Alors que je sors de chez moi, j’active mon spectre sans visage. Il est impossible de se déplacer dans ce village d’idiots sans être arrêtée pour être félicitée ou avoir ne serait qu’à dire bonjour à je ne sais quel connard que j’aurais croisé il y a huit ans et qui, désormais que je suis légèrement reconnue, se considère comme l’un de mes meilleurs amis. Honnêtement, les gens ont un sérieux problème et j’espères que le nouveau Raikage sera capable de remettre quelques pendules à l’heure – le seul avantage que j’y trouve, c’est que je peux me permettre d’être plus odieuse avec les gens. Ils ne font qu’apprécier de recevoir un peu d’attention. Soupirant calmement, je profite du son émis pour plonger les plus proches dans mon illusion, croisant le regard de quelques autres et altérant leur perception de ma personne. De toutes mes idées, celle-ci est définitivement la plus utile désormais. Je n’y aurais jamais cru si on ne me l’avait pas dit.

Toujours est-il que je dois voir Otoke, aujourd’hui. Pour une fois qu’il prend la peine de me contacter – même s’il ne s’agit là que d’un entraînement amiable entre nous, comme au « bon vieux temps » - je ne vais pas le lui refuser. Au pire, si mon bras glisse ou qu’un faux mouvement est exécuté, j’aurais le loisir de faire passer une partie de la colère froide et cruelle que j’éprouve à son égard par le biais d’une blessure physique. Je pense que le pire, dans cette histoire, c’est que malgré tous les événements récents, il n’est même pas capable de se rendre compte que je lui en veux vraiment. Qu’importe – mentir est l’une de mes spécialités, et s’il faut que je lui mente pour conserver ce petit quelque chose que l’on a… Je mentirai sans la moindre hésitation.

Je suis la première à arriver sur le terrain, même s’il ne me faut pas beaucoup l’attendre. Putain que je rêve de passer ma lame au travers de sa gorge… Ainsi que mes mains dans ses cheveux en le plaquant contre moi. Je secoue brièvement la tête pour me défaire de ces pensées idiotes et lui adresse un sourire jovial, celui qu’il a l’habitude de voir.

« Te voilà enfin Otoke ! Quel est le programme pour aujourd’hui ? »

Rien dans ma voix ne laisse paraître que quelque chose a changé – ça ainsi que mon corps sont une douce combinaison. Tout au plus, sera-t-il capable de comprendre sur mes quelques subtilités ? Je n’y crois pas. Avant même qu’il ne me réponde, je me mets en position de combat, lui adressant un sourire quelque peu provocateur. Je sais que nous allons commencer par un affrontement bref dans le cadre d’un échauffement puis nous irons chacun travailler sur nos techniques, ensemble. Après tout, je le connais mieux que n’importe qui dans ce village – hormis Karyuudo. C’est toujours le même schéma, les mêmes habitudes, les mêmes réactions, le même… Tout. Qu’importe qu’il soit devenu un criminel reconnu. Qu’importe qu’il ait choisi de passer son temps en prison sans jamais me demander mon avis. Qu’importe qu’il soit en train de m’écarter de lui à une vitesse dont il ne se rend pas compte. Je suis peut-être devenue la chaîne qu’il a toujours cherché à fuir, après tout.