadelle fut soumise aux sièges les plus sauvages de la part de clans guerriers désireux de s'approprier les secrets gardés par les Jisetsu, mais jamais aucune de ces tentatives n'aboutit.

Jusqu'au jour où la grande alliance politique et militaire née à Taki, et menée par le futur Empereur Samui Kakeshuou, finit par frapper aux portes de Tsuchi. Au départ appâté par la perspective de devenir un rouage essentiel mais toujours indépendant d'une machine gouvernementale plus grande et garante de la sécurité, le clan Jisetsu déchanta rapidement lorsque l'Empire s'enracina à Tsuchi et réquisitionna par la force tout ce qui pouvait lui être nécessaire. Malgré eux, les possesseurs du Kinnegan s'étaient enfermés eux-même dans une cage et bien que leur travail continua pendant tout le règne du Kamui, ils n'en étaient plus les uniques gardiens, ni même les seuls bénéficiaires. Documents, tomes et connaissances en tout genre migrèrent sans contrôle à cette période sans que quiconque au sein du clan puisse y faire quoi que ce soit, en dépit de quelques initiatives secrètes menées dans l'ombre par des groupuscules.

Ce fut une quarantaine d'années plus tard que l'un de ces groupes renégat parvint à faire pencher la balance, en s'alliant à plusieurs initiatives internes et externes à Tsuchi pour renverser l'Empire : les membres de la caste guerrière des Jisetsu venaient de reprendre l'ascendant sur leurs frères et sœurs érudits en leur montrant l'étendue de leurs erreurs passées. Devenue une véritable forteresse au fil de l'occupation impériale, avec ses quartiers, ses bâtiments militaires et civils, la Citadelle des Jisetsu devint le centre névralgique de la rébellion après plusieurs échauffourées majeures qui leur permirent d'en repousser les forces de l'Empire. Infrastructure surprotégée et renforcée au fil du temps, la Citadelle fut ensuite investie par l'armée officielle de Tsuchi et en devint le quartier général, ce qui ne fut pas pour plaire à une majorité des érudits Jisetsu qui craignaient là de répéter la même erreur qu'autrefois.

Mieux formée et plus aguerrie que jamais, la caste guerrière entendait bien changer la donne.

Le clan Samui représente la quintessence de ce que peut être l'aristocratie dans son expression la plus pure. Généralement hautains, les membres du clan sont bien conscients de la position qu'ils occupent sur l'échiquier du pays et n'hésitent pas à utiliser ce pouvoir à tous les niveaux possibles pour assurer la pérennité de leurs lignées et leur prospérité. Calculateurs, froids même entre eux, ils accordent une importance particulière au perfectionnement et se satisfont rarement de ce qui leur est trop facilement acquis, préférant obtenir encore davantage par le fruit de leur travail acharné et de leur motivation, quitte à devoir écraser, au propre comme au figuré, les obstacles qui se trouvent sur leur passage. Ils exècrent toutefois les expressions de violence trop directes et, si le choix leur est donné, préféreront toujours obtenir ce qu'ils désirent par d'autres moyens.

L'histoire du clan Samui commence par celle de ses membres fondateurs qui, voyant en leurs talents une expression de la pureté venue d'en haut, mirent en place les règles qui amenèrent au fil des décennies leur clan à se hisser dans l'aristocratie la plus prestigieuse et puissante de Tsuchi. Mêlant toujours leur finesse d'esprit à leur rigueur et leurs compétences martiales, ils rivalisèrent d'ingéniosité pour toujours se placer au mieux sur l'échiquier d'un monde devenu pragmatique et où aucun démon ne demeurait plus pour unir l'humanité contre lui.

La rigueur des Samui devint rapidement célèbre de par le monde, qu'elle soit envers les autres ou envers les membres de leur propre clan. C'est d'ailleurs cette ligne de conduite stricte qui valut au futur Kamui d'être initialement placé par ses paires aux confins des territoires sous leur influence, dans une cité sans grand intérêt du nom d'Itabei. L'histoire prouva, toutefois, que les idées et convictions de Samui Kakeshuou ne pouvaient être simplement balayées de la main, et le jour vint bientôt où le répugné s'éleva plus haut qu'aucun autre membre de son clan et commença à unir par la force tous les pays limitrophes sous sa bannière. D'abord sous couvert d'une union pleine de diplomatie, puis en tant que seul, unique et suprême souverain de son Empire.

Pendant le règne de Kakeshuou, les Samui coopérèrent globalement bien volontiers avec leur paire, l'aidant à asseoir son emprise sur Tsuchi grâce aux connections puissantes et aux racines fermement ancrées dans le pays que possédait le clan. Les maîtres de la glace prospérèrent ainsi aisément et assez naturellement pendant la durée du règne du Kamui, ce qui leur valut de s'attirer l'inimitié de certains pans de la population civile ainsi que de bon nombre de clans shinobis. Opérant bien souvent comme la main armée de Kakeshuou, tant sur le plan politique que militaire, les Samui furent pris de court lorsque les premiers réels mouvements organisés de rébellion firent surface avec des succès fracassants. Voyant le vent tourner, et témoin malgré tout des dérives et ambitions toujours grandissantes et insatiables de l'Empereur, le clan Samui se retira et aida, quoi que très subtilement, la rébellion à l'emporter.

Avoir joué un jeu dangereux après des décennies de collaboration n'empêcha pas les Samui de faire valoir aussitôt leur puissance, incontournable : c'est ainsi qu'à la tête de la Citadelle militaire qui fut inaugurée par la suite se trouva placé un membre de leur clan.

Les Seki, dans leur grand majorité, sont des être paisibles constamment en recherche d'introspection et de communion avec le chakra qui les entoure et qui les anime. En retrait de toutes considérations politiques, ils furent même parfois critiqués pour leur détachement et leur manque d'implication dans la vie du pays, notamment aux moments les plus critiques de son histoire. Antithèse totale des guerriers tatoués du nord, les Seki cherchent avant tout le sens de la vie dans la méditation, qui leur permet d'affiner leur compréhension du chakra, ses origines, ainsi que les responsabilités portées par les shinobi, qui le manipulent selon eux à tord et à travers.

Retraçant leurs origines jusqu'aux vallées du nord de Tsuchi, les membres du clan Seki n'ont jamais eu d'autre port d'attache que celui que leur dictait leurs besoins, tant physiques que spirituels. Dotés de prédispositions presque surnaturelles à percevoir et entrer en communion avec le chakra, les membres de ce clan ont parcouru les terres tantôt désolées tantôt grandioses du Pays de la Terre au fil des siècles, cherchant avant toute autre chose à parfaire leur lien avec l'énergie vitale, qui tient autant à leurs yeux d'une force bénéfique que d'une part d'ombre héritée des démons. La recherche d'équilibre perpétuelle des Seki leur valut avec le temps de s'éparpiller en diverses communautés à travers le pays, les membres du clan se mêlant graduellement et naturellement avec les populations civiles.

Mais si la majorité des Seki furent au fil de l'histoire des hommes et des femmes généralement vertueux, il existait également un courant contraire au sein du clan. Certains, plutôt que de rechercher la communion, la symbiose et l'équilibre, s'avéraient en effet plus prompts à poursuivre une quête de puissance sans fin, ce qui menaient ces Seki à de violentes extrémités lorsque leurs aspirations les heurtaient à d'autres clans shinobi. Et ce fut cette branche minoritaire qui embrassa la venue de l'Empire sur les terres de Tsuchi lorsque le Kamui commença à y étendre son dominion. En quête de pouvoir, ces Seki trouvèrent dans le règne tyrannique de Kakeshuou le moyen rêvé de parvenir à leurs fins.

Pendant ce temps, la grand majorité du clan tenta de se faire oublier : peu enclins à déclarer ou mener des guerres qu'importe le motif, il durent malgré tout laisser s'exprimer le penchant guerrier lié à leur maîtrise du chakra pour repousser et limiter l'influence impériale, qui ne semblait jamais vouloir cesser de se propager vers le nord. Cela leur valu, bien malgré eux, de se voir affubler de quelques titres pompeux par les villages les plus modestes, qui voyaient en eux des protecteurs et des gardiens. Aussi, lorsque dans l'ombre les premiers mouvements de rébellion organisée se mirent en mouvement, les Seki furent naturellement appelés à prendre les armes contre un régime qu'ils étaient connus pour avoir méprisé et tenu en respect pendant des dizaines d'années.

Ce fut donc à contrecœur que les membres du clan allièrent leurs talents à ceux des autres groupes investis dans cette entreprise, eux qui détestaient tant le conflit. Maintes fois, d'ailleurs, leur fut reproché leur manque d'implication dans cette guerre majeure et capitale pour la liberté, ce qui n'empêcha pas le nouveau régime, qui succéda à l'Empire à Tsuchi, d'offrir aux Seki une place de choix autours de la table pour le symbole qu'ils représentent aujourd'hui dans le cœur du peuple.

Les Suzurane sont des guerriers dans l'âme, et leurs tatouages claniques, qui mêlent souvent art alternatif et fuuinjutsu avancé, leurs permettent de canaliser leur rage au combat après avoir subi des blessures. Ce fonctionnement singulier se retrouve jusque dans leur façon de vivre, car là où dans la plupart des cultures la souffrance et la douleur sont simplement reléguées au rang d'indésirables à éviter à tout prix, les Suzurane les vénèrent presque comme des divinités à part entière. A ceci près, bien sûr, qu'aucune idole ne vient s'accaparer leur vénération. L'Homme né dans la souffrance, vit dans la souffrance et finit par s'éteindre : le credo du clan Suzurane est que cette fin, inéluctable, doit culminer dans une apothéose de douleur, symbole de leur existence écoulée, ce qui les pousse à toujours rechercher le combat de façon honorable ou non. Chaque sang versé, chaque cicatrice, représente aux yeux d'un Suzurane la qualité de vie qu'il a mené. Loin des aspirations politiques et économiques du commun des mortels, les membres du clan ne recherchent que l'accomplissement de leur credo, ce qui les mène le plus souvent à être perçus comme des brutes sans cervelles. Une approximation cependant très éloignée de la vérité.

Au fil du temps, les fiers guerriers aux tatouages ostentatoires oeuvrèrent d'arrache-pied pour se faire une place au nord du pays, mais durent à maintes reprises entrer en conflit avec le clan Samui, maître incontesté des montagnes gelées. Vivant en communautés semi-nomades, les groupes éparses qui composaient le clan Suzurane dans son entier aspiraient à bien peu en réalité : se sentir vivant. Toutefois, cet objectif ne pouvait décemment être atteint pour les guerriers tatoués que par la confrontation physique et brutale avec d'autres êtres humains : redoutés et crains, parfois à tord, les Suzurane projetèrent ainsi une image terrible aux yeux du reste du monde, qui se mit à les percevoir comme autant de criminels.

Défiant les conditions climatiques les plus inconfortables et les régimes féodaux successifs, les Suzurane durent cependant avouer leur impuissance lorsque la coalition devenue Empire de Samui Kakeshuou mit un frein terrible à leurs aspirations. Vaincus et repoussés par la rigueur et le génie militaire du Kamui, qui agrandit son Empire sans discontinuer, les Suzurane se réfugièrent pendant des décennies dans de petites chaînes de montagne au nord, délaissées même par les Samui pour leur pauvreté en ressources, et survécurent plus qu'ils ne vécurent. Et si des membres du clan se rappelaient bien sûr parfois leur fierté d’antan en allant trouver une mort honorable face aux troupes impériales, ces temps s'avérèrent très sombres pour le style de vie singulier des Suzurane.

Le clan fut toutefois approché et sollicité par un mouvement de révolte, quelques décennies plus tard. Mettant leur orgueil de côté une dernière fois pour participer à un mouvement collectif, commandé par les grand pontes venus d'autres clans, les Suzurane se distinguèrent de façon exceptionnelle pendant le long conflit généralisé qui s'ensuivit, traquant, anéantissant et fondant sur tous les adversaires que l'on leur désignait afin de mettre à bas l'Empire qui les avait forcé à vivre reclus et presque oubliés. Leur heure de gloire à son apogée et faisant oublier leur image passée leur permit pour la première fois d'obtenir une position forte, quoi que politique, au sein du nouveau régime.